STARRING MALO AND LOXIAS
standing on the way of control

En se levant ce matin, il avait décidé de se remettre au travail. Peut-être qu'en griffonnant quelques traits sur un bout de papier, l'inspiration reviendrait. Il ne faisait que de tourner en rond toute la journée. Le travail lui permettrait de se vider la tête de pensées négatives. Dessiner, coudre le détendraient sûrement. Ces temps-ci, il avait un rythme de sommeil irrégulier. Son corps ne suivait plus. Ses maux de tête se faisaient de plus en plus intenses. Une douleur lancinante au crâne. Un cachet d'aspirine et tout irait pour le mieux. Il ouvrit le tiroir de sa table de chevet. Il en pris un de la boîte et le goba d'un coup sec. Il se dirigea vers le dressing. Il arriva devant sa table de couture. Il n'était pas venu à son "atelier" depuis longtemps. Il rangea son carton à dessins, prit son pot de crayons et des ouvrages en tout genre. Il descendit. Il posa toutes ses affaires sur la table basse du salon. Il était environ quatre heures de l'après-midi. L'heure du thé. Il se prépara son éternel Earl grey, son parfum de thé de prédilection. Il versa l'eau chaude dans une tasse et y déposa l'infusion. Il rajouta une larme de lait, puis un soupçon de miel. Il revint dans la pièce d'à côté. Personne à l'horizon. Il prit place sur le canapé et sortit des feuilles blanches de sa pochette à croquis. Il saisit un crayon de bois et commença à dessiner. Les minutes défilèrent. Son esquisse commençait à prendre corps. Des feuilles étaient disposées devant. Elles étaient toutes noircies de coup de crayons. Des nouvelles robes naissaient au bout de son crayon. Il prenait une pause pour boire son thé. Il finit par l'oublier au bout d'une heure. Il était tellement appliqué qu'il ne remarqua pas la présence de Loxias. Il leva la tête et lui demanda avec le sourire : - Tu es là depuis longtemps ? Il posa son crayon et se caressa la nuque.

Je le cherche. Ça fait de longues minutes que je tourne dans le château à sa recherche. Je le cherche. Je le cherche parce que je me doute qu’il ne va pas bien, parce que je n’ai pas encore pris le temps, ni trouvé le temps d’aller me poser à ses côtés, comme j’ai eu l’occasion de le faire de nombreuses fois au cours de ses deux mois écoulés, et juste l’écouter me parler, vider son sac une bonne fois, et repartir plus léger. Je ne pense pas qu’il fasse ça avec tout le monde, je pense que la magie n’opère qu’avec moi, parce qu’il en a toujours été ainsi, parce que je dois inspirer un sentiment de confiance ou que sais-je, et qu’on s’en ouvre plus à moi, on se confie sans crainte. Alors, depuis quatre jours que je gère ma propre révolte, qu’en est-il de la sienne ? Je m’inquiète. Et puisque je m’inquiète et que je me retrouve dans l’incapacité de faire autre chose que de m’inquiéter, je le cherche. Il doit être aux alentours de 18h, lorsque je le trouve enfin, esseulé, mais très occupé, dans le salon. Dos à moi, je ne perçois que sa nuque qui ploie, et ses épaules qui s’agitent avec frénésie. Je connais cette attitude, j’ai souvent la même : il dessine. Absorbé par son monde, il n’a plus pied dans la réalité, et couche sur papier ce que son esprit fomente aux confins de son imaginaire. Je m’approche, jette un regard avide sur les pages noircies qui s’étalent devant lui, et très discrètement, pour ne surtout pas le tirer hors de ce monde en coton où la douleur et le doute n’ont pas de place, je m’en vais rejoindre un fauteuil perpendiculaire au sien. J’m’en fous qu’il ne me parle pas, qu’il ne sache même pas que je suis là, l’important c’est qu’il se trouve dans mon périmètre, c’est la seule chose qui compte. Alors je m’empare d’un bloc qui traine, et entreprend de griffonner à mon tour, rien de réfléchis, rien d’étudié, juste des lignes qui s’entrecroisent au gré de mes envies, de mes pulsions. Je regarde à peine la feuille, je me laisse simplement guidé par ma main qui agit en totale autonomie, comme agitée d’une vie propre. Et soudain, une voix troue le chaos, et mes yeux, aveugles, se remettent à percevoir le décor de la réalité. Malo, souriant à mon encontre, me demande si je suis là depuis longtemps... Je ne sais pas... Je ne sais plus trop... « Je ne voulais pas te déranger. » c’est tout ce que je parviens à lui dire avec une certaine forme de certitude, pour le reste, c’est encore trop vague. Mon regard se porte sur ma page noircie, et je découvre le dessin qui la compose. J’arrache la page et la lui tends. « Je... Je crois que c’est toi. » j’hésite en lui offrant l’oeuvre de mon inconscient. « Désolé... C’est pas très flatteur, c’est surtout très abstrait. » je lui avoue, confus. A mon tour de me frotter le nuque.

