SAYID & @GIGI
mardi 7 avril - 13:47

Il avait beau tenter de faire des efforts et avoir l'impression - sans doute vraie - de s'améliorer au fil des semaines à ce sujet, Sayid n'en restait pour autant pas moins quelqu'un qui appréciait les vertus de la solitude et du silence, raison pour laquelle il évitait autant que possible de s'infliger les exercices de vie en communauté les plus fastidieux, parmi lesquels le fait de manger en groupe. A la réserve cela ne le dérangeait pas, ils cuisinaient chacun leur tour et mangeaient tous ensemble, mais ces personnes-là il les connaissait, il avait appris à les cerner, à les comprendre, et presque à leur faire confiance. Assez du moins pour que le sentiment qui prenait le plus de place en son for intérieur lorsqu'il était à table ne soit pas le malaise et l'envie de disparaitre. Ici les choses étaient différentes, il ne connaissait pas les candidats, son propre secret le faisait se rendre méfiant à propos de celui des autres, et de façon générale certaines personnalités étaient de toute manière trop en décalage avec la sienne pour qu'il se sente pleinement à l'aise ... Alors il se contentait de faire avec, simplement, mais il avait besoin de ses moments de fuite et préférait éviter les moments d'affluence au sein de l'hôtel. Plutôt que de rester à la cuisine et de manger avec les candidats déjà présents le britannique avait donc terminé de couper ses fruits en morceau dans un bol et avait quitté les lieux pour aller manger ailleurs ; La salle de bal par exemple, cet endroit à ses yeux si inutile qu'en dehors des annonces de Cupidon il n'y mettait jamais les pieds. Contre ses propres attentes pourtant il n'avait aujourd'hui pas trouvé l'endroit vide lorsqu'il y était entré, et presque tout de suite reconnu le profil de Gigi lovée dans un des fauteuils. Déposant son bol de fruits sur la console contre le mur il s'était approché lentement, déposant doucement ses mains sur les épaules de la Gigi « Hey. » Il ne savait pas trop dans quel état d'esprit pouvait être la jeune femme, il avait bien compris qu’elle était du genre à passer du rire aux larmes en quelques secondes, chose qui le déconcertait d’ailleurs beaucoup, mais il ne savait du coup pas trop si depuis le prime de l’avant-veille et l'élimination de son partenaire elle avait décidé de passer à autre chose ou non. Ce qu’il croyait avoir compris en revanche c’est que pareille à l’enfant qu’elle était peut-être encore un peu, Gigi se consolait à coup de contact et de paroles réconfortantes ; Et s’il n’était toujours pas doué en terme de conversation cela ne lui coûtait en revanche pas grand chose de poser une main sur son épaule. Le contact physique aussi de façon générale n’était contrairement à ce qu’on pourrait penser n’était pas le noeud du problème, du moment qu’il était celui qui en avait l'initiative. « Qu’est-ce que tu fais toute seule ? » Chez lui la chose était des plus banales, mais Gigi ne lui avait jamais semblée très friande de la solitude, elle. Se retournant finalement vers la console il avait récupéré son bol de morceaux de fruits, pomme, abricot, fraise, mangue, c’était pas faute de s'être dit en préparant qu’il se faisait la même chose que  filaient à bouffer aux gorilles, mais puisqu’il s'intéressait déjà plus à eux qu’à n’importe quel être humain ce n’était pas ce qui dérangeait Sayid. « J’en ai fait beaucoup pour une personne. » Volontairement, puisque les fruits étaient bourrés de sucre et que Sayid ne répondait plus de rien quand il était question de sucre, mais ça ne voulait pas dire qu’il n’était pas prêt à partager.

