+ Je ne sais pas trop pourquoi ni comment, mais je suis arrivé devant la plaine boueuse que je contemple d'un air indifférent comme toujours. Je n'ai vraiment jamais réussi à comprendre l'intérêt que certains pouvaient porter à cette immense étendue de terre molle, gluante et dégoûtante. Et le circuit de kart, ça non plus, ça ne me plait pas. Je n'en ai pas encore fait une seule fois depuis le début de l'aventure, mais j'en ai un très mauvais souvenir de quand j'étais enfant et remonter sur l'un de ces engins ne me dit rien du tout, non, ça ne m'inspire pas vraiment confiance. J'ai déjà du mal avec les voitures, alors ces petits machins, là, non merci. Enfin, peut-être qu'il me faudrait un petit tour, une petite course avec quelqu'un pour changer d'avis, mais tant que je n'aurais pas de compagnon de jeu, je ne bougerais pas de là où je suis, je me contenterais de regarder comme depuis dix bonnes minutes. Jusqu'à ce que Jaheim entre dans mon champ de vision. En réalité, ça m'ennuyait plus qu'autre chose parce si personne n'était arrivé, j'avais prévu de m'en aller l'air de rien, mais maintenant qu'il était là, c'était peut-être un poil plus compliqué. Oui, bon, si je voulais partir maintenant je pourrais sans soucis, ne pas lui adresser la parole, tourner les talons et prendre le chemin du retour, mais puisque nous sommes là tous les deux, autant bavarder, même s'il pourrait tout à fait avoir l'idée de faire autre chose. Après il n'est pas aveugle et c'est un homme, les voitures, les karts, ce genre de trucs, dans la boue, ça doit le brancher, je sais pas. « J'arrive pas à comprendre la fascination que peuvent avoir certaines personnes pour les bagnoles. » Je lâche comme ça en fixant d'un air assez perplexe une des petites autos non loin de nous.

Je ne suis jamais rentré dans cette catégorie de mecs qui, pour prouver qu’ils sont virils ont besoin de dépenser des milliers et des milliers d’euros dans une bagnole de luxe. Je n’apprécie pas forcément les sensations offertes par les accélérations, je ne suis pas non plus branché par tout ce attire les nénettes qui mouillent leur slip dès qu’elles voient une grosse voiture bien modifiée avec des néons et autres bêtises du genre. A vrai dire je n’ai jamais eu besoin de me servir de ce genre de stratagèmes pour séduire, pour prouver que je suis un homme, un vrai et dans le cas contraire je n’aurais pas utilisé les voitures. Non, j’ai passé mon permis le plus tôt possible pour pouvoir conduire mon camion et transporter mon manège au gré des fêtes foraines mais je n’ai jamais été plus emballé que cela par la vitesse. Ce n’est pas moi que l’on retrouvera en plein milieu d’une ligne droite à plus de cinquante kilomètres heures de la limite autorisée. Mon père vous dira autre chose là-dessus, lui le grand fan de bolides qui ne rate pas le moindre championnat ni le moindre rallye. Voilà un autre truc qui nous oppose tous les deux, à croire que la liste est longue. Malgré tout je ne refuse jamais un petit karting, cette activité permet de rigoler plus qu’autre chose. Certains se font un kiffe en poussant la vitesse à son maximum, ce qui reste faible en soit puisque les karts sont bridés mais passons, je préfère plutôt faire la course et rigoler avec ceux qui m’accompagnent. « J'arrive pas à comprendre la fascination que peuvent avoir certaines personnes pour les bagnoles. » Difficile de l’éclairer sur le sujet, dans d’autres circonstances j’aurais certainement pu lui être utile, peut-être même que mon avis aurait été intéressant à développer mais ce phénomène m’échappe complètement. « Une partie d’entre eux aiment le sentiment d’insécurité qui découle de la vitesse… D’autres en ont besoin pour atténuer un complexe d’infériorité… » C’est l’analyse que j’en fait en tout cas. « On se fait un petit tour tranquillou ? » Puisque nous sommes dans le coin autant en profiter non ? Et puis, j’ai envie de parler plus franchement avec Jessica. Au tout début du jeu nous nous entendions plutôt bien, je pensais qu’il y aurait un bon feeling entre nous mais j’ai l’impression que ce n’est plus vraiment le cas depuis et je me suis beaucoup questionné là-dessus. « Je peux te demander un truc ? Est-ce que j’ai fait quelque chose ces dernières semaines qui t’as choqué ? Surpris dans le mauvais sens du terme ? » Mon truc c’est de mettre les pieds dans le plat, pas de passer de la crème pour ne pas faire mal.