w/elsa

Ce n’est pas dans ses habitudes de manger en groupe, et même si cette semaine il s’est mêlé aux autres un peu plus que la normale, en ce jeudi, il reprend, l’espace de quelques heures, ses mauvaises habitudes en s’isolant. Il faut dire aussi qu’il n’avait pas particulièrement faim jusqu’ici et qu’il ne voyait pas l’intérêt donc de se mélanger aux autres juste pour faire acte de présence. Mais sur le coup des vingt-et-une heures, il doit s’avouer vaincu, son estomac criant famine. Il prend donc le chemin de la cuisine et c’est sans surprise qu’il découvre qu’il est seul. Il cherche quand même dans le réfrigérateur s’il n’y a pas des restes, flemme de cuisiner oblige. Il y en a, mais rien qui ne le tente particulièrement. Il n’a donc d’autres choix que de se mettre aux fourneaux. Enfin, c’est vite dit, parce qu’il ne compte pas passer deux heures derrière la cuisinière, non, il va se contenter d’une recette simple et efficace, à savoir la pâte à crêpes. Il est en pleine préparation de quelques crêpes pour son souper quand Elsa entre dans la pièce. Elsa, qui est dans la même galère que lui cette semaine, à savoir sur le banc des nominés. « Je te proposerais bien de nous saouler pour oublier la nomination, mais je carbure à l’eau, donc ça risque d’être difficile. » Quoi que, si ça se trouve, elle ne boit pas non plus d’alcool. On ne peut pas dire qu’il la connaisse beaucoup, ce ne serait pas surprenant que cette information lui ait échappé jusqu’ici. Et si elle en boit, elle peut tout à fait se servir sans se soucier de lui, ça ne le dérange pas. « Alors ma seule alternative, ce sont les crêpes, si tu en veux. » Rien de bien surprenant à cette annonce, la plupart des candidats carburent aux crêpes, il a l’impression. Faut dire que pour les grands experts de la cuisine comme lui, ce n’est pas difficile à préparer et c’est une valeur sûre. Bon, en cuisine, il n’est pas non plus complètement largué, mais comme il n’a pas toujours la chance d’avoir un équipement à portée de mains, on ne peut pas dire qu’il s’occupe souvent de faire des grands repas. Et puis ici, ce n’est pas son intention de nourrir tout le monde, Elsa a déjà bien de la chance de s’être vue proposée une telle offre, c’est un événement qui n’arrive qu’une fois dans une vie, oui.

L'heure du dîner est déjà passé depuis un moment et pourtant, je n'ai encore rien avalé ce soir. C'est de la faute à ma fainéantise légendaire, je n'avais simplement pas trouvé le courage de rejoindre la cuisine au moment où je devais le faire. Maintenant, il me fallait affronter mon estomac grognant plus fort qu'un ours et dérangeant tous les candidats se trouvant dans la même pièce que moi. Craignant de me faire déguerpir à coups de pieds au cul, j'obtempère et prends la décision de donner à mon estomac ce qu'il réclame. Marchant avec légèreté jusqu'à la cuisine, je pousse distraitement la porte pour tomber sur Alistair. Le candidat m'étonne lorsqu'il prend directement la parole, on ne peut pas dire qu'il m'avait habitué à cela. Ce n'est vraiment pas pour me déplaire, j'apprécie le fait qu'il le fasse et ça me met bien plus à l'aise que lorsque je me retrouve face à un candidat complètement muet. Je lui souris, avec beaucoup d'honnêteté, lorsqu'il m'annonce qu'il aurait pu me proposer une soirée de beuverie pour oublier la nomination qui pèse sur nos épaules cette semaine. «J'ai déjà subis les méfaits de l'alcool au début de la semaine, je suis pas prête de recommencer. » J'avais un peu abusé des cocktails en fin de prime et en avais ensuite payé les conséquences. Vouloir oublier une nomination, ça ne sert à rien puisque la réalité te rattrape tôt ou tard. On oublie pas indéfiniment et il nous faut, à un moment donné, accepter le choix de nos camarades de jeu. «Mais je veux bien une crêpe, merciiiiiii.» J'dois avoir l'air d'une gamine mais je suis franchement contente qu'il me propose parce que j'avais pas le courage de me faire quelque chose. «Alistair, tu fais quoi dans la vie ? » Par simple curiosité, parce que j'ai envie d'en apprendre un peu plus sur le candidat qui se trouve à côté de moi. Je me rends compte que je risque peut-être de partir et que je n'ai pas encore eu le temps de connaître tout le monde, peut-être que je passe à côté de personnes vraiment sympas et ça serait franchement dommage.

