Une nouvelle matinée au sein de ce chalet. Depuis quelques jours, une nouvelle routine s’était mise en place. Un nouveau traintrain. Ce changement, il ne l’avait pas vraiment voulu, ni demandé. Non, pas vraiment. Il n’avait pas non plus demandé que sa partenaire de jeu l’abandonne. Oui. L’abandonne. Il avait l’impression qu’Emmeline l’abandonnait au fur et à mesure des jours qui passaient. Elle le fuyait. Elle voulait s’échapper. S’échapper de quoi ? De lui ? De sa présence ? C’était ridicule. Il n’y avait rien eu entre eux. Ah si. Un baiser. Juste un baiser. C’était tout. Un tout petit baiser. Un baiser de rien. Il n’aimait pas cela. Cette impression d’être délaissé. Heureusement qu’Ezra était là. C’était un mal pour un bien, cette histoire. Il passait de plus en plus de temps avec lui. Peut-être un peu trop. Oh non. Lui ne trouvait pas. Cela faisait déjà plusieurs jours. Plusieurs jours qu’il n’avait pas croisé Emmeline, ni même échangé quelques mots. Et qui sait ô grand combien il avait envie. Envie de lui parler. Pour tirer cette affaire au clair. Pour comprendre. Pourquoi cette réaction ? Il eut pendant un moment tenté de la chercher. Mais en vain. Puis il n’avait pas envie de parcourir tout le chalet. Il la croiserait bien… au bout d’un moment. Après tout, le chalet n’était pas si grand que cela. Il tomberait bien sur elle, un jour ou l’autre. Ou peut-être pas. Emilien était donc parti dans le cellier à la recherche de nourriture pour son petit-déjeuner. Il était dix heures passée, et il n’avait toujours rien dans le ventre. Il tourna le dos à la porte, ne faisant guère attention au passage qu’il pourrait bien avoir. A vrai dire, personne n’entrait… jusqu’à elle. Il se redressa, observant alors Emmeline. Il resta un peu surpris face à cette… retrouvaille. Enfin, pouvait-on appeler cela une ‘retrouvaille’ ? Il ne savait pas vraiment. Il n’eut guère le temps de réagir. « Je suis venue pour... hm, peu importe, je vais... ». Elle avait l’air tout aussi surprise que lui. Ou plutôt, elle ne semblait pas être préparée à le croiser. Elle prit alors la parole. Elle était venue pour… ? Pour ? Peu importe ? Vraiment ? Peu convaincante réponse. « Rester ? » souffla-t-il alors. Oui, elle allait rester. Evidemment. Elle n’allait pas continuer de le fuir. C’était stupide comme réaction. Il s’approcha d’Emmeline, tout doucement. Il ne voulait pas qu’elle s’en aille. Qu’elle fasse demi-tour et qu’elle le laisse seul. Encore seul. Comme ce fameux soir dans ce jacuzzi. « Il serait peut-être temps qu’on ait une conversation, tu ne penses pas ? Emmeline… tu ne trouves pas cette situation idiote ? » lui demanda-t-il. Evidemment, elle l’était. Tout du moins, Emilien la voyait comme telle. Une situation idiote qui ternissait leur relation. Leur amitié.

Il y avait un avant et un après. Il y avait ce réconfortant avant où ils étaient tout sourire, bras dessus bras dessous, des gestes remplis d’une affection, des petits mots, des mots gentils, des mots doux, un amour fraternel. Oui voilà, ils s’aimaient. Mais pas comme deux aimants. Comme une sœur et un frère, un amour fraternel. Il y avait cet anxieux après. Cet après qu’il n’appréciait pas, qu’il ne chérissait pas. Cet après où il n’y avait plus d’avant, où ce qu’ils avaient vécu ensemble avait été mis entre parenthèses. Ou effacé. Pourquoi plus rien n’était comme avant ? Avant ce fameux soir. Pourquoi ? Pourquoi le fuyait-elle au quotidien ? Avait-elle peur ? Peur de lui ? Pourquoi avoir peur d’Emilien. Qui aurait peur d’Emilien ? Il était certainement le garçon le plus inoffensif de ce nid. Alors pourquoi ? Elle était insensée cette situation. Elle n’avait pas lieu d’être. Oui, Emilien trouvait tout cela stupide. Il avait eu sa part de responsabilité dans ce baiser, il le savait. Il l’avait compris, mais… ce n’était qu’un baiser. Un simple baiser. Un baiser sans signification. Tout du moins pour lui. Qu’en était-il d’Emmeline ? Que pensait-elle de ce baiser ? Avait-il un sens pour elle ? Aimait-elle Emilien bien plus qu’elle le devrait ? Trop questions. Plein de questions. Tant de questions sans réponse. Emmeline affirma que c’était idiot. Que cette situation était idiote. Emilien fit un léger signe de tête lorsqu’elle lui dit qu’elle agissait comme une imbécile. Peut-être. Peut-être pas. Il ne voulait pas la juger, il voulait juste comprendre. Oui. Voilà. Comprendre. « Pourquoi ça fait des jours que tu fuis, Emmeline ? Ce baiser est à oublier, tu l’as dit toi-même. Alors… il y a quoi ? Il est où le problème ? Tu vois, j’ai beau retourner la question dans tous les sens, je n’ai trouvé aucune réponse. Alors je me dis que c’est peut-être toi qui détiens la clé de cette incompréhension. ». Peut-être qu’en lui demandant directement, elle répondrait. Elle répondrait à toutes ces interrogations qui lui minaient le moral. Car oui. Oui, cette situation ne l’enchantait guère. Il la détestait même. Il n’avait rien demandé lui, dans tout cela. Il ne lui avait pas demandé de changer de lit, de le fuir, de l’abandonner tout simplement. « S’il y avait quelque chose, tu me le dirais ? ». Elle ne pouvait pas lui dire qu’il n’y avait rien. Rien, ce serait mentir. Car s’il n’y avait rien. Jamais. Ô grand jamais, un mur se bâtirait entre eux. Brique par brique, la séparation devenait évidente. Ce n’était pas sur des non-dits qu’ils pourraient arranger leur relation, retrouver cette cohésion d’antan. La retrouveraient-ils au moins ? Il l’espérait, au fond de lui.

