+ mylah.

Autant profiter du début d'après-midi pour se sécher et faire sécher ses vêtements, d'un côté. Sailor s'estimait plutôt heureuse de porter des brassières de sport en guise de sous-vêtements, elle pouvait déambuler sur le camp et dans la forêt sans tee-shirt sans vraiment de gêne. Une espèce de maillot de bain, en même plus couvrant.
Elle est allée se laver dans le lac, ce matin, se cachant dans l'eau verte, dans un coin tranquille, afin de rincer son tee-shirt. A force de dormir avec, et de transpirer dedans, c'était un vrai torchon.
Sortant du lac, elle se secoue un peu pour se sécher rapidement au soleil, en sous-vêtements, et une fois plus ou moins sèche, enfile son bermuda. Elle n'avait pas encore pensé à ça, mais il lui faudrait trouver une technique pour faire sécher son tee-shirt, façon étendage. Sailor revient sur ses pas, jusqu'au feu de camp, en cherchant de quoi fabriquer un fil à linge de fortune. Elle déambule pieds nus, elle a l'habitude à la maison, c'est la culture des îles du Pacifique. On se trimballe souvent pieds nus. Une amie lui avait même dit qu'en Nouvelle-Zélande, même en plein centre d'Auckland, plein de gens marchaient pieds nus aussi. Elle aime bien, ça, Sailor, cet état d'esprit décontracté, dénué de stress, de tensions.
Elle arrive au feu de camp, et son regard croise celui d'une fille blonde, qui s'est présentée dans son équipe, avec Claudia, plus tôt. Sailor lui adresse un large sourire en essayant d'organiser ses cheveux noirs trempés, mais propres. Au moins, pas de problème de fer à lisser, comme aurait pu s'en plaindre Gigi, quand on affiche une tignasse asiatique, c'est le cadet de ses soucis. « Bonjour ! » fait-elle joyeusement à la fille, dont elle ne se souvient pas du prénom. Elle pose son tee-shirt humide, essoré, sur la table de pique-nique et cherche quelque chose de ses grands yeux, à hauteur d'arbre. « Comment est-ce que tu crois qu'on peut fabriquer une corde à linge ? Avec du lierre ? » fait-elle, réfléchissant à voix haute, en essayant de nouer le contact avec la fille, qui a l'air un peu stressé, « chez moi la nature est vraiment différente et je n'étais jamais sortie de Guam alors... tu crois que le lierre, ça tient ? On peut faire des noeuds avec ? » continue-t-elle, motivée pour améliorer le confort de tous.

Jeudi, 12h03. Il est l’heure de manger pour Mylah. En règle générale, elle termine de travailler à douze heures avant de prendre une heure de pause pour cuisine et manger. Une heure, c’est parfois trop juste, elle qui prend beaucoup de temps derrière les fourneaux. Il faut qu’elle mange sainement, elle doit compter les calories de chaque aliment, préparer un tableau récapitulatif pour ne pas manger deux fois la même chose dans le même mois, elle doit décider l’ordre de ses préparations pour conserver au maximum les saveurs de ses aliments. Elle prend le chemin de la cabane abandonnée afin de se décider quant à son repas du jour. Elle pourrait se proposer de cuisiner pour tout le monde, la vie en communauté oblige, mais elle n’est pas du genre à rendre service si on n’agit pas de la sorte avec elle. Arrivée dans la cabane, elle se met à la recherche de produits pouvant convenir à sa règle du jour. Des aliments rouges, uniquement. Elle s’empare de tomates, d’un morceau de viande rouge, de betteraves ainsi qu’une petite bouteille de jus de canneberges qu’elle diluera avec un peu d’eau. Elle reprend ensuite le chemin du campement, espérant que le feu ne soit pas pris d’assaut, mais elle se doute bien que cela est le cas compte tenu de l’heure. Et elle ne s'est pas trompée, quand elle arrive, elle constate qu’elle n’aura pas la moindre parcelle pour cuire sa viande. Alors elle attend. Elle ne peut pas préparer les autres aliments en avance, tout doit être préparé plus ou moins simultanément. Elle mettra cuire la viande, elle coupera les tomates puis s’occupera des betteraves. Mais tant que son morceau de viande n’est pas sur le feu, c’est foutu pour elle. Elle dépose dans un coin, à l’abri, ses aliments du jour pour ne pas qu’on lui les vole et s’impatiente en faisant le tour du campement, jusqu’à ce qu’une fille l’interpelle. Elle l’a reconnait, elle est dans l’équipe Claudia, elle-aussi. Sailor. Prénom tellement original que Mylah n’a pu que le retenir. « Bonjour. » Elle répond d’un