w/tilda

Il savait que c’était une mauvaise idée avant même d’entrer dans ce labyrinthe. Il le savait, et pourtant il n’a pas réfléchi bien longtemps. Le voilà donc perdu pour la seconde fois en moins d’un mois, au milieu de ce labyrinthe. Heureusement pour lui, il n’est pas du genre à paniquer et l’idée de ne pas trouver la sortie dans l’immédiat ne l’angoisse pas plus que cela, même s’il aimerait autant éviter de rester coincé ici jusqu’au milieu de la nuit. Mais la production s’arrangerait quand même pour finir par le secourir avant qu’il ne doive passer la nuit ici ? Il tourne un peu un rond dans un premier temps, avant d’abandonner les recherches pour se détendre avec l’aide d’une cigarette – heureusement qu’il pense à emporter son paquet partout où il se rend. S’il ne s’était pas écouté, s’il n’avait pas voulu jouer au plus fier en retrouvant la sortie par mémorisation, il serait probablement dans le nid en train de … s’ennuyer, mais avec la sécurité de passer la nuit à l’abri. Sauf qu’en cette fin d’après-midi, il a opté pour un petit défi personnel en venant ici. Il s’est déjà plus ou moins perdu lors de la première semaine et il a fini par retrouver la sortie en compagnie d’Andreja, mais il voulait savoir s’il était en mesure de sortir une nouvelle fois, grâce à sa mémoire. Problème celle-ci est capricieuse, et le voilà donc perdu. Il marche donc en attendant d’avoir un éclair de génie, et finit par tomber sur Tilda au détour d’une haie. Bon, il espère qu’elle connait la sortie, mais il va éviter d’entamer la conversation de cette façon pour ne pas sembler intéressé que par la capacité de la jeune femme a les sortir d’ici. « Tu vas mieux que la dernière fois ? » Il lui demande presque aussitôt après l’avoir aperçue. Ce n’est pas qu’il veut tâter le terrain afin de savoir s’il doit dégager si la réponse s’avère négative, mais c’est tout comme. Elle est pas méchante, il a eu l’occasion de s’en rendre compte, simplement elle s’est montrée particulièrement insistante lors de leur première rencontre et il n’a pas forcément envie qu’elle en fasse de même aujourd’hui. Et puis, au final, il ne sait toujours pas si c’est son état d’esprit général ou s’il a juste eu le malheur de la croiser lors d’une mauvaise passe, autant dire qu’il préfère la seconde option. « Félicitation pour ta grossesse. » Il ajoute ensuite. Difficile de passer à côté de l’événement de la semaine, autant à cause du bilan d’Akela que la discrétion d’Eryk lors du prime. Peut-être que ce n’est pas un événement qu’elle souhaitait ébruiter, mais c’est désormais chose faite. Et puisque ça n’est plus un secret, il lui semble approprié de la féliciter. Enfin, même si lui, personnellement, ne voit pas l’intérêt de féliciter quelqu’un pour un tel événement, il ne voit pas où est le plaisir à prendre vingt kilos et à souffrir pour pondre des marmots qui seront probablement insupportables. Oui, il n’est pas particulièrement fan des enfants.

