FT. ANTWON

Mes mains se posent à plat contre la tête de lit, je souffle, m'étire comme je peux avec les bras légèrement fléchis. Je peux pas vraiment pousser le mur, vous voyez... Je passe une main dans mes cheveux, regarde à côté de moi, faut croire qu'Antwon s'est déjà enfuit. Je cligne des yeux, j'ai l'impression que j'vais pleurer parce que j'ai mal. Genre comme si j'avais quelque chose dans l'oeil. Alors je frotte, me retrouve avec le mascara que j'ai pas enlevé hier soir. Quoi ? J'avais la flemme ! Attendez, j'ai bu du truc rose, j'ai parlé, j'ai pas voulu quitter India et tout, trop d'émotions ! Alors quand je suis arrivée dans le dortoir, j'me suis laissée tombée sur le lit à côté d'Antwon et j'ai dormi. Fin de l'histoire, rien de plus compliqué que ça. Autant dire que le mascara, c'était bien le dernier truc auquel j'ai pensé. Enfin on s'en fiche, c'est pas le sujet. Du coup je pleure, je pleure, je pleure. Et je me frotte les yeux, et ça me fait encore plus pleurer. Non mais j'suis un peu con, j'en suis consciente, j'assume pleinement ! Enfin, j'arrive quand même à me lever, essuie d'un revers de la main les larmes qui perlent encore sur mes joues. Fait chier hein. Et puis je regarde un peu autour de moi, sans vraiment trouver quoi que ce soit d'intéressant. Je marche un peu, ouvre une porte et y trouver Antwon, en sous-vêtements. Ah ouais, c'est le dressing. « Pf, t'es trop prévisible. » dis-je, en levant les yeux au ciel. « Tu t'rends compte, tu fais un combo de ouf là. A moitié à poil, dans un dressing. » Tout lui quoi. « Et pas un mot sur mes yeux de pandas, ou j'te frappe. » Comme ça, il est prévenu et on peut passer à autre chose. « Besoin d'aide ? » Je connais déjà la réponse, en fait.

Tu t’es endormi comme une pauvre merde hier. La soirée a été longue, riche en rebondissements, et surtout alcoolisée. Et une fois arrivé dans ta chambre, tu t’es affalé sur ton pieu en boxer. Trente secondes après, tu dormais déjà. Et bizarrement, tu t’es réveillé dans les premiers. Peut-être parce que c’est pas ton lit, et que t’es pas trop habitué. Ce qui te fait sursauter, par contre, c’est le fait de sentir un corps à côté du tien dès ton réveil. Alors déjà le premier soir, t’avais fini avec quelqu’un dans ton lit. Il te faut quelques secondes pour comprendre que ce n’est que Lulu-Belle, et tu laisses échapper un soupir de soulagement. Pas que ça t’aurait dérangé de tirer ton coup le premier jour, mais t’aurais préféré t’en souvenir quoi. Surtout si c’était avec Kinga.
Tu tentes alors de te lever sans réveiller ta petite sœur, et c’est pas chose facile puisqu’elle est à moitié allongée sur toi. Elle a pris ses aises, la petite. Tu réussis quand même ton coup, et files directement sous la douche pour te réveiller. Parce que t’as quand même une sale gueule là. Tu prends juste un boxer avec toi, que t’enfiles après t’être lavé. Tu sèches tes cheveux avec ta serviette tout en allant jusqu’au dressing. Le dilemme de la journée. C’est quand même le premier jour, et faut que tu fasses bonne impression auprès de tes camarades. La porte s’ouvre derrière toi, et tu vois un panda endormi face à toi. Ah nan, c’est juste ta sœur. Et voilà qu’elle fait déjà une remarque sur ton côté exhib et ta fâcheuse habitude à passer 100 ans devant ton dressing. Bon après tout, elle n’a pas tort. Tu reposes ton regard sur tes fringues, et demandes : « Le débardeur avec mon short noir ou la chemise Amérique avec mon short en jean ? » T’attends même pas sa réponse, et tournes le dos à tes habits pour venir prendre ta petite sœur dans tes bras. « Comment j’suis trop content qu’on soit ici ensemble. » Tu déposes un baiser sur son front.

