J'sais pas pourquoi, j'sais pas comment, mais je revins à la charge avec les pistes de ski. Cette fois ci, exit la luge rouge, le rêve était passé et Maverick aussi. Cette fois ci, je couvais du regard ce beau snowboard et cette belle paire de ski, cette fois ci, j'avais envie de pire encore : apprendre à skier. Lorsque j'eus rejoins la piste, s'y trouvais déjà Alecia, je lui souris, elle me sourit, et je lui lançais « C'est cool ... que tu sois revenue » Un p'tit mot gentil pour - un peu - effacer mon cri de joie lorsque victoire, Cupidon n'annonça pas mon nom lors des premières nominations. Qu'est ce qu'elle faisait là, je ne lui demandais même pas, si elle était contente d'être revenue, c'était pour moi obligatoire. « Tu sais skier? » J'attendais presque une réponse positive, comme pour trouver un professeur pour m'apprendre, mais, étais-je prête à faire abstraction des caméras, une fois de plus, et de me ridiculiser? . « Ce serait bien que tu me dises oui et que tu me proposes de m'apprendre » Je n'attendis donc pas sa réponse, je n'attendis pas non plus le fait qu'elle me demande si, moi aussi, je savais skier, de suite, je lui avouais mon point faible et surtout, lui demandais de l'aide. Après tout, nous étions dans la même "équipe" non?

Je pense qu’il n’y avait pas plus sadomasochiste que moi, à chaque fois que je désirais faire quelque chose de nouveau je ne m’orientais pas sur un truc qui serait simple à appréhender. J’aurais pu me mettre à tricoter, soulever des poids en salle de sport, romancer mon histoire au sein de Fake Lover, en voilà des nombreuses idées mais non, à la place je préférais tenter le diable en m’attaquant à des activités qui ne me permettraient que d’être utilisée dans un bêtisier pour bien faire marrer les autres, le ski ce n’était clairement pas ma passion, j’en avais fait une fois, peut-être deux étant plus jeune et à chaque fois je m’étais pris des gamelles monumentales. Je me souvenais aussi d’avoir eu des francs moments de rigolade et au final je considérais mes escapades ski comme étant des bons souvenirs. A présent il ne me restait plus qu’à me surprendre moi-même en tenant debout sur mes skis en plein milieu d’une descente plus d’une minute, peut-être même de tourner si je croisais un arbre parce qu’il m’était arrivé de m’en prendre un en pleine face faute d’avoir réussi à m’imposer une rotation pour prendre une autre direction. Une jeune candidate me rejoignait, Luce si mes souvenirs étaient corrects. Une personne que je ne connaissais pas plus que ça et qui m’avait donné envie de lui arracher la tête à l’annonce des nominations mais je ne lui en tenais pas rigueur. « C'est cool ... que tu sois revenue » Je souriais contente qu’elle m’apporte en quelque sorte son soutien. « Merci, c’est gentil… Luce, c’est ça ? » Je regardais la descente de cette piste, probablement la plus simple et pourtant elle me paraissait déjà monstrueusement compliquée. « Tu sais skier? » Comment lui dire que je ne skiais pas mieux qu’un africain qui n’avait jamais connu la neige de sa vie ? Au final elle reprenait la parole, je pourrais donc remettre ma réponse à plus tard. « Ce serait bien que tu me dises oui et que tu me proposes de m'apprendre » Je souriais amusée haussant les épaules en répondant du tac au tac. « Je peux t’apprendre à te prendre des gamelles mémorables mais… Niveau ski je ne suis rien de plus qu’une débutante. Et encore, un débutant serait plus habile que moi ! »

