La douche restait une épreuve pour Sochanna, malgré la thérapie, malgré ses premières brasses dans une piscine, la douche restait une épreuve. Elle avait le sentiment d'étouffer, elle paniquait et le contact de l'eau sur son visage la renvoyait à un passé qu'elle désirait oublier. Elle prenait rarement sa douche aussi tard dans la matinée mais sa nuit avait été agitée, elle n'arrivait pas à trouver le sommeil et s'était agitée de longues heures avant de sombrer dans l'inconscience. Elle avait mis de longues minutes à se décider à aller se doucher. Elle ne pouvait pas laisser sa peau contrôler sa vie. Bientôt elle ne partagerait peut être plus son quotidien seule, aller prendre une douche devrait être naturel et ne pas ressembler à une condamnation à la prison à perpétuité. Elle se glissa sous le jet d'eau après avoir enfilé un haut et un bas de maillot de bain. Elle finissait par les quitter et les remettre l'un après l'autre mais cette relative intimité était nécessaire, elle n'appréciait pas d'exhiber ainsi son corps. Elle comptait, un murmure masquée par le bruit de l'eau ruisselant dans la cabine de douche. Elle avait senti une présence supplémentaire mais n'identifia celle-ci que lorsque la voix de Laoise lui parvint. Elle n'avait pas senti le regard de la jeune femme sur elle, sur son dos. "Ce n'est rien. Je sais que c'est assez ... Fascinant et terrifiant comme spectacle." Souffla-t-elle. En se rappelant l'attitude de Malo face à ses cicatrices une brusque bouffée de gêne empourpra ses joues. Elle comptait toujours mentalement. Se penchant elle ramassa la bouteille de gel douche à ses pieds et délaissa le haut de son maillot de bain pour se nettoyer. Elle n'avait aucun problème avec le fait de faire cela devant Laoise. Elle n'avait aucun préjugé sur les homosexuels et ne se sentait pas plus gênée en présence de Laoise dans cette tenue qu'en présence de n'importe quelle autre femme. "Ce sont des ... souvenirs de mes amis du désert." Cynisme quand tu nous tiens.

Les souvenirs, ils étaient toujours présents, elle n'oubliait jamais pourtant il était désormais plus facile de vivre avec, d'avancer. Grâce à cette aventure, aux rencontres qu'elle avait fait. "Ce n'est rien je comprends qu'on le remarque." Elle sourit pour atténuer la dureté de ses précédentes paroles. "Je suis un peu vexée que se soit mon dos que tu regardes, d'ordinaire on me flatte plutôt sur mes fesses." Le sourire malicieux de la blonde s'accentua tandis qu'elle replaçait son haut de maillot de bain sur sa poitrine après avoir nettoyée sa peau. Elle éteignit le jet d'eau et commença à laver ses longs cheveux blonds. Il était étrange de se retrouver en la présence de Laoise. Malo lui avait-il parlé de leur ... rapprochement ? Elle savait à quel point ils étaient proches mais comment savoir ? Elle avait promis à Malo de garder le secret sur leur relation mais Laoise... Elle était la meilleure amie de Malo et... Et Sochanna admirait la jeune femme pour son courage et sa force, faire son coming out à la télévision c'était plus que courageux. "Laoise, je..." Elle soupira, passa une main dans ses cheveux oubliant qu'elle avait son crâne enduit de mousse. Elle était nerveuse, fébrile. Pourquoi éprouvait-elle le besoin de se confier à cette quasi inconnue. Elle soupira, s'approcha de la jeune femme. "Il faut que... Je crois que..." Elle n'y arrivait pas.

