Le prime se termine, avalisant l'élimination d'Elin, ma partenaire de début de jeu. J'esquisse un air un peu déçu mais de là à dire que je suis triste, que ça me bousille ma soirée, que ma semaine est foutue, ça serait un peu fort. Je m'étais un peu attaché à elle, à sa présence flamboyante, elle faisait partie de mon quotidien et je trouve dommage pour elle d'avoir été éliminé aussi tôt. Mais je n'en oublie pas que je suis mon principal souci. Aussi, je lui adresse un au revoir sincère et canalise toute mon attention pour aller aux nouvelles. Je suis à présent seul, ce qui veut dire qu'on va, normalement, m'attribuer un tout nouveau binôme, et je suis curieux de connaître son identité. Mon regard papillonne jusqu'à Percy à l’évocation de nos deux prénoms. Ma première réaction est une douloureuse envie de rire mais, charitable, je me pince les lèvres dans un rictus pensif et ne pipe mot jusqu'au moment de quitter le plateau. Je reprends la direction du nid en compagnie de Clémentine, tout à sa joie de savoir qu'elle a à présent la possibilité de tester une nuit dans la chambre orientale si l'envie lui en prend. Inutile de préciser qu'elle se fera une joie de squatter voire de m'exclure de mon propre lit. Fatiguée, elle m'abandonne sur le pallier de la porte d'entrée. Je n'ai pas sommeil, pas du tout même. Aussi, déambulant encore un peu sur les terrasses, jusqu'à atterrir sur le rebord de la fontaine, je m'allume une clope, le nez levé vers le ciel et l'esprit ailleurs. Ce n'est qu'au bout d'une dizaine de minutes et d'une nouvelle clope au creux des lèvres que j'aperçois une silhouette se détacher dans l'obscurité à peine perturbée par les éclairages bordant la façade. C'est Percy. Il revient du plateau, j'imagine. Il semble me repérer au moment où je le repère et lorsqu'il arrive à ma hauteur, je lui tends une cigarette. C'est qu'on est binômes, maintenant. « T'as un lit entier pour toi seul, j'ai un lit entier pour moi seul » j'avance. Maddy n'est plus là, et Elin non plus (sans parler de son clébard). Leurs places vacances nous laissent tous deux l'occasion de profiter d'un matelas deux personnes sans être dérangés par un corps étranger. « Je te propose qu'on ne s'essaie pas à la colocation » j'esquisse un fin sourire. Qui dit qu'on est obligés de dormir ensemble ? N'y a-t-il pas des lits en suffisance même si on reste chacun de notre côté ? Pas que ça me dérange de l'avoir dans mon espace vital, mais... Ouais, je suis bien tout seul. Et je ne doute pas que lui aussi. Cette solution lui semblera sans doute la meilleure. Silencieux, alors, j'inspire une longue bouffée salvatrice sur ma cigarette, les doigts posés dessus, avant de la souffler lentement, prenant le temps de la regarder s'évaporer au vent. « Je ne vais pas te mentir, ça m'arrange de savoir que tu ne pistes plus mon secret. » Inutile d'être hypocrite. Maintenant qu'il est mon partenaire, il n'a en toute logique plus la possibilité de me buzzer et c'est bon pour moi. Je ne suis pas con. Il avait des indices, il avait la volonté et je le sais parfaitement capable de faire fonctionner ses méninges pour finalement mettre le doigt en plein sur mon secret. « Mais quand même, désolé mec, tu dois être blasé. » À sa place, je le serais. Il a tout de même dépensé près de dix mille boules pour obtenir ces indices, n'importe qui aurait la rage, dans cette situation. Et honnêtement, je regrette presque pour lui.