ton un peu moins enjoué que celui de l’asiatique. Pas qu’elle soit de mauvaise humeur, mais Mylah a appris à contrôler la moindre de ses émotions, ou plutôt ses parents lui ont appris à le faire et à moins de faire une crise de panique ou d’être fâchée, elle est rarement émotive, plus dans la neutralité. « Je n’en sais rien. » Elle répond ensuite à l’interrogation de la noiraude à propos d’une corde à linge. Le lierre, elle connait, mais elle s’en est jamais approchée, elle ne sait donc pas si c’est l’idéal pour en faire une corde à linge. Sailor insiste, mais Mylah se contente de hocher les épaules. « Ça ne coûte rien d’essayer. » Si le lierre casse, elle saura que ce n’est pas l’idéal. « Sinon, tu peux toujours pendre ton t-shirt sur une branche d’arbre, c’est ce que je fais. » Bon, ce n’est pas parfait, mais c’est une solution qui marche dans l’immédiat. « En tout cas, tu as l’air de bien te débrouiller cette semaine… » Elle laisse en suspens, comme si elle laissait le choix à Sailor de rebondir là-dessus. La nature est peut-être vraiment différente chez elle, mais à voir, ça n’a pas l’air de déranger Sailor qui semble très bien se porter malgré le contexte de la semaine. Déjà lors de la répartition des tentes, l’asiatique ne lui avait pas semblé se soucier de passer une semaine à la belle étoile. C’est fascinant, de l’avis de Mylah, de découvrir des gens capables de s’adapter à n’importe quelle situation.

La blonde avoue ne pas vraiment avoir de réponse à ses questions, et Sailor acquiesce avec une moue perplexe de réflexion, apparemment très prise par son projet de fil à linge. Elle croise les bras et réfléchir en scrutant les arbres autour d'elle. A Guam, ça serait déjà plus facile, les lianes, c'est drôlement pratique pour s'amuser. « Hum, d'accord, » fait-elle en s'approchant d'un arbre en tirant légèrement sur une branche de lierre, qui résiste un peu. La fille blonde ajoute ensuite que ça ne coûte rien d'essayer, et Sailor fait volte-face avec un large sourire. Elle aime bien ça, cet esprit, de se dire que pour savoir, il suffit d'essayer. Ca lui plaît bien. « C'est vrai, ça ! Je vais essayer... » ajoute-t-elle, tout en essayant de décrocher la branche en question, en tirant dessus comme sur la queue de Mickey. Au bout de quelques coups, elle finit par arriver à la décrochant, se retrouvant avec une espèce de corde d'environ deux mètres, ornée de jolies feuilles vertes. Désolée, mère nature. Chacun son tour pour être égoïste ! La blonde ajoute alors qu'elle a fait sécher ses affaires sur des branches, et Sailor l'écoute en essayant de faire des noeuds avec son lierre, ses yeux globuleux rivés sur la fille. « J'ai essayé la dernière fois mais y'avait plein de miettes d'écorce coincées sur mon tee-shirt, ça grattait et c'était pas très comfortable... » fait-elle avec un petit rire amusé. D'ailleurs, l'inconnue ajoute même penser que Sailor se débrouille bien dans la nature, ce qui arrache un sourire éclairé à l'asiatique. « Ah oui ? » s'exclame-t-elle, ravie de l'entendre. Elle se sent même obligée de poursuivre la conversation, comme d'habitude, en rajoutant des tas de détails inutiles. « Ca ne me dérange pas, tout ça, je suis trop contente d'être là, c'est trop bien de participer pour de vrai à Fake Lover ! Et puis chez moi, on passe plein de temps sur la plage, ou dans la campagne, c'est pas très citadin, alors j'ai l'habitude, même si c'est quand même un peu différent... et puis ma petite soeur, elle fait les scouts, aussi, alors elle m'a montré plein de trucs, mais pas assez, si j'avais su, je lui aurais demandé de m'expliquer toutes ses astuces... ouille. » Elle s'interrompt dans son monologue enjoué quand son doigt se pique contre un bout de bois charnu, lorsqu'elle essayait de nouer le lierre à une branche. Tant mieux, elle parle vraiment trop, parfois. « Voilà... » fait-elle, pensant tout haut, en nouant le premier côté. Et puis elle se retourne subitement avec un sourire pour regarder sa camarade de feu de camp. « Ah ! C'est quoi ton prénom, au fait ? Je me souviens de ta voix quand on a réparti les tentes, mais je n'y voyais vraiment rien alors... » demande-t-elle avec entrain. Elle a dû entendre son prénom, mais elle n'avait pas vraiment pu mettre de visage défini sur ces patronymes, alors autant rattraper le coup maintenant.