Le neige, ça avait toujours été mon rêve, m'évader et filer à la montage, découvrir les joies de porter un super masque tout pourri et un beau bonnet à pompom. La joie de revenir super bronzée en février sauf le contour des yeux super moche, mais la joie quand même de frimer devant ses collègues façon "t'as vu, j'ai la tune de partir à la montagne". Malheureusement, ce n'était pas mon cas et j'avais presque enviés ces gens, non pas pour leur superbe bronzage, mais juste pour découvrir ce sport et avoir le plaisir de dire "moi aussi, je suis riche". Minable petite infirmière à Paris, j'avais quitté ma famille pour vivre dans un studio minable avec mon fiancé. Paris, pollution ... J'y avais découvert la mer grâce à Paris plage, j'y avais découvert la vie. Lorsque pour la première fois, la semaine dernière, j'avais découvert qu'on nous avait concocté cette magnifique montagne, j'étais aux anges, telle une enfant, je m'étais extasiée, j'avais sauté dans la neige, fait des roulées boulées, de la luge, des rires mais ... ça ne pouvait durer qu'un temps, il fallait montrer au monde entier qu'on était ... merdique. Alecia aurait pu être ma sauveuse, elle se rappelait à peut près mon nom et je hochais la tête pour toute réponse, il n'y avait pas lieu de dialoguer là dessus. J'étais heureuse qu'elle ne me réponde pas, j'avais un sourire énorme lorsqu'elle commença à parler mais mon sourire se figea rapidement.« Je peux t’apprendre à te prendre des gamelles mémorables mais… Niveau ski je ne suis rien de plus qu’une débutante. Et encore, un débutant serait plus habile que moi ! » Et merde, mon rêve ne se réaliserait-il donc jamais? Mon rêve resterait-il figé ici, dans cette maison? Des gamelles à en revendre, une débutante. Je masquais ma déception « Hum, j'suis pas sûre, je suis pire que débutante, et je sais même pas enfiler cette paire de ski alors ... Je suis mal barrée pour commencer à descendre les pistes, les cheveux volant au vent ... On aurait pu devenir des héroïnes du ski, on se contentera de ... Tu sais enfiler une paire de ski? » Je tentais finalement le tout pour le tout, après tout, si elle savait faire ça, elle en savait déjà plus que moi.

Je n’avais jamais été une professionnelle du ski, je ne le deviendrais jamais à moins que mon bref passage dans cette émission m’ouvre une carrière dans le domaine mais j’en doutais fort. De toute manière ce n’était pas quelque chose qui me faisait envie, très sincèrement je ne me voyais pas faire autre chose de mes journées qu’ambulancière. C’est bien simple, je travaillais avec des horaires tellement peu fixes, très flexibles qu’on me rémunérait plutôt généreusement ma partenaire et moi, nous avions le moins important pourcentage de décès sur la durée du transport et ça nous permettait ainsi d’avoir quelques avantages, signe que nous étions une équipe de choc qui savait improviser et prendre des risques lorsque le patient était sur le point de mourir et que nous étions censées le laisser mourir. Nous ne l’entendions jamais de cette oreille, nous nous autorisions à pratiquer parfois une chirurgie que l’on apprenait très tôt, des procédures qui faisaient perdre du temps une fois à l’hôpital et qui permettaient d’offrir une perspective plus réjouissante aux patients, au lieu de n’avoir que trois ou quatre minutes avant de s’enfoncer ils bénéficiaient de huit ou neuf minutes, peut-être pas une grosse différence pour vous qui ne connaissez rien à la médecine mais pour nous c’était très important. Passons, ma vie me plaisait bien comme elle était organisée, je ne vivais pas au-dessus de mes moyens, au contraire je mettais chaque mois deux-cent dollars de côté et aujourd’hui j’avais déjà une dizaine de milliers de dollars de côté, c’était déjà une belle somme au cas où un pépin arriverait d’autant plus que j’avais gagné un peu d’argent dans d’autres circonstances. Luce me rejoignait devant la première piste, tel un grand-huit une grosse descente nous appelait, elle était imposante et je ne doutais pas que je finirais rapidement sur le dos à glisser avec mes skis en espérant ne pas me casser quelque chose car ça arrivait beaucoup plus rapidement qu’on ne pouvait le croire avec la neige et les sports pourtant peu extrêmes à première vue lorsqu’ils étaient pratiqués par des débutants. J’étais un peu hésitante et je me demandais si ma camarade était plus qualifiée que moi, l’occasion d’en apprendre un peu plus histoire de ne pas avoir l’air nulle sous tous les angles. Elle me faisait rapidement entendre le contraire et je lui apprenais que moi non plus je n’étais pas vraiment une skieuse dans l’âme. « Hum, j'suis pas sûre, je suis pire que débutante, et je sais même pas enfiler cette paire de ski alors ... Je suis mal barrée pour commencer à descendre les pistes, les cheveux volant au vent ... On aurait pu devenir des héroïnes du ski, on se contentera de ... Tu sais enfiler une paire de ski? » Je souriais amusée m’approchant d’elle après avoir retiré mes skis, je m’agenouillais dans la neige préparant les deux skis. « Tiens, tu dois mettre ton pied là ! » J’indiquais un endroit sur le premier ski.

