w/mckayla

Il s’agite sur le canapé du salon qui lui fait office de lit, se tourne dans tous les sens, son cœur prêt à sortir de sa cage thoracique à tout moment, jusqu’à ce qu’enfin, il parvienne à sortir de son sommeil dans un sursaut. Il met quelques minutes à reprendre ses esprits et à s’asseoir sur le canapé. Il passe ses mains sur son visage humide, pousse un soupir d’exaspération, lassé de voir ses nuits écourtées constamment. Il décide finalement de se lever, attrape une chemise qui traîne sur le canapé histoire de cacher ses bras en priorité, mais aussi son t-shirt trempé par la sueur. Il prend le chemin de la cuisine où il ne tarde pas à avaler un demi-litre d’eau rapidement, avant de lancer la cafetière. Il ne va pas se rendormir, il ne veut pas se rendormir alors autant s’assurer que ça n’arrive pas en s’enfilant les cafés comme il enfile les cigarettes. Presque affalé sur la table de la cuisine, tentant de reprendre ses esprits, il entend la porte s’ouvrir et se redresse immédiatement. Il est déjà à sa deuxième tasse en l’espace de quelques minutes, ce n’est pas plus mal qu’on vienne l’interrompre. Il passe une main sur ses cheveux humides pour que ceux-ci cessent de lui tomber dans les yeux, avant de porter son attention sur la personne venant d’entrer. Une jeune femme, encore inconnue au bataillon. Ou peut-être pas, et qu’il n’arrive pas à la reconnaître vu son manque de clarté dû au réveil soudain, mais il compte sur elle pour lui faire une réflexion dans ce cas-là. « Café ? » C’est tout ce qu’il parvient à dire dans l’immédiat, c’est encore bien trop confus dans son esprit pour qu’il parvienne à faire une véritable phrase. Mais si elle est un peu plus réveillée que lui et pas trop stupide, elle comprendra qu’il lui propose de lui remplir une tasse. C’est qu’il est serviable. Et puis, finalement, portant son regard sur l’extérieur, il constate qu’il fait encore nuit. « Il est quelle heure ? » Qu’il parvient à formuler après quelques instants de silence. Si ça se trouve, il est bien trop tôt pour une tasse de café. Enfin bon, lui ça ne l’a jamais dérangé.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, il peut parfois être sympathique et agréable et la jeune femme vient d’en avoir la preuve puisqu’il lui a proposé de la servir. Ce n’est pas un privilège qu’il offre à tout le monde. Faut croire qu’il est du matin – ou de la nuit en l’occurrence. Elle accepte, il tire une tasse propre posée sur le comptoir qu’il remplit avant de la pousser en direction de la demoiselle. Il lui demande l’heure par la suite, après avoir aperçu l’extérieur et l’obscurité qui y règne. Il est plus un peu plus de quatre heures. Il a donc dormi moins de deux heures. C’est déjà ça. Elle est beaucoup trop bavarde à son goût, pose trop de questions et il lui faut quelques instants pour parvenir à formuler une réponse qui n’est pas un grognement. « Quelques minutes. » S’il arrive à avoir la notion du temps de façon correcte. « Sommeil agité. » Qu’il répond simplement à sa deuxième question. Il va pas lui faire un briefing quant à ses capacités restreintes à trouver le sommeil, pas sûr que ça l’intéresse et il ne la connait pas assez pour s’ouvrir à ce point. « Et toi ? » Elle a une petite mine, mais sa capacité à déblatérer plus vite que son ombre lui fait penser qu’elle est peut-être réveillée depuis longtemps. Ce qu’elle lui annonce par la suite a le don de l’agacer. « Méchant ? » Il répète, sceptique. Il est suffisamment réveillé pour se souvenir de la signification de ce mot, mais il ne serait pas contre quelques précisions. « Je crois que tu n’as pas saisi le concept du paintball. Il faut tirer sur les gens, je l’ai fait et d’autres aussi. » Grâce à sa remarque quelque peu déplaisante, il est désormais pleinement conscient pour lui répondre. Il marque une légère pause pour reprendre une gorgée de café avant de poser à nouveau le regard sur la blonde. « Pourquoi je serais plus méchant qu’un autre ? » Il faut vraiment qu’elle l’éclaire là. Il commence à la replacer, c’est la partenaire du larbin, peut-être qu’elle n’a pas apprécié qu’il l’attaque lui et pas un autre à peine arrivé sur le terrain. Mais dans l’ensemble, il s’est attaqué au larbin trois ou quatre fois, pas plus si ses souvenirs sont bons. Peut-être que c’est son visage qui lui donne l’impression qu’il est méchant. Oui, c’est sûrement ça.  

