Kimaori et Sorcha.
Quand quelque chose me mettait en bourrique, ou me tournait dans la tête sans que je puisse l’y en sortir, il n’y avait qu’une chose que je pouvais faire : me défouler. Et j’avais justement trouvé de quoi m’occuper les mains, à défaut de pouvoir m’occuper l’esprit. La salle de sport, en cet après-midi, était devenu mon refuge. Le sac de frappes, lui, rêvait de pouvoir se sauver loin, très loin de moi. À vrai dire, je ne le ménageais pas. Je n’avais aucune technique, aucune connaissance en la matière. Je ne faisais que frapper, frappe encore, jusqu’à l’épuisement. Je m’arrêtais alors, mais je finissais toujours pas recommencer le même manège. Cette routine avait quelque chose de rassurant, de réconfortant. Et le contact du tissu sur ma peau faisait mal, mais chaque coup me permettait d’avoir les idées claires, ne serait-ce qu’un instant. Au bout d’une heure, j’étais exténuée, et me forçant à m’arrêter, je m’accroupis un moment contre le mur, la tête entre les genoux, mes mains entourant celle-ci. Je n’allais pas craquer, j’étais seulement à bout de nerfs envers moi-même. Et ce n’était certes pas en agissant de la sorte que j’allais régler mes problèmes. La violence n'arrangeait jamais grand chose, de toute façon. Relevant mon torse, je scrutais un moment mes mains rougit, et étirant mes doigts, je poussais un léger gémissement. Quel idiote j'étais, vraiment.

Lorsque Kim entra dans la salle d'entraînement, elle se dirigea instinctivement vers la coin réservé au kick boxing. Il y avait des sacs de frappes et même un petit ring pour les plus courageux. Kim ne s'y était rendue que deux fois depuis le début de l'aventure. Elle en était à sa troisième préférant s'attarder sur son yoga en ses lieux. Elle avait enfiler un collant de sport, un débardeur, avait attaché ses cheveux et passé une bande de protections autour de ses mains. Elle s'aperçut rapidement que l'endroit n'était pas vide. Sorcha - qu'elle ne connaissait pas encore bien - semblait vouloir se défouler. Mais à la manière dont elle frappait, elle devait se faire plus de mal que de bien. Alors qu'elle approcha, la jeune rousse s'arrêta et se replia sur elle même dans un coin. Kim venait d'assister malgré elle à un moment d'intimité entre Sorcha et elle même qui ne la mettait clairement pas en joie. Kim ralentit le pas mais rejoint sa camarade de jeu. Silencieuse, pour commencer, elle s'agenouilla à ses côtés. Posa un regard sur ses mains abîmées. Hey ... est ce que ça va ?

Alors que mon regard fixait mes jointures douloureuses, j’aperçus une silhouette s’approcher de moi, pour finalement s’accroupir à mes côtés. Kimaori, que je connaissais à peine, semblait m’avoir surprise dans mon moment de faiblesse. « Hey… est-ce que ça va? » me demanda-t-elle d’ailleurs. Je relevais les yeux vers elle, n’y vit que de la sollicitude, rien de méchant. Elle s’inquiétait vraiment pour moi. « J’ai mal. » laissais-je seulement entendre, ramenant mon regard sur mes mains. En fait, il y avait bien plus de sous-entendus que je ne voulais laisser entendre, mais je n’étais pas encore tout à fait prête à m’ouvrir à une parfaite inconnue.