Je suis appuyée contre le mur, les bras croisés. Je suis encore toute habillée, en fait. Ouais, avec les affaires de la veille. Je suis sans doute la fille la plus flemmarde de toute la terre, impossible pour moi de faire quoi que ce soit en étant ne serait-ce qu'un peu fatiguée. C'est pas de ma faute, c'est juste... je sais pas. Je crois que c'est de l'auto-protection, parce que je sais que si j'fais quelque chose, ça va rater ou être de la grosse daube. Non mais sérieux, j'suis pas possible quand j'suis fatiguée. Je pète des câbles, déjà. Je ris, je pleure, je ris, je danse, je saute, je dis des conneries, des insultes, des mots bizarres. Insupportable quoi. Enfin c'est pas le sujet, je m'égare un peu. « Le débardeur avec mon short noir ou la chemise Amérique avec mon short en jean ? » me demande mon frère. Hm... Je prends l'air le plus concentré que je puisse avoir en étant fatiguée, avant de bailler sans mettre ma main devant la bouche. On s'en fout, on est entre nous... Mais bon, je crois qu'il n'a rien remarqué, parce qu'il me prend direct dans ses bras, en me faisant un bisou. Je ferme les yeux, passe mes mains autour de ses hanches. « Comment j’suis trop content qu’on soit ici ensemble. » Je hoche la tête, je ne peux qu'être d'accord avec ce qu'il vient de dire. « Si y'avait pas eu Fake Lover, je sais pas quand j't'aurai revu. T'as décidé de devenir anglais ou y'a moyen que tu reviennes en France un jour ? Et j'parle pas d'une pauvre semaine à Noël. » Je l'ai eu un peu mauvaise lorsqu'il a dû repartir après Noël. Sérieux, j'l'ai pas vu depuis un million d'année. « Le débardeur, les filles vont mouiller leur culotte sur ton passage. » dis-je, avec l'air le plus détaché du monde. Je suis toujours comme ça, toujours. « Lilo me manque, sinon. » Lilo c'est... Lindsay Lohan, son chat au féminin. Parce que c'est une chatte rousse. Enfin vous voyez quoi. Fallait un nom débile et Lindsay Lohan, ça semblait assez débile pour être crédible. « T'as pas croisé beaucoup de roux en Angleterre, en parlant de Lilo ? » Bah quoi ? Je me demande, y'a quoi de mal à ça ?

Rien que d’avoir ta petite sœur dans tes bras te rend heureux. T’as l’air niais avec ton sourire sur ton visage, là. Mais tu t’en branles. Parce que t’avais tellement attendu ce moment. Le moment où enfin, tu pourrais l’enlacer. Et inévitablement, elle te lâche une remarque sur tes vacances de Noel, qui ont été trop courtes à son goût. Ca t’avait fait chier à toi aussi de repartir. Aussi intéressant qu’est ton taf, ça ne remplacera jamais ta famille et faut l’avouer, ils te manquent tous les jours. Alors passer des appels téléphoniques à être enfermés dans un château pendant des semaines avec Lulu-Belle, ça te laisse pas du tout indifférent. Ouais, ça réchauffe ton cœur. Une de tes mains vient pincer sa joue, et tu encres ton regard dans le sien. « Tu sais bien que j’vais rentrer pour finir mes études. Au final, c’est Montpel’ mon point de repère ! » Parce que t’y as toujours vécu. Parce que ta famille y est. Tu la réconfortes avec un grand sourire, avant de déposer à nouveau un bisou sur son front. « Ca m’fait bizarre de t’avoir là, devant moi. Mais j’aime. » Bref, ta tenue. Elle te conseille le débardeur, et tu te retournes, le récupérant pour l’enfiler. Il est assez ample, et on peut voir par l’ouverture en dessous de tes bras la forme de tes pectoraux et de tes abdos. Ouais, elle a raison. T’enfiles ensuite ton short, tandis qu’elle te parle du chat. « Il squatte toujours autant ma place dans ton lit ? » Possessif, ouais. Surtout que bon, c’est un chat quoi. Et toi, tu trouves ça un peu inutile, même s’il t’arrive souvent de jouer avec lui. Ou de le faire chier. « Coupable, j’suis sorti avec une rousse. Et c’qu’on dit sur elles, c’est pas vrai, ça sentait bon à l’intérieur de sa petite culotte ! » Classe, Antwon..

