welcome to the club
ft. Amy & Maxence

Nous avions beau nous trouver sur une île paradisiaque, il n'empêche que parfois tout ce soleil et cet air marin me faisaient le même effet que le désert en Iran ou la pollution à Paris : saturation. J'étais dans une de ces journées là, et parce que j'en avais momentanément ras le pompon d'entendre le bruit des vagues ou le chat des oiseaux dehors, j'avais décidé de passer l'après-midi sagement à l'intérieur. Sagement parce que je m'étais simplement installé sur un des canapés de la salle de réception, avec pour compagnie un des livres de la bibliothèque. Peu désireux de faire fonctionner mes méninges j'avais laissé mon manuel de langue sur ma table de nuit et voilà maintenant une bonne heure que je dévorais Les contes des mille et une nuits sans avoir décroché. Quand je me lançais dans un bouquin je pouvais parfois passer des heures sans lever le nez, presque sans faire attention à ce qui se passait autour de moi, et ce même si comme c'était le cas ici j'avais déjà li le livre en question. Comme la plupart des contes ceux des mille et une nuits étaient souvent bien plus sordides qu'il n'y paraissait, des histoires de meurtres, de mariages arrangés, de punition divine et autres joyeusetés, bref autant dire qu'à l'heure où Alicia avait encore l'âge qu'on lui lise une histoire autant dire que tout ce qui sortait de ma bouche était gentiment édulcoré. Mes songes m'ayant un instant sorti de ma lecture je m'apprêtais à reprendre lorsque j'avais remarqué Amy qui venait de rentrer dans la pièce. Tandis que je lui adressais un sourire, un truc m'était subitement revenu en mémoire et j'avais alors demandé d'un ton amusé « Alors, il parait que tu as rejoint le club des trentenaires ? Tu assumes fièrement, j'espère. » J'avais entendu au détour d'une conversation avec je ne sais plus qui que l'anniversaire de la jeune femme était dans la semaine, je ne savais plus vraiment quel jour ... Bref, de toute façon de qui je tenais l'information n'était pas en soit quelque chose de capital. « Joyeux anniversaire, du coup. Un poil en retard mais bon, tu sais ce qu'on dit, c'est l'intention qui compte. » J'étais volontairement enjoué, probablement parce que la jeune femme elle ne le semblait qu'à moitié et que j'espérais sans doute inconsciemment la contaminer un peu. Refermant finalement mon livre je l'avais gardé sur mes genoux, mais mon attention elle était désormais entièrement dirigée vers Amy. Et c'était un peu con, parce que j'avais affreusement envie de lui poser une question mais le timing aurait difficilement pu être pire ... Mais c'était comme ça, quand j'avais une question elle s'incrustait, et je pouvais bien essayer de la chasser tant que je voulais elle ne me laissait pas la paix tant que je ne l'avais pas posée « J'peux te poser une question ? C'est à propos de ton frère. » J'annonçais la couleur dès le départ, histoire qu'on ne puisse pas me reprocher de prendre la jeune femme par surprise. Je lui laissais même le loisir de me répondre non. Cela n'arrangerait pas ma frustration puisque je détestais garder une question sans réponse, mais je lui laissais le choix malgré tout.

J’ai un petit creux. Faut croire que je n’ai pas assez mangé ce midi. Alors je me rends dans la cuisine, et pour ça je passe par le salon. J’aperçois Maxence, je ne compte pas le déranger, il est en pleine lecture. Je me contente de lui adresser un sourire. Mais il prends la parole pour s’adresser à moi. « Alors, il parait que tu as rejoint le club des trentenaires ? Tu assumes fièrement, j'espère. » Tss, comment il est au courant ? Bah peut importe. « Il faut bien.  De toute façon, la vingtaine n’était pas une bonne décennie pour moi. En espérant que celle-ci soit mieux. » Elle pourra difficilement être pire de toute façon. Cela serait pas mal que des bonnes choses m’arrivent de temps en temps. La chance doit bien tourner à un moment donné non ? Sur ce il me souhaite mon anniversaire. Mieux vaut tard que jamais en effet. De toute façon, si je ne l’ai dis à personne, c’est que je ne m’attendais pas à ce qu’on m’organise une party et me fasse plein de cadeaux. « Je recevrais mon cadeau un peu plus tard, c’est ça ? » Que je lui demande dans un sourire. Bah ouais, parce qu’il a bien prévu de m’en faire un n’est ce pas ? C’est alors qu’il pose son livre sur ses genoux, et je le vois hésiter. Comme s’il voulait dire un truc, mais qu’il n’osait pas. « J'peux te poser une question ? C'est à propos de ton frère. » Hm. De tous les sujets de conversation, il faut que ça soit sur celui là qu’il est une question. Mais quelque chose me dit que ça ne sera pas complètement désintéressé. Je sais qu’il a dépensé une petite fortune pour avoir deux indices sur mon secret. Alors… « A condition que je puisse te poser une question moi aussi, même si elle n’aura probablement pas de réponses. » C’est même quasi certain, mais bon. « Vas y, je t’écoute. » Allez qu'on en finisse.

