La journée a mal débuté pour Colin, qui après un léger accident dans le cellier – fallait bien que son estomac finisse par lui jouer un sale tour, c’est désormais le cas – s’est coupé au pied à cause d’une satanée brique de verre. S’il a fait – un peu – le malin face à Lawrence qui a le don de toujours pointer le bout de son nez quand Colin est en fâcheuse posture, dès que leurs chemins se sont séparés avec le Prince Disney, il a pris la direction de la salle de bain pour y soigner sa blessure de guerre. Trois fois rien, un peu de désinfectant, un pansement et le tour est joué, mais Colin ne serait pas Colin s’il n’exagérait pas (légèrement) les choses. Assis sur le rebord du meuble de la salle de bain, il nettoie bien sagement sa plaie quand Jade décide de faire irruption dans la pièce. L’oubliant un cours instant le temps de finir de désinfecter son orteil, il relève finalement le nez et observe la candidate un court instant. « Elle fait souvent des cauchemars, Scarlett ? » Il la questionne, d’un ton sérieux, s’imaginant que sa rencontre avec Scarlett dans les escaliers n’est plus un secret depuis qu’Akela a jugé utile de diffuser cet extrait. Scarlett lui avait fait promettre de ne rien dire à Jade, il n’avait pas jugé utile de le faire, mais il suppose qu’il peut se permettre maintenant. « Oublie. » D’abord parce que finalement ça ne le regarde pas, ensuite parce qu’il s’imagine qu’être systématiquement associée à sa sœur doit commencer à être pesant. Et justement, l’ambiance l’était un peu trop selon lui depuis sa question, il décide de faire une réflexion dont il a le secret. « Tu tombes bien en fait, j’ai pas encore eu l’honneur de partager un bain avec quelqu’un alors qu’à croire c’est un rite de passage. » Oui, quatre candidats en tout partagent un bain et ça en devient un rite de passage, Colin a cette capacité à interpréter les élément comme il le souhaite. « Alors comme t’as un peu d’expérience dans le domaine, j’me dis que peut-être… tu peux te sacrifier pour la bonne cause. » La bonne cause, tout à fait. Malgré tout, Colin n’est pas stupide, il sait que sa demande restera sans réponse positive, mais sur un malentendu, ça peut fonctionner.

Je ne veux faire qu'un passage express dans la salle de bain, simplement pour remettre ma serviette de bain à sa place. Mais je suis happée par un Colin qui se transforme en sa propre infirmière. Mes grandes opales se contentent de l'observer en silence pendant un instant, soutenant son regard en douceur, sans rien faire. Il suffit que le prénom de ma soeur sorte de sa bouche pour que cela me captive, et pas qu'un peu, je m'anime tout de suite. La question de Colin semble tétaniser tous mes muscles, je m'arrête. Je me rappelle vaguement de leur épisode grâce à la rubrique d'Akela. « Souvent, autour de la même idée » je me contente de répondre. Le feu. Sa brûlure.  Je ne suis même pas sûre que ce soit réellement des cauchemars, j'ai arrêté de comprendre le jour où elle a arrêté de m'en parler, me laissant dans une ignorance volontaire. Je la laisse faire parce qu'elle sait ce qui est le mieux, pour elle, pour nous. « Qu'est ce que tu t'es fait ? » je demande en désignant en douceur son pied blessé ? Apparemment oui, enfin, cela reste toujours plus joli que mes pieds de ballerine, d'ailleurs. Colin enchaîne sur un tout autre sujet, sans aucun fil directeur, mais je m'adapte. Il ne faut pas chercher de rapport parfois. Je vois évidemment à quoi il faut allusion, on va dire qu'il n'est pas d'une subtilité impressionnante. Je crois qu'il a deviné ma réponse, il me semble, j'compte pas tellement prendre un bain avec lui et encore moins à midi. D'ailleurs sa proposition n'en n'était pas réellement une, qu'on se le dise. « J'ai de l'expérience ? Tu ne sais pas ouvrir le robinet ? Je veux bien te le faire, à la limite » je réponds simplement moqueuse en haussant les épaules. Je peux bien donner un peu de ma personne. « J'imagine que tu sais te déshabiller tout seul, quant à te glisser dans la baignoire, cela est à ton niveau aussi, et voilà, c'est fini Colin » j'expédie sa petite expérience, maintenant à lui de s'occuper de la pratique maintenant que je lui ai expliqué la théorie. « Aller, essaie maintenant » je lance sarcastique de mon éternelle voix aérienne en esquissant un léger rictus.

