Aujourd'hui, c'était séance intensive de cardio-training à la salle de sport. Car depuis que Mado était entrée dans le nid, elle avait finalement passé plus de temps à chercher à se détacher quelque peu du sport qu'à en faire. Et si cela aurait assurément un coté très logique pour beaucoup, à ses yeux, ça n'était pas loin d'être une catastrophe de grande envergure. Parce que si elle commençait à se reposer sur ses lauriers et que ce genre d'activités ne passaient finalement plus qu'au second plan pour elle, mais où irait bien le Monde ? Que se passerait-il lorsqu'elle engloutirait un yaourt au chocolat ? Et bien, elle grossirait pardi. Et grossir, olala, ça n'était simplement pas envisageable pour quelqu'un d'aussi physique que la française. Alors non, elle n'allait certainement pas continuer à mettre toute sa ligne en péril simplement pour philosopher un peu. De toute manière, elle avait toujours été quelqu'un de plus physique que mental, parait-il. Elle ne se fit en tout cas pas prier pour se rendre en salle de sport dès le début de l'après-midi, bien décidée à reprendre un rythme aussi soutenu qu'avant d'arriver ici. Parce que, mine de rien, quelques petits jours sans réellement faire d'exercice avait bien failli anéantir son rythme. Peut être était-ce même pour cela, finalement, qu'elle trouvait moins facilement le sommeil ? Parce qu'elle se fatiguait moins, c'était indéniable. Il fallait donc réagir maintenant. La jeune femme n'avait donc pas tardé à grimper sur une machine et à suer sang et eau pour tâcher de se remettre pleinement dans le bain. Mais tandis qu'elle tâchait de ne plus penser à rien, elle en vint à amèrement regretter de n'avoir pas pensé à s'accompagner de son casque audio ... En effet, une voix se fit entendre et sembla s'adresser à elle. Une voix qui la traitait de feignasse et semblait la sommer d'accélérer. Hm, vraiment ? Genre, vraiment de chez vraiment ? Parce que, soyons clairs, durant son petit tour d’horizons des candidats, Mado ne se souvenait pas avoir repéré quelqu'un de suffisamment téméraire pour oser ce genre de propos. Tournant la tête pour dévisager sa camarade, elle eut à faire à une rouquine presque inconnue au bataillon. Presque, parce qu'elle n'était tout de même pas sans lui rappeler quelqu'un. Pour le nom, par contre, elle repasserait. La rousse reprit alors la parole, face à une Mado décontenancée. Maintenant, elle la traitait de ... hm ... limace toute molle, c'est bien ça ? Intéressant ? Avec une plaisante référence à Quasimodo, également. Bien, bien. Elles allaient être copines, toutes les deux. Descendant alors de son enfin, Mado s'approcha de sa camarade. Le regard dur, les poings serrés, tout laissait penser que cette fille vivait ses dernières secondes. Tout, sauf peut être cet étrange sourire qui venait de gagner les lèvres de la française. Un sourire peu habituel, mais riche de sens. « Si tu veux mon avis, tu ferais une excellente entraineuse » commenta-t-elle alors, les mains posées sur les hanches pour reprendre son souffle. « Mais pour l'avoir moi-même été à une époque, je peux te garantir que ça n'a rien à voir avec les profs d'eps de la secondaire, qui se foutent en jogging juste pour faire genre, hein. Voilà pourquoi je te propose de voir si tu es aussi douée pour suer que pour encourager. » Finalement, ça devait être ça sa punition : devoir tester la machine à son tour, histoire de voir s'il était aussi facile d'aller plus vite, avec plus d'énergie, en se redressant, pour n'être ni associée à une limace toute molle, ni à Quasimodo, hm.

