► Le 23 janvier, 23h16, en compagnie de Lukas.
Première journée? Terminée. Il était encore tôt, mais les autres candidats l'avaient épuisée. Ils ne lui avaient rien fait en particulier, non. Ça ne changeait pas le résultat. Vivre avec plus de trente autres personnes, c'était bien trop étrange pour elle. Elle était une louve solitaire, que voulez-vous. Point positif de sa présence dans ce jeu: elle était libre de tout partenaire. Elle ne finirait jamais de s'extasier devant ce fait. Et elle avait un lit réservé à son nom. Un lit qui n'accueillerait que sa petite personne. Ça changeait. Un exploit. Bien que le fait, d'avoir un lit, lui-même était assez incroyable. Elle n'était pas prête de se plaindre sur ce point. Et d'ailleurs, elle allait profiter, dès maintenant, de ses couvertures, qui, elle l'espérait, étaient douces. Tout comme son matelas avait intérêt d'être aussi confortable qu'il en avait l'air. Elle entra dans la chambre, d'un pas relativement lent. Sans tarder, elle se dirigea vers sa valise. Síomha n'avait pas défait ses affaires. Ne comptait pas les défaire. Elle se pencha avant de finalement s'accroupir, attrapant une nuisette qui devait trainer quelque part là-dedans. Une fois trouvée, elle alla s'asseoir sur son lit, enleva ses talons aiguilles. Elle les déposa au pied de son lit, comme s'il s'agissait de magnifiques escarpins de grande marque. Ce n'était que deux godillots qu'elle avait depuis plus de six mois. Rien de bien exceptionnel. Passons. Sans trop de suspense et sans aucune pudeur, aucune, elle commença à se débarrasser des vêtements superflus. C'est-à-dire tout sauf sa petite culotte. Ce qui était déjà un exploit: celle-ci ne restait en général pas longtemps là où elle était. Elle finit tout de même pas enfiler la dite nuisette. Síomha se retourna ensuite vers son lit et écarta les couvertures d'un mouvement brusque. C'est à ce moment-là qu'elle se rendit compte qu'un autre candidat se trouvait dans la pièce. Soit elle rêvait, soit il était en train de la dévisager. Soupir. Elle plaça ses mains sur ses hanches, le fixant à son tour, un sourcil arqué. S'il voulait jouer au con qui fixe l'autre, très bien, elle pouvait jouer aussi.

La nuit était tombée sur la maison. La fraicheur avait surgi dès que le soleil s'était finalement couché et comme une poule, j'avais senti presque immédiatement la fatigue m'envahir. Sortir, faire la fête n'était pas dans mes priorités. Je préférais de loin jouer de mes instruments et chanter. C'était beaucoup plus divertissant et je n'avais jamais aucun regard sur moi à ce sujet puisque que je le faisais seul, dans le sous-sol de la maison de mes parents. Je ne savais pas l'heure qu'il était et encore moins si des candidats étaient couchés. J'entrais dans ma chambre, les yeux fixés droit devant moi et je sentais une présence hostile non loin de mon emplacement. Je me stoppais, cherchant en vain ce qu'il pouvait se passer. Puis je repris ma route en esquivant les lits avec ma canne blanche. Je m'installais alors sur un lit - le mien pensais-je sur le coup. Et je commençais par retirer mes chaussures puis mon tee-shirt et enfin mon jean. Je pliais ma canne et la rangé sur la table de chevet. Je sentais toujours cette présence autour de moi et surtout, je la sentais très proche de moi. « Oona, c'est toi ? » Demandais-je. Aucune réponse. « Qui est là ? Si c'est une mauvaise blague, je vous... » Je n'eus pas le temps de terminer ma phrase puisqu'en voulant me coucher je me retrouver sans le vouloir contre la présence en question. « Ah, heu...Excuses-moi. »

