♦ Pour Kenneth

Je n'étais pas une grosse dormeuse. Quelques heures de sommeil et j'étais en pleine forme pour débuter la journée. Comme presque tous les matins, je me levais assez tôt et descendais à la cuisine, vêtue de mon debardeur et d'un pantalon de jogging. Coiffure en chignon mal fait, je m'approchais tranquillement jusqu'à ce que j'aperçoive sur place Kenneth. Le seul avec qui j'avais réellement discuté la semaine dernière et qui avait été le seul témoin de mon évanouissement sur le balcon. Je m'étais réveillé plus tard dans la chambre et je n'avais jamais eu l'occasion de le remercier. C'était l'occasion ou jamais. Je me dirigeais donc vers la cafetière pour me servir un bon mug de cette boisson chaude et je me plaçais à ses côtés. Bien que je n'avais pas oublié ces derniers mots, je préférais me concentrer sur son aide lors de cette soirée mouvementée. « Merci... Pour tout. » Lui dis-je simplement alors que je serrais sa main avec la mienne. Je lui souriais et bus une gorgée de mon café.

Kenneth semblait gêné par ce que je lui disais. Je trouvais pourtant mes remerciements importants. Il m'avait aidé et c'était donc normal que je le remercie. Cependant, sa réaction m'amusa. C'était comme s'il n'avait pas l’habitude qu'on le lui dise et qu'il ne savait pas quoi répondre. Je l'observais en silence se servir un verre tandis que je reprenais une gorgée de mon café et que je faisais griller quelques tartines pour le petit-déjeuner. « Ça va beaucoup mieux. Grâce à toi en partie. » Je lui souris tandis que je pensais qu'il fallait mettre les choses au clair. « Tu sais, ce n'est pas à cause de ce que tu m'as dit que je suis tombée dans les pommes. Je préfère te le dire plutôt que tu penses autre chose. » J'étais honnête avec lui. C'était le mieux dans cette situation pour éviter tout quiproquo pour la suite.

Kenneth semblait toujours aussi gêné et cela m'amusait. Il était adorable.« Pourquoi pas ? Il y a une première à tout et puis cela m'étonne qu'aucune femme ne soit tombé dans tes bras. A moins que... Es-tu gay, par hasard ? » Lui répondis-je. Je savais que ma dernière question pourrait le surprendre. Mais bon, j'étais direct donc je la lui posais sans honte ni gêne. Qu'il le soit, cela ne me dérangeait pas. Qu'il ne le soit pas, c'était pareil. Après tout, il était plutôt bel homme et je suis sûre qu'il ne laissait personne indifférent que se soit d'un bord ou de l'autre. Mes toasts sautèrent du grille pain. J'étalais un peu de beurre par-dessus et croquer dans l'un d'eux. « T'en veux un ? » Lui demandais-je simplement comme si ma question précédente n'était pas gênante pour Kenneth.

Ma question pouvait le surprendre. Je n'en doutais. Être pris de court par ce genre d'interrogation d'une autre personne ne devait pas être facile surtout pour un homme comme Kenneth qui semblait déjà gêné. Je l'écoutais répondre vaguement et par intermittence. Je le laissais s'exprimer, je n'avais que cela à faire après tout et il me confirma son hétérosexualité. Je lui souris. Après tout, il n'y avait pas dequoi avoir honte dans les deux cas. Il était qui il était et on l'aimait comme ça. Je le suivais du regard lorsqu'il s'appuya sur le plan de travail. Il semblait d'un seul coup plus distant. « Être gay et être viril sont deux choses bien différentes. Donc je ne vois pas ce que ça vient faire là. Et je n'ai jamais douté de ta virilité. » Je croquais une nouvelle fois dans ma tartine et bus ensuite une gorgée de mon café. « Au contraire... Et tu es plutôt bel homme pour en faire craquer plus d'une. » Je lui souris à nouveau.

Je terminais ma tartine après avoir complimenter le physique de Kenneth. Ce dernier s'abaissa dans la seconde qui suivit. Je soupirais. Il devait apprendre à avoir confiance en lui et à ne pas se sous-estimer. A ce rythme, il arriverait six pieds sous terre avant moi. Je me levais et le rejoignis lorsqu'il me posa à son tour une question qui aurait pu me gêné mais qui ne le fit pas. Je le regardais et souris. « Jamais. » Lui répondis-je. « Même si une ancienne "amie" m'a déjà embrassé. » Oui, cela remontait à la fac et je n'avais pas oublié. Comment oublier ? « Mais ne parlons pas de moi. C'est toi qui m'importe aujourd'hui. Tu m'as aidé et maintenant c'est à mon tour. » Je prenais un air sérieux. « Ne te sous-estime pas. Tu ne fais que te rabaisser à chaque que l'on te complimente et tu ne devrais pas. Si on te le dit, c'est que la personne en face de toi le pense. Alors arrête et accepte-le. Sois confiant, ait une meilleur estime de toi et tu verras, la vie te paraîtra bien plus belle. Ne te prends pas la tête. Vit, tout simplement. Tu es jeune, beau et intelligent. Profites-en maintenant, tu ne sais pas ce qu'il pourrait arriver plus tard. » Je le fixais. J'étais sérieuse. Il devait murir sur ce point-là et je comptais bien y faire quelque chose. « On va faire un marché. Tu fais ce que je viens de te dire et je... » Je me mis à réfléchir sans trouver l'autre parti mon concernant.