Ce prime l'avait gonflé, et c'était même peu dire. Parce qu'outre le fait qu'il se soit passablement fait chier comme un rat mort, la soirée s'était terminée sur une note hautement frustrante pour l'anglais. Lui qui avait passé les derniers jours tout seul avait ce soir hérité d'un nouveau binôme, en la personne d'Hadrien. Que personne ne se méprenne, il trouvait ce type intéressant, et il est même possible que ce soit l'un des rares garçons avec qui former un 'couple' le dérangerait dans une moindre mesure, peut être parce qu'il ne l'imaginait pas lui rendre les choses compliquées. Seulement voilà, le problème, ça n'était pas tant Hadrien que son secret. Un secret qui intéressait hautement Percy depuis quelques jours, vu qu'il avait dépensé pas moins de dix-mille euros pour obtenir deux indices susceptibles de l'aiguiller un petit peu. Et voilà que ce soir, il entendait dire que ce secret pour lequel il avait considérablement amoindrie sa cagnotte, et bien il ne pourrait plus espérer le buzzer. Du coup, il quitta le plateau pour le moins blasé, sans tellement chercher à adresser le moindre mot à qui que ce soit, préférant sortir prendre un peu l'air, ce qui le calmerait sans doute mieux que n'importe quoi d'autre. Alors il marcha jusqu'au jardin, au sein duquel il évolua jusqu'à arriver à quelques mètres de la fontaine, près de laquelle il put distinguer un candidat, qui très vite lui apparut comme étant Hadrien, justement. L'anglais savait que ce serait vache, de lui faire payer sa frustration, alors il poursuivit sa marche jusqu'à arriver non loin de son désormais partenaire, à qui il adressa un signe de tête reconnaissant lorsqu'il lui tendit une clope, avant d'afficher une moue partiellement amusée. « Ce serait pas plus mal, effectivement, parce que j'ai une façon un peu particulière d'apprendre à connaître mes partenaires, et je suis pas sûr qu'elle te plairait » qu'il répliqua sur un ton plutôt équivoque, car faisant évidemment référence à ce qu'il s'était passé avec Maddy, sa première partenaire. Nul doute que si Hadrien voyait où il voulait en venir, il lui confirmerait que c'était préférable de faire lit séparé. Parce que si Percy n'avait jamais montré de penchants homosexuels, qui sait ce qu'il se passerait si, déboussolé, il en oubliait un instant que c'était un mec qui partageait son lit. Prenant une taffe, l'anglais fut forcé d'esquisser un maigre sourire au moment où Hadrien évoqua de lui-même son secret. « Je m'en serais pas du tout douté » souffla-t-il alors sur un ton un peu léger, peut être avec l'envie de ne pas dramatiser excessivement les faits. Son partenaire se disait désolé, et il haussa machinalement les épaules, plus fataliste. « Je l'ai mauvaise, c'est clair. Pour tout le fric que j'ai dépensé vainement, bien sûr, mais aussi parce que je peux plus me creuser les méninges et que ça, ça me frustre vraiment en tant que joueur. » Il pouvait dès à présent abandonner toutes ses pistes, elles ne lui serviraient plus à rien. Pourtant, il savait qu'il aurait été capable de faire les bons liens, de creuser les bonnes idées. Il avait peut être bluffé l'autre jour, mais il aurait fini par y voir plus clair, il le savait. « Puisqu'on parle de secrets, y'en a qui t'intriguent particulièrement, toi ? » Il n'avait jamais vraiment eu l'occasion de parler de ça avec d'autres candidats, alors autant profiter de cette occasion pour voir si comme lui il avait potentiellement quelques cibles. Peut être les mêmes, d'ailleurs, si ça se trouve. « Me cite pas celui du mec blindé, vu qu'on est tous prêts à prétendre que son secret nous intéresse alors que c'est son blé, uniquement, qui nous fait de l’œil. » Il était bien le premier à assumer de vouloir faire main basse sur une pareille cagnotte, alors que le type, il ne lui avait jamais vraiment adressé le moindre mot, comme beaucoup certainement.

