Carmen, Hyram, la chambre sera votre lieux ce soir. Une table, deux chaises, des bougies, des pétales de roses étalées sur le sol, une musique romantique, un menu savoureux. Ce soir vous dégusterez : écrin fantaisie saumoné à l'aneth, magrets de canard au gingembre, Tartare de fruit au coquelicot accompagnée d'une petite fondue au chocolat. Grands crus et champagne sont bien évidemment de la partie. Des tables ont été disposées ça et là dans le château offrant une intimité sans égale aux couples. La lumière a été tamisée, vous serez éclairée à la lumière de bougies, un serveur vous apportera plats et boissons mais occultez le puisque ce soir c'est votre soir. L'amour frappe à votre coeur sachez le saisir.

Cupidon vous souhaite une bonne soirée.

Ce soir serait leur soir. Lorsqu'il avait été décidé que Carmen dînerait en tête à tête avec le français, la réaction n'avait pas été des moindre. Chatouilles dans le bas du ventre, sourire niais de jeune adolescente, crampes à l'estomac et nœud dans la gorge, tout était réunit. Aussi, il avait fallu un très long moment à la l'italienne afin de choisir la robe adéquate parmi la bonne vingtaine qu'elle avait eut la brillante idée de mettre dans sa valise. Sans lésiner sur les moyens, Carmen avait prit de tout. Toutes les formes, toutes les couleurs et tout les styles. Les vêtement s'entassèrent sur son lit à une vitesse fulgurante jusqu'à e que l'évidence ne lui saute aux yeux. Cette petite robe noire, courte et classique. Certaine qu'Hyram serait satisfait de ce classicisme et cette simplicité, la blonde termina cette mise en beauté à l'aide d'un rouge à lèvre carmin avant que l'heure ne sonne le début de cette saint valentin qu'elle savait pleines de surprise. D'une part parce qu'elle la partagerait avec le candidat. Il ne la laissait pas indifférente et l'italienne l'avouait sans crainte. Sa retenue, sa poésie et son sérieux faisait de lui un homme charmant, extrêmement mystérieux et Carmen était désireuse d'en apprendre plus. Le comprendre et l'apprivoiser. Et puis, leur précédente conversation ne l'avait pas laissée de marbre et la blondinette comptait bien creuser et gratter jusqu'à atteindre qui sait, peut-être son cœur. Ses talons claquèrent sur le parquet de la deuxième chambre, celle-la même dans laquelle elle s'était préparée. Personne. Très peu encline à la ponctualité, elle ne releva pas. Ils avaient, de toute manière, toute la nuit pour se découvrir. Ses prunelles claires embrassèrent la pièce totalement transformée et le cœur de la belle fit un bond tant la beauté du lieu lui paru irréelle. Doucement, elle se fraya un chemin à travers les pétales de roses, en attrapa un au passage par pure superstition et s'installa à la table leur étant réservée. Il ne fallu pas plus de quelques secondes au français pour la rejoindre. En un sourire, Carmen se retrouva face à lui, déposant des mains délicates sur son costume, remettant sa cravate droite, déposant un baiser sur sa joue, très (ou trop) près de la commissure de ses lèvres. « Quelle classe. » lui murmura-t-elle simplement, mutine, incapable de cacher la joie de partager cette soirée en sa compagnie.

