LEONE !



En fait, j'avais réfléchis à des plans les plus débiles les uns que les autres pour ma petite vengeance sur Leone. Me venger de quoi ? Vous osez vous poser la question ? Non, pas du buzz, mais bien de ce qu'il m'avait fait subir le soir de la soirée des fantasmes. C'était nul et pas cool du tout. Malheureusement, je n'avais rien trouvé d'assez bien ou de réalisable. Et puis, de toute façon, il donnait une impression que tout (ou presque) le rendait indifférent et je n'avais pas envie de faire quelque chose d'extra pour que rien ne le touche. Bref. Donc, j'avais laissé tombé. Et puis en plus, j'avais encore mal à mon poignée à présent bandé (ce n'était pas très grave, juste une grosse entorse, ça irait mieux dans quelques jours) après ma chute dans les escaliers de Samedi. Bref, aucune importance. Aujourd'hui, j'avais décidé d'aller faire un tout sur le balcon. Il faisait frais, mais le soleil était présent et vallait mieux en profiter, car ce n'était pas tous les jours le cas, c'est le moins qu'on puisse dire. Là, je rencontrais alors Leone et un sourire amusé s'afficha alors que je repensais à mes plans d'attaques ridicules.

« Leone, t'es vraiment pas cool quand tu t'y mets. » lâchais-je d'un ton grave avant de me tourner vers lui, tendant mon bras non blessé vers son visage et pointant mon doigt. « La prochaine foi que tu m'attaches à une chaise avec les menottes et que tu laisses la clé au fond d'une bouteille de vodka, j'te jure que... Que voila, hein. »

Ridicule vous avez dit ? Je suis assez d'accord.

Sa tasse de café reposait dangereusement sur la balustrade du balcon à côté du cendrier. Leone fumait, paisible, jusqu’à l’arrivée de Charlie. D’ailleurs, il aurait bien aimé savoir comment elle était parvenue à se libérer. Un habitant s’était certainement dévoué pour finir la bouteille de vodka, sûrement Cassandre qui aurait tenté de noyer son inconsolable chagrin. Sa colocataire, un poil contrariée, le pointa du doigt.

« Je suis indestructible. » Répliqua-t-il d’un naturel déconcertant, soufflant la fumée au visage de la demoiselle.

Les menaces prononcées par Charlie étaient simplement des paroles en l’air. La demoiselle le savait pertinemment, elle ne pouvait absolument rien contre lui. Elle parvint néanmoins à lui extirper un sourire amusé. Il la dévisagea un instant avant de reporter son regard sur son poignet bandé. Ils allaient pouvoir ouvrir un club, les grands blessés de Fake Lover. Il espérait néanmoins qu’Alec n’était pas responsable, lui qui prônait les bonnes manières était paradoxalement d’une violence incroyable.

« Tu avais raison. Je ne dois pas être fait pour ce genre d’émission. Je ne supporte plus l’ambiance du Nid. Entre ceux qui se plaisent dans leur rôle de victime dans l’unique but d’attirer la compassion des autres et ceux qui utilisent l’amour comme prétexte pour se poignarder dans le dos… L’Humanité est encore pire que tout ce que j’avais pu concevoir. Certes j’ai causé beaucoup de mal, j’ai au moins le mérite de l’avoir fait en face et directement. Pourquoi ça fait de moi quelqu’un de plus méchant que ces hypocrites dénués de dignité ? J’ai promis à Matthew que je n’abandonnerai pas… mais je suis malheureux ici. »

En se confiant ainsi à Charlie il commettait sûrement la plus grande erreur de son aventure. Il ignorait si elle était en mesure de le comprendre, il ne lui en demandait pas tant. Il avait juste ressenti le besoin de partager ses peines. Sa voix était marquée par l’émotion. Il se trouvait faible, écœurant, humain.

