Il court. Il court sans s’arrêter, tourne à gauche, à droite, revient en arrière. Mais il ne comprend pas, quelle que soit la direction qu’il prend, il s’engage à chaque fois dans un long couloir sans issue. Il est piégé. À nouveau. Et ça le fait paniquer, parce qu’il n’y a pas de fenêtres ni de portes qui lui permettent de s’échapper de cet endroit. Alors il frappe les murs jusqu’à s’en faire saigner les mains, hurlant jusqu’à ce qu’on lui réponde, qu’on lui montre une issue. Mais ça ne fonctionne pas. Et soudain, les murs se mettent à bouger, à se rapprocher autour de lui et il a beau s’engager dans un nouveau couloir, ça ne change rien, les murs s’approchent toujours plus et finissent par l’envelopper, le presser. Il n’arrive plus à respirer, puis c’est le trou noir. Il se réveille en sursaut, en sueur et met quelques secondes avant de réaliser qu’il n’est plus dans le centre qui l’a accueilli il y a quelques temps, mais bel et bien dans le nid d’amour de Cupidon. Ça ne suffit pas à le rassurer, la sensation de ne pas parvenir à respirer et toujours bien présente. Il ne traîne pas, sort du lit, et disparait dans les couloirs pour retrouver en urgence la cuisine pour y boire un verre d’eau et se passer de l’eau sur le visage avant de s’engouffrer – presque en courant – à l’extérieur. Il n’a pas pris la peine de se changer, il doute de rencontrer qui que ce soit sur le chemin. Et puis, son pyjama n’est pas excentrique, pantalon et pull manches longues de couleur noir, ça pourrait presque passer pour un jogging. Il presse le pas à l’extérieur, marquant une distance entre le nid et lui, ne sachant pas réellement où se rendre. Il laisse ses pas le guider, tout lui convient du moment qu’il ne retourne pas à l’intérieur dans l’immédiat. Il est un peu perdu, tout juste sait-il que minuit est passé. Il avance, jusqu’à ce qu’il retrouve le chemin de la plage. Où là-bas, une silhouette est déjà présente. Il s’approche et grâce à la lumière de la lune, reconnait les cheveux roux de Gaëtane. Bien, c’est exactement le genre de présence dont il a besoin, il continue de s’approcher en direction de la candidate. « Salut. » Il lui lance, avant de prendre place à côté d’elle. Il ne lui demande pas sa permission auparavant, il suppose que depuis le temps, elle accepte sa compagnie. Il dépose ses prunelles sur le ciel, les étoiles. Les étoiles, d’ailleurs, qui ne tardent pas à devenir le sujet de la conversation quand Gaëtane reprend la parole. Il l’écoute raconter son anecdote, un léger sourire aux lèvres. « Et c’est quoi, leurs noms ? » Il demande finalement, tandis que ses prunelles naviguent entre les différentes constellations. Il n’y connait pas grand-chose, il sait qu’il existe la petite ou la grande Ourse, mais il ne saurait pas les reconnaître dans le ciel. Il faut dire qu’il ne sait jamais intéressé plus que ça aux étoiles, vu que durant une partie de sa vie, il ne les voyait qu’à travers les barreaux de sa chambre. Ce n’est pas pour autant qu’il ne sait pas apprécier la beauté et le calme que dégagent celles-ci. Elle fait ensuite référence à une conversation qu’ils ont eue il y a déjà quelques semaines. « Plus impressionnantes, aussi. » Surtout, en réalité. Ce n’est pas comparable, les petites étoiles en plastique de la chambre stellaire, aux vraies. Elles ne sont pas forcément faciles à distinguer, mais elles donnent l’impression d’être minuscule en comparaison de celles de la chambre stellaire. Finalement, il quitte les étoiles des yeux pour déposer ses prunelles sur Gaëtane. « Comment tu te sens ? » Il l’a à peine croisée depuis