Maintenant que je prenais le temps d'y penser, j'étais bien capable de rester ici à lire jusqu'à la fin de la journée et de ne bouger qu'au moment où mon estomac commencerait à crier famine. Je crois que les gens habitués à regarder l'émission ne se rendaient pas compte du temps que pouvaient passer les candidats à ne rien faire ou presque, pas étonnant que la production réussisse à faire tenir l'intégralité de la journée de tous les candidats réunis en moins d'une heure, le tout entrecoupé de deux ou trois pauses publicité ... On avait vite fait le tour. Machin fait cuire des pâtes, Machine fait des longueurs à la piscines ... Passionnant, hein. Du coup j'étais partit pour rester affalé là des heures sans doute, avec mon bouquin, mais c'était sans compter l'arrivée d'Amy. Pas qu'elle me dérange ceci dit, un peu de compagnie ne faisait jamais de mal, et puis je venais justement de me rappeler que j'avais entendu dire qu'elle avait fêté son anniversaire ces derniers jours ... La cachottière. « Il faut bien. De toute façon, la vingtaine n’était pas une bonne décennie pour moi. En espérant que celle-ci soit mieux. » Elle semblait sérieuse, aussi je préférais me garder de toute réflexion du type est-ce que tu n'as jamais entendu dire que trente ans c'est censé être le début du déclin ? ... Non, j'allais garder ça pour moi. De toute façon ce n'était que des conneries, moi aussi j'étais bien mieux dans les baskets maintenant que quand j'avais vingt piges. « Je recevrais mon cadeau un peu plus tard, c’est ça ? » J'avais esquissé un sourire amusé. C'était donc de fêter ses trente ans ici dans un sens, je me disais qu'elle aurait sans doute préféré fêter ça avec sa famille ... Enfin, la partie de sa famille qui n'était pas présente ici, quoi. Je m'en souvenais, pour mon trentième anniversaire j'étais en reportage à Kandy et Alicia et sa mère avaient veillé jusque tard dans la nuit pour réussir à me croiser deux minutes sur Skype ; Je gardais énormément de souvenirs du Sri Lanka, je ne les échangerais contre rien au monde, mais à ce moment-là j'aurais donné à peu près n'importe quoi pour avoir mes deux femmes avec moi. « C'est tout à fait ça, tu comprends vite. » avais-je en tout cas répondu à la question de la jeune femme. Non mais en cherchant bien je pourrais toujours trouver un truc, lui faire une pâtisserie ou aller lui cueillir une fleur dans le jardin ... « Mais j'ai des moyens assez limités, je suis coincé sur une île déserte vois-tu ... Alors je compte sur ton indulgence. » Et puis là encore c'était l'intention qui comptait, alors on acceptait les cadeaux et on ne discutait pas ... Un peu comme quand Tixy me rapportait un cadavre de rat de sable quand je trainais dans le jardin, je suis sûr que dans sa tête il n'y avait pas plus merveilleux cadeau. Ou bien c'était une menace de mort déguisée, mais je préférais la théorie du cadeau, hm. Toujours est-il que maintenant qu'Amy était là, y'avait une question qui me trottait dans la tête depuis un moment concernant elle et son frère. Pas une question cruciale hein, mais bon une question que je ne pouvais m'empêcher de me poser à chaque fois que je voyais l'un ou l'autre, alors au bout d'un moment j'avais décidé qu'il fallait bien que je la pose. « A condition que je puisse te poser une question moi aussi, même si elle n’aura probablement pas de réponses. » Est-ce que cela voulait dire qu'elle comptait me poser une question piège ensuite, ou bien simplement que le fait de me laisser poser ma propre question ne voulait pas dire pour autant qu'elle soit encline à y répondre ? Bah, peu importe, maintenant que j'avais mis le sujet sur le tapis de toute façon « Vas y, je t’écoute. » Je n'avais pas intérêt à tourner cent sept ans autour du pot, sans quoi elle aurait probablement le temps