Et voilà, à partir de maintenant le jeu était lancé et je venais de faire connaissance avec l’homme qui serait en duo avec moi pour les prochaines semaines. Sans être déjà stratégique, ce que je ne savais de toute manière pas être j’espérais que nous pourrions tous les deux aller très loin dans cette aventure. Il semblait être un garçon sympathique, Maverick qu’il s’appelait. Sans l’avoir trop détaillé physiquement je pouvais constater que, sans avoir un physique de jeune premier il avait un charisme qui ne pouvait laisser indifférent. De toute manière on ne peut pas dire que j’étais ici dans le but de me taper tous les mecs du jeu et être la pire trainée du chalet. Non, au contraire j’allais surement me voir attribuer le titre de « bonne sœur » de l’édition à moins que je retrouve subitement goût à la séduction, au sexe et à tout ce que passer du bon temps entrainait. Passons, la soirée s’était très rapidement terminée, il faut dire que mon partenaire et moi avions eu l’occasion de faire notre entrée parmi les derniers candidats, ainsi nous devrions rattraper notre retard avec les autres dans les prochaines heures. Je privilégiais néanmoins mon camarade de jeu, il serait mon allié dans cette aventure et je me devais donc d’être proche de lui, ça me semblait même très naturel, je ne me voyais pas le boycotter sous prétexte que nous passerions suffisamment de temps ensemble à dormir. Nous avions déjà peu à peu fait connaissance, rien de bien profond, des discussions superficielles mais c’était toujours comme ça au départ. A présent vêtue d’une simple petite nuisette ni trop provocante ni trop vieillotte j’avais rejoint notre lit plus joyeuse que jamais, cette aventure allait être superbe. Pourtant, à trop regarder le mur je m’étais égaré dans mes pensées. « Tu as l'air songeuse, à quoi tu penses ? »

Je tournais la tête vers le jeune homme, lui aussi était plus âgé que la plupart des candidats du jeu, ce n’était pas plus mal, ainsi je ne serais pas la doyenne de l’émission et je ne savais même pas si Maverick l’était, je ne connaissais pas encore tous les candidats et je m’en rendais compte maintenant. « Oh tu sais… A des tonnes de choses, il se passe tellement de trucs dans ma tête d’un seul coup ! » Je souriais amusée alors qu’il reprenait la parole et dans son ton je pouvais sentir qu’il était gêné, il avait même peur ? Qu’allait-il me dire qui serait susceptible de ne pas me plaire ? « J'ai écouté ta présentation ce soir. Je suis désolé pour ton fils, cela doit être un déchirement de ne plus l'avoir auprès de toi. Au fond, on se ressemble tous les deux, j'ai deux enfants, je ne les ai pas vu depuis plusieurs années et ils me manquent. » Je perdais le sourire un faible instant, parler de la perte de mon fils encore bien trop ancrée dans mon esprit était difficile mais je voulais que cette aventure m’aide à faire mon deuil plus que je ne l’avais déjà fait à l’extérieur. Je me relevais progressivement après avoir pris une gamelle monumentale, tout irait mieux avec le temps, je le savais. « Il est vrai que nous avons tous les deux un parcours semblable et j’espère que tu auras l’occasion de revoir tes enfants très vite… Ça devrait être interdit d’être coupé comme ça de sa famille… Et… Merci pour mon fils, c’est gentil ! » Pour l’instant je n’étais pas très bavarde mais je trouverais bientôt de quoi alimenter notre conversation.