dimanche, jour de prime, durant lequel il s’était inquiété. Elle lui avait fait comprendre que c’était dû à sa maladie et il espère qu’elle gère mieux les choses aujourd’hui. Il ne sait pas vraiment comment le cerveau de Gaëtane fonctionne, si elle parvient parfois à le mettre en veille ou si cela relève de l’impossible, mais il le lui souhaite. « Oh, bon anniversaire, je crois. » Il lance ensuite, réalisant en recomptant les jours que c’est aujourd’hui, s’il ne s’est pas trompé. Il n’a pas retenu les anniversaires de tout le monde, mais il espère avoir le mérite de s’être souvenu du sien. « Je suis désolé, je n’ai pas de cadeau. » Il termine, un peu gêné. Même dans la vie réelle, en dehors de ces murs, quand il se souvient de l’anniversaire de Peter, il peut rarement lui faire un cadeau. Parce qu’il n’a pas les moyens, ou parce qu’il n’a pas d’idée. Et là, ce ne sont pas les idées qui auraient manqué pour Gaëtane, mais son intelligence qui lui fait défaut. Parce qu’il s’imaginait stupidement rédiger un casse-tête, une énigme, n’importe quoi, sauf qu’il n’a rien trouvé d’intéressant. Alors, finalement, il a abdiqué. Vu l’heure, il aura peut-être l’occasion de se rattraper durant la journée. Il l’espère.

Ce n’est pas rare qu’Alistair soit réveillé à ces heures-là, mais il s’agit habituellement d’une énième insomnie. Sauf que ce soir, ce n’est pas le cas. Si, parfois, il tente de résister à l’appel du sommeil, ce ne fut pas le cas cette nuit. Il s’est couché relativement tôt, aux alentours des vingt-et-une heures, parce qu’il a accumulé trop de sommeil en retard et qu’il ne pouvait pas lutter plus longtemps. C’est l’avantage du calme de la loveroom, il n’a plus besoin d’attendre que la totalité du nid soit endormi pour sombrer dans les bras de Morphée. Mais voilà, c’était bien trop beau pour être vrai, il ne peut pas se coucher tôt et bien dormir, ça ne colle pas. Ceci dit, il reste dans sa moyenne de trois à cinq heures de sommeil, quand il parvient à fermer l’œil. Il est malgré tout légèrement agacé, il s’imaginait naïvement avoir le droit à une nuit de répit, mais il s’est trompé. Il devrait savoir, pourtant, depuis le temps qu’il n’est pas en mesure de dormir comme un bébé, mais il continue à garder espoir. Quoi qu’il en soit, une fois réveillé, il ne tarde pas à fuir en direction de l’extérieur pour cesser cette impression d’étouffer, sans réellement savoir où se rendre. Il est un peu perdu, mais vu l’heure, personne ne risque de l’embêter sur le fait qu’il déserte au milieu de la nuit. Enfin, peut-être parce qu’il croyait naïvement que plus personne n’était encore debout à cette heure-ci vu le calme régnait dans le nid quand il est passé par les couloirs. C’est sans compter sur Gaëtane qu’il reconnait en arrivant à la plage. Ils se rencontrent souvent à des heures tardives, mais ça ne le dérange pas, ça lui fait une compagnie des plus agréables lors de ses longues nuits. Il ne tarde pas à s’installer à ses côtés tandis qu’elle commence à parler des étoiles. Il n’y connait rien, lui, mais il n’est jamais réticent à en apprendre plus sur ce qui l’entoure. Ça ne veut pas dire qu’il compte faire de l’astronomie sa passion, mais sur le moment, ça l’intéresse sincèrement. Il suit du regard le doigt – ou plutôt la manche – de Gaëtane qui s’agite, tente d’enregistrer les informations et écoute silencieusement. « Une naine rouge ? » Il dit simplement quand elle a fini la première partie de son récit. Une naine rouge, ça ne lui dit rien, mais il suppose que c’est une étoile rouge. Sauf qu’il est sûrement un peu idiot, parce qu’il