Trop de questions. Trop d’interrogation. Trop de flou. Oui, voilà. Il y avait un voile qui venait flouter son esprit. Il avait beau chercher, toujours chercher, il ne trouvait pas de réponse à ses questions. Emeline détenait la clé. La clé de cette vérité. De cette vérité qui noircissait leur relation. Ce n’était qu’un baiser. Un baiser à oublier. Il l’avait oublié, lui. Enfin. Il aurait pu facilement l’oublier s’il n’y avait pas eu les images de ce baiser diffusaient lors du prime, sans compter le commentaire de la chroniqueuse. Un rapprochement, avait-elle dit. Y en avait-il un ? Comment Emmeline voyait Emilien ? Ils étaient pourtant clairs dans leur relation. Une relation fraternelle, un amour fraternel. Ils le disaient eux-mêmes. Ils l’affirmaient haut et fort. Et voilà que cette relation ne ressemblait plus à rien. Emmeline était-elle Emilien ? L’aimait-elle plus qu’un frère ? Plus qu’un ami ? Ce qui pourrait certainement expliquer ce baiser. Il n’y avait pas d’autres possibilités. Jamais. Jamais jusqu’à présent, ils n’avaient eu des gestes déplacés. Pas de baiser, en tout cas. Juste de longues étreintes et des petits mots doux. Elle se sentait mal, c’était donc cela son explication. Elle se sentait mal, alors elle le fuyait, elle fuyait cette certaine réalité. Emilien s’approcha d’elle doucement, pour éviter de lui faire peur. Oui. Peut-être avait-elle fini par avoir peur de lui ? Elle n’avait pourtant aucune raison de l’être. Et tant dit que sa voix s’élevait un peu plus dans la pièce, il lui attrapa les mains délicatement. Comme pour tenter de la calmer. Elle avait certainement dû appréhender ce moment, un peu comme lui. Mais peut-être l’avait-elle appréhendé plus que lui, ce moment, cette conversation. « Calme-toi… » souffla-t-il alors. Il avait eu envie de la prendre dans ses bras, pour lui dire que tout cela n’était rien. Juste une fâcheuse histoire à oublier. La prendre dans ses bras, et lui déposer un tendre baiser sur son front. Il en avait envie… mais… mais ce serait vraiment trop étrange s’il venait à lui adresser ce genre de gestes. Surtout maintenant. Surtout dans cette situation, leur situation. Emilien finit par reculer, laissant tomber ses bras le long de son longiligne. Alors lui demanda s’il y avait quelque-chose. Après tout, il devait bien il y avoir ‘quelque-chose’. « Je ne sais pas… à toi de me le dire justement. » souffla-t-il alors, reculant et posant ses mains sur le plan de travail qui se trouvait derrière lui. « Pourquoi tu te sens rejetée et gênée, Emmeline ? ».