Qu'on se le dise, Mado s'amusait de sa réputation. Son sale caractère lui avait valu d'avoir fait "mauvaise impression" auprès du public et des candidats, et sans aller jusqu'à dire qu'elle portait beaucoup d'intérêt à cette distinction, il est vrai qu'elle avait tendance à se dire qu'elle pourrait tout aussi bien en jouer, l'utiliser pour voir ce que cela serait susceptible de provoquer chez ses camarades. Elle ne se pensait ni redoutable ni effrayante, mais un poil impressionnante tout de même. La preuve, cette jolie rousse avait du avoir l'une des frousses de sa vie lorsqu'elle l'avait vu avancer vers elle avec son air déterminé et laissant légitimement penser qu'elle lui ferait la peau. Et peut être, oui peut être que si Mado avait véritablement été de mauvaise humeur et qu'elle avait estimé que sa camarade avait poussé le bouchon un peu trop loin, elle se serait permise de la corriger. Mais là, bon, ça restait bon enfant, gentillet, et elle ne prenait clairement pas ce genre de petites piques pour elle. Elle ne lisait ni animosité ni sadisme chez sa camarade, alors elle supposait simplement que celle-ci avait voulu tenter une petite provocation, sans trop savoir comment s'y prendre, un peu maladroitement donc, peut être pour voir ce qu'il se passerait, ce qu'elle deviendrait, ce que Mado ferait d'elle et de ses cheveux roux. Rien, évidemment. Elle n'allait pas se prendre pour Jean-Baptiste Grenouille et lui faire la peau, tout de même. Surtout pas pour si peu, c'était certain. Mais elle opta tout de même pour une attitude qui avait du laisser penser, au moins l'espace d'un très court instant, qu'elle allait entrer dans une colère noire et faire un massacre. Alors que non, justement, elle se contenta d'insinuer que sa camarade ferait une bonne entraineuse. C'était d'ailleurs plutôt vrai, même s'il est probable qu'elle ait principalement dit cela à défaut de lui dire autre chose, hm. Parce qu'en soi, il n'était pas certain que Mado s'entourerait d'une entraineuse comme elle, mais clairement, oui, elle sentait chez elle un net potentiel. Absolument. Potentiel qu'il lui fallait d'ailleurs accroître, et il n'y avait pas trente-six mille façons de le faire. La clé du succès, c'était la polyvalence. Être une entraineuse capable de motiver, c'est bien. Être une entraineuse capable de motiver ET de montrer l'exemple, c'est mieux. Alors, pourquoi ne pas permettre à la rouquine de se lâcher sur cette machine de cardio, hein ? Elle pourrait ainsi montrer ce qu'elle valait en cela également, et qui sait, peut être serait-elle repérée par Madonna, qui l'engagerait ? Sauf qu'attendez une minute, à la réponse de la rousse, l'on pourrait presque croire qu'elle ... refusait de se plier à la volonté de Mado ? Genre, pour de vrai ? Impossible ... Après être passée si près de la mort une fois, comment pouvait-elle chercher après elle à nouveau ? Cette fille était-elle folle ? Cette fille était-elle sado-masochiste ? « Non non non, je ne peux pas te laisser dire ça. Parce que, vois-tu, c'est pour toi que je propose ça, hein. Ne pas exceller en cardio-training, c'est avoir raté sa vie, ni plus ni moins. » Nul doute que beaucoup vivaient très bien sans, mais voyez-vous, Mado donnerait cher pour voir cette demoiselle à l’œuvre, sur cette machine, pour lui montrer qu'il n'était pas aussi facile de le faire que de le dire. Très cher, même.