A l'annonce du thème du soir, j'avais déjà quelques appréhensions. J'ai toujours détesté la Saint-Valentin. Il n'y a rien de plus cul-cul et de vulgaire. Ce n'est pas la fête qui m'enchante le plus. Je n'ai pas besoin de ce genre de fête pour avouer mes sentiments à une femme. Je n'ai jamais eu recours à ce genre de subterfuge de toute mon existence. Je suis anticonformiste, aux bords de la marginalité à bien des égards. Je suis un romantique dans une certaine mesure. Dans ce cas-ci, ça ne vaut même pas la peine. Si nous prenons ça au sens strict historique, nous célébrons tout de même un martyre. Cette fête, c'est le summum du mauvais goût. Des peluches, des fleurs, du chocolat : des clichés surfaits et sirupeux qui m'insupportent. J'essaie de prendre sur moi. Ce n'est pas facile pour moi de masquer certaines de mes convictions. En revanche, passer une soirée en tête-à-tête avec Carmen ne me dérange guère. Au contraire, c'est une des seules raisons qui me pousse à outrepasser mes aprioris concernant cette frénésie autour de la Saint-Valentin. Peut-être que j’intellectualise trop. Cela ne m'empêche pas d'être nerveux pour autant. Tout ceci pour dire que ça me mets une pression supplémentaire. Vais-je être la hauteur de ses espérances ? Vais-je rester un minimum correct en sa présence ? Toutes ces interrogations suscitent chez moi cette angoisse perpétuelle de l'échec. Avec le temps, je pensais que ça serait amoindri. Non, je la ressens encore. Notre rapprochement ne facilite pas les choses pour moi. J'aimerai mettre une certaine distance entre nous. Mais c'est plus fort que moi. Les élans du cœur sont incontrôlables. Pendant que je me torture l'esprit à comprendre la nature de mon attirance pour elle, j'ai opté pour un costume sombre de préférence. A la fois sobre et classique. Sans oublier la cravate, bien sûre. J'arrive dans la pièce. Elle était là, splendide de la tête aux pieds. Je n'ose la reluquer davantage. Ce qui devient très vite impoli, excédant les dix secondes. Elle s'approche de moi. Ses mains effleurent ma veste, puis remettent en place une cravate rebelle. Ses lèvres viennent se déposer sur ma joue, frôlant presque les miennes. Je la dévisage, un peu perturbé par son geste. Elle me complimente. Je rétorque enfin : - Je te retourne le compliment. Je me saisis de sa main que je baise délicatement avant de lui tendre une rose. Non, je ne suis pas venu les mains vides. J'ai décidé de jouer le jeu pour une fois.

Hyram était renversant, comme à son habitude. Son costume lui donnait l'air d'un homme d'un homme important et cette hypothèse tombait rudement bien puisque aux yeux de Carmen, le français l'était devenu. Malgré cette spontanéité qui la caractérisait depuis – certainement – son plus jeune âge (Carmen ayant toujours été très spontanée, vivant au grès des envies de son corps et de son esprit sans que jamais elle ne réfléchisse d'avantage) elle sentit une certaine réticence dans les gestes – malgré tout très doux et maîtrisés – du candidat. Bien qu'elle ne le connaisse pas d'avantage, la belle ne pouvait nier s'être attachée peut-être plus que de raison à cet homme et se rendait alors compte que la réciproque n'était peut-être pas vraie. Fronçant légèrement les sourcils et affichant une moue quelque peu boudeuse sur son visage, elle se recula. « Je te retourne le compliment. » « Quel d'engouement » répondit-elle du tac au tac, mi-mutine, mi-sérieuse. Peut-être réussirait-elle ainsi à engager une conversation qui ne se limiterait pas à quelques mots seulement, bien que ceux-ci sachent lui faire plaisir. La rose qu'il lui tend eut le don de raviver la flamme précédemment quelque peu éteinte. Les joues de Carmen s'empourprèrent légèrement. Son sourire s'élargit et ses yeux pétillèrent. A l'image d'une enfant de cinq ans recevant ses cadeaux de Noël, Carmen eut l'air d'un bambin complètement conquis. La fleur prit le chemin de son nez et doucement, elle huma son parfum exquis, ne quittant pas le français des yeux. De ce regard perçant, quelque peu provocateur mais incroyablement sensuel. Carmen était comme ça. Il ne lui fallu pas grand chose pour succomber à nouveau et oublier les quelques méandres passées. Pas grand chose pour que son regard et son visage ne s'illuminent de nouveau. Enjouée, la belle prit la main du candidat afin de l'amener jusqu'à la table dressée en leur honneur. Quelque chose d'incroyablement coquet, intimiste et sexy où elle prit place rapidement. Tout en posant la rose sur ses genoux, Carmen le fixa, longuement. Sans une parole, d'un regard perçant, cherchant à l'analyser en profondeur avant de, finalement, briser ce silence incroyablement pesant. « Qui es-tu réellement, Hyram ? » demanda-t-elle de but en blanc. Ils ne se comprenaient pas, c'était indéniable. Alors pourquoi continuait-elle a ressentir cette attraction lorsqu'il se trouvait à quelques mètres d'elle ?