Si je le propose aussi naturellement, c'est parce que je suis certain que Percy sera exactement du même avis que moi. Allez savoir pourquoi, quelque chose me dit qu'il n'est pas du genre à aimer partager son lit, même chastement, et dans ce cas-ci, totalement chastement, avec un mec. Ne serait-ce que pour entretenir son image, j'imagine. Ça a quelque chose de marrant. Enfin, moi, ça me va. Ça m'offre tout loisir, sans devoir ruser, sans passer pour le radin de service, de profiter moi aussi d'un matelas entier sans devoir faire gaffe à l'autre personne, juste à côté. Parce que c'est facile de partager un lit avec sa copine, ça n'a rien de gênant de se réveillé collé à elle ou un peu trop près ou dans n'importe quelle situation un peu ambiguë. Lorsqu'il s'agit d'une inconnue, en revanche, il faut un certain temps d'adaptation avant d'être totalement à l'aise, de ne pas avoir peur de s'étaler, de lui piquer son coussin, la couette. Alors un mec, n'en parlons même pas. « Ouais, garde ça pour ce qui est doté d'un vagin, je n'ai pas envie d'être obligé de te couper les couilles, quelque chose me dit que t'as encore de grands projets pour elles » je rétorque, amusé. Quand on y pense, Percy a quand même tout du gros relou accro au cul mais il a également quelque chose qui le rend sympathique malgré tout. Aussi, je ne m'en formalise pas une seconde. Je m'en fous un peu de qui il s'amuse à dragouiller. Captant une longue inspiration sur ma cigarette, je l'écoute d'une oreille m'expliquer la façon dont il vit la situation. Bon, ça n'a rien de dramatique non plus, mais j'imagine que dans le contexte dans lequel nous sommes, c'est ce qui se rapproche le plus du bon gros merdier. « J'te fais confiance, t'auras pas de mal à en saquer un autre » je dédramatise. Il a la détermination pour, ça se voit comme le nez au milieu de la figure. Donc ouais, je lui fais totalement confiance sur ce coup-là. Je détourne finalement la tête dans sa direction lorsqu'il me questionne, m’amenant à me plonger dans mes pensées. « Andreja ? » Je crois bien que c'est lui qui est en tête des cagnottes. Je n'ai que moyennement fait attention, pour être honnête, et mon regard n'a que survolé le récapitulatif des gains. Mais je ne pense pas dire de connerie. « T'as raison, son secret en lui-même ne m'intéresse pas plus que ça » j'admets sans le moindre problème ni tact. Tout simplement parce que je ne lui ai absolument jamais adressé la parole, donc je ne vois pas trop pourquoi ce qu'il cache m'intéresserait, lorsque même ce qu'il montre ne m'intéresse pas. Donc même s'il a la plus grosse cagnotte du nid, je ne vais pas perdre mon temps à investiguer sur lui. Évidemment, si on m'offre des indices ou la possibilité quelconque d'avoir un point de départ dans de potentielles recherches, là, pourquoi pas. Mais sinon... « Je préfère me pencher sur ceux des candidats que j'apprécie. » Ceux dont la vie m'intrigue, ceux que j'ai soif de connaître. Car le secret est une information comme une autre, voire encore plus capitale. Il est donc normal d'avoir envie de le voir révélé. « Genre Paloma, Ana, Mallaury » j'énumère pensivement. Eux en particulier, mais il y a aussi Noah, Tilda, ou encore Pia, dans une moindre mesure, cela dit. Et bien évidemment, il y a celui de Clémentine, mais la vérité, c'est ce que je la connais tellement bien que j'en viens à me demander si ce n'est pas quelque chose que je sais déjà. Ce qui serait franchement drôle. « Il y avait le tien aussi » j'ajoute avec un sourire. Percy est un bien drôle de personnage, celui qui le nie est un menteur, et il interpelle de par son attitude, de par son caractère, nettement singulier. Ça me suffit pour me demander ce qu'un comportement tel que le sien peut bien cacher. Enfin, j'imagine que je le saurai bien assez tôt, maintenant. Parce que contrairement à lui, je n'avais pas particulièrement de pistes sur son secret. Sur d'autres oui. « Je suis curieux de voir si ça va changer quelque chose à la façon dont je les vois. » On est d'accord, le secret d'une personne est supposé représenter quelque chose d'inhabituel, d'improbable, d'incroyable dans sa vie. Forcément, sa révélation offrira une toute autre vision sur le candidat en question, parfois pour le pire, parfois pour le meilleur. Mon secret, par exemple. J'imagine que certains me verront différemment, une fois découvert. « Et toi, d'autres cibles ? » D'autres que moi, s'entend. Je ne pouvais quand même pas être sa seule victime, ça deviendrait un peu glauque.