Waouh, les gens étaient encore plus atteints qu'elle ne l'aurait pensé. Pire que la belle Síomha sous l'emprise de stupéfiants, c'est vous dire. L'énergumène qu'elle venait de remarquer agissait de manière parfaitement suspecte. La blonde le regarda faire un instant, se demandant ce qu'il avait bien pu prendre comme drogue pour finir dans un tel état. Pensez bien que le fait qu'il soit aveugle ne lui avait pas effleuré l'esprit. Non, elle gardait en tête l'idée qu'il était juste un illuminé, comme il y en avait tant dans ce château. Sans gêne, il s'installa sur le lit de belle. Et continua son petit manège. A ne plus rien y comprendre. La blonde prit place à son tour sur le matelas tandis que le jeune homme se déshabillait. Elle devait avouer qu'il était agréable à regarder, c'était déjà ça. Il avait la même gueule que la plupart des hommes dans ce château, mais après tout, ce n'est pas tellement ça qui l'intéressait. Passons. Oona? Qui était cette personne? Son amie imaginaire? Oui, ça devait être ça. Et bien qu'elle aurait très bien pu se faire passer pour cette fameuse personne, elle préférait voir ce qui allait se passer ensuite. Elle était presque intéressée, c'était mettre la barre très haut. Félicitations. Ce n'est que par la suite que les choses devinrent réellement intéressantes puisqu'il se rendit compte de la présence de Síomha, alors qu'il était parti pour se coucher. Sous les couvertures de Síomha. Dans le plumard de Síomha. « Pas besoin de taper dans la subtilité... » lança-t-elle alors de sa voix harmonieuse. Bien entendu, il n'allait sans doute pas comprendre, c'est pour cela qu'elle ajouta: « Si tu veux qu'on baise, il suffit de demander. » C'était aussi simple que cela. Pas besoin de lui faire tout un cinéma pour entrer dans son lit, elle y acceptait, en général, tout le monde.

J'étais prêt à m'allonger sur le lit (mon lit ?) lorsque j'effleurais quelqu'un sans le vouloir. Je me retrouvais con, gêné et honteux. Être aveugle, parfois, c'était difficile. « Désolé, je ne t'avais pas entendu. » Et c'était vrai ! J'avais senti quelque chose, une présence mais jamais je n'aurais pensé être aussi près d'elle. Et la réalité faisait qu'elle était seulement à quelques centimètres de moi lorsque je m'étais déshabillé. C'était d'autant plus gênant car cette personne n'avait même pas levé la voix pour signaler sa présence. Je me redressais rapidement. « Pas besoin de taper dans la subtilité... » Ce n'était pas Oona. Loin de là. Pour être franc, je ne savais pas qui c'était. Je baissais la tête. « Si tu veux qu'on baise, il suffit de demander. » « Je... Heu... C'est que... Non. » Dans la précipitation, je voulus attraper ma canne et je la fis tomber à terre.Je ne savais pas quoi faire et je commençais à avoir froid en simple sous-vêtement.

Soupir. Il semblait bien moins amusant finalement. Beaucoup moins. Il était plus drôle durant sa crise de démence, maintenant la belle était juste... blasée. Elle savait bien qu'elle l'était rapidement, mais tout de même, il battrait presque un record. Passé de « a du potentiel » à « me fait chier à mourir » aussi rapidement, c'est un bel exploit. « Tu m'en diras tant... » Est-ce nécessaire de signaler qu'elle disait celui d'un air particulièrement détaché puisqu'elle n'en avait rien à faire? Non, surtout pas, ça semblait évident. Comment pourrait-il en être autrement? Puis, très spontanément, elle avait proposé une bonne partie de jambes en l'air. Après tout, pour se faufiler ainsi dans son lit, c'est bien qu'il y avait une raison? Elle est jolie, elle a une belle poitrine et un joli petit cul, elle connait ça, les mecs qui se glissent dans son lit. Ça ne l'offense pas, au contraire. Et elle n'aurait pas dit non, le candidat était pas trop mal foutu. « Dommage. » souffla la belle avant de se glisser sous ses couvertures.

Je n'arrivais pas à comprendre cette jeune femme. Elle était vulgaire, provocatrice et extravertie. Je ne l'appréciais pas vraiment, à première vue. Enfin, façon de parler. Je ne savais pas quoi dire. « Dommage. » J'arquais un sourcil. J'étais pathétique à côté mais elle était tout aussi désespérante. Je ne répliquais pas car je savais très bien qu'elle aurait le dessus sur moi. Je pouvais résister mais je ne savais pas me défendre quand on m'attaquait et c'était bien là un défaut majeur de mon tempérament. Je soupirais. Je n'arrivais pas à retrouver ma canne. Je penchais pour tâter le sol mais rien n'y faisait. Je ne la retrouvais pas. Je me levais alors du lit et je commençais à marcher. Un pied frappa un autre lit que je faillis même à en perdre l'équilibre. M'appuyant sur le matelas, je continuais ma route dans la chambre. Je ne savais pas trop où j'allais mais je préférais m'en aller que de rester avec une telle femme. Levant les bras en face de moi, j'avançais. Mon autre pied se cogna à son tour dans un lit. Je me laissais alors tomber. J'étais trop fatigué pour résister plus longtemps. Je sentais alors une présence à mes cotés. « C'est toi Oona ? » Demandais-je encore une fois. Malheureusement pour moi, ce n'était pas elle. Je me retrouvais encore dans le lit de cette jeune femme. Sans le savoir, j'avais simplement tourné autour de son lit pour me coucher de l'autre côté. Des millions de téléspectateurs devaient bien s'amuser à me regarder et moi, j'étais un être innocent qui ne rendait pas compte une seule seconde de la situation.