Mado n'était pas aussi monstrueuse qu'on pouvait bien le croire. Après tout, elle n'avait pas bouffée la rouquine, ni ne l'avait violentée dans l'unique but de lui faire faire du sport, hein. Alors qu'elle aurait tout à fait pu, oui, c'était évident. Elle avait d'ailleurs pensé user de la force pour se faire comprendre, au moins un quart de seconde, avant d'avoir finalement décrété que ça ne l'avancerait pas, et que de toute manière, sa camarade lui semblait suffisamment maligne pour être capable de s'échapper de ce genre de plans sans grande difficulté. Donc non, elle préférait continuer à converser avec cette demoiselle et voir jusqu'où cette dernière était capable d'aller pour échapper à son terrible destin. Parce que bon, dans l'esprit de Mado, il était certain que sa camarade finirait tôt ou tard par grimper sur cette horrible machine et par y suer bien comme il faut. Elle n'avait simplement pas l'intention de l'y forcer. La traumatiser n'était après tout pas le but, qu'on se le dise. Sauf que bon, pour le moment, elle ne semblait pas franchement disposée à coopérer. Ce qu'il y avait même d'assez amusant dans sa manière de procéder, c'était que cette jeune femme s'amusait perpétuellement à inverser les rôles, prétendant que c'était à Mado de continuer ses exercices, alors que bon, disons qu'elle n'avait pas franchement besoin de continuer à ce rythme, étant donné qu'elle venait quand même de se donner suffisamment pour que personne n'ose remettre en question son implication et ses efforts, n'est-ce pas petite rouquine un peu trop téméraire. Non mais sérieusement, il fallait - mais vraiment - que cette dernière fasse l'effort de s'essayer au cardio-training. Parce que oui, comme l'avait si bien dit Mado, il le fallait si elle ne voulait pas que l'on considère qu'elle ait raté sa vie. Parce que c'était ça l'idée, oui. Alors si elle voulait pouvoir prétendre que sa vie était complète, qu'elle n'avait rien à regretter et si elle ne voulait avoir nul goût amer en bouche au moment de trépasser, il lui fallait impérativement monter sur cette machine et prouver qu'elle pouvait faire autre chose que parler, simplement parler. Elle disait être d'accord avec l'idée. Bien. Mais alors, pourquoi s'entêtait-elle à dire qu'il fallait que ce soit Mado, et non elle, qui grimpe sur l'engin ? Est-ce qu'elle avait vraiment compris l'idée ? Est-ce qu'elle ne se foutait pas un tantinet de sa gueule au final ? Honnêtement, Mado commençait à se poser quelques questions. « T'es pas croyable » s'esclaffa la française, complètement hallucinée. Non, elle n'en revenait pas. Et non, elle ne lui tenait pas rigueur de son attitude. Bien au contraire. Cette jeune femme l'amusait, en fait. Son audace, son toupet ne pouvaient que séduire Mado. Même si bon, elle n'était pas non plus sortie d'affaire hein. Non, clairement pas. Elle obtenait juste un sursit. Oui voilà, un sursit. Parce que maintenant, la rouquine lui parlait de ses cheveux, comme s'il était naturel de s'y intéresser d'un seul coup, et comme si s'il n'était pas flagrant qu'elle essayait juste de passer à autre chose hm. En plus, maintenant, elle lui tripotait les cheveux. Vraiment pas gênée, celle-là. « Je les aime bien aussi. Et c'est ma couleur naturelle, oui. Toi, par contre, j'ai un petit doute. » Ses cheveux étaient quand même vachement roux, et pour n'avoir pas fréquenté beaucoup de rouquines dans sa vie, Mado supposait qu'elles étaient peu nombreuses, et donc, que sa camarade avait pu se teindre les cheveux. Mais peut être était-elle une vraie rousse, et si tel était le cas, tant mieux pour elle. « Et si ... » Suspense, suspense. Mado allait sortir un truc génialissime, oh oui bon dieu, elle le sentait. « Et si on montait chacune sur une machine, pour chacune se muscler, pour chacune motiver l'autre et pour chacune impressionner les téléspectateurs ? » L'idée du siècle, donc, évidemment. Et c'est là qu'elle en vint à se demander comment, oui vraiment, comment elle avait pu ne pas y penser avant ? Là, elle se trouvait brillante. Et si sa camarade trouvait le moyen de refuser, et bien, elle allait lui tirer les cheveux. Nul doute qu'elle n'oserait pas prendre le risque.