S'il est vrai que Percy avait eu une façon un peu particulière de se rapprocher de sa précédente partenaire, il était relativement peu probable qu'Hadrien lui inspire le même genre d'envies, parce qu'il fallait bien avouer qu'aussi charismatique soit-il, il aurait du mal à lui faire de l'effet. Toutefois, il s'amusa à laisser entendre que ouais, peut être bien que la façon qu'il aurait eu de se faire à ce nouveau partenariat aurait pour le moins déplue à Hadrien, et la réflexion de celui-ci lui tira un rire spontané. « Bah c'est surtout qu'à mon avis, tu risquerais de faire quelques malheureuses ... que dis-je, quelques suicidaires ! » qu'il énonça alors, l'air de rien. Un Percy sans couilles, ce serait un Percy très légèrement handicapé, qu'on se le dise, puisqu'effectivement il tendait à penser qu'elles avaient encore de beaux jours devant elles, ses roupettes. Son partenaire mit alors le sujet sensible sur la table, celui du secret que Percy n'aurait jamais l'occasion de découvrir par lui-même. Bien sûr que la situation l'agaçait, mais Hadrien avait raison, il ne comptait pas rester sur cet épisode et s'empêcher d'en chercher d'autres, des secrets. Ainsi hocha-t-il doucement la tête, avant de chercher à savoir si Hadrien, de son coté, avait en soi des pistes sur certains secrets, justement. Il voulait se faire une idée des candidats susceptibles de l'intéresser. Lui, il préféra d'emblée le prévenir qu'il aurait du mal à le croire s'il citait ... Andreja ? Ah, non, visiblement ils ne parlaient pas du même gars. « Ah non, moi je parlais du type qui s'est fait plein de blé sur une devinette, tout à l'heure. Tu sais, celui dont la tronche orne le salon. » Noah, lui semble-t-il. Ou le mec pas franchement mémorable par excellence. Bon mais, comme l'anglais l'avait laissé entendre, il assumerait de s'intéresser uniquement à sa cagnotte, alors si une illumination lui venait, il buzzerait sans hésiter. Hadrien disait s'intéresser davantage aux secrets des candidats qu'il appréciait, ce qui n'était pas sans logique. Ainsi il l'entendit énoncer plusieurs noms, et le troisième eut tendance à l'amener à froncer doucement les sourcils. « Je sais pas ce qui m'étonne le plus : que t'apprécies Mallaury ou bien que son secret t'intéresse. » Il était honnête, il n'allait pas lui dire que Mallaury cachait certainement un truc puissant alors qu'il était juste persuadé que ce mec cachait un petit traumatisme qu'il devait voir comme le drame d'une vie, alors que le commun des mortels aurait tendance à facilement s'en remettre. Apparemment, Hadrien s'était aussi plus ou moins intéressé au sien, de secret, et il accueillit cette confession avec un maigre sourire. « Y'a pas grand monde qui pourrait a priori le trouver, mais toi t'en aurais probablement été capable, avec le temps. » Parce qu'il était loin d'être con, certainement observateur et logique dans son genre. C'était peut être prétentieux d'estimer que son secret était particulièrement à l'abri, mais il était prétentieux, il allait falloir s'y faire. Son partenaire disait alors être curieux de savoir ce que changerait la découverte des secrets de ceux qu'il appréciait sur sa façon de les voir, et c'est vrai qu'au bout d'un mois, tout le monde devait finir par se le demander. « A mon sens, c'est inévitable. Le regard qu'on pose les uns sur les autres changera forcément dès que les masques tomberont, et ceux qui auront mis le plus d'énergie à protéger leur secret n'auront alors plus qu'à assumer les conséquences de tout ce qu'ils auront été prêts à faire pour ça. » Est-ce qu'il pensait au sien, de secret, là tout de suite ? Certainement. Parce qu'en soi, bien sûr qu'il se donnait du mal pour le protéger. Personne ne pouvait l'avoir remarqué, mais l'anglais à l'air si impassible n'avait pas chômé. Et donc oui, certains trucs lui retomberaient dessus s'il était encore là au moment de révéler son secret. « Comme toi, le secret de Paloma m'intrigue, au même titre que ceux d'Errol, d'Elsa et de Tilda. De Ghika aussi, j'avoue. » Parce qu'ils étaient certes très différents, il n'empêche que ce mec ne passait pas inaperçu et que ça l'intéresserait de savoir ce qu'il pouvait cacher, parce que peut être que c'était plus profond que ce à quoi on s'attendrait en le voyant. Très certainement, en fait. « Au fait, maintenant tu peux bien me le dire, t'as à aucun moment gobé mon numéro pourtant ô combien convaincant de la semaine dernière ? Que je sache si le cinéma est une reconversion envisageable à ma sortie. » Il ironisait, preuve qu'il arrivait à prendre un peu plus de recul. Non pas qu'il ait cherché à remporter un oscar ce jour-là, mais quand même, il aurait aimé qu'il se sente un tout petit peu menacé.