Je ne connaissais pas énormément Maverick mais je ressentais un très bon karma le concernant. Je n’étais pas l’une des niaises qui croyait totalement aux esprits, à la fatalité du destin et au Karma mais parfois j’aimais me dire que certaines personnes croisaient ma route dans un but bien précis. Si c’était vraiment le cas je m’estimais plutôt chanceuse ce soir parce qu’il y avait des autres candidats qui, pour le moment ne me donnaient clairement pas envie de faire leur connaissance par le biais des attitudes qu’ils pouvaient avoir. C’est dommage mais c’est la triste vérité, je me méfiais néanmoins de mes idées reçues, j’adorais que l’on me prouve que tout ce que j’imaginais était faux, je dirais même que c’était vital pour qu’une relation fonctionne avec moi sauf lorsque je me faisais déjà de bonnes idées à propos des personnes qui m’entouraient bien entendu. Me rendre compte qu’un gars sympa était enfaite un enculé de première n’était pas quelque chose d’agréable et qui me faisait prendre mon pied, au contraire, c’était une déception supplémentaire et un goût amer qui ne me quittait pas pendant plusieurs heures. « Tu sais, pour moi c'est beaucoup plus compliqué. Mes jumeaux n'ont aucune envie de me voir, tous comme ma femme et mes amis d'avant. Je les ai faits beaucoup trop souffrir parait-il. » Je me mordillais la lèvre le regardant dans les yeux, je peinais à l’imaginer comme étant un mauvais gars qui n’avait pas pris le temps ne serais-ce qu’une petite minute de s’occuper de ses proches, il n’avait pas pu leur faire excessivement de mal sur un autre plan ou alors j’étais vraiment aveugle et il cachait bien son jeu. Non, je ne voyais définitivement pas en quoi est-ce qu’il avait pu les faire souffrir. « Tes jumeaux… Ils ont quel âge déjà ? Mais je pense qu’avec l’âge ils comprendront qu’ils font une erreur et qu’avoir une présence masculine, avoir leur père est plus important que tout ce qui a pu se passer ces dernières années… Si tu cherches sincèrement à arranger les choses tu ne pourras pas ne pas obtenir de reconnaissance de leur part ! » C’est comme ça que je percevais les choses en tout cas, peut-être que j’avais tout faux mais la sincérité primait toujours, même lorsque j’en voulais à quelqu’un je revenais toujours en les voyant souffrir à cause de moi.

Parler de mon fils décédé n’était pas vraiment un sujet de conversation que j’appréciais, au contraire je le fuyais comme la peste et pourtant, face à Maverick je ne pouvais pas éviter le sujet, après tout, il était mon partenaire et je le sentais suffisamment posé pour comprendre ce que je pouvais ressentir. Chacun à notre manière nous avions eu droit à une perte, lui avait la chance de pouvoir changer les choses alors que moi, de mon côté je devais me faire à l’idée que mon fils était bel et bien parti. Depuis cet été je m’étais déjà beaucoup remise en question, il était hors de question que je sois une femme dépressive pour le restant de ses jours, au contraire je retrouvais peu à peu goût à la vie et cette aventure allait me servir d’accélérateur, il suffisait de me voir ce soir, plus hystérique que moi il ne devait pas y avoir, les petites jeunettes pouvaient se rhabiller. Sans être vulgaire j’allais faire le show. Avant de mettre l’ambiance je me laissais pourtant aller à un moment de réconfort, d’honnêteté. « Ils vont avoir 16 ans en juillet, comme chaque année depuis 2 ans je leurs enverraient un cadeau par la poste. J'attendrai désespérément un signe de reconnaissance, en vain. Puis je me replongerais à coeur perdus dans mes inventions, afin de rendre la vie des autres meilleurs. » Je le comprenais et je me disais que ça ne devait pas être facile tous les jours pour lui. « C’est horrible… J’espère que ton passage ici leur fera prendre conscience que tu tiens à eux plus qu’ils ne peuvent le croire ! » Que dire de plus ? Je ne pouvais pas trouver les mots justes parce qu’il n’y en avait pas. « Et toi, quel âge avait-il ? Au fond je suis persuadé qu'il doit être très fier de sa maman qui malgré son terrible chagrin continue à vivre. » Je n’étais pas une fille qui aimait penser à ce qu’il devait faire, je ne croyais plus vraiment au Paradis ni à l’enfer mais ça me faisait plaisir tout de même de l’entendre dire ça. « Il aurait eu 12 ans en octobre dernier. » Et là, je ne comprenais pas vraiment ce qu’il se passait, sans prévenir il approchait jusqu’à me prendre dans ses bras. Même si c’était appréciable je restais très froide et ne pouvait m’empêcher de reculer, je n’étais plus habituée à ça. Je n’avais pas été proche d’un garçon depuis la fin du lycée c’est pour dire. « Euh… Excuse-moi mais… Je ne suis pas vraiment une fille qui aime les câlins et les trucs dans le genre. »