Sailor lui pose trop de questions d’un seul coup. Elles se rejoignent, mais pour autant, Mylah n’a aucune réponse à lui donner. Parce qu’elle ne sait pas si le lierre peut s’avérer utile pour créer une corde à linge. Ça ne lui est jamais venu à l’idée de tester  et ce n’est pas aujourd’hui que cela va changer. Le meilleur moyen de le savoir, c’est d’essayer, tout simplement. Au pire, le lierre se cassera et Sailor devra se creuser les méninges pour trouver une autre solution. Mylah est tellement gentille qu’elle lui en propose même une, l’alternative de la branche d’arbre. Sauf que Sailor a déjà essayé et n’a pas été convaincue, pour des raisons que le commun des mortels aurait également trouvé déplaisantes. « C’est parce que tu ne t’y prends pas correctement. » Elle rétorque simplement, haussant brièvement les épaules. C’est la solution de facilité de balancer son t-shirt sur un arbre et de ronchonner parce qu’il a accroché quelques écorces au passage. En réalité, il suffit de connaître la technique. Ou du moins, la technique de Mylah. Elle dénude la branche principale de toutes ses petites sœurs, passe la pierre la plus aiguisée qu’elle trouve sur la branche pour retirer un maximum d’écorce, sans pour autant libérer la sève afin de ne pas laisser de matière collante sur son vêtement. Et pour cela, suffit de passer un chiffon – c’est-à-dire le vêtement abandonné d’un de ses camarades de galère – humide sur la branche dénudée. Enfin, que le t-shirt est sec, il n’y a plus qu’à secouer énergiquement celui-ci et à passer le revers de la main à plusieurs reprises pour éliminer les quelques déchets qui ne sont pas les bienvenus. C’est simple, selon Mylah. Uniquement selon Mylah, probablement. Mais elle se gardera bien d’exposer sa technique, non pas par envie de garder celle-ci secrète, mais parce qu’elle se retient – et dieu sait comment cela est dur pour elle – de diriger les moindres actions de chacun. Elle finit par changer de sujet en avouant à Sailor qu’elle semble bien se débrouiller cette semaine, laissant sa phrase en suspens pour laisser le choix à l’asiatique de continuer la conversation. Elle n’est pas douée, Mylah, quand il ne s’agit pas de parler affaires. Dans sa tête, c’est le maitre mot de chacune de ses conversations, en temps normal. Les affaires, encore et toujours. Sauf que si elle avait pris connaissance du débit de Sailor auparavant, elle se serait abstenue de laisser sa phrase en suspens. Pour autant, elle écoute. Elle parle volontiers, Mylah, mais elle n’aime pas parler pour rien dire. Et c’est exactement ce que fait Sailor, du point de vue de la blonde. Ce qui retient particulièrement son attention, c’est la phrase de la noiraude sur Fake Lover. « C’est ton rêve de participer à cette émission ? » Qu’elle demande quand Sailor a terminé son monologue. À en croire les paroles de Sailor, cela en approche. Elle ne saurait dire si elle vise juste ou non, mais elle a besoin d’être éclairée sur la question. Mylah est ambitieuse. Très ambitieuse, elle ne s’en cache pas, mais Fake Lover ne représente pas une ambition ‘’réelle’’ à ses yeux. Et si ça peut sonner comme une critique, c’est parce que cela en est une. Bien évidemment, Mylah ne s’en rend pas compte, c’est son envie de contrôler les autres et leurs choix qui parle et c’est peut-être bien ça le pire. « Si on avait su, je crois qu’on se serait tous préparé d’une façon ou d’une autre. » Elle termine, rebondissant sur les dernières paroles de Sailor à propos de sa sœur. L’asiatique se serait préparée en demandant des astuces à sa sœur, Mylah aurait préparé des listes et un équipement de survie (et probablement prévu un plan détaillé du déroulement de la semaine pour s’assurer de parer à chaque imprévu). Elle observe les mains de