Doucement le soleil se couche, d’ici une petite heure il ne sera plus là mais cette fois-ci je n’irai pas le regarder sur la plage ou dans un des endroits paradisiaque qu’offre cette île. Aujourd’hui je serais sur la terrasse. J’ai envie de m’asseoir ici pour être un peu plus tranquille et aussi pour étudier dans le calme. Etudier, oui. Tout à l’heure tandis que personne ne séjournait dans la chambre, je me suis emparée du précieux livre de malais de Maxence. Je voudrais apprendre quelques mots qui pourraient l’impressionner, ou disons plutôt que je prépare un petit coup. J’aimerais lui faire croire que je suis bilingue, que j’ai une histoire en commun avec la Malaisie ou quelque chose comme ça. Je ne me suis pas encore décidée sur la tournure de mon mensonge à vrai dire mais une chose est sûre : il sera gros. Comme tout gros mensonge il sera forcément réussi alors j’en jubile d’avance. Ayant joué les James Bond durant tout le chemin afin d’atteindre la terrasse sans que personne ne m’ait vue en possession de ce livre -qui aurait été bien mieux caché dans un sac mais qui pourrait bien se balader avec un sac ici ? – j’arrive enfin sur le lieu de paix où je trouve, surprise, Danica. Je soupire, déçue qu’elle m’ait entendue arriver. Par réflexe je cache le livre dans mon dos. Evidemment il fallait que je tombe sur une super amie de mon partenaire et en plus elle était en compagnie d’une bouteille, d’alcool bien sûr. J’ai bien compris qu’ici Danica et alcool étaient deux mots associés. « Tu bois pour oublier ? » De but en blanc, mes petites prunelles curieuses plantées dans les siennes, je lui avance un sourire. « Je peux oublier avec toi ? » Je n’ai rien à oublier mais je n’ai pas bu ne serait-ce qu’une seule goutte d’alcool depuis que je suis ici et pourquoi pas le faire maintenant ? Et puis de toute façon c’est fichu pour le malais alors… « Enfin tout dépend de la qualité du produit. Qu'est-ce ? » Je m’assois à côté d’elle, posant le livre sur la table sans même faire attention que, oups, j’étais censée le cacher.

« Je dois oublier quoi ? » Je ne prétends pas la connaître, ce n’était qu’une supposition : une traduction de la scène. « Je n’en sais rien. » dis-je en haussant les épaules. Ce serait plutôt à moi de lui poser cette question, elle inverse les rôles. Rôles…ça faisait bien longtemps que je n’avais pas mentionné cette chose. Soit, passons. Je secoue la tête un moment comme pour chasser mes pensées de mon esprit. « Si t'as quelque chose à oublier, toi, je t'en prie... quoi que, t'as l'âge ? » Ils vont finir par tous me faire craquer ! Je vais créer une bannière annonçant mon âge à tout le monde ! Et puis je mentirai en disant que j’en ai plus rien que pour les embêter ! « Bien que je sois un bébé j’ai l’âge, oui. » J’annonce fermement, faisant au passage référence à l’adjectif du prime qui m’avait sauté aux yeux. Sinon dans leur globalité ils étaient tous sympathiques. « Puis non je n’ai rien à oublier, au contraire je voudrais me rappeler de tout ! » Pas question d’oublier ne serait-ce qu’une seconde de cette aventure bien qu’il soit connu que notre cerveau ne puisse retenir une journée toute entière. Je prends place aux côtés de Danica, l’atmosphère étant agréable. « C'est juste du vin blanc, je me saoûle pas la tronche à dix-huit heures sans raison, » Excusez-moi mais pour les gueux siroter du vin c’est se saouler, du moins je le considère comme tel parce que je ne vois pas pourquoi ils auraient la classe de s’accaparer ce genre de pratique mais après tout peut-être que même si elle parle mal Danica n’en est pas une. Puis à vivre avec les autres je me suis rendue compte que certaines choses touchaient aussi le commun des mortels et n’étaient pas limitées à ma classe sociale. C’est toujours un petit choc mais je m’habitue vite au final. « D’accord. » J’ai entendu des choses de-ci, de-là mais je ne pense pas qu’elle souhaite les entendre alors je me contente de lui répondre de mon air détaché jusqu’à ce qu’elle ne remarque la chose. « Tu lis quoi ? Oh, c'est celui de Maxence, tu t'intéresses à la Malaisie ? » Tournant la tête vers le livre de malais, je m’affole tout à coup quand je réalise que je l’ai laissé exposé au grand jour. J’en deviens tête en l’air mon dieu quel manque de professionnalisme ! « Oui depuis longtemps, il a oublié son livre dans la cuisine alors je voulais lui rapporter. » J’ai tellement l’air pressée que je ne dois pas être très crédible, je serais franchement triste que mon petit tour ne fonctionne pas. Rapidement je me saisis du livre et le pose sur la chaise à côté de moi, de façon à ce qu’il ne soit plus dans le champ de vision de Danica. « Et toi tu t’intéresses à… au Panama. Hm. Ça a l’air sympathique. » Petit changement de conversation mais je peux bien m’intéresser à Danica si ça peut me sauver. Je prends tout ça très à cœur, oui.