Il avance sans pression le temps de savourer une cigarette. Le connaissant, il ne s’en tiendra certainement pas à une seule, mais il n’a pas grand-chose à perdre. Il ne compte par repartir à la recherche de la sortie dans l’immédiat, même s’il déambule dans le labyrinthe. Il se connait suffisamment pour savoir que lorsqu’il ne parvient pas à faire le vide dans sa tête pour repartir de zéro, ça ne sert à rien de forcer les choses. Tant qu’il n’aura pas pris le temps d’examiner la situation et d’essayer de se remémorer le chemin qu’il avait emprunté avec Andreja, il ne sortira pas d’ici, il se contentera de tourner en rond et de rester perdu, mais à quelques mètres dans l’endroit initial. Il faut juste qu’il parvienne à mettre sa mémoire à contribution et il sortira d’ici. Du moins, c’est ce qu’il se dit pour se persuader qu’il parviendra à trouver la sortie rapidement et à éviter de passer la nuit ici. Heureusement qu’il n’est pas prêt de paniquer pour si peu, car il est évident que ça le desservirait plus qu’autre chose. À force d’avancer sans réel but, il finit par tomber sur Tilda au détour d’une haie, la première chose qui lui vient à l’esprit est les issues de secours qui s’offrent à lui. Même s’il n’a rien contre elle et qu’elle est plutôt agréable, il n’a pas oublié avec quelle insistance elle a voulu qu’il se rapproche d’elle sur cette marche d’escaliers, il y a presque deux semaines. Maintenant, avec l’annonce de sa grossesse, il ne sait pas vraiment comment elle se comporte. Il parait que les émotions sont mises à mal durant cette période de la vie des femmes et si c’est réellement le cas, il aimerait autant éviter d’être celui qui se ramasse l’excès d’affection de la part de Tilda. C’est pour cette raison qu’en lieu et place des salutations d’usage, il préfère lui demander si elle se sent mieux que la dernière fois. Elle précise qu’elle ne compte pas le forcer à ce qu’il la prenne dans ses bras, il n’en fallait pas plus pour qu’il soit soulagé et qu’il n’ait plus envie de déguerpir d’ici le plus vite possible. « Tant mieux. » Elle n’a pas vraiment répondu à sa question – ou du moins, pas de manière explicite – mais il se contente très bien de cette réponse-là, d’autant plus qu’il est mal placé pour la juger alors qu’il est le premier à répondre aux questions de façon détournée. De plus, s’il n’a pas à jouer au psy à l’oreille attentive, il ne s’en porte que mieux. Parce qu’à la rigueur, la seule chose susceptible d’occuper l’esprit de la jeune femme, c’est sa grossesse nouvellement découverte. Et autant dire que ce n’est pas le sujet le plus passionnant du monde, du moins à ses yeux. Il la félicite tout de même pour celle-ci parce cela lui semble être des paroles appropriées compte tenu de la situation, même si lui s’en fiche pas mal qu’elle soit en cloque et qu’il ne voit pas réellement l’intérêt de la féliciter. C’est sa vie à elle, pas la sienne, il n’a pas à émettre le moindre commentaire sur l’état de Tilda. À en croire sa réaction, un merci par franchement venu du cœur, ça n’a pas l’air d’être un sujet sur lequel elle souhaite s’épancher bien longtemps. Ce qui est loin de déplaire à Alistair, il se voit mal parler layettes et accouchement. Si elle avait commencé à le bassiner avec ces thèmes-là, il aurait probablement pris ses jambes à son cou et l’aurait abandonnée à son triste sort au milieu du labyrinthe. La prochaine réflexion de la candidate ne manque pas d’ailleurs de lui tirer un léger rictus. Enfin quelqu’un qui a l’air de partager son opinion, au moins sur un point. « Compris. » Il déclare, presque amusé (faut pas déconner non plus) par sa réaction. Le message est passé, c’est un sujet sur lequel il ne reviendra pas et ça l’arrange bien. Ceci dit, puisqu’il n’est pas totalement dépourvu de bon sens, il s’empresse de terminer sa cigarette (même s’il n’a pas réellement besoin de se forcer puisqu’il a l’habitude les enchaîner), histoire de ne pas l’accommoder trop longtemps avec une fumée qui peut s’avérer néfaste. Certes, ce n’est pas une cigarette qui va transformer son bébé en Frankenstein des années 2000, ni même la déranger elle, mais manque de chance, il est parfois bien élevé. Quand elle évoque la possibilité qu’il soit perdu, il est presque tenté de répondre par la négative par fierté, mais puisqu’il l’a sous la main, ce serait dommage de laisser passer son unique chance de sortir ici sans perdre trop de temps. « Oui et je compte sur toi pour m’aider à retrouver la sortie. » Il lui confie son destin entre ses petites mains, soit elle l’aide, soit elle le laisse à son sort et il devient l’encas nocturne du sanglier qui erre dans le coin. Elle n’oserait pas, tout de même. « S’il te plait. » Il ajoute, comme dernière tentative de la convaincre. Il n’a pas l’habitude de demander l’aide de quiconque, autant dire que c’est un véritable sacrifie pour lui que de supplier la jeune femme de la sorte.