se les imagine blanche, lui, faite simplement de lumière non colorée. Réflexion dont il se passera de dire à haute voix, n’ayant pas envie de passer pour un idiot. « C’est des noms particuliers, quand même. » Il dit ensuite, plus pour lui-même qu’autre chose. Mais c’est la vérité, c’est un peu particulier, il faut le reconnaitre. Elle déclare ensuite ne pas connaître toutes les constellations de l’hémisphère sud. Ce n’est pas grave, il se contente de ce qu’elle veut bien lui dire. « C’est déjà pas mal. Tu vois, par exemple, j’aurais été incapable de te citer la moindre constellation. » Bon, certes, il a une mémoire un peu capricieuse, il n’a jamais non plus eu l’occasion de s’intéresser à ce genre de choses. Au centre, ils avaient quelques livres, mais rien sur l’astronomie. Il finit par lui demander comment elle se sent. Son état lors du prime l’a inquiété et il n’a pas eu l’occasion, avant aujourd’hui, de lui demander si les choses se sont arrangées. Malheureusement, son sommeil se fait capricieux. « Parce que tu es préoccupée ? » Il préfère lui poser une question sur son sommeil plutôt que sur sa prise de médicament, sachant que cela ne le regarde pas. Ses préoccupations non plus, au final, mais il peut toujours essayer d’avoir un mot rassurant. Il ne sait même pas s'il s'agit de cela en réalité, car il ne sait pas comment le symptôme de Gaëtane se traduit et la façon dont il agit sur son esprit. Elle dit ensuite que ça va un peu mieux. Une réponse guère satisfaisante pour Alistair. « J’aimerais que ce soit plus qu’un peu. Je te le souhaite, en tout cas. » Il finit par dire, le regard plongé dans les étoiles. Il aimerait, cependant ça ne dépend pas de lui. Mais il n’aime pas la voir ainsi, c’est un fait. Parce qu’il sait que malgré tout, il ne peut pas l’aider, alors qu’il aimerait. Tout à coup, il se souvient que c’est l’anniversaire de Gaëtane – s’il ne se trompe pas, sa mémoire lui ayant déjà fait défaut – et il ne tarde pas à le lui souhaiter. C’est qu’il tient tout de même à le faire, il apprécie Gaëtane et c’est la dernière personne dont il voudrait oublier l’anniversaire. Si lui ne l’a pas oublié, elle si, à priori. Il s’excuse ensuite quant au fait qu’il n’ait pas de cadeau, car s’il a marqué un temps d’hésitation quant à savoir si c’est bel et bien aujourd’hui qu’elle fête son anniversaire, il était au moins certain que c’était cette semaine et il avait réfléchi à un cadeau. Simplement, il n’a pas vraiment su réaliser son idée, alors il a vite abdiqué. Elle lui dit que ce n’est pas grave, qu’elle ne veut rien du tout. L’avantage avec Gaëtane, c’est qu’il sait que cela est sincère et pas simplement une formule de politesse pour cacher sa déception. « Tu n’es pas du genre à accorder beaucoup d’importance à ce jour, je me trompe ? » Il finit par lui demander. Certains organisent des fêtes pour le moindre anniversaire et d’autres préfèrent oublier ce jour qui ressemble à tous les autres. Il fait partie de la seconde catégorie et vu les paroles de Gaëtane, il suppose qu’elle aussi. Elle constate – puisqu’il s’agit bien de cela – qu’il n’arrive pas à dormir. « Je n’arrive plus. » Il corrige, d’un ton un peu blasé, tandis qu’il hausse les épaules. C’est vrai, ce n’est pas qu’il n’y arrive pas, c’est qu’il n’y arrive plus, car il est malgré tout parvenu à fermer les yeux l’espace de quatre heures, ce qui n’est pas rien pour Alistair. « J’ai fini ma nuit, en réalité. » C’est triste à dire vu l’heure, mais c’est la vérité. Il n’arrivera pas à retrouver le sommeil d’ici les prochaines heures et il est condamné à errer