De ma vie, jamais je n'avais fais autre chose que vivre comme les autres l'entendaient. J'avais suivie des études de médecines parce que mon père me l'avait demandé, j'étais sortie avec des types parce qu'ils me l'avaient demandés, j'avais frappé une fois ma sœur parce qu'elle me l'avait demandé. Je pouvais être naïve, trop gentille, je ne mesurais pas forcément toutes les conséquences de mes actes et j'en étais navrée pour moi même. Alors, lorsque vint ma période de rébellion, j'avais décidé d'abandonné les études de médecines supérieurs pour me contenter de devenir infirmière, j'avais quitté Paris pour me contenter de m'éloigner de ma famille, j'étais sortie avec un type, une espèce de bad boy parce que je l'avais décidé et j'étais venue ici, pour défier l'ordre de mon fiancé. Il me l'avait interdit, il ne voulait pas que je voyage, que je découvre le monde, mais je n'avais qu'une envie : déployer mes ailes. A presque vingt-six ans, j'avais envie d'aventure et me rendre compte que j'avais passé un quart de ma vie à répondre aux exigences des autres m'avaient anéantie. Aujourd'hui, j'avais décidé de skier, et même si je ne savais pas mettre une seule paire, même si je ne savais pas comment tout ça se passait, j'étais bien décidé à réaliser ce rêve étrange. Je trouvais cela facile, à la télévision, il suffisait de mettre le cul en l'air et laisser le vent nous pousser par ce je sais quel miracle scientifique. Il suffisait ... Je l'avais cru.
Alecia me montrait comment procéder pour mettre les skis, chose déjà un poil compliqué, je n'imaginais pas encore la suite. J’exécutais ses recommandations et très vite, fut chaussée de skis, j'étais fière, me relevant un sourire aux lèvres, regardant ma partenaire, je demandais « Et maintenant, comment on descend? » J'avais envie d'extrême et j'étais certaine d'en trouver en pratiquant ce sport, même filmée et prête à me ridiculiser devant des millions de téléspectateurs.

Je pensais pouvoir descendre et me casser la figure dès maintenant mais, avec l’arrivée de Luce une nouvelle perspective s’était offerte à moi. Nous étions toutes les deux pires que des novices, la seule différence c’est que je connaissais légèrement plus le ski qu’elle pour en avoir fait quelques fois par le passé, ce n’est pourtant pas ça qui me permettrait de ne pas me prendre les pieds dans la première botte de neige qui dépasserait et de m’étaler comme une crêpe. En réalité je me moquais d’avoir l’air stupide, je rigolais toujours de mes cascades dignes des meilleurs films d’action. Okay c’était nettement moins impressionnant mais ça faisait volontairement sourire et parfois même rigoler. Avec Luce je me voyais bien finir à genoux mais pas toute seule, la jeune femme se trouverait à mon avis dans la même situation que moi et nous allions bien rire toutes les deux. Il n’y avait rien de mieux pour se rapprocher et nouer un début de lien, je peux vous l’assurer. Je quittais mes skis pour lui montrer comment les enfiler, il est vrai que ça n’était pas aussi facile que dans les films à première vue mais une fois qu’on maitrisait le processus il n’y avait rien de bien sorcier. Je patientais quelques minutes m’assurant qu’elle était bien installée sur ses skis pour rejoindre les miens en toute tranquillité. « Et maintenant, comment on descend? » Je souriais amusée lui adressant un regard à la limite d’être pris pour un défi. « Tu pousses sur tes deux espèces de cannes et tu pries pour ne pas finir trop vite la tête dans la neige ! » Je gloussais me préparant à dévaler cette descente, si je tenais une ou deux minutes droite j’aurais déjà fait un grand pas je peux vous l’assurer. « Prête ? »