Sailor s’agiter, puis finalement parvenir à effectuer un nœud. « Tu as ta réponse, maintenant. » Elle déclare, léger sourire aux lèvres. Ce qu’elle ne dit pas, c’est qu’elle va certainement profiter de la corde à linge maintenant que celle-ci est en voie d’être réussie. Sailor finit par lui demander son prénom, prenant même le temps de se justifier quant au fait qu’elle ne le sache pas. Mylah n’est pas vexée. Il est certain qu’elle préférerait qu’on se souvienne e son identité, mais elle sait qu’une quarantaine de prénoms à retenir en l’espace d’une semaine relève de l’exploit. « Mylah. » Elle répond d’une voix douce propre à elle-même. « Ça se passe bien la cohabitation avec le jeune homme ? » Jeune homme dont elle a oublié l’identité. Mais comme cela ne se fait pas de montrer ses faiblesses – ah, si elle savait l’image qu’elle renvoie – elle fait mine d’avoir prévu sa phrase depuis le début et de ne pas avoir été prise de court par le fait qu’elle ne se souvienne plus du prénom du fameux jeune homme. La maitrise en toute situation.

Si elle s'y prend comme un manche, sans doute, elle n'est pas réputée pour être très adroite, comme fille. Dans le genre je fais tout tomber par terre, et je trébuche dans tout ce qui traîne, Sailor est la championne. Alors quand la candidate dit qu'elle ne s'y prend pas bien pour étendre ses affaires sur ces branches, ca n'étonne absolument pas Sailor qui hausse les épaules avec un sourire. « Oh, sans doute ! » admet-elle. Sa mère le lui dit souvent, d'ailleurs, mais bon, elle a ses raisons pour être maladroite. Elle continue son affaire, en essayant de trouver une branche située à la meilleure distance pour tendre le lierre près du feu sans tout faire brûler. La fille semble intéressée par ce qu'elle a laissé échapper vis à vis de l'émission. Sailor fait une moue de réflexion tout en accrochant le lierre, et poursuit la conversation en jetant des coups d'oeil à la blonde de temps en temps. « Je sais pas trop si on peut appeler ça un rêve mais j'adoooore l'émission ! Je suis une grande grande fan et j'étais curieuse de voir comment c'est alors... et puis j'aimerais bien gagner un peu d'argent pour mes parents, aussi, parce qu'on ne roule pas sur l'or... » continue-t-elle sur sa lancée, comme d'habitude. En même temps, à son âge, même pas sortie du lycée, elle ne ferait rien d'utile avec cet argent, tandis que ses parents avaient un tas de dettes à rembourser, et c'était pas avec leur boutique de souvenirs qu'ils allaient y arriver rapidement. Finalement, elle arrive à accrocher l'autre bout du lierre, et tire un peu dessus pour tester. « Ca a l'air de marcher plutôt bien ! » s'exclame-t-elle avec entrain en contemplant son oeuvre, prenant un pas de recul. Et puis la blonde se présente, donc, et dit s'appeler Mylah. Ce à quoi Sailor répond avec un large sourire franc. « Sailor, enchantée, » fait-elle en tendant la main pour serrer celle de Mylah en guise de salut officiel. Et puis elle enchaîne sur une question à propos de son colocataire de tente. Sailor attrape son tee-shirt humide. « Oh, Leandro ? Oh oui oui, ça va, il est sympa, et puis il prend pas trop de place et il est discret, alors tout va bien ! » fait-elle avec un sourire. On peut dire qu'elle n'a pas écopé du plus exigeant ou remuant des candidats, visiblement, elle aurait eu plus de mal si elle avait dû cohabiter avec un grand type baraqué qui ronfle ou une fille qui a peur des insectes. « Et toi ? Tu partages ta tente avec qui, déjà ? » renchérit Sailor en essayant d'étendre son tee-shirt, en évitant de trop brusquer sa construction de corde à linge éphémère. Si d'autres voulaient l'utiliser, c'était avec plaisir, mais il fallait aussi surveiller la solidité de la chose, qui semblait un peu précaire.