de changer dix fois d'avis, du coup j'avais fini par cracher ma valda « En fait je me demandais seulement ... Est-ce que le regrettes pas parfois, que vous en soyez arrivés là ? A vous détester, je veux dire. Y'a pas des fois où il te manque et où tu envisages un début de réconciliation ? » Non mais vraiment, je me posais la question ... Je trouvais ça triste, en fait. Je n'étais pas mieux placé questions relations fraternelles, mais il n'empêche que je trouvais ça triste, voilà. Ceci dit je n'avais pas trop suivi ce qui se disait non plus, alors je ne savais pas trop d'où venait cette haine à peine dissimulée entre le frère et la soeur ... Enfin voilà. Le truc c'est que je ne croyais pas aux coïncidences, et que le fait qu'ils soient là tous les deux voulaient peut-être dire un truc, c'était peut-être un signe ou ... Ouais, fallait que j'arrête de croire que le grand barbu nous envoyait des signes à tort et à travers, sans doute. « Voilà c'était ça ma question ... tu peux poser la tienne, si tu veux. » Parce qu'un marché était un marché après tout.

Maxence évoque mon anniversaire. Je ne sais même pas comment il l’a apprit, mais peut importe. De toute façon, dans ce jeu, rien n’est jamais secret bien longtemps. Ne serait ce à cause de la salle de vidéo surveillance. N’importe qui est susceptible de nous épier, à n’importe quel moment. Ça se trouve en ce moment là il y a un candidat qui nous écoute. Bon si c’est le cas il doit probablement se faire chier, m’enfin. Mon anniversaire n’est pas le sujet le plus intéressant du monde. Par contre je me doute bien que Maxence a prévu un cadeau pour moi. Je veux dire on est tellement proche que cela me semble évident. J’en serais franchement déçue du contraire. « C'est tout à fait ça, tu comprends vite. » Je le savais. Il fait ensuite appel à mon indulgence, sous prétexte qu’il a des moyens limités, tout ça. « Je ne m’en fais pas, tu trouveras. » Il est plein de ressources, je n’en doute pas. Ce n’est pas l’absence de magasins qui va l’empêcher de m’offrir un cadeau digne de ce nom quand même. Il n’est pas du genre à s’arrêter à ça voyons. Bon et sinon, il veut me poser une question. Sur mon frère. Je préfère encore discuter de mon anniv à la limite. Mais bon je concède à lui répondre, à condition que moi aussi je peux lui en poser une. Et concernant l’absence de réponse, je parlais de lui, je suis pas sure qu’il saura se montrer honnête. Je m’installe quand même sur le canapé, ça sera plus confortable pour parler, plutôt que lui assis et moi debout. C’est mieux d’être à la même hauteur lors d’une discussion. « En fait je me demandais seulement ... Est-ce que tu regrettes pas parfois, que vous en soyez arrivés là ? A vous détester, je veux dire. Y'a pas des fois où il te manque et où tu envisages un début de réconciliation ? » Je le trouve bien indiscret quand même. De quoi il se mêle ? Mais je vais quand même concéder à lui fournir un réponse…Je laisse quelques secondes passer avant de prendre la parole. « Bien sur qu’il me manque. Mais j’ai perdu mon frère il y a bien longtemps. » Je sens que je vais déjà regretté d’avoir avoué qu’il me manque, si Benjamin tombe sur cette conversation. Il y a juste à espérer que non. « La cassure est bien trop profonde pour pouvoir revenir en arrière…Il y a dix ans, peut etre qu’il y aurait eu un espoir… Mais il les a écrasés en se tirant comme un voleur. Comment veux tu que je me réconcilie, avec une personne qui a décidé de tirer un trait sur toute sa famille, du jour au lendemain ? Et préférer se faire passer pour mort, plutôt que de donner ne serait ce qu’un signe de vie ? Quel genre de personne peut faire ça ? Il a brisé notre famille, alors non, il n’y a pas de réconciliation possible. » Et encore, ce n’est que la face cachée de l’iceberg. Il