Ils étaient enfilés, ils me tenaient les jambes et je tenais mon équilibre grâce aux bâtons de ski, je regardais Alecia enfiler les siens et me regarder, me demandant si j'étais prête. Prête était un grand mot, prête était une sorte d'état que je n'étais jamais sûre d'avoir atteint, mais je savais que je pouvais me lancer, que je pouvais franchir cette étape du grand saut. Elle m'expliqua rapidement comment m'élancer, et si je n'y arrivais pas, si je tombais directement, je soupirais, on ne refaisait pas le monde avec des si, je hochais la tête et sans même attendre son feu vert, levant les bâtons, je tentais d'avancer grâce à eux et ... soudain, je sentis le vent siffler dans mes oreilles, les cheveux s'envoler. Prise d'une panique incontrôlée, je fermais les yeux. La conséquence de mon acte fut quasi immédiate, je tombais à la renverse. Je restais un instant là, sans bouger, avant d'ouvrir les yeux et de m'assoir, admirant le nombre de mètres que j'avais pu faire avant de chuter. Je regardais Alecia qui n'avait pas encore vraiment bougeait et là, c'était la honte. J'avais cru descendre à toute vitesse la pente, j'avais cru être arrivée en bas et je n'avais pas fais un seul mètre, je n'avais pas tenu sur mes skis plus de trente secondes que déjà, mon cul était au sol. J'explosais alors de rire. « Non mais, c'est super impressionnant vu comme ça ! » Je tentais de me justifier. « Essaies un peu toi » Je la mettais au défi d'aller plus loin que moi, je la mettais au défi de s'élancer à son tour.

Je proposais à Luce les conseils qui m’avaient été donnés il y a de cela quelques années, autant vous dire qu’ils n’avaient pas été très utiles mais que ça permettait parfois de tenir plus de trois minutes avant de perdre l’équilibre et de finir sur le sol. Sans même prendre le temps de me répondre la petite blonde s’élançait, enfin, c’est à la base ce que je croyais qu’elle faisait mais après une vingtaine de secondes je ne pouvais que constater que pour un premier essai c’était un échec cuisant, elle s’écrasait simplement dans la neige après avoir pris un air à la fois amusant et flippant, comme si elle était en train d’avoir une vision en plus d’être en transe. Vous voyez le genre ? Passons, elle ouvrait les yeux et je pense qu’à cet instant le constat était aussi difficile pour elle que pour moi, elle n’avait pas fait le chemin qu’elle pensait avoir traversé. Quel dommage, il ne fallait pas qu’elle perde espoir pourtant. Je la regardais ne pouvant contenir un sourire moqueur, je n’étais pas sympa mais qui n’aurait pas eu envie de rire à ma place ? Personne. « Non mais, c'est super impressionnant vu comme ça ! » Je gloussais restant à ma place, je ne voulais pas prendre le risque de tomber en avançant un peu plus pour lui venir en aide. Moi, mauvaise sauveteuse ? Je ne vous le fait pas dire. « J’imagine… » Disais-je ironiquement sans être pour autant méchante, j’étais plus amusée qu’exaspérée après tout. « Essaies un peu toi » Je souriais, elle me défiait ? Parfait. « Très bien… L’artiste entre en scène ! » J’étais autant ironique que tout à l’heure, vive l’artiste si vous voyez ce que je veux dire. Je me laissais aller et démarrait à une vitesse déjà bien trop rapide par rapport à d’habitude dans la descente, je tenais une minute, peut-être une bonne minute trente avant de faire ce que certains appelleraient une figure d’acrosport, une roulade avant puis quelques glissades sur le dos. Je n’étais définitivement pas l’artiste du moment. « Et voilà le travail. » Je faisais preuve d’énormément d’autodérision, morte de rire en me voyant ainsi installée en plein milieu de la piste.