Malone avait perdu toute notion du temps en se cloîtrant dans cette pièce. Feuille après feuille, il voyait ces créations naître du néant, de son mal être. Il exorcisait ses démons, ses déceptions à travers ses coups de crayons. Dans ses dessins, il y conciliait ses peines et ses joies. La raison n'existait plus. Le monde autour de lui, les gens n'étaient plus. Il laissait la fureur l'envahir. La fureur d'édifier, d'engendrer. Construire un univers. Animé par un élan créatif, il en avait oublié le jeu, les départs des candidats, la rupture, la souffrance ... Le retour à la réalité fut cruel, car la douleur était encore présente. Logée au creux de sa poitrine. Il regarda sa monstre d'un geste machinal, puis posa mon regard clair sur Loxias. Il tenait entre ses mains un calepin et un crayon. Il dessinait également. Son sourire s'étira. Quand l'anglais le voyait, il sentait son cœur s'alléger un peu. Il avait hésité à s'entretenir avec lui à plusieurs reprises. Mais il n'osait pas. - Je ne voulais pas te déranger., lui dit-il. Il ne le dérangeait jamais. De le voir lui procurait une sentiment de contentement. Il arracha une feuille de son calepin et la lui tendit. Le blond observa son croquis avec attention. Il en examina chaque trait, chaque trace. Les traits de son visage s'adoucirent. - Je... Je crois que c’est toi. Il se reconnaissait dans ce dessin. Il ne saurait expliquer la raison. - Désolé... C’est pas très flatteur, c’est surtout très abstrait. C'était peut-être abstrait mais il trouvait la représentation magnifique. Énigmatique. Les contours du visage, du corps. Il avait contemplé énormément de tableaux et de portraits dans son existence. Ce dessin provoquait chez lui de vives émotions. Il resta quelques minutes à le fixer. Le trouble pouvait se lire dans ses iris. Il reporta son attention sur son interlocuteur. - Je ... Puis-je garder le dessin ? Je le trouve magnifique. Tu as du talent. Il le posa sur la table basse en compagnie de son océan de dessins de mode. Parmi ces croquis éparpillés ça et là, il reconnut les lettres A et J. Interloqué, il regarda le dessin de plus près. Une robe destinée à AJ ... Il retourna la feuille et la cacha sous une pile de feuilles. Il avait oublié l'existence de cette robe. Une robe qui restait inachevée. Il sentit le regard inquiet de son homologue masculin sur lui. Il leva la tête et croisa son regard. - Tu voulais quelque chose ?, s'enquit-il de lui demander. Il l'avait presque oublié sa présence. Il en était désolé. Son esprit était ailleurs, ces temps-ci. Il n'arrivait pas se concentrer. Il se sentait vidé, détaché de tout.

J’sais pas trop comment je fais ça, ni qui s’exprime à travers ma plume, si c’est moi, mon inconscient ou encore quelque chose de plus extérieur que ça... Je connais une blonde qui pense qu’un ange s’exprime à travers moi, mais vu le résultat de certain de mes gribouillis j’imagine qu’il s’agit plutôt d’un être plus noir et tourmenté... Toujours est-il que, bien souvent, je découvre le résultat en même temps que mon sujet. C’est le cas, encore une fois, et lorsque je tends le feuillet à Malo, si j’hésite en lui disant que c’est lui, c’est simplement parce que je n’en suis pas certain, n’ayant pas eu conscience de le prendre pour modèle. Evidemment qu’il s’agit de lui, de qui d’autre sinon ? Mais puisque je découvre moi aussi... Le dessin est abstrait, le représentant lui, mais avant tout ses zones d’ombres et d’errances, ses remords et ses regrets, ce que les autres ne perçoivent pas, mais que mon regard capte sans mal. « Je ... Puis-je garder le dessin ? Je le trouve magnifique. Tu as du talent. » me demande-t-il tandis que je réprime un mouvement de surprise. « Oui, oui, bien sûr, il t’appartient. » J’ai capturé une image de lui, qu’il l’accepte ou préfère la détruire, peu importe, celle-ci lui appartient, elle a cessé d’être mienne dès que la mine du crayon a quitté la feuille. « Merci, on a tendance à me le dire, et j’ai tendance à pas trop comprendre pourquoi. » je lui avoue, suite à son compliment. Il faut dire que c’est assez naturel et tellement automatique, que je n’arrive pas à comprendre ce qu’il y a d’extraordinaire à dessiner quelqu’un. Cela dit, j’en ai vu dessiner certain, et je dois bien avouer que ce qui est extraordinaire c’est de dessiner aussi mal que ça... Je m’attends à une réponse, mais en relevant la tête, je constate que Malo est déjà loin, à nouveau perdu dans son monde et ses pensées. Je le vois s’emparer d’un croquis, l’observer et rapidement le retourner pour le planquer sous les autres. Je n’ai pas eu le temps de voir de quoi il s’agissait, mais deux options trottent dans ma tête : sa femme ou AJ. J’opte pour AJ. « Tu voulais quelque chose ? » me demande-t-il finalement, après avoir prit, à nouveau, conscience de ma présence. « Oui, te voir. » j’affirme, bien moins hésitant que la première fois. Que je le dérange ou non, peu importe, cette fois-ci je m’impose, et je ne le laisse pas retourner seul dans son monde ouaté. La réalité est peut être douloureuse, mais elle est réelle, au moins. « On peut rester là, tous les deux, sans rien dire, ou alors tu peux en profiter pour me parler, vider ton sac, ou même, éventuellement me hurler dessus, si ça te soulage... C’est à toi de décider. » Je suis calme, parce que c’est ainsi qu’il faut être, et je lui offre un sourire rassurant afin qu’il vienne en confiance s’ancrer et ce dernier.