n’a pas idée jusqu’où ça peut aller…Mais bon sang, qu’est ce qui m’arrive ? Pourquoi je viens de lui faire toutes ces confidences ? Pourquoi je ne me suis pas contenté de répondre, non pas de regret, aucune réconciliation possible, c’est un connard, et basta ? Faut croire qu’il me met en confiance le bonhomme. Au moins il ne pourra pas dire que je ne lui ai pas répondu avec sincérité. Et d’ailleurs c’est à mon tour. Peut être que du coup après ça il sera plus enclin à lui-même se confier ? « J’ai remarqué que tu ne te baignais jamais… Ni à la plage, ni à la piscine. Tous les candidats ici adorent se balader torse nu, et toi, t’es toujours en Tshirt, malgré les chaleurs. Et je ne te croise jamais à la salle de bain, j’en déduis que tu fais en sorte de te doucher à des heures décalées des notres… J’ai bien compris que t’as un problème avec ton corps. Je voulais savoir pourquoi… » Des cicatrices qu’il veut cacher ? Un simple complexe physique ? Je ne sais pas, mais ça m’intrigue.

C'était bien tombé quand même, j'avais fêté mon anniversaire une quinzaine de jours avant mon entrée dans le jeu. Pour une fois que je n'étais pas dieu sait où à cette date là j'avais été bien content de pouvoir en profiter avec mes proches. Et puis déjà qu'Ulysse tenait rarement plus de vingt-quatre heures sans me charrier sur mon âge, imaginez un peu si j'avais pris un an pendant ma présence dans le jeu, hein. Quoi que, si ça se trouve j'aurais eu droit à un cadeau de la part d'Amy, du coup ... Elle en attendait un de ma part en tout cas, bah oui, vu que j'avais pensé à le lui souhaiter. « Je ne m’en fais pas, tu trouveras. » Oh sans doute oui, on pouvait toujours trouver si on cherchait un peu, mais bon il ne fallait pas être trop difficile. D'autant plus qu'entre l'invasion de noix de coco, d'ananas et de moustiques je préfère vous dire que tout n'était pas un cadeau, à Hawaii. En attendant j'avais donc une question à lui poser, ce que j'avais fait après avoir reçu son autorisation, bien que donnée d'un air un peu dubitatif. Au fond ce n'était pas tant de savoir ce qui avait séparé Amy de son frère qui m'intéressait, c'était plutôt le fait que s'ils étaient là, tous les deux, c'était peut-être le moment où jamais de se réconcilier ... « Bien sur qu’il me manque. Mais j’ai perdu mon frère il y a bien longtemps. » C'était surprenant comme formulation. "J'ai perdu mon frère" comme s'il était mort ou quelque chose comme ça. Alors qu'il avait l'air bien vivant, pour un mort. « La cassure est bien trop profonde pour pouvoir revenir en arrière … Il y a dix ans, peut-être qu’il y aurait eu un espoir … Mais il les a écrasés en se tirant comme un voleur. Comment veux tu que je me réconcilie, avec une personne qui a décidé de tirer un trait sur toute sa famille, du jour au lendemain ? Et préférer se faire passer pour mort, plutôt que de donner ne serait ce qu’un signe de vie ? Quel genre de personne peut faire ça ? Il a brisé notre famille, alors non, il n’y a pas de réconciliation possible. » Ah, ouais. Quand même. Bon du coup ça me changeait un peu ma vision des choses, je veux dire je trouvais toujours triste comme situation forcément, mais ... Bon, je comprenais le point de vue de la jeune femme. Même si en ne sachant rien de la vie de Benjamin je n'étais pas en position de juger de ses décisions et de ses actions. Tout ce que je savais en tout cas c'était que « Dans ce cas c'est lui qui est un crétin. » Bon, si je disais juste ça ça risquait quand même d'être compris de travers, alors je préférais préciser et ajouter « Si j'avais mon frère ici, enfin là ma sœur, dans un endroit clos et où elle serait forcément obligée de m'écouter à un moment ou à un autre, je lâcherais plus l'affaire. Je prendrais pas le risque de me faire éliminer avant d'avoir dit tout