silence is gold
ft. Faust & Maxence

Outre le fait que passer ses journées à se dorer la pilule sans rien faire de très constructif pouvait être ressenti avec mauvaise conscience, ce qui était un peu mon cas je dois dire, il fallait quand même avouer qu'il y avait de sacrés avantages à être dans un endroit comme celui-ci. Il semblait y régner un calme constant et reposant, par exemple, et ça ça faisait un bien fou ... Tellement que je repoussais le moment de me mettre "au boulot" depuis le début de la semaine. C'était tellement tentant de rester à ne rien faire un peu, et même si je ne le faisais pas sans une impression d'abuser un peu de ma chance, on ne pouvait pas dire non plus que j'avais beaucoup l'occasion d'abuser de ce genre de choses d'habitude. Et là par exemple, puisqu'il était encore tôt et que le soleil avait décidé de pointer le bout de son nez, j'étais allé en profiter sur la terrasse, encore déserte à cette heure que certains ici qualifiaient sans doute de trop matinale. J'étais donc là, assis en tailleur sur le sol en bois de la terrasse, les yeux fermés face au soleil, Tixy couchée à côté de moi et une tasse de café tiède posée de l'autre côté. De quoi j'aurais pu me plaindre, on se le demande ... Je n'avais encore rien foutu depuis le début de la semaine, mais je ne m'étais jamais senti aussi détendu, je crois. Ma pression artérielle apprécierait sans aucun doute. Mais puisqu'il ne fallait pas abuser des bonnes choses trop longtemps voilà que des bruits de pas faisant grincer le sol m'avaient fait sortir de mon pseudo état de méditation pour relever les yeux vers le nouvel arrivant. Dont je n'avais toujours pas retenu le nom ; Rien de personnel là-dedans, simplement cela faisait beaucoup de monde d'un coup, et à ma décharge j'avais tellement peu croisé ce type durant la semaine que c'était à peine si sa tête me disait quelque chose. Ou alors je n'étais juste pas encore totalement réveillé, au choix. « Bonjour. » avais-je simplement dit d'un ton engageant. J'insistais pas trop, parce qu'on ne savait jamais comment réagissaient les gens qui venaient de se lever, certains étaient carrément à prendre avec des pincettes ... Quoi que je ne savais même pas si il venait de se lever en fait, c'était une supposition. Et ma résolution n'avait pas tenue longtemps de toute façon puisque j'avais fini par lui rajouter « Te vexe pas mais je crois que j'ai toujours pas retenu ton prénom. » Mais bon y'avait pas mort d'homme après tout, moi je n'allais pas lui en vouloir s'il n'avait pas retenu le mien par exemple, je doutais même que ce soit le cas.

Ça faisait bientôt une semaine que vous étiez enfermés, et pour toi tout c'était plutôt bien passé. Tu ne te plaignais de rien, tu adorais cette endroit, tu adorais ne rien faire - ce n'était pas comme si ça te changeait de d'habitude mais bon, hm. De plus, tu t’entendais bien avec la partenaire qu'on t'avait attribué. Bref, tu étais comme un petit poisson dans l'eau ici. Et en ce samedi matin, tu avais décidé d'aller faire bronzette sur la terrasse. Une fois que tu avais pris ton petit déjeuner, tu te rendis sur les lieux, sans t'attendre à ce qu'il y ait grand monde vu l'heure qu'il était. Et pourtant, il y avait bel et bien quelqu'un. Une personne à qui tu n'avais encore jamais adressé la parole jusqu'ici, d'ailleurs. Alors tu te diriges vers lui, décidant de remédier à ça. Si les gens participaient à Fake Lover, ce n'était pas pour rester dans un coin, muet, et tout seul. Non, non. « Bonjour ! » tu réponds dans un sourire. Tu étais de bonne humeur, aujourd'hui. Tu étais souvent de bonne humeur, en fait. Et à ses paroles, tu ne peux pas t'empêcher de rire, parce qu'il n'y avait vraiment pas de quoi être vexé. D'ailleurs, tu irais donner une médaille à la personne qui aura retenu les prénoms de tous les  candidats en même pas une semaine. C'était juste impossible. « Te vexe pas non plus, je ne sais pas qui tu es. » tu annonces, histoire de mettre les choses au clair. « Faust, enchanté. » que tu rajoutes, histoire de remédier  toute cette ignorance. « Apparemment la prod' a bien aimé les hommes à barbe cette saison.. » t'amuses-tu. Entre lui, Grayson, Archie - et sûrement d'autres - vous étiez servis.