dans ce nid en attendant que celui-ci s’éveille. Enfin, dans l’immédiat, il profite de la compagnie de Gaëtane et c’est tout ce qu’il lui faut. La question qu’elle lui pose par la suite ne le surprend pas. Cependant, il marque un temps d’arrêt, ne sachant pas réellement que répondre. « Je crois. » Il est peu convaincu, mais il ne voit pas d’autres réponses. Il croit, oui, puisque tout semble être de son côté pour qu’il ne se sente pas si mal, après tout. Il a regagné un peu d’argent, il est demi-finaliste et si son secret a certes été découvert à moitié, il s’agit de la moitié qu’il considère la plus agréable et facile à assumer. « Je ne sais pas trop. » Il finit par corriger. Il ne saurait pas précisément dire ce qui le tracasse. La révélation de la moitié de son secret a eu un certain impact, mais Andreja ne lui a pas balancé des souvenirs enfouis au visage, c’est une partie de son vécu à laquelle il pense tous les jours. Et il y a l’autre partie, plus difficile à assumer, qui le ronge de l’intérieur. C’est sûrement ça, le problème. « Je peux pas en parler. » Il finit par dire, avant de se laisser tomber en arrière sur le sable pour avoir une vue d’ensemble sur le ciel. Il pourra, d’ici quelques jours, mais il ne le voudra certainement pas.

Il sait pertinemment que vu son niveau d’étude, il peut être considéré comme ignorant. Son éducation, il l’a eue de son expérience et non de l’école à proprement parlé, c’est un fait. Pour autant, il n’aime pas qu’on lui renvoie son manque de connaissance à la figure et qu’on le prenne de haut, bien même s’il ne se considère pas comme un esprit intellectuel. Mais avec Gaëtane, ça ne se passe pas ainsi. Il n’a jamais été jugé par elle et c’est bien pour cela qu’il ne dit pas non quand elle peut lui apprendre quelque chose. Et puis, il voit bien que ça lui plait, à elle, de l’informer. Elle ne fait pas par contrainte, mais pas plaisir. C’est pour cette raison qu’il l’écoute attentivement et qu’il se permet même de demander plus de précisions à propos de ces fameuses naines rouges. Ça ne lui dit rien, comme nom, il doit le reconnaître. Gaëtane ne tarde pas à lui donner de plus en plus amples informations, qu’il écoute à nouveau attentivement. « D’accord. » Il ne sait pas combien de temps il s’en souviendra, mais il a imprégné l’information dans l’immédiat. « Tu as quand même pu en faire, malgré l’hôpital ? » Il ne connait pas vraiment le passé de Gaëtane, il sait simplement qu’elle a passé un temps à l’hôpital. Quand exactement et combien de temps, il ne le sait pas et il ne veut pas le savoir, c’est son passé à elle et il lui appartient de décider ce qu’elle veut confier ou non. D’ailleurs, comme toutes les questions qu’il peut poser depuis qu’ils passent du temps ensemble, il ne le prendrait pas mal si elle ne répondait pas. Mais il est curieux, quand il s’agit de quelqu’un qu’il apprécie. Compte tenu de sa phrase, il ne sait pas vraiment si elle a pu faire des études (peut-être à cause de l’hôpital, justement) ou si elle a pu en faire, quelle matière elle a étudié. Visiblement, ce n’est pas celle qui lui aurait plu puisqu’elle vient de l’avouer qu’elle aurait aimé étudier l’astronomie. Par la suite, il lui demande si elle se sent mieux que lors du prime. La réponse qu’elle lui donne le laisse sceptique. Un peu, ça veut tout de même dire qu’elle n’est pas totalement tranquille. Elle n’arrive pas à dormir, non plus, il s’imagine qu’elle doit être préoccupée. Enfin, plus préoccupée que d’habitude, car Gaëtane ne lui a jamais semblé totalement apaisée. Il n’ose pas poser trop de questions, notamment