Gratter sur ma guitare, l’activité que je préfère et qui me déstresse le plus facilement. Je n’ai pas trop eu l’occasion de profiter de ma bonne vieille guitare achetée lors d’un passage éclair en France quelques années en arrière, il faut dire qu’il y a toujours quelqu’un dans les environs et je n’ai pas envie d’écoper du titre de casse pied de la baraque. Avec un peu de jugeote je me serais rendu à la salle de musique pour être pénard mais figurez-vous que j’y ai toujours trouvé quelqu’un que je n’ai pas voulu déranger. Il semblerait que ce soir je sois enfin tombé au bon moment, personne ne se trouve à la salle de musique, peut-être parce qu’il est plus de vingt-deux heures. Je tiens ma guitare d’une main et un bon verre de rosé d’une autre. J’allume la lumière et me glisse dans la pièce, de très bonne humeur et inspiré. Je prends une petite minute pour déposer mon verre sur le sommet du piano puis je m’installe sur une chaise juste à côté pour pouvoir sortir mon médiator jaune qui va me permettre de faire raisonner les cordes de ma guitare. Je n’ai pas forcément la voix qui impose l’évidence lorsque je chante mais personne ne s’est jamais plaint non plus, il parait qu’elle est très grave, parfois éraillée mais étonnamment puissante dans les petites notes aigües. « Ain't no sunshine when she's gone. It's not warm when she's away. Ain't no sunshine when she's gone and she's always gone too long… Anytime she goes away. » J’y vais en douceur, reprenant cette chanson de Bill Withers que ma grand-mère m’a appris lorsqu’elle m’a donné mes premières leçons de guitare.

Spoiler:

Je suis passionné par la musique depuis mon plus jeune âge. J’ai grandi dans le flamenco, les airs chantants et dansants mais j’ai très vite appris à évoluer et à me diriger vers d’autres genres pour gagner en diversité. Il m’arrive encore très régulièrement d’attraper ma guitare pour mettre l’ambiance après une bonne soirée de fête foraine terminée sur un air de musique gipsy mais j’aime revisiter certains classiques différents. Il m’est arrivé de réadapter certaines balades à la guitare d’une manière surprenante, rien que pour le plaisir de faire les choses différemment et je dois admettre être assez fier d’y être arrivé la plupart du temps. Alors non, je n’ai pas la voix qui révolutionnera l’industrie du disque mais ma passion me permet d’apporter plus d’ampleur à ma voix pour combler certaines petites imperfections. Je suis donc au taquet, sur cette chanson de Bill Withers lorsqu’une voix s’élève derrière moi. « I wonder this time where she’s gone. Wonder if she’s gonna stay » Mon sourire s’étire, je tourne la tête pour regarder Eryk et reprendre en cœur. « Ain't no sunshine when she's gone and this house just ain't no home. Anytime she goes away. » Je termine ce petit moment chanté par un rapide solo de guitare que j’abrège volontairement. « Tu t’entraines pour the Voice ? Ou X Factor peut être ? Je peux faire le jury si tu veux. » Carrément ? Je dépose prudemment ma guitare au sol entre mes jambes pour pouvoir attraper mon verre de rosé et en boire une petite gorgée. « Je n’ai pas le niveau pour, mais j’ai toujours rêvé d’être devant un jury, lâches-toi ! » Je serais presque excité de le voir endosser cette étiquette. « Eryk c’est ça ? » J’ai plutôt bien retenu les prénoms de mes camarades et j’en suis le premier surpris.