@salomée

Jusqu'ici, j'avais été plutôt raisonnable non ? Enfin, je n'avais pas vraiment eu beaucoup d'excès, je trouvais. D'alcool peut-être oui, mais pour ce qui était de la bouffe, fallait bien avouer que je me laissais un peu porter par le vent quoi, me disant que c'était toujours mieux lorsque c'était les autres qui me faisaient à manger, plutôt que moi tentant de les intoxiquer. Alors forcééément en ce midi légèrement désertique, la cuisine ne me semblait pas franchement amicale. Normal, il n'y avait tout bonnement personne pour me préparer quoi que ce soit. J'avais tout de même forcé un peu le destin, en laissant l'horloge tourner un petit peu, mais au bout de dix minutes, j'étais bien obligé de m'avouer à moi-même que tout le monde fuyait cet endroit. Comme s'ils avaient prédits que je m'y tiendrais -comme toujours- du coup il m'avait fallu un plan de repli. Et c'était ainsi vers le stand de confiseries que j'avais jeté mon dévolu. Je sais, il y avait plus gastronomique en matière de repas, mais lorsque l'on n'a pas le choix, on n'a pas le choix. Et puis j'avais fait tous les efforts du monde pour l'éviter au maximum lors des semaines passées, alors je pouvais bien faire un petit écart, rien qu'une fois. Du coup, je m'en étais approché comme un gosse de treize ans s'approcherait du rayon lingeries féminines d'une grande surface, avec culpabilité. Oui, mais une culpabilité tout de même rapidement effacée par une certaine excitation -pas la même que l'exemple cité au dessus, évidemment. Je commençais donc mes courses, genre normal, et finissais même par me prendre au jeu, tentant de faire des assortiments de couleurs, comparant le goûts des dragibus bleus aux rouges, bref, une vraie catastrophe. D'ici une heure, j'allais devenir un expert en la matière, soyez-en certains.

Je suis incorrigible. Chaque matin je me blâme moi-même pour avoir succombé à la tentation du stand de confiseries la veille. A chaque fois je n’y déroge pas, au moment des quinze minutes de course d’échauffement je me jure d’arrêter les bonbons et de suivre un régime alimentaire plus sain tant je souffre. Est-ce que je me tiens à mes bonnes résolutions ? Non bien sûr. A ce point-là c’en est même pathétique, je réduis tous mes efforts à néant avec des habitudes alimentaires pareilles. Voyez, ça me déprime tellement que je vais aller me chercher un paquet de bonbons chez Margaret. Oh ce sera rapide, j’ai mes petits préférés maintenant même si je m’aventure parfois à prendre des intégrales acides histoire de pimenter mon quotidien monotone. Là par contre je crois que j’ai mieux qu’un assortiment à concept : Grey. Je ne l’avais jamais vu par ici, c’est cool je me sens directement beaucoup moins coupable. « Oh-oh bienvenue dans mon humble demeure. Je te présente Margaret. » On a plus le droit de se faire plaisir ? Sérieusement je deviens folle à être trop enfermée, je crois que l’état d’ébriété devient une sorte d’état naturel. « Tu trouves de quoi ravir tes papilles ? » Je me penche pour voir ce qu’il met dans son sachet en plastique. Tout plein de bonnes choses évidemment mais il n’a pas succombé aux caraneiges. « Ceux-là c’est les meilleurs. » Piquant une boule blanche pour la lui montrer je m’essaie à un lancer-gobé. C’est complètement raté, le bonbon atterrit par terre plutôt que dans ma bouche. Ça m’apprendra à vouloir frimer. « Raté. Ça marche peut-être mieux avec les dragibus. » C’est une excuse comme une autre, d’ailleurs je constate que Grey aime bien ce genre de mini boules colorées.