sur son symptôme, parce qu’il a peur de toucher à un point bien trop personnel et douloureux pour être évoqué face à quelqu’un qui, au final, elle ne connait que depuis quelques semaines. Elle n’arrive pas à s’arrêter de penser. Elle y arrivait depuis le début du jeu, mais depuis la semaine dernière, elle a atteint sa limite. « C’est bientôt terminé. » C’est tout ce qu’il trouve à lui dire. Il aimerait en faire plus, mais il ne peut pas, il n’est pas dans sa tête. Ceci dit, c’est vrai que c’est bientôt terminé, d’ici une semaine et demie, Fake Lover appartiendra au passé. Il faut qu’elle retienne cela, que bientôt, elle retrouvera sa tranquillité et son mode de vie habituel. Elle ajoute ensuite qu’elle a dû aller à l’infirmerie chercher les sédatifs qu’elle avait laissés de côté depuis son arrivée. « Tu as quand même pu t’en passer pendant deux mois, ce n’est pas rien, je suppose. » Elle parle de cas d’urgence, une fois encore, ça lui signifie que ça ne va pas vraiment, malgré ce qu’elle peut lui dire. Mais elle a pu se passer de ces médicaments pendant deux mois, ça lui semble être une bonne chose. Elle confirme à nouveau que ça va un peu mieux, grâce aux étoiles et au bruit de l’eau, ça lui rappelle Quiberon. Ce n’est que temporaire, il suppose, mais c’est déjà ça. « Tu te réjouis de rentrer ? » Il y a environ un mois, elle lui avait dit qu’elle n’avait plus trop envie de rentrer. Cependant, la semaine dernière, elle avait aussi dit qu’elle était plutôt contente d’en être arrivée là, même si elle venait à se faire éliminer. Mais à l’entendre, Quiberon lui manque. Quoi qu’il en soit, il lui souhaite d’aller mieux. Il finit par lui souhaiter bon anniversaire quand il y repense, en espérant ne pas s’être trompé de jour. Ce n’est pas le cas, puisqu’elle le remercie. Elle avait oublié, d’ailleurs, ce qui est surprenant. Même lui qui n’accorde pas beaucoup d’importance à son anniversaire, il ne parvient pas à oublier ce jour. Il s’excuse ensuite de ne pas avoir de cadeau à lui offrir. Cela aurait été le moindre des choses, mais il n’est pas parvenu à réaliser ses idées. Elle lui dit que ce n’est pas si grave, qu’elle ne veut rien, ce qui lui met la puce à l’oreille quant à l’importance qu’elle accorde à ce jour. Et effectivement, il ne s’y est pas trompé, elle considère cela comme un jour de plus, tout simplement. « C’est vrai. » Il confirme, secouant légèrement la tête. Il n’accorde pas plus d’importance que ça à son anniversaire, quand il était gosse il aimait bien le fêter et puis, à l’adolescence, les occasions ne se sont plus présentées. Une fois adulte, le constat est qu’il n’a personne avec qui le fêter, tout simplement. Elle finit par constater qu’il n’arrive pas à dormir. La vérité, c’est qu’il n’y arrive plus, sa nuit est terminée. Mais ce n’est pas une fatalité, ce n’est pas comme s’il était habitué à dormir huit heures par nuit, d’un sommeil profond. Elle finit par lui retourner la question à propos de son état et il n’est pas en mesure de formuler une réponse précise. Il croit, en effet. Il devrait, plutôt. Mais en réalité, il ne sait pas trop, il est perdu dans ses pensées, tantôt positives, tantôt négatives, alors il lui est difficile de donner une réponse qui reflète réellement son état d’esprit actuel. Enfin, il le pourrait, mais Cupidon lui taperait certainement sur les doigts pour en avoir trop dit. Quoi que, taper sur les doigts est un terme un peu léger, il serait renvoyé à l’extérieur à coup de pied aux fesses. Et puis, même s’il pouvait en parler librement, il n’est pas certain qu’il le ferait, en