Avoir une pratique sportive régulière c’est bien, personne ne va dire le contraire, mais ce devrait être interdit de sentir autant la transpiration après avoir fait un énorme effort. Je ne supporte pas les mauvaises odeurs, surtout celles qui sont corporelles, et il n’y a donc pas à réfléchir un seul instant, je dois prendre une douche au plus vite. J’aurais pu profiter des vestiaires pour prendre une douche rapide mais je n’ai rien pris pour me changer, je suis donc remonté jusqu’à la maison pour rejoindre la chambre hivernale où se trouve encore ma valise… Oui parce que j’ai eu la flemme d’intégralement la défaire, sait-on jamais si je dois remballer mes affaires et être viré de la maison à l’occasion d’un nouveau prime. Dans ma valise j’ai attrapé un boxer et un jean puis je me suis envolé jusqu’à la salle de bain. L’heure est grave, un candidat se brosse les dents, enfin je crois, près d’un lavabo mais tant pis, je dépose mes vêtements ainsi que la serviette que j’ai volontairement laissé de côté la veille pour pouvoir la retrouver facilement dans la salle de bain puis je retire les unes après les autres mes fringues. En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire je me retrouve nu comme un ver et je me pavane sans faire attention à l’homme qui pourrait en profiter pour se rincer l’œil ou, au contraire, être outré. Je me presse en direction de la douche que j’allume pour laisser un petit temps à l’eau pour se réchauffer et j’avance à nouveau d’un pas, l’eau perle sur mon corps, épouse mes formes et leur apporte un voile de brillance. Ce que c’est bon de prendre une douche, je ne comprends définitivement pas comment certaines personnes peuvent ne pas apprécier de se laver.

Ce qu’il peut être agréable de sentir l’eau frapper avec une douceur paradoxale ton corps de plein fouet. J’ai mis le temps à régler la température de sorte à ce qu’elle soit chaude sans être trop brûlante pour autant mais à présent que je suis là-dessous il n’y a tout simplement rien qui pourrait m’empêcher d’en profiter à fond. Je laisse échapper un bref petit soupire discret et je prends le temps de largement apprécier les sensations exquises que m’offrent l’eau. Il n’y a pas meilleur moyen de se détendre très simplement après un effort sportif de taille, de quoi repartir totalement revigoré pour affronter quelques nouvelles heures avant de filer au lit. Je me baisse pour attraper la bouteille de gel douche qui, je crois, m’appartiens et je presse la petite bouteille pour que s’écoule une petite noisette de gel le long de ma paume de main. Je suis du genre très généreux et je n’hésite donc pas à me servir très largement pour avoir de quoi étaler sur mon corps musclé, mes mains épousent mes formes avec rigueur et font mousser le produit qui est très rapidement chassé par l’eau qui recouvre d’un voile transparent ma peau brûlante. « Eum… KEN ? » Qui me parle ? Je me retourne, intrigué par la voix masculine et assurée qui vient de briser mon moment de tranquillité, et constate qu’il s’agit du garçon qui se brossait les dents. « Va falloir que tu ramasses ça mon vieux, t’es pas chez ta daronne. » Mon regard le toise longuement de haut en bas, j’ai effectivement laissé mes vêtements par terre mais c’est uniquement le temps que je prenne ma douche, j’ai du savoir-vivre voyez-vous. « Tu n’es pas la boniche de la maison ? » Il a pourtant la gueule de l’emploi. « Pourrais-tu déguerpir au plus vite ? tu fais tâche dans mon paysage ! » Et j’ai surtout très envie de prendre ma douche sans avoir la dérangeante impression d’être maté.

Dans la vie, il faut parfois savoir être patient. J’ai laissé mes fringues trainer au sol le temps de prendre ma douche sachant qu’il n’y avait qu’un mec dans la salle de bain à ce moment-là. Ces derniers jours je me suis rendu compte qu’il y avait des moments dans la journée où la foule n’était pas aussi omniprésente dans la salle d’eau. Prendre une douche à vingt heures c’est donc l’idéal pour se retrouver en toute tranquillité sous les jets d’eau. C’est en tout cas ce que je pensais mais il semblerait que je me sois complètement trompé, je dirais même que j’ai fait fausse route puisqu’Isaac semble être d’humeur à m’embêter. Voir ma tenue de sport et mon calbut au sol lui agresse les yeux en quoi ? Non parce que la pièce est suffisamment grande pour qu’il puisse passer à côté tout en continuant sa vie mais non, il s’est senti obligé de me faire une réflexion là-dessus. Je me suis senti obligé de lui demander s’il n’était pas la boniche du coin, non parce que dans ce cas il peut prendre mes vêtements et les mettre au sale, je ne serais pas en colère, au contraire. « Ah non, je ne m’appelle pas Adnan. » Ah oui c’est vrai, j’ai encore du mal avec les visages et les prénoms de tous les candidats. « Hélas ! » Que je réponds en soupirant, limite blasé. Je ne suis pas très pudique mais j’éprouve malgré tout une certaine gêne, je n’aime pas trop me promener à poil au milieu de personnes dont j’ignore tout. C’est le problème de cette salle de bain, bien trop transparente pour offrir l’intimité nécessaire pour prendre sa douche, bon et puis je ne me vois pas non plus me laver en maillot de bain. Je demande à Isaac de s’en aller à présent, j’ai l’impression qu’il me regarde avec un peu trop d’insistance et ça me dérange un peu. « Drôle de royaume… » Je lève les yeux au ciel, me retournant pour à nouveau faire face au pommeau de douche. « On fait avec les moyens du bord ! » Mes mains retrouvent mon torse, je donne un petit coup de main à l’eau qui s’écoule toujours sur mon corps en chassant quelques petites traces de gel qui jusqu’à maintenant faisaient de la résistance. « Le problème dans la vie en communauté, c’est que des tâches il y en a un peu partout. » Hélas oui, il en est l’exemple flagrant. J’en ai terminé avec ma douche, j’arrête l’eau et sors de la cabine. Il me faut quelques pas supplémentaires pour atteindre ma serviette que j’enroule autour de ma taille. « Tu n’as jamais vécu sur un campus universitaire ou en collocation ? » Il parle différemment de tout à l’heure mais je n’y prête pas trop attention. « Je vis en permanence avec les autres tu sais, je suis ce que l’on appelle un gitan !» Je déteste ce terme qui a tendance à être bien trop négativement connoté à mon goût mais c’est le plus parlant.