S’il reste des résidus d’écorce sur son t-shirt et que cela la démange, c’est parce que Sailor ne s’y prend pas correctement. Il y a toute une technique à adopter, technique qui peut paraitre fastidieuse la première fois. C’est un coup à prendre, comme on dit. Sailor n’a pas l’air de se vexer de la remarque de Mylah, ce qui provoque un léger sourire à cette dernière. Pour une fois que l’on est d’accord avec elle. La jeune blonde remarque ensuite que l’asiatique a l’air de bien se débrouiller cette semaine. Visiblement, elle n’est pas dérangée par le contexte de la semaine, puisqu’elle est ravie de participer pour de vrai à Fake Lover, ce qui fait tiquer Mylah. À priori, elle se trompe, ce n’est pas le rêve de la noiraude, même si elle adore l’émission. « Tant d’enthousiasme, Cupidon doit déjà t’adorer. » Elle lance, avec un demi-sourire. Il est certain qu’elle sera le genre de candidates à profiter de chaque instant si elle en vient à être sélectionnée. Elle est donc une grande fan de l’émission, mais aimerait également gagner un peu d’argent pour ses parents. « C’est un beau projet. » Elle rétorque simplement. C’est très bien de sa part de vouloir aider ses parents. Mylah a conscience que tout le monde n’a pas eu la même chance qu’elle dans la vie et elle est admirative devant ceux qui essayent de trouver des solutions, même si cela consiste à s’afficher dans une émission de télé-réalité. Sailor termine son projet et le lierre semble tenir. « En effet. Bravo. » Elle glisse, convaincue sans être convaincante. Il est important de féliciter les gens qui réussissent quelque chose, même si cela est aussi futile que de réussir une corde à linge en lierre. Pour autant, il ne faut pas montrer trop d’entrain au risque que Sailor se repose sur ses lauriers. C’est ainsi que ses parents l’ont éduquée. Un petit mot d’encouragement de temps en temps, sans réel conviction. L’obligeant à ne jamais cesser ses efforts. Mylah se présente et serre volontiers la main de l’asiatique, pour une fois que quelqu’un fait preuve de politesse. La blonde la questionne ensuite sur sa cohabitation avec le jeune homme qui partage sa tente, histoire de faire un peu la conversation, elle qui a conscience de ne pas faire énormément d’efforts. À en croire Sailor, ça se passe bien, elle n’a pas à se plaindre. Mylah acquiesce silencieusement et c’est sans surprise que Sailor lui retourne la question. « Adélie. Nous n’avons pas encore eu l’occasion de vraiment faire connaissance, mais ça se passe bien. » Elle se souvient de son prénom, c’est déjà pas mal. Plus sérieusement, Adélie ne lui a pas semblé être une fille compliquée, raison pour laquelle elle n’a pas à se plaindre de la cohabitation avec elle. Pour autant, ça ne se passe que bien et non très bien, uniquement à cause de la précarité de la tente et du sac du couchage. Peut-être que si Mylah avait été dans un vrai lit, confortable comme elle en a l’habitude, elle aurait pu insister sur cela. « Tu as déjà eu l’occasion de sympathiser avec certains ? » Parce que Mylah ne peut pas dire que ce soit le cas de son côté. Par contre, Sailor lui semble bien plus à l’aise qu’elle pour se lier à des gens qu’elle connait à peine.