Colin ne sait pas pourquoi il aborde le sujet Scarlett, d’autant plus qu’il est le premier à éviter de se mêler aux problèmes des autres. La nuit où il s’est heurté à la jeune femme, il s’est montré plutôt détaché, d’abord parce que de telles situations lui échappent totalement, ensuite parce qu’il n’avait pas envie d’être l’épaule sur laquelle pleurer. Pourtant, avec le recul, il n’a pas pu s’empêcher de se poser des questions, certainement parce qu’il apprécie un minimum la rouquine, et il se dit que sa sœur est la mieux placée pour lui répondre, avant de se rétracter. Il faut qu’il garde en tête le fait que ça ne le regarde pas, et qu’à la place de Jade, il n’aimerait pas être systématiquement associé à quelqu’un d’autre comme tout le nid semble le faire, à en croire que les deux sœurs sont incapables d’exister par elles-mêmes. Mais malgré sa réflexion, la rousse décide tout de même de lui fournir une réponse. « Et y’a un moyen de la calmer ou comment ça s’passe ? » Dernière question en rapport avec Scarlett, promis. Mais puisqu’il est généralement le dernier éveillé dans le nid, ce n’est pas impossible que la situation se reproduise, et peut-être que la prochaine fois il évitera d’être bloqué par le fait de ne pas savoir quoi faire. « Un bocal a décidé de me provoquer en duel, mais t’inquiète pas, j’ai gagné. Simple dommage collatéral. » Il précise en désignant son pied. Ouais, il a totalement pris le dessus sur ce fichu bocal, hm. Repensant aux images diffusées par Akela, il finit par changer de sujet, optant pour des conneries dont il a le secret et qu’il maîtrise bien plus que les sujets sérieux. Il peut prédire la réponse de la candidate et d’un certain côté ce n’est pas plus mal, il se sentirait con si elle acceptait, surtout maintenant qu’il soigne son pied et qu’il est impensable d’avoir fait tout ça pour rien. « Bah non, j’y connais rien, en général j’vais me laver une fois par mois au lac du coin, alors moi et les robinets… » Il commente en haussant les épaules. « Ah non, mais me déshabiller tout seul j’sais pas l’faire non plus, va aussi falloir que tu m’donnes un coup de main de ce côté-là. » Il souffle avec son air de con sur le visage. « Par contre, bingo, me glisser dans la baignoire c’est dans mes cordes ! » Il continue, exagérant une fierté qui n’a pas lieu d’être. « D’ailleurs j’te signale qu’elle va pas se remplir toute seule si tu y mets pas du tien. » Elle a proposé d’ouvrir le robinet après tout, qu’elle le fasse. « Dis-moi tout, c’est parce que j’ai pas le corps de Lawrence, c’est ça ? Vous êtes un peu racistes envers les maigrichons dans l’coin. » Il soupire en terminant d’appliquer son pansement, avant de quitter le meuble sur lequel il squattait pour se laver les mains.

Je suis obligée de lui confier que ce genre d'évènement n'est pas exceptionnelle. Colin me demande une technique pour tenter de l'apaiser. J'attends toujours le moment il va rajouter the phrase qui me fera bien comprendre qu'il se fout de ma gueule. Mais elle ne vient pas, le silence contente de perdurer. « La prendre dans tes bras » je lui dis en plantant mes prunelles acier dans les siennes, tout à fait sérieuse pour le coup. « La bercer » je continue, lui faire comprendre que ce n'est qu'un cauchemar, qu'elle ne s'embrase pas, qu'elle est toujours là, avec nous, lui carresser les cheveux comme un enfant. C'est surement pour cet ensemble qu'elle ne supporte pas que je sois dans les parages. Mes prunelles s'accrochent à sa pseudo blessure. « Je vois que tu es doué » je me contente de dire en ne préférant même pas m'imaginer la scène, cela risque d'être ridicule. Colin me propose un bain. Evidemment. Je roule des billes juste avant de me dire qu'il manie assez mal le savon et le pommeau de douche. « T'inquiète pas, ça se sent » je me contente de lui dire, moqueuse et mutine, l'air ailleurs comme toujours. La machine Colin est lancée. Il veut que je le déshabille. « Viens par ici, je m'en occupe » je raille simplement pour savoir jusqu'où il ira dans sa connerie. Je tends les bras en avant, comme déjà au taquet pour lui enlever son haut. Colin évidemment tente de trouver une explication à mon refus si ... surprenant. Il me parle de son gabarit, instinctivement mes prunelles s'en vont le jauger. Y a pire. « Les autres surement » je lâche de mon doux soprano. « Mais pas moi Colin, tu sais, nous, les danseuses, on adore les maigrichons » je ronronne comme pour le rassurer avec un sourire narquois sur mon minois de poupée. Je serai presque capable de ne prendre maintenant ce bain, juste pour l'agacer. « Par contre, on aime moins les infirmes, j'imagine que ça doit être pour ça » ... mon refus, je lui désigne son pied, moqueuse.