Des suicidaires, rien que ça. Il ne doute vraiment de rien, le Percy. Ça a quelque chose de drôle, presque distrayant. Les gens prétentieux m'ont toujours moins agacés que la moyenne de gens, parce que je suis un petit bourgeois et que j'ai l'habitude. Enfin, ici, je suis loin d'être le riche de la bande, il faudrait que je parvienne à péter un secret, par exemple, pour obtenir ce statut. Quoi que Noah, que Percy évoque, n'a même pas eu besoin de ça. La chance a suffit. « Ah ouais, c'est vrai qu'il vient de me sucrer la cagnotte d'Elin » je fais mine de maugréer, parce que bon, évidemment, je songe d'abord à la perte de ma première partenaire, mais tout de même, j'aurais préféré qu'elle me revienne à moi, sa cagnotte, ou la moitié de sa cagnotte, je ne sais pas très bien. Le hasard veut, toutefois, que ça soit Noah qui la récupère, Noah dont le secret m'intéresse aussi, bien que je ne le cite pas parmi ceux me rendant le plus curieux. Il relève un prénom en particulier, alors, et face à son incompréhension, un sourire naît doucement sur mes lèvres. « Et moi, ça ne m'étonne pas du tout qu'il ne te revienne pas. » C'est qu'on peut difficilement faire plus radicalement opposés que Percy et Mallaury. Même en réfléchissant bien, je ne leur trouve absolument aucun point commun. Évidemment, je suis loin de les connaître parfaitement, l'un comme l'autre, mais ils ont des caractères, des comportements, des pensées si différents qu'il est difficile d'imaginer que quoi que ce soit puisse les lier. « Quoi que si on était dans un film con de lycée américain, vous deviendriez les meilleurs amis du monde, liés par vos différentes et unis par votre complémentarité » je le charrie, avec tout le mélo-drame feint à ma disposition. Les deux antagonistes que tout oppose, jusqu'à se rendre compte que chacun apporte à l'autre ce qui lui manque. Classique. Mais il se trouve qu'on est dans la vraie vie, là, alors je ne place pas plus d'espoirs que ça dans leur réconciliation. Ce sont leurs affaires, de toute façon. Je me mets à songer à son secret, alors, et je me surprends à avoir hâte de savoir de quoi il retourne. La vérité, c'est que j'ai pas la moindre idée, et qu'il affirme que j'aurais pu être capable de le trouver me surprend un peu. Est-ce quelque chose d'évident, de si évident que personne ne le remarque ? Ça pourrait. J'ai l'impression que c'est mon cas, par exemple. Mais bon, là encore, c'est certainement car je le connais, mon secret. Et j'en viens à imaginer la réaction de Percy lorsqu'il l'apprendra. Lui qui cherchait, ça ne l'étonnera peut-être pas tant que ça, j'ignore où se situait, s'il était proche ou pas du tout. Sa vision de moi changera peut-être. Peut-être pas du tout. Je hoche la tête, l'air pensif. C'est drôle, dans un sens, parce qu'en soi, de façon générale, on ne fait que disposer d'une information en plus sur la personne qu'on côtoie. Elle n'en devient pas pour autant un total étranger. « Il y a un truc en particulier qui te décevrait ou te dégoûterait, si ça venait à être le secret de quelqu'un ? » je le questionne, curieux. Moi-même, je n'en ai aucune idée. Là, tout de suite, je serais bien incapable de dire ce qui pourrait me choquer. Bon, c'est clair que j'aurais du mal à regarder quelqu'un de la même façon si elle m'annonçait que son secret est d'être un assassin ou toute la panoplie des sévices corporels ou psychologiques à disposition des êtres humains. Mais mis à part ça, étant plutôt tolérant, de façon générale, j'imagine que ça sera au cas par cas. « Reconnais que c'est la jupette qui t'a émoustillé » je me marre, en revoyant encore Ghika affublé d'une jupe et particulièrement fier, en plus. Franchement, on a beau me dire que j'ai une attitude un peu "je m'en bats les couilles" vestimentairement parlant, je n'aurais jamais osé ça. Je savais même pas que les jupes pour homme existaient, pour tout dire. À part les kilts, quoi. À nouveau, je souris lorsqu'il évoque une précédente confrontation entre nous. Je revois encore parfaitement la scène, ses airs grandiloquents, son assurance imperturbable. « Je n'ai pas douté un instant que tu sois capable de trouver mon secret mais honnêtement, ta tentative d'intimidation donnait plus l'impression que tu fanfaronnais, c'était trop gros pour être vrai. » je réponds en toute sincérité. Ça se voyait un peu que c'était du bluff. En général, une personne dans la situation qu'il mimait ne se serait pas amusée à venir provoquer sa cible, à moins d'être inconscient. Le résultat, c'est que j'aurais très bien pu le pister à mon tour, afin d'être certain qu'il me foute la paix pour un moment. « T'as pas vraiment besoin de ça pour être menaçant ou pour être pris au sérieux. » Ce n'est pas pour qu'il attrape la grosse tête, c'est juste que je le pense. « Essaie plutôt le one-man-show. » je lance avec un petit sourire. Bon, il a de quoi faire, en sortant d'ici, entre son bouquin et son spectacle.


(désolée pour le retard )