réalité. La réflexion de Gaëtane lui arrache un mince sourire. Il sait qu’elle est là pour lui, si besoin, elle le lui a déjà dit. « C’est gentil. » Il répond, tournant légèrement la tête vers elle, un court instant, avant de reporter son attention sur les étoiles. Il le sait, qu’elle est là pour lui. Mais il ne sait pas si ce serait suffisant. « Mais je ne crois pas qu’on puisse m’aider, en réalité. »  Il termine, un peu fataliste. C’est la vérité, même Gaëtane dont il se sent proche et en qui il a confiance, elle ne pourrait pas l’aider. Il a déjà essayé de se faire aider, notamment par des professionnels, par Peter, mais ça n’a jamais marché. Il va vivre avec ses pensées jusqu’à sa mort et il l’accepte, aucune alternative ne s’offrant à lui. « Je suis désolé, je ne suis pas de très bonne compagnie. » Et il ne dit pas cela que pour cette nuit, avec elle. Mais de manière générale, il ne l’est pas. Les autres commencent peut-être à l’apprécier, il n’empêche que rien de réjouissant ce dégage de lui et qu’il parvient à pourrir une ambiance (bien que ce terme ne puisse pas s’associer avec sa présence) avec une simple phrase. C’est quelque chose qu’il aurait pu apprendre ici, s’il avait voulu, d’éviter ce genre de remarques. Mais il a déjà appris à communiquer avec les autres, il ne peut pas tout faire.

Elle lui parle des constellations et il l’écoute attentivement. Il ne garantit pas que les informations lui restent bien longtemps en mémoire, mais ce n’est pas pour autant que ça ne l’intéresse pas. Alistair n’a pas la chance d’avoir un quart des connaissances de Gaëtane, dû à son bas niveau d’études, mais il n’est jamais contre le fait d’en apprendre plus. C’est bien pour ça qu’il s’intéresse à la lecture. Outre les romans qui lui permettent de s’échapper de sa vie pourrie, il y a les livres théoriques, ceux dont il ne retient pas forcément toutes les informations, mais qui lui permettent de s’éduquer seul. Il l’a un peu fait au centre, le choix était très restreint, mais il a bien trouvé deux ou trois bouquins qui ont été en mesure de l’aiguiller sur des événements historiques ou des suppléments en langue étrangère. Ce n’est pas grand-chose, mais c’est toujours mieux que rien. Quant à Gaëtane, si elle avait pu choisir, elle aurait aimé étudier l’astronomie. À l’entendre parler ainsi des constellations, elle n’aurait pas été perdue, dans une telle matière. Il se montre curieux, peut-être trop, en lui demandant si c’est à cause de l’hôpital qu’elle n’a pas pu exercer des études qui lui auraient plu. Il se trompe, elle n’a passé que quelques mois à l’hôpital, mais ce sont d’autres raisons qui l’ont empêchée d’étudier l’astronomie. « D’accord. » Il dit simplement, signifiant par là qu’il ne va pas s’épancher plus longtemps sur la question car il comprend très bien qu’elle ne peut pas en dire plus ou qu’elle ne veut pas, choix qu’il respecte totalement. Il finit par lui demander comment elle se sent et la réponse n’est pas celle qu’il attendait. Ça va un peu mieux, mais l’aventure commence à être difficile à vivre. Le point positif, si l’on peut dire cela car ne le lui ressent pas ainsi, c’est que Fake Lover touche à sa fin. Une semaine et demie à tenir, et tout ceci sera fini. Et concernant sa prise de médicaments, elle a tenu deux mois sans eux, il suppose que ce n’est pas rien. Il ne veut pas trop s’avancer par peur de dire quelque chose de maladroit, mais à priori il n’a pas visé à côté puisqu’elle confirme. Est-ce qu’elle se réjouit de rentrer ? Il lui pose la question car, à vrai dire, il n’a pas une petite idée sur la