Sailor laisse échapper un petit rire quand Mylah souligne son enthousiasme. C'est pas le cas de tout le monde, au quotidien, même si elle fait bonne impression au début, elle fatigue aussi, avec son éternel optimisme et sa philosophie du "rien n'est grave". Elle fait les gros yeux avec un sourire amusé. « Ma petite soeur, elle dit que je lui casse les oreilles, alors peut-être que ça ne plaira pas à Cupidon non plus ! » fait-elle d'un ton léger. Bah, on ne peut pas plaire à tout le monde. Elle est bien comme ça, elle préfère voir le verre à moitié plein, c'est moins anxiogène, finalement. Même si certains ne peuvent pas vraiment s'empêcher d'être négatifs non plus. Elle termine son oeuvre, et finit par étendre son tee-shirt dessus, puis se retourne vers la blonde qui l'a plus ou moins accompagnée dans cette entreprise. « Si tu veux l'utiliser, ne te prive pas ! Enfin, si c'est assez solide pour étendre plus de choses... » lui dit-elle avec un sourire. Autant que ça serve aux autres aussi, d'un côté. C'était plus ou moins ça, la survie, non ? Mylah lui dit faire tente commune avec une fille prénommée Adélie, et qu'il n'y a rien à signaler. Bonne nouvelle. « Tant mieux, alors ! Par contre, je ne vois pas du tout de qui il s'agit... mais c'est pas très grave, je finirai bien par savoir, un jour ou l'autre ! » commente Sailor avec un sourire gêné, en haussant les épaules. Elle finirait bien par entre ce prénom quelque part et l'associer à un visage, dans la semaine. Ils sont quarante-cinq, mais on tourne vite en rond, au final. Mylah lui demande ensuite si elle a pu parler avec d'autres, candidats, et Sailor réfléchir quelques instants. « Oh eh bien... j'ai pu un peu discuter avec Tia... et puis Gigi, pendant le prime, aussi... et aussi Kiri, l'autre jour. Ah, et le monsieur qui s'appelle Sayid aussi ! Tout le monde a l'air plutôt gentil, alors ça va ! » fait-elle en souriant gaiement. Jusque là, rien à dire, même si elle a pu entendre quelques éclats de voix par ci ou par là, parfois. Mais pour sa part, elle n'a pas fait de mauvaise pioche, jusque là, juste quelques uns plus loquaces que d'autres, ce qui parait évident. Sailor s'assoit alors sur une bûche, l'air pensif, le menton dans les mains. « Je me demande bien sur quels critères ils se basent, pour sélectionne qui entrera dans la maison... tu crois que c'est quels genres de critères, toi ? Peut-être qu'ils font un sondage dehors ? En même temps, s'ils nous le disaient, certains feraient trop d'efforts pour les satisfaire et ça serait quand même faussé... » fait-elle, parlant au fil de sa pensée, histoire de combler les silences. Et peut-être que Mylah aurait un point de vue intéressant là-dessus. C'est bien connu, ça fait des années que le sujet de conversation favori de Sailor est Fake Lover, ça ne risque pas de changer même dans le jeu.

Elle est enthousiaste, Sailor, c’est certain. Peut-être un peu trop, mais elle peut déjà prétendre s’attirer les bonnes grâces de Cupidon. Elle imagine bien la mascotte de la production être ravi que quelqu’un l’adore – ou plutôt son émission – à ce point. Sailor n’en est pas si sûre puisqu’elle explique que sa petite sœur a tendance à penser qu’elle casse les oreilles. Mylah se contente de hausser les épaules. Elle est fille unique, elle ne comprend pas vraiment les réflexions entre frère et sœur. Et puis, elle ne connait pas Sailor. Elle a l’air d’aimer parler, mais de là à penser qu’elle casse les oreilles, il y a encore un gouffre à franchir. La noiraude termine son étendage et propose à Mylah de s’en servir. Proposition qui n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd. « J’y penserais, merci. » Oh, elle y pensera, cela est certain. Et puisque cela est si gentiment proposé, elle serait bête de refuser. La colocation entre Leandro et Sailor se passe plutôt bien, de même que celle entre Adélie et Mylah. Adélie qui est une sombre inconnue aux yeux de Sailor. « Une rousse à la bouche et aux yeux trop grands pour son visage. » C’est une description assez fidèle d’Adélie. Elle est jolie pourtant, mais Mylah doit bien admettre que se retrouver nez-à-nez avec ses deux grands yeux, cela surprend. Avec cette indication, impossible pour Sailor de se tromper quand elle croisera la jeune femme. En parlant de colocataires de tente, Mylah en profite pour la questionner sur les rencontres que l’asiatique a déjà pu faire ici. Tia, Gigi, Kiri, des noms qui ne lui parlent pas, ou très vaguement. Le dernier, par contre, la fait réagir. C’est