Il était rare, franchement rare, que Mado soit impressionnée. Généralement, peu de choses, mais aussi peu de personnes étaient susceptibles de lui faire un tel effet. Et pourtant, elle devait reconnaitre être pour le moins impressionnée par cette demoiselle-ci. Oui enfin, ne nous emballons pas hein, c'était surtout le culot, l'audace de cette jeune femme qui la stupéfiaient, en soi. Non pas qu'elle n'aimait pas distribuer maints compliments, mais si, un peu quand même hein. Donc disons qu'elle restait simplement assez impressionnée par l'attitude téméraire de cette jeune femme, par le courage dont elle faisait effectivement preuve depuis le début de cette conversation, elle qui n'en finissait plus d'essayer d'échapper à ce qu'elle semblait décidément considérer comme une torture. Alors que bon, faire du sport, ça avait énormément d'avantages aussi, si bien que Mado ne pensait plus à la fatigue physique que cela occasionnait depuis bien longtemps. Oh oui, elle, elle avait définitivement adopté le sport, c'était certain. Quel dommage qu'il n'en soit vraisemblablement pas de même pour sa jolie camarade. Mais sans doute celle-ci laissait-elle ses appréhensions, voire ses traumatismes, la freiner. Car elle avait peut être connu quelques expériences sportives déplaisantes et qui l'empêchaient aujourd'hui de monter sur une malheureuse machine de cardio-training ... Mado gardait ça dans un coin de sa tête, sait-on jamais que ça puisse la conduire quelque part, hm. Il était clair en tout cas que si la rouquine n'y mettait pas un tant soit peu du sien, qu'elle ne faisait pas preuve de plus de bonne volonté, ça n'allait pas pouvoir aller, hein. Et probablement que ça lui allait très bien, à elle. Sauf que Mado, en grande bornée qu'elle était, n'en démordait pas : il fallait que sa camarade fasse du sport, il fallait qu'elle le fasse aujourd'hui, et il fallait qu'elle soit elle-même présente pour s'en faire une opinion. Peut être aurait-elle l'occasion d'en rire, après tout. Mais bon, ça, elle allait éviter de le laisser entendre, des fois que ça bloque d'autant plus sa camarade, hm. En attendant, celle-ci semblait plus intéressée par les cheveux de Mado que par le cardio-training. Pfff, ah il est certain que c'était moins épuisant de parler tifs que de se remuer sur une machine, hein. En tout cas, Mado avait dit vrai, ses cheveux bruns étaient naturels. En soi, elle voyait mal comment quiconque pouvait en douter, mais bon ... Et sa camarade ? La rousse, avait-elle teint ses cheveux ? Ou bien les avait-elle eu en cadeau de Mère Nature ? Visiblement, ils étaient naturels eux aussi. « C'est tout à ton honneur » annonça-t-elle sincèrement, dans un vague sourire. Bon, assez parlé cheveux, le plus important restait ici le sport, hein. Donc Mado revint naturellement à la charge, pas du tout décidée à lâcher l'affaire, c'est certain. Mais comment revenir sur ce fâcheux sujet sans braquer la jeune femme, hm ? Délicate affaire que celle-ci. Et visiblement, il avait suffi qu'elle évoque le public et un possible désir de l'impressionner pour que sa camarade y voit l'occasion idéale pour refuser une nouvelle fois son offre. Merde, ça n'était visiblement pas une carte à jouer avec elle, hm. « Même pas une grand-mère adorée ou un petit copain ? Imagine-les, stupéfaits, époustouflés, éblouis par tant d'efforts, par tant de détermination ... Fiers, si fiers ... » Ouais, elle tentait le tout pour le tout pour convaincre sa camarade de monter sur cette fichue machine. En plus, elle lui avait proposé de l'y accompagner, ce qui était plutôt gentil de sa part en soi. Si vraiment sa camarade restait butée comme ça, clairement, Mado allait devoir sortir les crocs. Et personne ne voulait ça, oh non, personne. Surtout pas cette jeune femme qui, merde alors, trouva à nouveau le moyen de changer de sujet. Maintenant, il était question d'Ezra. Le truc qui n'avait rien à voir avec le reste, quoi. Ah non mais elle changeait de sujet comme de paire de chaussettes, celle-là, ça paraissait évident. « Pas cent fois, mais presque. Et oui, Ezra et moi nous entendons bien. Je suppose que si nous avions pour habitude de nous bouffer le nez, nous ne serions jamais venu ici tous les deux. Du moins, moi je n'aurais jamais pu m'y résoudre. » Déjà qu'elle devait se coltiner le partenaire le plus casse-couilles du monde, ça n'était pas pour s'encombrer d'un frère qu'elle aurait pu déprécier. Heureusement, ça n'était pas le cas. Mais sa camarade devait s'en douter. Et pour cause, celle-ci enchainait les feintes simplement pour gagner un peu de temps. Sauf que ça ne prenait plus. Non, maintenant, Mado allait passer aux choses sérieuses. Alors elle saisit ni plus ni moins sa camarade par la main et la conduisit directement face à l'engin qu'elle ne voulait décidément pas approcher. « Allez, grimpe. Je suis presque sûre que tu vas survivre. Parce que non, au cas où tu te poserais la question, je ne renonce jamais. » Et c'était vrai pour cela comme pour beaucoup d'autres choses à vrai dire. En tout cas, elle allait vraiment devenir méchante, si sa camarade la contrariait nouveau. Ça allait chier, cette fois, oh oui.