Kimaori soupçonnait une douleur plus profonde et bien plus signifiante que celle que pouvait ressentir Sorcha aux mains. Son regard, sa mine triste et puis cet acharnement certain sur un sac dont elle ne connaissait rien, ne présageait pas vraiment du bon. Kim resta pourtant concentrée sur les blessures physique de la candidate. C'était le genre de chose que faisaient les filles, parler et s'occuper de choses aux double sens certains. Les mecs avaient souvent du mal avec ce concept alors qu'en fait c'était très simple ... Il suffisait de translater ses émotions sur un événement de moindre importance pour oser lâcher quelques vérités rudes qui bien évidemment n'avait rien à voir avec le dit événement ... Compris ? Ouai ben tant pis ! Un truc de filles quoi ! Kim se redressa, alla fouillé dans la petite armoire accrochée au mur près de la porte d'entrée et revint à sa place et position initiale. Je peux ? Demanda-t-elle plus par politesse qu'attendant une réelle réponse. Elle prit la main droite de Sorcha dans la sienne. Ca va peut-être un peu piquer. Elle appliqua une crème cicatrisante sur ses jointures, saupoudra le tout de talc, s'assura de faire pénétrer la mixture tout en laissant une couche apparente et termina par oter les bandes de protection de sa propre main pour l'enrouler autour de celle de la jeune femme. Je pense que tu en as plus besoin que moi. Evite de trop bouger les articulations, et laisse reposer au moins 24h. Après ça, si besoin est, tu peux laver et recommencer. Normalement c'est un truc miracle. Oh et la prochaine fois que tu désires t'attaquer à ce vilain bad boy là-bas ... demande moi conseil, disons que je connais quelques trucs. Elle ponctua ses dire par un clin d'oeil complice et se déplaca un peu sur la droite pour à son tour s'addosser contre le mur à côté de Sorcha. Quelque chose lui disait que la candidate n'était pas prête à être livrée à elle même.

J’étais presque certaine que Kimaori avait compris que ma courte réponse impliquait bien plus qu’elle n’en laissait croire. Les femmes et leur instinct… Nous étions faites de la même façon et pensions pareillement. Il n’y en avait qu’une pour en comprendre une autre. Et même si elle n’en parlait pas, une certaine part de moi éprouvait de la gratitude à l’égard de ma camarade. Rien que pour sa présence. Son prochain geste n'allait que valider ma pensée. « Je peux ? » me demanda-t-elle, et posais mes yeux sur elle pour réaliser qu’elle souhaitait seulement s’occuper de mes mains. J’acquiesçais d’un faible signe de tête, et elle s’empara délicatement de l’une d’elle. « Ça va peut-être un peu piquer. » me prévint-elle, avant d’appliquer une crème sur mes jointures – effectivement, cela était loin d’être agréable, mais ça restait supportable, en comparaison à ce qui me rongeait l’esprit. Je la regardais s’occuper de mes blessures, scrutant cette mixture d’un œil incertain. Elle semblait être toute à fait à l’aise de ces mouvements et j’en déduisais qu’elle savait parfaitement ce qu’elle faisait. C’était rassurant. Elle répéta la même routine sur mon autre main, puis enroula les deux blessés dans des bandes de protection qu’elle avait retirée de ces propres mains. « Je pense que tu en as plus besoin que moi. Évite de trop bouger les articulations, et laisse reposer au moins 24h. Après ça, si besoin est, tu peux laver et recommencer. Normalement c’est un truc miracle. » J’acquiesçais face à ses recommandations, même si j’ignorais si j’allais les respecter à la lettre. Demain, j’y penserai demain, quand la douleur serait omniprésente. « Oh et la prochaine fois que tu désires t’attaquer à ce vilain bad boy là-bas… demande-moi conseil, disons que je connais quelques trucs. » Un faible, très faible sourire étira mes lèvres à sa dernière remarque, même si je n’étais pas d’humeur. À croire que l’humour pouvait régler tous les maux.
D’autres se seraient surement éloignés après avoir accompli leur bonne action de la journée, mais la jeune femme, elle, resta à mes côtés, prenant place à ma gauche. Je tournais donc la tête vers elle, cherchant les bons mots pour la remercier, mais rien ne vint. Du moins, rien d'autre qu'un simple « Merci. »

Spoiler:

Sorcha ne s'était pas enfouie, elle n'avait pas pris la première occasion pour s'éloigner une fois les "soins" terminés. Quelques chose disait à Kimaori que cette jeune femme avait plus besoin de compagnie qu'elle ne désirait l'exprimer vraiment. Kim n'aimait pas vraiment voir quelqu'un dans une détresse apparente. Cela pouvait être passager comme plus profond, le résultat était le même : elle ne pouvait jouer les ignorantes. Restant quelques secondes de plus dans le silence, laissant à sa camarade le loisir de souffler, de ne pas être brusquée, Kim ne bougea pas d'un poil. Elle fini par prononcé simplement : Ce genre d'aventure à l'art de faire remonter plus d'émotions qu'on ne l'aurait soupçonné n'est ce pas ? Sa voix se voulait douce, non intrusive. Le but n'était pas de lui extirper les vers du nez mais d'introduire une éventuelle ouverture si telle était le désir de Sorcha.

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