le seul des quatre cités avec lequel elle a eu l’occasion d’échanger quelques mots. « Je l’ai croisé également, ce Sayid, il est absolument charmant. » Ou comment dire dans son langage de femme d’affaire que c’est une tête à claques. Elle ne se base que sur une seule impression, mais on dit souvent que la première impression est la bonne. Mylah observe la jeune fille s’asseoir sur une buche et la position qu’elle prend laisse présager qu’elle est pensive. Or ce qui sort de sa bouche dénote avec sa position, mais soit. « Toi qui adore cette émission, tu devrais le savoir. » Si elle est aussi fan qu’elle le dit, elle aurait déjà dû distinguer quelques critères de sélection. Mylah elle-même en a distingué certains, elle qu’elle n’avait jamais visionné l’émission assidument avant de passer le casting (bien qu’elle se soit rattrapée depuis). « Pour ce que j’en ai vu, il faut éviter d’être trop discret ou d’avoir un caractère qui se fond dans la masse. Et si tu veux mon avis, le physique est le critère le plus important. » À ne pas en douter. Il n’y a que voir les quarante présélectionnés, tous des mannequins, à quelques exceptions près, pour ne pas blesser les minorités. « Mais tu n’as pas à te faire de souci de ce côté-là. » Elle laisse échapper, glissant un regard furtif sur la poitrine de la candidate. Heureusement qu’elle est elle-même une fille, sans quoi son regard serait très probablement mal interprété. Mais ce serait mentir que de dire qu’elle n’a pas remarqué la poitrine volumineuse de la jeune fille. C’est presque dérangeant, puisqu’elle a l’air d’avoir seize ans. « Tu as quel âge, Sailor ? » Qu’elle en vient à demander. Est-ce même légale de la laisser participer à une telle émission ? Ou d’avoir recours à la chirurgie esthétique aussi jeune ?

La description qu'offre Mylah d'Adélie n'est pas franchement flatteuse à premier abord, mais c'est énoncé avec une espèce de simplicité ferme que Sailor n'ose même pas contredire. De toutes façons, elle n'a pas vraiment vu le visage de la rousse, et puis, ça reste une opinion. Surtout niveau physique, ce n'est pas Sailor qui va jouer les pointilleuses. « Hum, d'accord, j'essaierai de la reconnaître, alors... » fait-elle un peu perplexe, avec un sourire tout de même, parce que dans l'absolu, ça aiderait quand même, de savoir qu'elle est rousse, qu'elle a une grande bouche et des grands yeux. En effet, même si Sailor pose des questions sur la sélection, elle est aussi sensée être accro, mais ce début de jeu la laisse complètement muette. Elle ne sais plus vraiment quoi en penser. Pour répondre à Mylah, elle s'assoit sur une buche près du feu, un peu maigre, et réfléchit un peu. « Eh bien, en fait, comme c'est la première fois qu'ils font ça, le camp, la semaine zéro, ces trucs là, je crois que je ne sais plus trop ce qu'ils attendent de nous, pour leurs candidats ! » fait-elle avec un petit rire pour ponctuer sa phrase. La question du physique est intéressante, il est vrai que les émissions de télévision en général ont un faible pour les gravures de mode en tous genres. Cela dit, même si Mylah semble dire le contraire, elle ne se considère pas du tout comme telle. D'ailleurs, elle en serait même objectivement aux antipodes. Sailor secoue la tête avec un sourire amusé. « Oh, je crois pas que ça soit mon meilleur atout pour participer, vraiment pas du tout ! Comparée aux autres filles, je n'ai vraiment rien à voir du tout ! » fait-elle en pressant un index sur sa joue. Petite, maigrichonne, les yeux globuleux avec un léger strabisme convergent intempestif, les dents de devant un peu trop en avant... elle avait été plus gâtée que pas mal de filles d'origines asiatiques niveau poitrine, mais ce n'était pas non plus encore de quoi tomber à la renverse. Ca en serait même un peu bizarre, comme un déséquilibre étrange, des hormones qui font pas leur boulot comme il faut. En toute logique, la conversation dérive sur son âge. « Dix-huit ans ! Enfin, je vais avoir dix-neuf ans cette année... » fait-elle. Elle doit sans doute être la plus jeune du groupe, mais bon, peu importe. Elle a déjà repéré d'autres candidats de sa génération, comme Leandro, déjà, par exemple. Plus facile pour discuter que les candidats qui ont presque l'âge de son père... « Et toi ? Tu as quel âge ? Et tu viens d'où, d'ailleurs ? » demande-t-elle à Mylah avec entrain, curieuse d'en savoir plus sur la jeune femme. Elle a l'air plus âgée qu'elle, et s'exprime si poliment, elle doit sans doute venir d'un milieu plutôt aisé.