Quand il voit Elsa entrer dans la cuisine, la seule chose qui lui vient à l’esprit est la nomination de la jeune femme. Enfin, leur nomination respective, puisqu’il a également la chance de passer par là. Il lui proposerait bien de se saouler pour oublier le temps d’une soirée le grand soir qui approche doucement, mais manque de pot, il ne boit pas, bien que dans la situation actuelle ça l’aurait bien arrangé, car même s’il est relativement détendu cette semaine, il doit reconnaître que la pression monte peu-à-peu, à mesure que dimanche approche. « Tant mieux dans un sens, ça t’évite de trinquer seule. » Il rétorque brièvement, avant de lui proposer à la jeune femme de compenser cela par des crêpes. Elle arrive au bon moment, puisqu’il s’apprêtait à cesser ses cuissons pour se mettre à table. Bien que les crêpes soient un repas incontournable et apprécié de tous, ce n’est pas pour autant qu’Alistair comptait se goinfrer, on ne peut pas dire qu’il ait l’appétit d’un ogre, il a involontairement préparé trop de pâte, bien que ce soit une bonne nouvelle pour Elsa, du coup. Il hausse un sourcil à sa façon de répondre. C’est vrai qu’il n’a pas l’habitude de côtoyer Elsa, mais surtout, il n’est toujours pas habitué aux gens de bonne humeur. Même si lui est plutôt dans cet état d’esprit cette semaine, il n’est pas encore à ce stade-là, alors oui, c’est encore un comportement qui le surprend, bien que ça l’agace légèrement moins qu’il y a quelques semaines en arrière (notamment la fois où il avait croisé Jaheim dans cette même cuisine, se déhanchant sur la musique, c’est une vision qu’il aimerait encore oublier). « Je te laisse te servir. » Il déclare, en montrant l’assiette à côté de lui. Bien que pour le coup, elle n’ait pas vraiment besoin de sa permission puisqu’il le lui a proposé. Mais disons que c’est plus une façon de lui faire comprendre que s’il veut bien s’occuper de la cuisson des crêpes, elle est assez grande pour se servir toute seule. Elsa se décide à faire la conversation et ça l’arrange, à vrai dire, puisqu’il a fait beaucoup d’efforts ces dernières semaines et il arrive donc d’être fatigué ou à court de sujet de conversation, il est donc bien content qu’elle s’en charge. « Je suis sans emploi. » Il ment un peu. Un peu, parce que s’il est actuellement sans emploi, le temps de l’émission, la véritable réponse serait plutôt sans emploi fixe. Il y a bien évidemment des périodes où il ne trouve rien, mais en général, il alterne d’un petit job à un autre, finit toujours par se faire virer, mais à au moins le mérite de gagner un peu d’argent sur de courtes périodes. Et il sait pertinemment que s’il avait annoncé cette vérité, il aurait eu le droit aux questions lui demandant quels types d’emplois il exerce, quel fut le dernier, etc, comme il en a déjà eu le droit. « Et toi ? Je te vois bien être dans un métier qui nécessite le contact avec les autres. » Aka le type de métier qu’il ne pourrait jamais exercer, bien évidemment. Mais Elsa, sans la connaître très bien, elle a l’air ouverte, et il l’imagine bien faire quelque chose qui nécessite le contact avec autrui. Oui, il la voit vraiment mal enfermée dans un bureau à faire des sondages téléphoniques ou ce genre de choses.

