Oh, ce que j'étais heureux. Depuis Fake Lover, tout me souriait, vraiment tout. J'avais une copine splendide, presque irréelle, un appartement, je gagnais presque toutes mes compétitions, et en plus, j'avais un nouveau pénis. Que demander de plus ? Personnellement, je n'avais besoin de rien d'autre. Et c'était bien pour ça que je souriais bêtement, là, dans la rue, m'apprêtant à rentrer pour retrouver la femme que j'aimais. Seulement, voilà, mon regard se pose sur cette maison, sur ce jardin. Ce jardin plein de poulets en cage, et surtout, ces cochons. Je remarque rapidement cette portée de cochons de quelques semaines à peine. Il y en a un particulièrement, à l'écart des autres bébé cochons, qui m'attendrit directement. Et voilà que sans réfléchir, je saute par dessus la barrière pour pénétrer dans le jardin, et me diriger vers ce petit être rose. Je regarde à droite, puis à gauche : personne. Ni une, ni deux, je le prends dans mes bras et je me mets à courir. Je ne regarde pas une seule fois derrière moi, et je ne m'arrête pas non plus de courir jusqu'à être arrivé à bon port. Je ferme rapidement la porte derrière moi et je prends même soin de fermer à double tour, complètement essoufflé. Bon sang, est-ce que je venais vraiment de voler un bébé cochon ? « ISIIIIIIS ! » je dis à bout de souffle, tout en me précipitant pour fermer les volets, au cas où le fermier nous aurait suivi, ou au cas où il aurait prévenu la police... On ne savait jamais ce qui pouvait arriver. « Regarde ce que j'ai trouvé par terre... » je suis tellement essoufflé que j'ai besoin de prendre une grande inspiration entre chaque mot, ce qui rend ma voix particulièrement saccadée. Pourtant, je n'oublie pas le principal : je lui tends le petit cochon tout mignon, alors que je ne peux pas m'empêcher d'avoir un sourire béat aux lèvres. Oh, je sais bien qu'elle devinera immédiatement que ne je l'ai pas "trouvé" dans la rue, mais ça ne m'empêchait pas d'essayer... Manquerait plus qu'on trouve des cochons errant dans les rues de Los Angeles.

j'entends la porte d'entrée se fermer, à double-tour. ok, c'est quoi ce bordel ? je lâche mon couteau, fais quelque pas vers le salon histoire de pouvoir voir l'entrée, et Bob passe devant moi en hurlant et ferme les volets. je sors de la cuisine, et me plante à un coin du salon, tout en regardant la chose qu'il tient dans ses bras. un cochon, même dans l'obscurité de la pièce, je peux le voir. « trouvé.... par terre ? », j'en crois pas un mot. et puis j'le connais Bob, j'le connais vraiment bien maintenant, je sais qu'il dédramatise un peu tout. « tu l'as volé à qui, pour de vrai ? », je demande, alors qu'il se joue un remake du Roi Lion devant mes yeux, Bob, tenant à bout de bras le cochon, qui fait un bruit bizarre. je fais un pas en arrière, j'ai déjà vu des cochons en vrai, mais j'aime pas ça. et encore moins les cochons colombiens. « et tu veux le garder ...? », je demande, tout en me demandant comment faire passer un tel truc auprès du propriétaire. un chat, un chien, c'est d'accord. un cochon, ça l'est tout de suite beaucoup moins. et puis j'ai pas vraiment envie d'avoir ce truc chez moi, mais faut trouver une façon de dire ça à Bob, sans qu'il veuille absolument le garder et même aller vivre ailleurs avec. ouais, il est un peu spécial de temps en temps mon copain, mais je l'aime.

Je reprends mon souffle, petit à petit. Tout va bien. J’ai mon cochon, je suis chez moi, oui, tout va bien. J’hoche la tête à sa question, tout sourire. Ouais, par terre, étonnant hein ? D’un côté tu n’allais pas le trouver sur un arbre… Et puis à sa seconde question, j’ai le réflexe de ramener le cochon près de moi, je le cale dans mes bras, comme un signe de protection contre la méchante sorcière. « Je l’ai pas volé… Il m’était destiné. » J’explique d’une petite voix en berçant le bébé cochon dans mes bras, le regardant tendrement. « Regarde comme il est mignon… il est pas mignon ? » Il n’y avait pas deux réponses au choix, la réponse ici était forcément : « oui, il est adorable, viens on l’adopte ? » Mais ce n’est pas vraiment ce qu’Isis me dit. Elle est sceptique, je le vois bien. « On va pas le jeter dehors… Ils vont faire de lui du bacon. Tu arriverais à vivre la conscience tranquille en sachant que tu as envoyé un pauvre être tout rose comme de la Barbapapa devenir du vulgaire bacon pour gros ? » Est-ce que ma petite amie était si cruelle que ça ?

ah, s'il lui était destiné alors, tout va bien. j'me prends à sourire, amusée par sa réponse. « ah oui, donc va y en avoir beaucoup d'autres, du coup ? une femelle, ensuite ce sera un poney, et puis Dieu te donnera 10 000 planches de surf pour construire une arche ? » j'rigole, mais en fait c'est pas si drôle, je sais vraiment pas comment j'vais me sortir de là. et puis il rapproche le cochon de lui, me demande s'il n'est pas mignon. « c'est... un cochon ? », il aurait pas pu me ramener un ptit chaton abandonné, sérieusement ? qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça. et voilà, et voilààààà. Bob est attaché à ce cochon, et veut pas qu'on l'abandonne, et il veut encore moins qu'il se transforme en bacon. j'le regarde dans les yeux, je sais pas quoi répondre, j'suis emmerdée là, vraiment. « maaaaais... », je trouve rien à dire. en fait, si, j'ai pleins d'arguments, seulement j'arrive pas à les sortir. allez, allez Isis. « mais on loue l'appart', le propriétaire acceptera jamais qu'on ai un cochon... », genre c'est pas moi qui en veut pas, c'est le propriétaire. c'est un argument valable, le propriétaire voudra pas non plus. « et puis il va grandir, il va faire 80 kilos et va casser des meubles ou passer à traver le plafond des voisins du dessous... », non, j’exagère à peine.