ce que j'ai pas eu l'occasion de dire pendant, hm, dix ans. » Enfin c'était mon point de vue. Biaisé, peut-être, et en tout cas totalement subjectif ... Bref. Qui sait, un miracle avait peut-être encore le temps de se produire avait que l'on ou l'autre ne quitte l'aventure. Quoi qu'il en soit, puisqu'elle avait répondu à ma question, et plus honnêtement que je ne l'avais envisagé très clairement, j'étais prêt à en faire de même bien que je ne vois pas trop ce qu'elle pouvait vouloir me demander ... Peut-être mes motivations pour avoir acheté des indices à son sujet ? Dans ce cas elle aurait sa réponse, je n'avais rien à cacher, hm. Mais finalement non, c'était sur un tout autre sujet qu'elle voulait me questionner « J’ai remarqué que tu ne te baignais jamais … Ni à la plage, ni à la piscine. Tous les candidats ici adorent se balader torse nu, et toi, t’es toujours en Tshirt, malgré les chaleurs. Et je ne te croise jamais à la salle de bain, j’en déduis que tu fais en sorte de te doucher à des heures décalées des nôtres … J’ai bien compris que t’as un problème avec ton corps. Je voulais savoir pourquoi … » J'étais un peu pris au dépourvu, cela devait d'ailleurs certainement se lire sur mon visage, mais je ne m'attendais pas vraiment à cette question. Mais c'était de la faute de tous ces types qui se croyaient dispensés du port du tee-shirt sous prétexte qu'il faisait un peu chaud, aussi ... « Toi tu traînes un peu trop avec ces exhibitionnistes de Jarek et Ulysse, si tu veux mon avis. » avais-je alors répondu d'un ton légèrement teinté d'ironie. J'appréciais beaucoup Ulysse et Jarek hein, pas de méprise, mais il fallait bien avouer que ces deux-là étaient les parfaits exemples des types qui ne savaient pas rester habillés du début à la fin d'une journée ... Est-ce que le fait d'être à Hawaii était à ce point-là une excuse ? « Mais non, j'ai aucun souci particulier avec mon corps, même si c'est pas dans ma nature de retirer mes fringues dès que y'a un rayon de soleil ... Et puis je bosse dans des pays où le thermomètre est régulièrement au dessus des trente degrés, je suis bien obligé de garder mon tee-shirt si je veux pas être confondu avec un vacancier. » ajoutais-je d'un ton amusé. Dites plutôt que c'était plus commode de porter un kevlar par dessus un tee-shirt que par dessus rien du tout, surtout que des vacanciers en zones de conflits c'était quand même rare, hm. J'avais soupiré. Je crois qu'en temps normal je n'aurais pas répondu sincèrement à sa question, mais elle avait répondu à la mienne alors je me voyais mal ne pas en faire de même. Hésitant un instant j'avais fini par tirer sur le col de mon tee-shirt pour découvrir le haut de mon épaule gauche ; On n'y voyait pas non plus grand-chose, si ce n'était le haut de quelques longues traces roses imprimées dans la chair. De loin cela pouvait presque passer pour des griffures, si seulement. C'était encore rouge, un peu enflé, bref on voyait bien que si elles n'étaient plus "fraîches" elles n'étaient pas là depuis excessivement longtemps « Ça avait pas aussi bonne mine, quand on est arrivés y'a trois semaines. » Comme si cela suffisait à expliquer. Sans doute que oui. Marquant à nouveau une pause je priais pour que ce que je m'apprêtais à dire ne soit pas diffusé ensuite « Souvenir de voyage, entre autres. Mais j'en ai pas parlé, pas à ma fille ni à sa mère du moins, alors du coup ... » Du coup je n'avais pas envie de m'exposer à des questions auxquelles je n'avais pas envie de répondre en me baladant torse nu comme le faisaient certains. Tirant de nouveau sur mon tee-shirt pour le remettre en place je me disais que si cette conversation tombait en résumé dans le prime j'irais étriper Alix moi-même ... Mais soit, Amy avait eu la réponse à sa question, nous étions à égalité.