Bien qu'Alistair ne soit pas le candidat que je connaisse le plus dans cette aventure, sa compagnie ne m'a jamais été désagréable. Lorsque je le trouve -par hasard- dans la cuisine, je suis plutôt contente. Je me dis que ça nous fait une discussion supplémentaire avant de peut-être, devoir quitter l'aventure. Les nominations de cette semaine me paraissent assez difficile à départager et je préfère ne pas faire de prognostiques à ce sujet. A mes yeux, nous avons tous les six le potentiel nécessaire pour poursuivre l'aventure. Il n'y en a pas un qui ne me fasse pas peur. C'est cette peur de quitter l'aventure qui m'avait poussé à vider des verres d'alcool lors du prime, une grave erreur quand j'y repense. «Je ne trinque jamais seule, c'est déprimant. » Bon, sauf dimanche dernier peut-être. «Tu ne bois jamais Alistair ?» lui demandais-je soudainement intriguée par les paroles prononcées par le candidat quelques instants plus tôt. Ce n'est pas le genre de question que je poserai dans ma vie de tous les jours mais ici, le moindre détail peut avoir son importance et si cette simple question peut m'aider à avoir des indices sur la vie d'Alistair et pourquoi pas, son secret, je ne vais certainement pas craché dessus. Le brun me propose ensuite des crêpes qu'il a faites de ses petites mains. Une proposition qui me ravie puisque je n'avais absolument pas envie de me mettre aux fourneaux à une heure pareille et que mon estomac n'aurait certainement pas supporté que je saute un repas. Comme vient de m'indiquer que je suis libre de me servir, je ne compte pas me faire prier et j'attrape d'un geste habile l'assiette qu'il me montrait. J'attrape ensuite l'une des crêpes qu'il a cuite et la dispose avec soin dans cette assiette que je dépose ensuite sur la table. Je m'élance ensuite avec légèreté vers l'une des armoires, l'ouvre pour en sortir la pâte à tartiner. Je saisis également une cuillère et je recouvre la crêpe d'une grosse couche de chocolat. «Ca, c'est ce qu'il y a de meilleur au monde ! » m'exclamais-je avec enthousiasme en lui montrant ce que je venais de préparer. C'est d'ailleurs ma fille qui raffole le plus de ce genre de choses, mais elle n'est pas autorisée à en manger à n'importe quel moment. Je tiens à ce qu'elle ai une alimentation équilibrée mais je ne la prive pas de quelques petits plaisirs par moment. Saisissant la crêpe de mes deux mains, je mords goulûment dedans et questionne Alistair sur la vie qu'il a et que j'ignore. Je ne connais pas grand chose à son sujet et j'ai l'impression que chaque information récoltée peut être intéressante. Je commence simplement par le métier qu'il exerce, non pas que ce soit ce que je trouve le plus intéressant, c'est simplement la première chose qui m'est venue à l'esprit. Il est sans emploi. Forcément, d'autres questions surgissent dans mon esprit et je ne me retiens pas. Je les pose sans hésiter en me disant que si il ne veut pas y répondre, il ne le fera pas. Je sais que c'est un homme de caractère et je doute qu'il se laisse intimider par des questions de toute façon. «Tu n'as jamais travaillé ou c'est seulement momentané ? » demandais-je avant de mordre une nouvelle bouchée de la crêpe. «Puis, comment tu fais pour vivre sans travailler ? Tu te fais entretenir ? » On sait tous que les temps ne sont pas faciles pour tout le monde alors je suppose qu'il provient d'une famille riche. Ou qu'il a trouvé quelqu'un qui le financerait un peu, simplement. J'attends d'avoir ses réponses avant de me faire une idée sur le sujet parce que je ne compte pas me faire une fausse idée à son propos. Il se lance à son tour dans la conversation et il y va même de sa petite hypothèse. Un métier qui nécessite le contact avec les autres, il voit juste et cela me fait sourire. «Dans le mille Emile » dis-je comme si il venait de gagner un gros lot «Je suis coiffeuse alors je suis plutôt habituée à écouter les gens parler. Ou à les faire parler. » Personne ne connait une coiffeuse muette à ce que je sache. «Quelle est la chose que tu aimes le plus dans ce nid ? Tu ... Le contact avec les autres, c'était pas ton truc à toi ... Alors qu'est-ce que tu penses de la colocation ? De nous tous. Tu nous supporte ? »