C'était assez paradoxal parce qu'avec Claudia nominé d'office et cette voix d'avance contre lui Sayid se disait qu'il n'avait jamais été aussi près de la nomination que cette semaine, et pourtant c'était la première fois depuis qu'il était ici qu'il se sentait si apaisé. Parce que les effets du paintball s'étaient finalement estompés, parce qu'il avait suffisamment observé les gens pour savoir à peu près comment agir avec les uns et les autres, et parce que l'environnement inconnu devenait peu à peu familier. C'était déjà une source d'angoisse en moins pour lui, et cela l'aidait à relativiser le reste. Pour autant il avait encore besoin de ses moments de solitude, ces moments où il n'avait pas besoin de faire l'effort d'être ou d'avoir l'être d'être qui que ce soit, et presque sans réfléchir il s'était dirigé vers la salle de bal en se disait qu'à cette heure-ci de la journée il la trouverait sans doute déserte. C'était d'ailleurs peut-être bien pour cette même raison que Gigi s'y trouvait, avec sa petite mine et l'air un peu ailleurs lorsque Sayid avait demandé - de façon tout à fait rhétorique - ce qu'elle faisait là et qu'elle avait simplement répondu d'une voix éteinte « Je ne sais pas. Pas grand chose je suppose. » Il l'avait scruté un instant, assez déconcerté devant une facette de Gigi qu'il ne connaissait pas et face à laquelle il ne savait donc plus trop comment réagir, s'adapter. De manière un peu hésitante il lui avait donc proposé ses fruits, faute de mieux, à défaut de trouver quelque chose d'adapté à dire ou à faire « Je n'ai pas très faim je crois, mais merci c'est gentil et puis c'est trop joli. » Il n'avait pas insisté. Il n'insistait jamais, de toute façon, pour lui la première réponse avait toujours valeur de réponse définitive. Attrapant machinalement une framboise dans le bol il avait fait quelques pas pour aller se poser devant l'une des baies vitrées de la pièce, sans un mot de plus. La vérité c'est que même s'il avait appris à apprécier assez Gigi pour se soucier d'elle, il n'était pas vraiment doué pour ce qui était de consoler les gens. Et puis il lui en voulait un peu aussi, même s'il ne l'avouerait pas, parce qu'Akela s'était chargé de diffuser pendant sa rubrique la conversation entre Gigi et Ronan et que Sayid n'avait pas forcément apprécié la manière dont la jeune femme avait parlé de lui. Comme le mec un peu simplet qui ne vaut pas grand-chose, celui qui n'est une menace pour personne. Si elle savait Gigi, qui elle avait réellement en face d'elle ... Mais peu importe, il avait l'habitude. D'être pris tour à tour pour un mec trop gentil, pour un connard, pour une bonne personne, pour une mauvaise personne, il avait l'habitude, et il ne dirait rien. Ce n'était pas le moment, de toute façon. « C'est vrai que tu travailles avec les singes ? » Il avalé un morceau de banane avant de se retourner, pas le moins du monde embêté par le changement de conversation, puisqu'il n'avait pas le coeur à tenter de faire des efforts pour la faire avancer lui-même. « Oui. » Il avait fait quelques pas, quittant le devant de la baie vitrée pour venir s'asseoir dans le fauteuil qui faisait face à celui de Gigi, déposant son bol sur la table basse au milieu. Il avait croisé les bras, mimant la posture de la jeune femme, avant de se décider à reprendre « Ils sont moins compliqués que les humains. Et plus tolérants. » Du moins c'était son avis à lui, l'avis d'un mec qui n'était jamais autant pris au dépourvu que face à un autre être humain, comme s'il se sentait en décalage avec le reste de son espèce et avait plus sa place parmi les primates. « Ça serait un paradis pour eux, là où je travaille, si ces abrutis décidaient d'aller braconner ailleurs ... » Il se parlait plus à lui-même qu'il ne s'adressait à Gigi, finalement, et le ton amer qu'il employait n'était rien d'autre que l'expression de pensées qu'il préférait ne pas répéter à voix haute. Il avait soupiré. Il était de bonne humeur ce matin et maintenant plus vraiment, à croire que l'humeur de Gigi était contagieuse, et attrapant une fraise dans son bol il l'avait avalée sans grande conviction.