Spoiler:

Depuis le lycée je n’avais pas eu le moindre moment de tendresse avec un homme. Pour dire vrai cet enfoiré qui avait tiré une croix sur moi juste parce que j’étais enceinte de lui m’avait totalement dégouté des relations amoureuses, je ne croyais pas en leur durabilité et tous les mecs qui avaient fait des tentatives pour me mettre dans leur lit m’avaient prouvé que je ne me trompais pas du tout. Je ne pourrais pas dire qu’une présence masculine ne me manquait pas parfois mais je me rappelais tout de suite des avantages à ne pas avoir un gros lourdingue sur le dos et je me disais que finalement c’était un mal pour un bien. Cette aventure serait peut-être l’occasion de me contredire mais j’en doutais fort, ma vision des hommes était relativement stricte, j’en appréciais énormément mais aucun n’avait su me prouver qu’il n’était pas juste un chien qui ne pensait qu’à sauter le plus de filles possible. « Désolé, je voulais juste te montrer qu'il y a ici des gens qui t'apprécient, qui désirent que tu te sentes bien. » Il s’installait après avoir essayé de me prendre dans ses bras, je me sentait presque mal pour lui mais j’étais comme ça et hors de question d’être hypocrite. « Je ne doute pas de la sincérité de ton intention mais… Voilà, je préfère te prévenir quand même. » Je lui adressais un fin sourire alors que l’impression de l’avoir vexé en lui mettant un râteau venait germer dans ma tête, il était silencieux à présent. « Merci pour cette discussion, elle m'a ouvert l'esprit et fais comprendre des choses. Essayons de bien dormir pour notre première nuit ensemble. Bonne nuit. » Est-ce qu’il allait vraiment dormir maintenant ? Avec l’entrée dans l’aventure je ne me voyais pas du tout me coucher aussi tôt. « Est-ce que tu es vexé parce que je t’ai en quelque sorte mis un vent ? »

Je me demandais si je venais de taper en plein dans la fierté de Maverick, pas que ça m’importe en réalité mais je ne voulais pas commencer à me mettre à dos des candidats alors que nous étions dans l’aventure depuis à peine quelques heures. Je me mordillais la lèvre prenant enfin la parole pour lui quémander une réponse, était-il vexé d’avoir pris ce que je pouvais appeler un vent ? J’espérais que non mais dans le cas contraire tant pis pour lui, je n’étais pas une fille facile et je préférais que les limites soient fixées pour le moment, on en reparlerait dans quelques temps si le feeling passait vraiment bien mais étant donné qu’un homme ne m’avait pas fait de l’effet depuis douze longues années j’en doutais fort. « Je suis un homme, j'ai essayé d'être charmant, agréable, de te réconforter. Je te mentirais en te disant que je n'ai pas ressentis un pincement au cœur. Un pincement de déception, je ne t'en veux pas je te comprends j'étais juste déçu c'est tous. » Je riais jaune, okay mais pour qui est-ce qu’il me prenait ? Ma franchise, mon manque de tact, tout ça me faisait parler plus vite que je ne réfléchissais et je risquais donc d’être un poil crue dans mes paroles. « Je comprends mais… Je ne suis pas une prostituée… On se connait depuis une heure, peut-être deux et je ne compte pas me faire sauter devant les caméras dès la première nuit ! » Je le toisais du regard sans me démonter, je pouvais être très intimidante, une femme de notre société moderne, je ne me laissais pas marcher sur les pieds, ce n’était pas dans mes habitudes. « J'ai entendu que tu étais ambulancière, ce n'est pas un métier trop difficile ? Personnellement, je ne pourrais pas faire un tel métier, c'est trop fort, trop dur. » Il n’avait pas tort, c’était un métier très difficile mais j’aimais exercer dans ce domaine, il n’y avait rien de mieux que de sauver des vies, certes nous avions aussi droit à notre lot de décès mais nous faisions au mieux. « C’est un métier comme un autre tu sais… Parfois on a des moments sanglots, on se retrouve impliquées personnellement sans vraiment le vouloir mais… Je n’échangerais mon travail pour rien au monde. Et toi ? Tu t’épanouis dans ta vie professionnelle ? Tu inventes quel genre de produits ? »