Son comportement était risible. En plus d'avoir l'air d'être tombé de la dernière pluie lorsqu'on aborde ce sujet si délicat pour certains – pas pour Síomha – qu'était le sexe, il avait une façon bien étrange de se comporter. Si elle avait cherché à comprendre, cela serait tombé sous le sens qu'il souffrait de cécité, mais que voulez-vous, il était vingt-trois heures passées et elle n'avait pas pour habitude d'en avoir quoi que ce soit à foutre des autres. Elle se contentait de le regarder faire. Se cogner, tourner doucement autour du lit, se cogner de nouveau, s'asseoir. Un sourcil levé, les bras croisés sur sa poitrine, elle fixait cet énergumène. Allez savoir s'il était étrange ou juste con, mais il en tenait une couche. De nouveau, il demanda après Oona. « A quoi tu joues? » répondit-elle au lieu de se présenter. Question légitime devant l'immense énigme qu'il représentait. « Je sais pas ce que t'as pris, mon gars, mais va falloir que tu arrêtes de sniffer, ça devient grave. » soupira-t-elle. N'allez pas croire qu'elle s'inquiétait de son état de santé, non, du tout, il l'empêchait juste de dormir. Et c'était embêtant.

Enfin tranquille, m'étais-je dis en m'allongeant confortablement sur un lit au hasard. Je pensais que j'allais pouvoir dormir maintenant que la crise du jour était passée. Je fermais les yeux. « A quoi tu joues? » « Quoi ? Encore toi ? Mais j'ai changé de lit ! Tu te fous de moi, c'est ça ? » Et c'était reparti comme au lycée. C'était le retour triomphale du souffre douleur ! « Je sais pas ce que t'as pris, mon gars, mais va falloir que tu arrêtes de sniffer, ça devient grave. » « Mais... » Je ne savais quoi répondre. Je me pensais manipuler et je n'avais qu'une envie dormir. « Mais je... » Mais je quoi ? Il fallait que je me lance, il fallait que j'attaque mais je n'y arrivais pas.

Et il s'allongeait de tout son long, comme s'il s'agissait de son lit. Il était peut-être clown? Ou alors il avait la mission de faire rire Síomha. Pauvre de lui, ce n'était pas gagné. Elle était simplement renfrognée et blasée. Elle savait pourtant qu'il y aurait des débiles dans cette émission, mais alors, là. Là, elle était surprise. Oh que oui, elle l'était. Et le pire étant qu'il lui demandait si elle se foutait de lui. « C'est moi qui se fous de ta gueule, bien sûr, ça parait logique. » rétorqua-t-elle, ô combien sarcastique. Qu'il n'inverse pas les rôles non plus. Ce n'était pas de la faute de la blonde s'il était tellement shooté qu'il ne savait plus où il était. Il bafouillait maintenant. Eh bien, elle n'était pas sortie de l'auberge. Elle leva les yeux au ciel, désespérée et soupira, longuement. Pourquoi fallait-elle qu'elle n'ait pas de partenaire mais quand même un casse-couilles dans son lit? Pourquoi, hein? Si encore il se taisait ou s'il voulait bien baiser, elle laisserait couler, mais là... Soupir.

J'étais vulnérable. Sans mes lunettes de soleil sur le nez, c'était la grande impression que j'avais que j'étais face à des inconnus. Face à cette jeune femme, c'était le cas. Je n'étais pas à l'aise et encore quand elle s'amusait avec moi. « C'est moi qui se fous de ta gueule, bien sûr, ça parait logique. » Sa remarque me fit alors réfléchir. Il existait une possibilité que je sois retourné dans son lit sans le voir, une infime possibilité que cela se soit produit. Je me redressais alors du lit. Je n'étais pas encore entré sous les couvertures. « Je... Je suis désolé. Je vais m'en aller. C'était pas mon attention... » Je me levais à nouveau, les bras tendus devant moi et j'avançais tout droit cette fois-ci. Malheureusement sans ma canne, je ne pouvais faire attention à ce qui se trouvait au sol. C'est ainsi que je me cognais dans une valise et que je tombais à terre. Je ne bougeais plus. La vie en colocation allait être difficile si les autres candidats laissaient traîner leur affaire un peu partout dans la maison.