Chaque problème avait sa solution, c’était ce que disait l’expression. Ce problème avait donc une solution. Mais laquelle ? Alors oui. Oui, ils trouveraient une solution. Une solution qui résoudra leur situation. Cette situation peu confortable. Emmeline se sentait stupide, rejetée, gênée dans cette situation. Et lui dans tout cela ? C’est certain qu’il ressentait un brin de gêne et de rejet, après tout, elle le fuyait comme la peste. Il y avait de quoi de se sentir rejeté, abandonné. Puis tout cela le peiné, le désolé. Il eut voulu revenir en arrière si cela était possible. Gommer ce baiser, les images diffusés lors du prime et tous les commentaires. Mais tout cela était trop tard. Il était en parti de sa faute. Il aurait certainement dû la repousser. Il aurait dû, oui. Mais il était trop tard pour avoir des remords, pour vouloir faire marche-arrière. Il n’avait plus qu’à affronter ce présent. Ce présent peut agréable à vivre. Elle lui expliqua alors pourquoi elle se sentait rejetée. Après tout, il y avait bien des raisons pour qu’elle se sente ainsi. Ainsi il l’aurait rejeté, tout simplement parce qu’il n’avait pas coupé court à ce baiser. A ce stupide baiser. A ce baiser à OUBLIER. O-U-B-L-I-E-R. Il baissa un instant la tête, réfléchissant alors à tout ce qu’elle venait de lui dire. Tentant ainsi de trouver des réponses à toutes ces questions qu’il pouvait bien avoir. Cette situation la gênait. Lui aussi. Elle ne savait plus comment se comporter avec lui ? Lui non plus, ne savait plus. Pouvait-il encore la prendre dans ses bras comme avant ? Pouvait-il encore lui déposer quelques baisers sur la joue, sur le front, sans que ceci soit mal interprété ? Pouvait-il encore agir comme avant ? Elle ne savait pas non plus pourquoi elle l’avait embrassé… « Tu en avais eu envie de ce baiser ? » lui demanda-t-il, alors. Si elle l’avait embrassé, au fond, elle en avait peut-être envie. Envie sur le moment, ou depuis quelques temps. Il ne savait pas vraiment. Peut-être était-ce pour cela que cette situation semblait s’envenimer. Elle en avait envie. Peut-être trop envie. Peut-être aurait-elle aimé qu’il l’embrasse de nouveau. Non. C’était étrange de penser des choses pareilles. Elle savait pourtant qu’Emilien aimait Ezra. « Ca me fait mal de nous voir comme ça, de te voir comme ça aussi… mais tu ne crois pas qu’on devrait essayer d’arranger les choses ? De faire en sorte que ce soit plus simple entre nous ? Après tout, toute cette rumeur qui court est fausse, n’est-ce pas ? Tu as envie de quoi, Emmeline ? ». Voulait-elle continuer de le fuir, quitte à mettre un trait sur le relation, ou voulait-elle arranger les choses, faire en sorte que tout redevienne comme avant, ou voulait-elle autre chose ? Voulait-elle encore plus qu’une simple amitié avec lui ? Après tout, c’était certainement ce que la plupart des personnes avait pensé lors de la diffusion du prime.

Evidemment, leur situation ne sera pas comme celle dans laquelle ils se trouvaient, s’il n’y avait pas eu ce baiser. Ce geste de trop. Ce geste de travers. Ce geste qui est venu tout fausser. Emmeline. Le cas Emmeline. Emilien avait donc émis l’hypothèse que si elle l’avait embrassé, c’était parce qu’elle en avait envie. Après tout, Cupidon n’avait pas été là pour leur dicter ce baiser. Alors, il n’avait trouvé que cela comme hypothèse. Mais… c’était quand même étrange. Etrange de s’imaginer qu’Emmeline avait eu envie de l’embrasser. Lui, Emilien. Son partenaire de jeu. Et elle semblait baigner dans ces vagues d’incompréhension et d’ignorance autant que lui. Ce baiser n’était malgré tout pas préméditer. Il manquerait plus qu’elle eut voulu le faire depuis des jours, des semaines, et qu’elle n’avait juste attendu le moment. Le moment opportun. Encore heureux. Il se contenta alors d’hocher la tête. Il finit alors par lui confier que cette situation ne le mettait mal à l’aise, qu’il ne l’aimait pas. Pas du tout. Il aimerait tant que ça redevienne comme avant. Peut-être qu’elle aussi. Elle aussi voulait que ça redevienne comme avant. Avant ce baiser. Il lui demanda alors ce dont elle avait envie. Si elle voulait continuer ainsi, ou non. Elle lui expliqua alors, pour commencer, qu’elle ne savait pas. Il aurait très certainement dû se douter de cette réponse. Combien de fois depuis le début de la conversation l’avait-elle prononcé ? Je ne sais pas. Elle ne savait pas. Combien de fois ? Un nombre incalculable. Son attention se reporta plus particulièrement sur la jeune fille lorsqu’elle évoqua leur relation. Elle aussi voulait que ça redevienne comme avant. Les câlins, les bisous, les gestes tendres, les mots tendres. Un mince sourire étira les lèvres d’Emilien. Il était ravi d’entendre cela sortir de sa bouche. Que ce soit elle-aussi qui lui disait des choses comme cela. Des choses rassurantes. Après tout, peut-être qu’ils pourront redevenir aussi proches qu’avant. Peut-être… Elle avait peur. Primo, peur que ça ne puisse pas être possible. Secundo, peur de l’embrasser de nouveau. Avait-il bien entendu. Il fronça légèrement les sourcils à l’écoute de ces derniers mots. « Emmeline… on est amis, tu ne peux pas m’embrasser de nouveau. » lâcha-t-il alors. Ils étaient amis, elle ne devait donc pas avoir peur de l’embrasser, et surtout ne pas penser à l’embrasser. Ils n’étaient qu’amis. Pas deux prétendants qui aspiraient à se tourner autour comme deux proies en mal d’amour. Non. Ils étaient juste… des amis. « Pourquoi tu aurais peur de m’embrasser… si on est amis ? ». Ils étaient bien amis, n’est-ce pas ? Oui. Évidemment.