« Dans ce cas c'est lui qui est un crétin. » Pourquoi, il pensait que c’était moi à la base la crétine ? Mais en tout cas je ne vais pas le contredire la dessus. « Si j'avais mon frère ici, enfin là ma sœur, dans un endroit clos et où elle serait forcément obligée de m'écouter à un moment ou à un autre, je lâcherais plus l'affaire. Je prendrais pas le risque de me faire éliminer avant d'avoir dit tout ce que j'ai pas eu l'occasion de dire pendant, hm, dix ans. » Oui bah peut être parce que lui c’est un type bien, alors que mon frère… C’est une toute autre histoire. « Sauf qu’il n’est pas là pour des réconciliations. Il n’a rien à me dire. Il n’a jamais eu l’intention de redonner signe de vie. Ça le fait royalement chier que la production a décidé de contrecarrer ses plans et de nous réunir. » Donc qu’il profite de quoi ? S’il voulait tenter d’arranger les choses, il a eu 10 ans pour ça. On n’a jamais bougé. Il nous aurait trouvé exactement là ou il nous a laissé. A la maison. « Le pire c’est qu’il n’a pas montré le moindre regret. On aurait pu croire qu’il aurait cherché à s’excuser ou se confondre en excuses pour son comportement minable…Mais non rien. Limite s’il n’était pas fier de son coup de se faire passer pour mort. » Pas une seule fois je ne l’ai entendu dire le mot désolé. Ou ne serait ce qu’éprouver une once de regret à son comportement. Rien du tout. Malgré tout le mal que son départ à pu nous faire à mes parents et moi. Non il préfère m’insulter et me dire des choses toutes plus gentilles les unes que les autres. Alors que des deux, c’est moi qui ait des raisons de le détester, pas l’inverse. Ou tout du moins les siennes sont injustes. « Une fois qu’il sera éliminé, il va retourner à sa vie et disparaître de nouveau. » C’est certain. C’est un lâche. « Et moi je ne sais pas pourquoi je te raconte tout ça… » Que je me rends compte tout à coup. Peut être que j’avais besoin d’en parler finalement. Il doit probablement être surpris que je me confie avec autant de sincérité, mais j’en suis la première surprise figurez vous. Bon maintenant, à lui de se confier. Place à ma question. Qui porte sur sa pudeur, cette réticence que j’ai vu à ôter ce tshirt. Ma question semble le prendre au dépourvu. Il ne s’attendait probablement pas à ça. Et ouais mon coco, je suis observatrice. « Toi tu traînes un peu trop avec ces exhibitionnistes de Jarek et Ulysse, si tu veux mon avis. » Ce n’est pas moi qui vais me plaindre qu’ils se baladent torse nu. Ils auraient tort de ne pas faire profiter de leur corps au monde entier quand on a en un comme ça non ? Ceci dit, que Maxence lui ne veuille pas se balader torse nu toute la sainte journée est une chose. Mais ne pas se baigner ? Ou la douche à des horaires ou y a moins de monde ? Il m’évoque des raisons liées à son métier. Genre quand il bosse dans des lieux à des températures très élevées il est bien obligé de porter un Tshirt pour ne pas être confondu avec un vacancier, blabla. Mouais. Ici on n’est pas sur le terrain, donc ça ne tient pas la route. Bon alors, plus sérieusement, c’est quoi la vraie raison ? Finalement, il découvre un peu son épaule, pour me laisser voir ce qui ressemble à des cicatrices. A vu de nez, ça a été fait récemment.  « Ça avait pas aussi bonne mine, quand on est arrivés y'a trois semaines. » D’accord. J’avais donc raison, une de mes théories étant qu’il cachait des cicatrices. « Souvenir de voyage, entre autres. Mais j'en ai pas parlé, pas à ma fille ni à sa mère du moins, alors du coup ... » Ah oui ? Petit cachottier. « T’avais pas envie qu’elles s’inquiètent ? Du coup c’est pour ça que t’étais en congés alors ? C’était plus des congés forcés ? »