« Je ne laisse personne m’approcher… Je l’appréciais vraiment, pourtant je l’ai détruite pour la tenir éloignée de moi, pour me protéger. Matthew non plus, il ne doit pas s’attacher à moi. Si je le blesse je serai le premier à en souffrir, comme avec Betty-Jayne. Je ne suis pas indestructible… »

J'affichais un sourire amusé. Indestructible, vraiment ? Si il le disait, je voulais bien le croire. Posant mes yeux sur sa tasse, puis le cendrier, je revenais à son visage. Il s'apprêtait à reprendre la parole et je fronçais quelque peu les sourcils: soudain, son expression changea. Et j'avais eu raison de penser que d'un seul coup, il avait l'air mal. Je restais figée à ses mots. A vrai dire, je ne m'attendais vraiment pas à ça et j'étais sous le choc. Pendant un instant, je me demandais même si il disait ça pour rire, pour me mettre encore une fois à l'épreuve ou si il était vraiment sincère. Mais bien vite, marquée par son regard et le ton de sa voix, je me rendais que non. Non, il ne jouait pas. Non, il ne se cachait pas derrière son masque de fer. Je détournais les yeux. Je ne comprenais pas pourquoi il me disait tout ça. C'était certainement parce que j'étais arrivée dans un moment de faiblesse, que ça aurait pu être moi ou quelqu'un d'autre, ça aurait été la même chose. Il avait certainement besoin d'extériorisé comme j'en avais eu besoin la semaine précédente face à Franz, même si au fond ce n'était pas les mêmes dires. Je le laissais parler, ne l'interrompais pas. Et puis, pour quoi dire exactement ? Je ne savais pas. Leone était difficile à cerner et je ne savais pas quels mots utilisés pour arriver à lui faire comprendre ce que je pensais ou ressentais face à ce qu'il me disait. Peut-être n'avait-il pas envie que je parle ? Je n'en savais fichtre rien et quel sentiment désagréable pouvait alors m'envahir face à cette situation pour moi complexe. Il se rendait compte de certaines choses, comme je l'avais fait. Je m'étais rendu compte que je ne vivais que dans un monde de Bisounours et qu'en réalité, l'Homme n'était qu'un déchet. C'était assez violent, d'ailleurs, enfin pour moi, de se rendre compte de ça dans un jeux télévisé. Gardant le silence quelques secondes alors qu'il avait terminé, les yeux rivés sur la mer qui s'étendait face à nous, je poussais un court soupire avant de prendre la parole à mon tour.

« Je... Je trouve que c'est dommage que tu t'éloignes ainsi des gens que tu apprécies. » dis-je dans un léger mouvement des épaules, avant de reprendre, d'un ton incertain. Je savais que mes paroles ne serviraient à rien, ou feraient même pire, mais je n'allais pas rester muette, si ?

« J'ai appris ici que l'humain était faible. C'est comme ça. On est tous faibles, certains plus que d'autres. C'est comme ça. On rencontre des gens détestables. Et Dieu sait combien ils sont nombreux, surtout ici où l'argent est en jeu. Mais on rencontrer aussi des gens biens. Qui tentent de rester dignes quoi qu'il arrive. On fait tous des erreurs un jour ou l'autre, sans ça, ce ne serait pas une vie que nous auront. Et puis parfois, c'est bien aussi de se remettre un peu en question et faire en sorte d'être plus heureux encore. »

Je me tus. J'étais complètement ridicule, débile. Des paroles comme les miennes ne pouvaient faire de bien à personne. Je poussais un long soupir cette fois et reposais mon regard face à moi. Je repensais alors à la soirée du nouvel an que nous avions passé à deux sous la tente, dehors. Je ne lui avais pas répondu à sa question, parce que je ne connaissais pas encore la réponse. Maintenant, oui.

« Tu te souviens, je t'avais demandé ce qu'étais pour toi la liberté. Tu m'as expliqué, et ensuite, tu m'as dit que tu l'étais et tu m'as demandé si moi je l'étais. Je pense que je le suis. Ne me demandes pas pourquoi, ni comment je le sais. J'en sais rien. Je le ressens, c'est tout. »

A son tour, Leone l’écouta d’une oreille attentive sans l’interrompre. Il ne prit pas en compte ses conseils. Pour lui, s’éloigner des gens qu’il pouvait apprécier n’était pas dommage mais amplement nécessaire. Elle lui confia également ses opinions vis-à-vis de l’être humain. Le jeune New Yorkais voyait les choses différemment :