Les cauchemars de Scarlett semblent être récurrents, il préfère donc être informé de la marche à suivre s’il se retrouve à nouveau confronté à la situation, mais la réponse de Jade ne lui plait pas forcément. « Ah. Merde. » Il laisse simplement échapper, un peu déstabilisé par la réponse de la rousse. Il n’est pas dans l’affectif, Colin, faire des câlins et rassurer les autres, il ne sait pas et il ne veut pas faire. Quelque peu perturbé par cette conversation qui lui échappe, il n’est pas mécontent que celle-ci dérive sur sa légère blessure, conséquence d’un combat – gagné, évidemment – contre un bocal. « Et encore, si tu voyais l’état du bocal, tu serais encore plus impressionnée. » Parce qu’elle l’est totalement là, c’est évident. À tel point qu’elle peut difficilement lui refuser un bain en sa compagnie, après tout elle a un peu d’expérience dans le domaine, à en croire Akela. Mais ça ne fonctionne pas comme il le souhaite – et c’est tant mieux dans un certain sens – puisqu’elle parle simplement d’ouvrir le robinet. C’est vrai qu’il n’y connait rien, l’eau courante n’existe pas dans son trou paumé. « Ça s’appelle l’odeur du Mâle. Parait que ça plait aux nanas. » On lui aurait donc menti ? Tsss. Autre chose qu’il est incapable de faire : se déshabiller, il compte donc sur elle pour lui donner un coup de main, ce serait très mal vu de ne pas aider un gamin en difficulté, hm. Il est assez surpris que Jade entre dans son jeu, même si ça ne lui déplait pas. Dans d’autres circonstances, ça lui aurait plu d’être déshabillé par la demoiselle, or ils ne sont actuellement pas assez intimes pour qu’il s’exhibe devant elle. Ce n’est pas son gabarit qui lui pose problème, ce sont les séquelles visibles de son accident. Ceci dit, après s’être fait muet un instant, son esprit toujours aux aguets du moindre défi – même minime – l’oblige à quitter son poste pour se rapprocher de Jade. Elle est danseuse, elle a vu pire. « Mais je t’en prie, j’sais que ça te ferait extrêmement plaisir. » Il lance, avec son sourire satisfait sur les lèvres, curieux de savoir si elle s'exécutera, tandis qu’il a même le réflexe de lever les bras, histoire de lui faciliter la tâche. Brave garçon. Toutefois, ce n’est pas parce qu’elle accepte de lui filer un coup de main pour se dévêtir qu’elle a accepté son invitation, et il pense connaître la raison de son refus. « Bon, bah j’compte sur toi pour m’présenter tes copines à la fin de l’émission, hein. » Il annonce, s’imaginant déjà avec une petite dizaine de danseuses à ses pieds. Le rêve. Avec Jade c’est mort, mais avec ses copines, y’a moyen si elle y met du sien. Enfin, y’avait. « J’suis outré, triste, dégoûté, nan sérieux j’ai pas de mots là. » Il soupire en se reculant légèrement, exagérant comme à chaque fois, mais quelque peu touché puisqu’il ne s’agit pas que de son pied au fond. Si ce n’était que ça, le problème de la cicatrisation serait vite réglé, mais il doit faire une croix définitive sur les jolies petites danseuses. Un deuil de plusieurs jours s’impose. « J’espère que t’as prévu un truc pour t’faire pardonner, parce que l’ascenseur émotionnel là, j’vais avoir d’la peine à m’en remettre, j’me voyais déjà avec cinq danseuses à chaque bras. » C’était la belle époque. « Enfin, ceci dit t'es contre le bain, mais t'as rien dit par rapport à la douche. » Il termine, pour le plaisir de l’embêter, son sourire de con sur les lèvres.