Heureusement, dans un certain sens, qu’elle a déjà abusé de l’alcool en début de semaine, car elle aurait été forcée de trinquer seule. Enfin, pas tout à fait, Alistair aurait trinqué avec elle, mais avec un verre d’eau, ce n’est donc pas tout à fait le même effet. Ceci dit, ça ne dérange pas Elsa qu’ils évitent d’oublier leur nomination respective en agissant de la sorte, car elle n’aime pas trinquer seule, c’est déprimant dit-elle. Possible. Lui connaît pas cela, donc il ne peut pas juger. Elle finit par lui poser une question sur sa consommation et il se contente d’un simple « Jamais. » comme réponse, reprenant ses propos pour les confirmer. Il connait le goût de certains alcools malgré tout, pour les avoir testé il y a de cela plusieurs années, avant qu’il ne décide d’opter pour un mode de vie un peu plus sain dans lequel il n’y avait pas la place pour l’alcool et la cigarette. La cigarette l’a emporté. Il l’invite ensuite à se servir parmi les crêpes déjà prêtes tandis qu’il continue d’en préparer avec le restant de la pâte et quand elle l’interpelle en déclarant que c’est ce qu’il y a de meilleur au monde, il se retourne pour savoir de quoi elle parle. La pâte à tartiner chocolatée, bien évidemment. « Non, désolé, ça ne vaut pas le sucre. » Il réplique, légèrement sarcastique. La pâte à tartiner, il aime bien ça, mais ses crêpes, il les préfère juste avec un peu de sucre. Enfin, tous les goûts sont dans la nature, il dit plus cela dans le but de faire la conversation que de véritablement lancer un débat. En tout cas, il est satisfait d’avoir pu lui faire plaisir avec les crêpes qu’il a préparé, c’est peut-être con, mais il avait oublié la sensation de faire plaisir aux gens, puisqu’il s’avère plus être une véritable déception en temps normal. Il finit la cuisson de la dernière louche de pâte et après cela, prend place aux côtés de la jeune femme, commençant à son tour à s’attaquer aux crêpes, mais au sucre, s’il vous plait. Elle le questionne ensuite sur ce qu’il fait dans la vie et il préfère lui dire qu’il est sans emploi. C’est un petit mensonge, mais à en entendre ses questions, il aurait peut-être dû être honnête dès le départ. « C’est momentané. » Et dieu merci, car malgré tout, il n’aurait jamais supporté l’idée de ne jamais travailler quand d’autres se tuent à la tâche. « En vérité, je ne garde jamais un emploi plus de deux mois. Alors j’enchaine les jobs un peu ingrats. » Enfin, lui qui continue de penser qu’il n’y a pas de sous-métier. Et puis, c’est ainsi depuis dix ans maintenant, alors il s’habitue à ne jamais garder un emploi plus de quelques semaines et à ne pas faire difficile suivant les opportunités qui se présentent à lui. Il fronce les sourcils quand elle évoque la possibilité qu’il soit entretenu. Oh, pitié, non, c’est une hypothèse à laquelle il n’a même pas envie d’envisager. Enfin, ceci dit, sa question est pertinente. « Je squatte ici et là, j’arrive à faire l’économie d’un loyer. Et le reste, je le dépense qu’en nourriture ou pour éponger mes dettes. » Il ne s’achète jamais de nouvelles fringues ni d’objets futiles. Il fait également l’économie d’un abonnement de téléphone, d’internet ou de télévision, puisqu’il a toujours détesté ce genre de technologies, capable de détruire quelqu’un en l’espace de quelques heures, ce n’est pas pour rien qu’il n’utilise pas le compte twitter mis à sa disposition. C’est un réfractaire à ce genre de conneries et il le sera toujours. Il la questionne à son tour sur son métier, évoquant la possibilité qu’elle exerce quelque chose en rapport avec le contact avec les autres. Et il a vu juste, puisqu’elle est coiffeuse. « À les faire parler, surtout, j’ai l’impression. » Il rétorque, sans méchanceté aucune. Mais aujourd’hui précisément, elle pose beaucoup de questions et Alistair qui reste plutôt discret sur sa vie se voit heurter de plein fouet par la curiosité d’Elsa. Et les questions continuent d’ailleurs, par rapport à son parcours dans le nid. Trop de questions à la fois, à vrai dire. Bon, déjà, quant à savoir s’ils supportent ses colocataires, la réponse est toute trouvée. « J’ai encore noyé personne, alors je suppose que la réponse est oui. » Il répond, sarcastique. « C’est toujours pas ma tasse de thé la colocation, je tiens à ma solitude. » Il est parvenu à la limiter, ceci dit, mais il a toujours besoin de se retrouver seul avec ses pensées de temps à autre, c’est vital pour lui. « Mais je commence à me réhabituer à être en contact avec les autres, et bien que je raffole toujours pas de ça, ce n’est pas désagréable. » Non, clairement, il ne sait pas comment font certains pour avoir ce besoin constant d’être entouré, presque H24. Il n’en est pas encore là et il ne le sera jamais, mais pour autant, il reconnait que ne pas toujours être seul à se morfondre dans son coin lui fait du bien et que ce n’est pas aussi pire qu’il l’avait imaginé. Peut-être parce qu’ils ne connaissent pas le véritable Alistair et que pour l’instant, ils pensent encore qu’il est quelqu’un de bien, malgré son caractère atypique. « Toi tu supportes tout le monde, non ? » C’est plus une question détournée pour savoir s’il y a quelqu’un avec qui elle ne s’entend pas, mais il peine à imaginer la jeune femme être en froid avec quiconque, à vrai dire.