« Je ne suis pas faible, mon humanité me rend faible. L’être humain est corrompu par l’argent, le sexe, la religion et le pouvoir. »

Ainsi elle se définissait comme une femme libre. Les deux candidats ne partageaient certainement pas la même définition de ce terme (elle variait selon chaque individu et sociétés), il était toutefois content que la demoiselle éprouve ce sentiment. Néanmoins Leone tenait à museler sa liberté :

« Inutile de préciser que je compte sur ta discrétion. Personne ne doit savoir ce que je t’ai confié. » Déclara-t-il catégorique. Il pouvait cependant s’attendre à ce que Cupidon sorte ses propos de leur contexte lors d’un prime pour les utiliser contre lui.

Je lui jettais un regard. Peut-être qu'il avait raison. Peut-être pas. Qui sav ait de toute façon ? Il se cachait peut-être derrière l'Humanité, la société, mais au fond, qui sait si ce n'est pas lui le faible ? Même lui ne savait pas. Et moi, j'avais beau dire que l'être humain était faible, comment pouvas-je le savoir ? Comment pouvais-je dire que nous ne l'étions pas et que c'est l'Humanité qui nous rendait ainsi. Personne ne savait et celui qui prétendait le contraire était bien trop naïf ou bien trop prétentieux. J'étais naîve. Je ne savais pas qui était Leone. Qui savait qui il était exactement dans cette maison ? SI ça se trouvait, même lui ne savait pas qui il était. Mais moi, j'étais jeune et je n'avais pas envie de me poser des questions sur ce genre de choses. Je voulais juste vivre ma vie, mes rêves, mes envies. Alors, je pensais que dès que l'on se rendait compte de ce qu'on voulait, ce dont on avait envie, alors on était libre. Libre de faire des choix, puisque l'on savait qu'on savait, ce que l'on voulait. Bref. Je fronçais légèrement les sourcils.

« Evidemment. » lâhais-je dans un souffle avant de garder le silence. Est-ce que sa réflexion était véritablement nécessaire ? Non. Pourquoi l'avait-il faite ?

« Tu penses vraiment que j'aurais pu aller raconter tout ça à quelqu'un ? » demandais-je, curieuse de savoir ce qu'il pensait de moi. Du moins, si il répondait correctement à ma question. On ne savait jamais ce qu'il pensait, ressentait. Moi, j'avais envie de savoir comment est-ce qu'il me définissait.

« Je ne te connais pas. Je n’ai pas confiance en toi. » Répondit-il simplement, c’était pour lui une évidence. Au sein du Nid il ne faisait confiance à personne, ce n’était un secret pour personne.

Il tendit amicalement sa cigarette à sa camarade, lui faisant comprendre qu’elle pouvait tirer dessus à sa guise. Parallèlement, il saisit sa tasse et but doucement quelques gorgées du café qui éveillait ses sens.
Avec franchise, il reprit :

« Je sais juste que tu es suffisamment stupide pour ne pas utiliser ce que je t’ai confié contre moi et m’enfoncer davantage. Certains parleraient de bienveillance ou de compassion, deux sentiments que je qualifierais de stupides dans une compétition. Donc je te remercie d’être aussi bonne, ou alors tu es suffisamment intelligente pour ne pas me provoquer. A toi de me le dire… »

J'affichais un léger sourire. Logique. Il raison et à vrai dire, j'étais assez naîve pour accorder beaucoup plus facilement ma confiance à quelqu'un. J'imaginais qu'il me fallait attendre une crasse venant de quelqu'un pour que je prenne enfin compte que de confier ainsi sa confiance les yeux fermés à n'importe qui n'était pas une bonne chose. Mais pour le moment, chaque personne envers qui j'avais confiance était des gens biens, enfin. Plus ou moins. Il n'y a pas de bien ni de mal, ces personnes n'utilisent juste pas la confiance que je leur ai confié contre moi. Enfin, bref. J'émis un léger rire lorsqu'il reprit la parole, tout en refusant sa cigarette d'un signe de tête accompagné d'un signe de la main: je ne fumais pas. Tout simplement. Je posais mes yeux verts sur lui et ne répondis pas tout de suite. Comme si je pouvais réfléchir ! Je savais très bien ce que j'étais.