Je n'avais jamais le moindre mal à me lever, quelque soit l'heure et quelque soit le nombre d'heures de sommeil que j'avais eu. Il m'arrivait bien de traîner un peu au lit de temps en temps lorsque j'étais chez moi, particulièrement les premiers jours avant que je ne retrouve un rythme, mais même là s'il y avait bien un truc qui n'arrivait jamais c'était de me voir faire la gueule au réveil ... Ou alors il fallait vraiment que l'ont m'ait tellement énervé la veille que la nuit seule n'avait pas suffit à faire redescendre ma colère, mais c'était le genre de truc qui devait m'arriver une fois tous les six ou sept ans, quoi. Bref, du coup j'appréciais particulièrement ceux qui savaient aussi se montrer de bonne humeur le matin, ou tout du moins qui n'imposaient pas leur mauvaise humeur aux autres dès le réveil ... Un sourire ça faisait toujours plus plaisir que quelqu'un qui tirait une gueule de trois pieds de long. Un bon point pour le nouvel arrivant donc, qui rien qu'avec son « Bonjour ! » venait déjà de s'attirer temporairement ma sympathie. Je disais temporairement parce que pour le moment cela restait la seule et unique fois où j'avais entendu le son de sa voix, et que c'était donc un peu léger pour se faire une idée définitive du bonhomme ... Mais c'était un bon début. Il n'en restait pas moins un parfait inconnu pour l'instant, et dont je n'avais même pas retenu le prénom comme je me décidais enfin à lui avouer « Te vexe pas non plus, je ne sais pas qui tu es. » A la bonne heure, au moins nous étions à égalité. « Faust, enchanté. » C'est clair que ce prénom là j'aurais eu du mal à le deviner, à défaut de l'avoir retenu du premier coup. Parents fans de Goethe, peut-être, mais ce n'était pas courant en tout cas. Enfin, un peu plus courant que Yishty, Yitshyhi, Titi quoi, c'est sûr. « Maxence. » C'était un peu plus commun c'est vrai, mais un peu moins facile à prononcer pour les anglophones aussi j'avais l'impression. Oui parce que c'était bien la seule chose que j'arrivais à déduire sans avoir besoin de lui demander, à son accent il me semblait couler de source qu'il venait d'un pays anglophone, ou tout du moins devait-il y vivre depuis assez longtemps pour faire illusion. « Apparemment la prod' a bien aimé les hommes à barbe cette saison ... » J'avais laissé échapper un léger éclat de rire, passant machinalement une main sur mon menton « Je garantie pas que la mienne survive longtemps, mais ouais je suppose que le look Robinson Crusoé était en adéquation avec le fait de nous balancer sur un caillou au milieu du pacifique. » J'exagérais un peu certes, disons un gros caillou ... Mais ça restait perdu au beau milieu de nul part, le moins que l'on puisse dire c'était que l'on ne risquait pas d'être embêté par les voisins. « Tu viens d'où, d'ailleurs ? » Depuis le début de la semaine j'avais l'impression que c'était l'ordre de chaque conversation avec une nouvelle personne qui croisait ma route, le prénom puis l'endroit d'où il ou elle venait. Alors je me disais qu'autant continuer sur cette lancée à nouveau.

Maxence, donc. Tu allais pouvoir retenir ça sans problème. À moins que tu deviennes amnésique d’un seul coup, ça devrait aller, oui. Quoi qu’il en soit, tu lui souris et tu lui fais remarquer qu’il n’avait rien d’authentique dans cette émission, puisqu’il était loin d’être le seul à avoir une barbe. N’empêche, si tu avais une tête à barbe, tu te laisserais bien en pousser une. Ca faisait vachement viril. Mais tu ressemblais plus à un clochard qu’à autre chose avec une barbe, en fait. Donc bon, tu avais tiré un trait dessus. « Je garantie pas que la mienne survive longtemps, mais ouais je suppose que le look Robinson Crusoé était en adéquation avec le fait de nous balancer sur un caillou au milieu du pacifique. » tu lâches un léger rire, amusé. Même si bon, tu ne pouvais pas le laisser dire qu’Hawaï n’était rien qu’un caillou. Ou du moins, c’était un caillou super méga cool. « On est quand même un peu mieux servi que Robinson Crusoé ici. » Clairement, même. Tu n’étais pas sûr que Robinson ait une piscine, et 31 colocataires, hm. « Tu viens d'où, d'ailleurs ? » « D’ici » tu réponds directement, dans un haussement d’épaule. « Enfin, j’suis né à Honolulu plus précisément. Mais j’suis bien sûr mon caillou, alors j’ai décidé de ne pas le quitter. » Tu dis en souriant, avant de lui retourner la question : « Et toi ? Je doute que tu sois Hawaïen en tout cas ! » Répliques-tu. Ça paraissait logique, rien qu’avec son prénom, et son accent. Et puis, au cas hawaïen n'oserait dire que sa propre île n'est qu'un caillou au milieu du pacifique. C'était beaucoup plus.