La cohabitation avec Adélie se passe bien, Mylah n’a pas à se plaindre, elle aurait pu tomber sur pire. Sur quelqu’un avec la main baladeuse, à l’hygiène déplorable ou au caractère insupportable. Alors la rousse lui convient très bien. Si Mylah visualise vaguement Leandro, ce n’est pas le cas de Sailor avec Adélie. La blonde a toujours le cœur sur la main, raison pour laquelle elle détaille la rousse en quelques traits grossiers pour aider Sailor à la reconnaître. Adélie a des yeux et une bouche trop grande pour son visage, mais puisque l’ensemble reste symétrique, on ne peut pas dire qu’elle soit désagréable à regarder, elle a un certain charme. Mylah hoche brièvement la tête aux propos de Sailor qui essayera donc de la reconnaître. La noiraude se questionne ensuite sur les critères de sélection et Mylah est surprise. En tant que fan de l’émission, Sailor devrait le savoir. Les critères sont presque toujours les mêmes, un caractère affirmé ainsi qu’un physique agréable à l’œil. Sauf que Sailor marque un point, ils ont bouleversé le déroulement habituel de la semaine, ce n’est pas impossible que les critères d’entrée le soient aussi. « C’est vrai… » Elle murmure pour elle-même, doucement, tandis que son visage se referme, prenant conscience du poids des paroles de Sailor. Mylah n’avait pas pensé à ce détail. Elle s’est tellement concentrée sur leur changement de situation, passant d’un nid bien douillet à un campement plus que sommaire, qu’elle en a oublié les critères de sélection. Elle n’a pas imaginé un seul instant que la production puisse changer ceux-ci. Son rythme cardiaque s’accélère tandis qu’elle commence à faire allers-retours pour se calmer, cinq pas à chaque fois. Et puis, elle se dit qu’ils ne peuvent pas se passer des caractères qui fonctionnent à chaque saison, ainsi que des physiques avantageux qui attirent les téléspectatrices comme les téléspectateurs. Elle s’arrête et se positionne devant Sailor, comme avant. C’est triste à constater, mais Mylah peut au moins compter sur son physique. En parlant de physique, Sailor peut compter sur sa poitrine opulente, cela ne va pas la pénaliser au contraire. Sauf que l’asiatique n’est pas du même avis et pense qu’elle n’a rien à voir avec les autres jeunes femmes. Ce n’est pas faux, elle pourrait se faire raboter les dents, ce ne serait pas plus mal, mais excepté ce petit défaut, elle n’est pas repoussante. Enfin, il faut aimer le style lycéenne. « Les asiatiques qui ont l’air très jeunes, ça fonctionne plutôt bien sur certains hommes. » Elle constate, haussant les épaules. Oui, c’est un truc qui marche si elle en croit ce qu’elle a pu entendre à la télévision ou ce qu’elle a pu constater de ses propres yeux lors de certaines réceptions où elle était conviée. Car il est difficile de donner un âge à Sailor, du moins Mylah préfère s’abstenir. Elle a l’air jeune, mais il doit tout de même avoir un âge minimal pour participer à cette émission. Elle a dix-huit ans et Mylah lui aurait volontiers donné deux années de moins. Ce qu’elle constate surtout, c’est qu’il y a un écart d’âge assez important entre certains candidats. Sailor pourrait aisément être la fille de Cecil, par exemple. C’est ensuite Sailor qui lui pose une question, sur son âge et sur son origine. « Vingt-six ans et je viens du Texas. » Ce qui doit s’entendre à son accent. Elle aimerait tout autant que ça ne s’entende pas, Mylah trouve son accent bien trop agressif à l’oreille et ce n’est pas pour rien qu’elle prend des cours pour le gommer. Quant à son âge, elle ment, parce que les chiffres impairs, elle les aime uniquement quand il s’agit de ses troubles obsessionnels, parce qu’elle ne s’en rend pas directement compte. « Et tu supportes d’être entourée de tous ces vieux ? » Elle questionne, avec un léger sourire. Elle-même se range dans la catégorie des vieux vu ses huit ans, officiellement, d’écart avec l’asiatique.