Je sens les doigts d'Antwon pincer ma joue, je le regarde avec un air accusateur ou provocateur, genre "lâche ça tout de suite, on dirait mamie" mais je dis rien. Parce qu'au fond, je suis bien contente qu'il soit là, parce qu'après plus d'un an loin l'un de l'autre, c'est plus ou moins compliqué. « Tu sais bien que j’vais rentrer pour finir mes études. Au final, c’est Montpel’ mon point de repère ! » Je ne peux m'empêcher de sourire, contente qu'il me dise quelque chose de la sorte. Je lâche quasi-directement après : « C'est pas Montpellier ton point de repère, c'est moi... » Parce que je sais qu'il sait que je sais qu'il pense exactement ça. Tant que je suis avec lui, tout peut être un point de repère. Je prends un petit air innocent, l'air de rien. Non parce que j'ai pas franchement envie qu'il me dise que je me trompe. Non parce qu'on sait jamais avec mon frère, juste pour me faire chier, il pourrait dire n'importe quoi. Je sens un bisou sur mon front, je ferme de nouveau les yeux quelques secondes. « Ca m’fait bizarre de t’avoir là, devant moi. Mais j’aime. » dit-il, ça me fait sourire direct. « Moi aussi, j'attendais ça depuis longtemps, en fait. » Mais bon, c'était pas le sujet initial, donc je finis quand même par l'aider, parce que Monsieur n'est pas capable de se fringuer tout seul et qu'il a constamment besoin d'un avis extérieur et féminin. Il enfile son débardeur, son short et je commence à lui raconter que mon chat me manque. Non mais c'est vrai, c'est difficile de vivre sans Lilo qui frotte constamment contre mes jambes ! « Il squatte toujours autant ma place dans ton lit ? » Je souris, avant de lancer quasi-directement : « C'est plus sa place que la tienne, en fait... », je recule d'un pas, place mes bras de façon à pouvoir esquiver une attaque de la part de mon frère et je plisse les yeux. J'ai certainement l'air d'une chinoise, mais j'aime bien ! Et puis lorsque je lui demande s'il a croisé beaucoup de roux en Angleterre, il ose me répondre : « Coupable, j’suis sorti avec une rousse. Et c’qu’on dit sur elles, c’est pas vrai, ça sentait bon à l’intérieur de sa petite culotte ! » J'arrête ce que je suis entrain de faire, le regarde, les bras ballants le long du corps. « Outre le fait que c'est clairement dégueulasse ce que tu viens de me dire... T'es sorti avec une rousse ? Et tu m'as rien dit ? » cache-toi, Antwon. Mais à vrai dire, il n'a même pas le temps de répondre que la musique retentit. La musique. Je regarde autour de moi, cherche une caméra et lance : « Non mais... c'est mon frère ?! » Je m'approche d'un pas, le regarde de haut en bas avant de lâcher : « Trop bizarre... »

Ton repère oui. Ca, t’as jamais pu le nier. Lulu-Belle, elle est trop importante dans ta vie. A tel point, que tu peux pas passer une seule journée sans avoir de ses nouvelles, sans échanger un texto, sans passer des heures au téléphone.  C’est comme ça, il faut que tu puisses discuter avec elle, sinon, t’es dans le mal. Et c’est une des seules personnes qui va te manquer si t’as pas eu un petit texto dans la journée. Aujourd’hui, tu l’as à tes côtés, dans tes bras, et t’es le plus heureux des hommes. Des frères. Et ça se voit avec le putain de sourire que t’as aux lèvres. « Tu m’énerves quand tu fais ta prétentieuse alors que t’as raison ! C’est moi qui fait ça normalement ! », dis-tu en riant, avant de déposer un baiser sur son front, lui avouant que t’aimes l’avoir auprès de toi. Elle te répond qu’elle attendait ce moment depuis longtemps, et tu acquiesces. Ca fait trop longtemps, même. « Et en vrai, moi, j’m’attendais pas à .. ça ! », dis-tu en la regardant, avant de rire. Elle comprendra, de toute manière. T’as pas besoin de t’expliquer pour qu’elle comprenne ce que tu dis, c’est comme ça entre vous. Vous continuez votre discussion en parlant du chat à ta sœur, et ta bouche s’ouvre grand à sa réponse, alors que tes yeux s’écarquillent. Un chat a pris le dessus sur toi ? Non ! « Il va virer ce chat, tu vas voir ! », dis-tu, un peu boudeur et râleur. Même si tu sais qu’elle dit ça pour te taquiner. Et forcément, puisque son chat est roux, et que tu vis en Angleterre, elle te demande si t’as vu beaucoup de roux. T’en as vu pas mal ouais, dont une de plus près. Chose que t’as peut être oublié de lui dire. Tu fais une grimace quand elle s’offusque, murmurant un petit « désolé… », avant de faire une petite tête toute mignonne pour pas qu’elle t’en veuille énormément. « Puis, j’suis pas réellement sorti avec ! J’l’ai bien kiffé à une soirée, et on est allé chez elle. Bon, il s’est trouvé que son appart, c’était Bagdad. J’suis presque parti avant de faire quoi que ce soit mais bon, j’avais pas envie d’utiliser ma main tu vois. Alors bon. Mais une fois, ça m’a suffit ! », t’expliques-tu, en te remémorant de cette soirée. Et là, t’entends la musique. LA musique. Vos deux visages se lèvent vers le plafond, fixant une caméra. « Oh et puis, on est là pour jouer ! », dis-tu en posant tes mains sur ses hanches et l’attirant vers toi pour poser un baiser sur ses lèvres. Vous finissez par vous détacher après quelques secondes. « Au moins, maintenant, tu sais pourquoi on dit que j’embrasse bien ! », dis-tu pour détendre l’atmosphère.