Spoiler:

Spoiler:

Désespérante. Cette rouquine était désespérante. Tellement, que Mado serait bientôt forcée de déclarer forfait. Elle, qui n'avait jamais abandonné, qui n'avait jamais renoncé, et que la simple idée de laisser tomber rendait malade. Elle, qui estimait avoir beaucoup pris sur elle pendant les dernières minutes, notamment au moment où sa camarade l'avait dérangé dans son cardio-training en ne manquant pas de prétendre qu'elle était molle du genou et complètement à la ramasse. De même, elle avait fait preuve de patience, lorsque la rouquine avait, par plusieurs fois, refusé de se plier à sa volonté. D'habitude, Mado obtenait toujours ce qu'elle désirait. Toujours. Là, elle l'avait en plus proposé gentiment, au point d'être même allée jusqu'à se proposer d'accompagner sa camarade, d'effectuer cette séance de cardio-training toutes les deux, pour se soutenir moralement. Mais non, rien n'y faisait, sa camarade semblait être plus bornée encore qu'elle l'était, et tout ça allait vraiment finir par lui provoquer de l’eczéma. Parce que oui, les contrariétés, ça ne lui avaient concrètement jamais réussi. Prise de poids, allergies, troubles respiratoires, paralysies faciales, crises de démence, possession maléfique ... tout était à craindre à présent. Tout. Les choses allaient devenir atroces, elle le sentait. Et tout ça parce que sa camarade était trop feignasse pour monter sur une foutue machine ! Rah, si elle pouvait, elle l'y ferait monter de force. Mais bon, Mado n'était pas pour la violence, de base, et se voyait mal maitriser parfaitement sa camarade, surtout si celle-ci se débattait aussi bien qu'elle lui tenait tête. La petite peste. Voyez comment elle parvenait à ruiner les maigres espoirs qu'il avait pu rester à Mado. Elle ne voulait donc impression personne, cette fille ? Aucun proche ? Aucun ami ? Aucun mec ? Personne de chez personne ? Merde. Mado était probablement tombée sur la seule nana du nid à n'être pas venue pour craner. Dans un sens, tant mieux pour elle, et ça la rendait plus intéressante que bien des grognasses ici, mais bordel, cette situation faisait drôlement chier Mado, qu'on se le dise. Celle-ci ne manqua d'ailleurs pas de soupirer, comme elle avait déjà du le faire quelques dizaines de fois depuis le début de cette entrevue. Blasée, elle était. Vexée et frustrée aussi, c'était certain. Et bien qu'elle tâche activement de ne pas trop le montrer, Mado était présentement au bord de la crise de nerfs. Oui, oui. C'était critique, ah oui, vraiment. Elle se doutait pourtant que sa camarade n'aurait pas le moins du monde mauvaise conscience de l'avoir mise dans un tel état. Peut être parce qu'au fond, elle n'en saurait rien, ouais, admettons. Mais quand même, elle s'amusait avec sa patience là, et c'était mal. Elle disait donc ne jamais renoncer non plus, et là, Mado fronça les sourcils. Pff, mais pff quoi. Elle pourrait faire un effort, non ? Non ? Okay, grand bien lui fasse de rester bornée hein. Vraiment, grand bien lui fasse. « T'es vachement casse-pied, quand même » nota-t-elle, comme si personne ne s'en était jusqu'à présent rendu compte. Parce que oui, naturellement, elle comptait sur toute personne susceptible d’assister indirectement à cette scène pour la soutenir. C"était elle qu'on devait plaindre dans cette histoire, c'était certain. « Okay. Ça suffit. J'abandonne. T'as gagné. » Mado était contrariée, mais cela se voyait forcément. D'où ses sourcils toujours fermement froncés et ses envies de meurtre durement refoulées. « De toute façon, tu ne m'as pas l'air bien dégourdie comme nana » reprit-elle, amère et rageuse. Elle aurait pu lui tirer la langue, mais à vingt-six ans, disons qu'elle allait peut être éviter. Ça n'était pas la peine d'en rajouter. « Quelque chose de plus intéressant, dis-tu ? Admettons. Mais quoi ? Parce qu'on pourrait se contenter de converser, faire connaissance, se découvrir, tout ça, mais ... comment dire ... je doute que ce soit franchement "intéressant", quand même. » Oh oui, elle l'avait mauvaise. Et donc, sa camarade pouvait aller se faire voir, maintenant. Chacune son tour, oui, exactement.