« Sauf qu’il n’est pas là pour des réconciliations. Il n’a rien à me dire. Il n’a jamais eu l’intention de redonner signe de vie. Ça le fait royalement chier que la production a décidé de contrecarrer ses plans et de nous réunir. » Pas que cela soit vraiment étonnant de la part de la production ceci dit, quoi de mieux qu'un peu de drama pour faire grimper l'audience, et tant pis si cela devait verser du sel sur les plaies de certains candidats. « Le pire c’est qu’il n’a pas montré le moindre regret. On aurait pu croire qu’il aurait cherché à s’excuser ou se confondre en excuses pour son comportement minable … Mais non rien. Limite s’il n’était pas fier de son coup de se faire passer pour mort. » Je n'avais rien répondu, me contentant de poser sur la jeune femme un regard compatissant, sans être dégoulinant de pitié pour autant. Je ne savais pas trop ce que je ressentirais à sa place, probablement que je ne pouvais pas vraiment m'en rendre compte puisque ce n'était pas le genre de situation que j'avais déjà vécu. J'étais brouillé avec mon aîné depuis un certain temps mais cela n'avait rien de comparable, d'autant plus que je savais toujours où il vivait tout comme il savait où je vivais ... Ce n'était qu'une question de fierté mutuelle, et ce n'était sans doute pas irréversible. Alors qu'en écoutant je me disais que peut-être que pour eux c'était trop tard « Une fois qu’il sera éliminé, il va retourner à sa vie et disparaître de nouveau. Et moi je ne sais pas pourquoi je te raconte tout ça … » Lui adressant un faible sourire j'avais doucement haussé les épaules, comme pour signifier que cela ne me dérangeait pas et en effet c'était le cas. « Peut-être que t'avais juste besoin de trouver quelqu'un à qui le raconter. Et tu dois aussi avoir compris que ça resterait entre nous. » Je précisais au cas où mais bon, je ne voyais pas quel intérêt j'aurais eu à aller répéter ce qu'elle venait de me dire à qui que ce soit. Pas plus au concerné qu'à quelqu'un d'autre. Parce que ce n'était pas un truc qui se faisait, déjà, et parce que ce n'était pas mon style non plus, de toute façon. Quoi qu'il en soit puisqu'elle avait accepté de répondre honnêtement à ma question, chose sur laquelle je ne fondais pourtant pas énormément d'espoirs je ne vais pas vous le cacher, elle méritait bien que j'en fasse de même avec elle. Quand bien même sans ce retour de promesse je ne me serais sans doute pas exécuté « T’avais pas envie qu’elles s’inquiètent ? Du coup c’est pour ça que t’étais en congés alors ? C’était plus des congés forcés ? » Soupirant légèrement je m'étais laissé retomber sur le dossier du canapé. Des congés forcés ouais, et parce que j'avais du être monté à l'envers à la naissance je prenais le mot congés comme une punition là où certains l'auraient pris comme une récompense ; Mais fallait voir ce qu'on me proposait pour m'occuper en attendant « J'ai dit à mon rédacteur que s'il me foutait derrière un bureau pour les quatre prochains mois je finirais sans doute par me pendre avec le câble d'alimentation de mon ordinateur ... Maintenant que j'y pense ça faisait un peu drama queen mais bon, j'ai gagné des vacances à Hawaii en échange alors de quoi je me plains. » C'est vrai qu'on avait quand même connu plus cruel châtiment, et après tout puisque c'était moi qui avait soufflé cette idée débile je ne pouvais m'en prendre qu'à moi-même pour en être devenu le cobaye. Mais soit, c'était moins pire que ce à quoi je m'attendais. Et pour ce qui était des deux femmes de ma vie « Mais ouais, que ce soit la mère ou la fille elles ont un peu tendance à s'inquiéter pour rien, alors du coup quand je peux éviter de dire certains trucs je préfère ... » Mais j'étais quand même un peu de mauvaise foi, parce que j'étais moi-même du genre à m'inquiéter pour rien. Mais bon pour le coup c'était vrai, ce n'était rien, ça avait juste eu une sale tête les premières semaines mais surtout parce que ça avait été soigné à la va-vite. Alors alarmer inutilement deux femmes qui s'inquiétaient déjà si je loupais de vingt-quatre heures mon coup de téléphone hebdomadaire ? Non, mauvaise idée.