Il y a quelques jours, j'ai fait une drôle de rencontre. Drôle dans le sens d'inattendu, d'inédit. Peu de rencontres me marquent réellement. Pour moi, ce ne sont que des visages et des noms qui tombent irrémédiablement dans l'oubli. Je ne m'attarde pas, je ne m'attarde à peine. Détaché de tout. Je ne prends pas de temps pour les autres. Je les évite, je ne mêle plus à la foule. Je me suis perdue en chemin. J’ai mené une existence hors du commun, et plutôt chaotique, avec pas mal de moments horribles, une vraie corvée à temps complet. Pourtant, ce qui m’a permis d’en réchapper, c’est d’avoir tracé dans toute cette saloperie une voie qui n’appartenait qu’à moi. Mais moi je me disais que si je me convertissais, si j'avais la foi, je serais obligé de laisser tomber le Diable et il se retrouverait tout seul dans les flammes, ce ne serait pas gentil de ma part parce que dans les épreuves sportives j'ai tendances à soutenir le perdant et dans les épreuves spirituelles je souffre de la même maladie, car je ne suis pas un homme de réflexion je fonctionne au sentiments et mes sentiments vont aux estropiés, aux torturés, aux damnés, aux égarés, non par compassion mais par fraternité, parce que je suis l'un des leurs, perdu, paumé, indécent, minable, apeuré, lâche, injuste, avec des brefs éclairs de gentillesse ; salement atteint et conscient de l'être, cette lucidité ne m'est d'aucun secours, au lieu de me guérir elle me plombe. Je pénètre dans le jardin botanique, un carnet à dessin sous le bras. J'ai envie de faire deux-trois esquisses en espérant que l'après-midi passe plus vite. J'arrive près de la serre, j'y entre et dégaine mon crayon à papier. Je commence à griffonner. J'entends des pas s'avancer vers moi. Je me retourne et voit Niklas. Je l'accueille d'un sourire posé. Notre dernière rencontre m'a fait réfléchir et son histoire a été plus intéressante que la mienne. Ses tatouages me plaisent dans le sens où ils ont des significations précises. Des symboles que je trouve intéressants car on comprend mieux l'homme qui les portent.