« Alors, je crois que je suis stupide. » dis-je dans un sourire. Si ne pas être un salaud était d'être stupide, alors je voulais bien me coller cette étiquette. Chacun son truc. Je gardais le silence, et frissonnais alors. Mais je ne bougeais pas, posant à nouveau mes yeux sur le paysage face à nous. Là, j'appuyais alors mes coudes sur la rembarde et posais ma tête entre mes deux mains, admirant.

Leone n’insista pas. Il récupéra sa cigarette, tira une dernière latte et l’écrasa dans le cendrier. Amusé par la réponse de sa colocataire, il lui adressa son sourire charmeur. Evidemment il ne la trouvait pas stupide, il craignait simplement qu’elle se fasse marcher sur les pieds. Peut-être commençait-il à l’apprécier. Il reposa sa tasse de café puis se plaça derrière Charlie, occupée à observer le magnifique paysage. En charmant gentleman qu’il pouvait être, il entoura le corps de la demoiselle de ses bras musclés, la serrant délicatement contre lui pour lui tenir chaud. Il l’avait vue frissonner.

« J’espère ne pas entraver ta liberté. »

Oui c’était toujours le même homme, celui qui l’avait menottée quelques jours auparavant. Il pouvait parfois se montrer doux et attentionné. Il suffisait simplement de profiter du moment, il ne durait jamais très longtemps.

Alors, sans vraiment que je ne puisse le prévoir (même pas du tout), il s'approcha, se plaçant derrière moi et je sentis ses bras entourer mes épaules. Bien que surprise, je ne bougeais pas. Au contraire: je profitais de l'instant, de ce moment de calme, de sérénité peut-être même de douceur et de tendresse. Venant de Leone, ça m'étonnait. Mais c'était plaisant et pour rien au monde je l'aurais repoussé. J'émis un léger rire à sa phrase, secouant simplement la tête de gauche à droite. Non. Je ne m'étais jamais sentie aussi libre, en fait, aussi bête que cela puisse paraître. Ou alors, je ne savais pas ce qu'était la liberté. Peut-être. J'en savais rien et à vrai dire, je ne me posais pas la question. Je me fichais royalement de tout ça sur l'instant. Je posais alors, après une brève hésitation, mes deux mains froides sur ses deux avants-bras, un léger sourire aux lèvres (je grimaçais néanmoins légèrement à cause de mon poignée). Ce n'était pas ambiguë, rien de tout cela. Je poussais un soupire, nous laissant dans le silence quelques instants avant, d'enfin, le rompre d'une petite voix timide.

« Merci... Pour tes bras. »

Oui, j'avais froid et à présent qu'il m'entourait, j'allais un peu mieux sur ce point. Néanmoins, on pouvait aussi y comprendre que si jamais quelque chose n'allait pas, je compterais sur lui. Qu'il le veuille ou non, je compterais sur ses bras. Oh, je ne suis pas une pleurnicharde ni quoi que ce soit. Mais si un jour j'en ai besoin, alors j'irais faire lui. Je pourrais très bien me prendre un vent, une claque, tant pis. Je sais que j'irais vers lui et j’espérais que ce soit réciproque. Pas pour les mauvais moments. Juste comme ça.

Comme il s’y était attendu Charlie apprécia son étreinte. Elle ne pouvait le voir mais il souriait, sincère et apaisé.

« Merci à toi… Pour ta stupidité, j’imagine. Tu vis dans un rêve. N’essaye pas de me tenter avec ta vision de la réalité, contrefaite et floue. Tu crois aux jolies images. Là où tu vois compassion, je vois avidité. » Répliqua-t-il honnête et songeur, un brin philosophe.

Leone se promit de garder un œil sur elle ; non pas qu’elle ait forcément besoin de sa protection, il craignait juste que sa naïveté l’entraîne au beau milieu de virulents conflits, en particulier dans une émission de téléréalité. Il était d’ailleurs surpris qu’elle soit arrivée si loin dans l’aventure sans s’effondrer. Elle était écorchée certes, elle en avait souffert, mais était sûrement plus forte qu’elle le pensait. Il ne la connaissait pas suffisamment pour lui faire part de ce compliment. Ainsi il décida de garder le silence.