Je pense que j'allais simplement apprendre à considérer cela comme des vacances, mais sans le dire clairement à voix haute. Ouais, c'était un bon compromis à mon avis, et du moment que je faisais un minimum sérieusement ce pour quoi j'étais là personne ne pourrait rien me reprocher, à priori. Oh et puis merde, de toute façon j'avais pas pris de vacances depuis une éternité, et jamais dans un endroit aussi paradisiaque, alors j'avais bien le droit de profiter. Surtout que comme me le fit si justement remarquer Faust « On est quand même un peu mieux servi que Robinson Crusoé ici. » Oui, c'était absolument certain. Bon, après même si on nous avait foutu des paillasses pour dormir, obligé à bouffer des brochettes au dessus d'un feu de bois et à cohabiter sur une plage comme dans une saison de Koh-Lanta, je pense que j'aurais réussi à être satisfait quand même ... Je pense même que c'était plus mon élément que le cocktail sous le parasol et avec les doigts de pieds en éventail. Mais c'était sans doute une question d'habitude. Et d'ailleurs, je me demandais d'où venait Faust justement, et si il était aussi dépaysé que moi « D'ici. » Ou pas dépaysé du coup, donc. Du coup, j'espérais qu'il n'avait pas trop mal pris le fait que je compare cette île à un caillou ... Je veux dire, c'était pas dit méchamment, c'était juste plus ou moins ma façon de définir une île quelle qu'elle soit. Surtout que là, on parlait de volcans, quand même. « Enfin, j’suis né à Honolulu plus précisément. Mais j’suis bien sûr mon caillou, alors j’ai décidé de ne pas le quitter. » Il avait souri à nouveau ... Il ne devait donc pas être trop fâché. Du moins j'espérais ... Et puis, je pouvais comprendre l'attachement de quelqu'un à ses racines, même moi j'avais beau énormément voyager rien n'arriverait jamais à la hauteur de mes montagnes natales. « Mais ... t'es pas déçu, du coup ? » que j'avais fini par lui demander d'un ton un peu perplexe « J'veux dire, c'est pas très dépaysant pour toi, la plage, le climat, tout ça ... » Surtout en sachant les possibilités de lieux qu'offrait la triple diffusion télévisée du jeu, y'avait des centaines d'endroits où atterrir et manque de bol pour lui il ne bougeait pas de chez lui ... Enfin, cela lui donnait peut-être un sentiment de confiance et de facilité que nous autres n'avions pas encore, ceci dit. « Et toi ? Je doute que tu sois Hawaïen en tout cas ! » On se demandait bien comment il en était arrivé aussi facilement à cette conclusion, hm. Y'avait bien l'autre blond là, Esteban, qui cassait un peu le mythe physique de l'hispano mais bon. « C'est mon bronzage, c'est ça ? » avais-je demandé sur le ton de la plaisanterie. Ou aurais-je plutôt du dire, mon absence de bronzage. J'avais pas mal pris pendant mon dernier reportage pourtant, mais autant bronzer prenait trois siècles autant retrouver sa pâleur naturelle se faisait à une vitesse hallucinante. « Briançon. C'est en France, dans les montagnes ... tout près de la frontière italienne. » Je préférais préciser, parce que si pour les amateurs de ski ma ville d'origine était une station prisée, pour la plupart des étrangers la France se résumait généralement à Paris et Marseille. Et même si je remontais souvent dans la capitale pour mon boulot, je n'étais pas et ne serait jamais parisien.