Non, elle ne pouvait pas faire ça ici, comme ça... Elle ne pouvait pas le trahir et pourtant... Pourtant elle voulait que la jeune femme sache ce qu'elle éprouvait pour Malo, ce qui se tramait dans le dos des candidats entre l'ancienne joueuse et l’actuel demi-finaliste. Elle avait besoin de se confier avant que sa tête n'explose, qu'elle perde la raison à retourner sans arrêt cette idylle dans son esprit. Elle perdait le sommeil, elle rêvassait mais tout cela ne lui semblerait pas réel tant que ceux qu'elle aimait, qu'il aimait, ne sachent ce qui se passait entre les deux jeunes gens. Mais il y avait quelque chose de ridicule dans cette situation. Elle ne connaissait pas Laoise, pas du tout, l'avoir observée à la télévision ne faisait pas d'elle son amie. Malo était son ami. Elle ... Ce n'était pas à elle de lui avouer ce qui se passait entre eux. Mais, il fallait qu'elle confie à quelqu'un ce qu'elle ressentait. Qui d'autre que Laoise pour recevoir cette confidence car il s'agissait de Malo or personne ne le connaissait mieux que la rouquine. "Ca va ... c'est juste que." Oubliant la mousse qui recouvrait encore ses cheveux elle entoura une serviette autour de son corps fin et sortit de la douche. Alors qu'elle se décidait à quitter la pièce sans fournir d'explications elle se ravisa. Retournant à l'intérieur de la cabine elle se plaça aux côté de Laoise, face à la caméra, elles faisaient écrans de leur corps devant le mur du fond de la douche, sur les carreaux roses elle écrivit dans la buée "j'ai des sentiments pour Malo" en tout petit, si petit qu'aucune caméra ne pourrait le décrypter si une image filtrait à la télévision, le message s'effaça en quelques secondes, remplacé par une nouvelle couche de buée. Légèrement fébrile elle tourna son regard vers la rouquine. "Tu comprends ?" Car oui, elle espérait que Laoise approuve cette ... alliance ?

Le soulagement l’envahit immédiatement après sa confession sous forme de message écrit dans la buée de la douche. Le poids qui oppressait son cœur s’allégea. Elle n’avait pas pu le confier à Malo, c’était trop soudain, trop… trop. Elle ne s’attendait pas à rencontrer l’amour dans cette aventure, qui était venu avec cette idée en tête cette saison ? Personne. Laoise et Anabel, Adie et Evan, Irène et Andréas, elle et Malo… Elle était venu pour reprendre contact avec les autres, laisser le passé derrière elle, lui pour se reposer, pour prendre des vacances, renouer le contact avec un autre milieu que celui de la mode. Ils n’étaient pas venus pour vivre une aventure sentimentale. Pas en premier lieu et pourtant, elle était amoureuse de Malo. Tout du moins le pensait-elle. Elle n’avait jamais éprouvé cela pour quiconque auparavant. Elle avait tourné et retourné ses émotions dans son esprit, cherchant un sens plus terre à terre à l’émotion qui avait étreint son cœur lorsqu’elle avait retrouvé Malo dans la Cabane en Bois. Elle était tombée amoureuse de lui. Tomber était le mot juste… Elle ne l’aurait jamais approché s’ils ne s’étaient pas heurtés de plein fouet un jour de pluie dans le parc et s’ils n’avaient pas atterrit l’un sur l’autre. « Je ne lui ferais pas de mal… Pas volontairement. » Elle grimaça un sourire. Elle savait qu’elle s’engageait dans une relation sérieuse, durable avec un homme bon et sensible. Elle savait aussi qu’elle n’était pas guérie, que si une certaine proximité physique s’était instaurée entre eux, si elle ressentait un désir intense de sentir ses mains sur elle, ses lèvres sur les siennes, elle ne pouvait pas tout précipiter. Elle avait été victime de viols répétés, les crises se manifestaient subitement dans des moments parfois inattendu. Elle savait que leur … vie intime serait marquée par ses crises, que leurs nuits ensemble seraient agités de leurs cauchemars respectifs mais, elle était amoureuse de lui. Elle éprouvait pour lui une émotion inédite, intense, flamboyante. Elle l’aimait. Le confier à Laoise l’avait libérée, quelqu’un savait, c’était réel. « Tu sais si tu éprouves le besoin de rentrer en contact avec mon postérieur, ne te cherches pas d’excuses. » Plaisanta t-elle en retour. Passant une main dans ses cheveux ses doigts ressortirent poissant de mousse. « Heureusement que j’ai trouvé le courage de te parler, si j’étais sorti avec cette tête ils m’envoyaient à l’asile direct… » Elle rit, un rire libérateur. « Tu sais Laoise je t’admire pour ton courage. Je sais qu’on ne se connait pas mais… J’espère que l’on apprendra. »