Il n’a dormi que deux petites heures, mais ce n’est pas négligeable compte tenu de son sommeil très souvent agité – toutes les nuits en fait – et il s’est habitué à dormir peu. Ainsi, il ne tarde pas à répondre à la question de la demoiselle.  « Oui. » Beaucoup trop souvent à son goût, en réalité. « Et à toi ? » Qu’il sache si ça lui arrive souvent ou non, si ça trouve elle va devenir sa super pote d’insomnie. Si lui est réveillé depuis quelques minutes, elle, elle n’a pas la même notion du temps. Et elle parle, elle parle sans-cesse qu’il n’ose pas l’interrompre avant qu’elle ait fini. « Tu peux toujours dormir avec quelqu’un si besoin. » Si vraiment ses cauchemars ne sont pas décidés à la laisser en paix. Elle peut toujours compter sur son partenaire, ou sur quelqu’un d’autre, il ne doute pas de sa capacité à se trouver une compagnie pour la nuit. Quant à savoir si ça sera passé ce soir, il ne sait pas, il n'est pas voyant alors il s'abstient de lui donner une réponse. Il est ensuite quelque peu agacé par sa remarque sur le fait qu’il serait méchant, il ne manque d’ailleurs pas de répondre, mais visiblement elle a des arguments qui défendent sa thèse. Il la laisse parler, encore et encore, avant de reprendre la parole quand elle se tait, point par point. « Je ne me suis pas acharné sur ton petit camarade en particulier. » Le petit camarade étant Adnan le larbin, il fait bien évidemment référence à lui et elle doit probablement l’avoir compris. « Mais peut-être que j’aime ça. » S’acharner sur les autres, être méchant. Ce n’est pas vrai, mais la réflexion de la candidate l’ayant passablement énervé, il compte bien se moquer légèrement d’elle, d’autant plus qu’elle a l’air assez crédule. « Ça m’arrive de sourire, oui. Et non, tu ne peux pas voir. » Alors, certes, ce ne sont pas des sourires jusqu’aux oreilles à s’en décrocher la mâchoire, plutôt des sourires timides, des rictus moqueurs, mais oui, ça lui arrive. Sauf que là, le seul sourire qu’il peut lui offrir est un sourire forcé, et il se doute qu’il ferait plus peur qu’autre chose. Il peut toujours essayer si elle insiste, mais il aura certainement l’air d’un requin. « Je ne suis pas méchant, mais je ne suis pas gentil non plus. » Qu’il termine. Il est entre les deux. Il ne martyrise personne – contrairement à l’impression que  sa rencontre avec Adnan a pu donner – mais il n’est pas non plus un gentil jeune homme qui se plie en quatre pour les autres. « Mais toi tu l’es, je me trompe ? » Gentille. Il n’a pas vraiment besoin d’avoir confirmation, elle pue la gentillesse incarnée à trois kilomètres. Il ne juge pas, il en faut des gens comme elle sur cette terre. Il ne fait pas plus d’effort pour discuter, de ce qu’il a vu elle n’est pas avare en questions, et comme ça le dérange moins d’y répondre que de les poser, il préfère se concentrer sur sa tasse de café en attendant la prochaine réflexion de la jeune femme. Tasse qu’il ne manque pas de vider à moitié, c’est qu’il devient bavard et que sa bouche est desséchée. Faudrait peut-être qu’il pense à lui demander son prénom, tiens, mais ce n’est pas à l’ordre du jour pour l’instant.