réponse. Il sait qu’elle aime bien être ici, pour autant cela semble être difficile. Alors peut-être qu’elle a hâte de retrouver Quiberon et sa tranquillité dont elle lui a déjà parlé. En réalité, les propos de Gaëtane sont plus nuancés. Elle ne sait pas vraiment. Elle a besoin de rentrer pour se reposer, mais elle aime bien être ici, aussi. Il hoche simplement la tête, signe qu’il a enregistré sa réponse. « Tu penses garder contact avec les autres, toi ? » Il demande finalement. Ce serait garder un pied dans l’aventure Fake Lover, à défaut de continuer à la vivre réellement. Ça n’aurait pas la même saveur, c’est certain, mais ce serait toujours mieux que rien. Enfin, il pense cela, mais il est le premier à admettre qu’il ne gardera certainement pas contact avec les autres. Pas par choix, mais par obligation. Si ça ne tenait qu’à lui, il ferait en sorte de garder des liens avec ceux qu’il apprécie particulièrement. Mais dans l’immédiat, ça lui parait bien impossible. C’est ensuite son humeur à lui qui est abordée, humeur qui est plutôt mauvaise, on ne change pas une équipe qui gagne. C’est les montagnes russes, son humeur, une semaine il se sent bien, la suivante il est au fond du trou. Cela a toujours été ainsi, il n’y a rien de nouveau. Il suppose qu’il a toutes les cartes en mains pour être plutôt satisfait de sa semaine et donc aucune raison d’être de mauvaise humeur, mais ses pensées négatives sont toujours là pour l’accompagner. Il ne peut pas vraiment en parler, en réalité. Gaëtane se propose de l’aider si elle le peut, mais la vérité c’est qu’elle ne le peut pas. Personne ne le peut, en réalité, ce n’est pas propre à elle. Car à choisir, il s’imagine qu’elle pourrait l’écouter sans jugements. Ou peut-être pas, mais peu importe, puisqu’il ne peut pas lui en parler. « J’en suis persuadé, en fait. » Il s’est autorisé une nuance d’espoir quelques instants auparavant, déclarant simplement qu’il ne croyait pas possible qu’on puisse l’aider. Mais la vérité est tout autre, en réalité et il faut qu’il l’admette à haute voix. Peut-être parce que c’est plus percutant et que cela réduit définitivement ses espoirs à néants et qu’il ne continuera pas à s’en faire alors qu’il sait pertinemment que c’est stupide. On ne peut pas l’aider, c’est un fait. Personne n’a réussi jusqu’ici, pas même Peter, ce n’est pas pour que des inconnus y parviennent. Ils l’ont aidé à leur façon, en lui prouvant qu’il n’avait pas totalement oublié tous ses réflexes de vie en société, mais sur ce point-là, c’est impossible que qui que ce soit puisse faire quelque chose pour lui. Pour certaines raisons bien précises. « Il faudrait que je cesse de mettre des barrières entre les autres et moi, pour ça. » Il a baissé sa garde, depuis qu’il est ici. Parce qu’il y a bien été obligé pour se lier aux autres, ou du moins, essayer. Mais de là à se mettre totalement à découvert, il y a encore beaucoup de travail. « Et c’est compliqué. » Il est dans l’incapacité de faire confiance à quiconque. Gaëtane est ce qui se rapproche le plus de cela, parce qu’elle ne l’a jamais brusqué et a toujours su l’accepter comme il est. Pour autant, il garde une certaine retenue, bien plus légère qu’avec la majorité des gens qu’il côtoie, mais retenue qui est pourtant bel et bien présente. Et aussi stupide que cela puisse paraître, cela se traduit par toute l’aide qu’elle pourrait lui apporter. Il aimerait lui parler, mais il ne peut pas. Il pourrait lui demander un service quelconque, mais il ne le fera pas. Il l’apprécie et n’a aucune envie de se servir d’elle ainsi et bien même s’il le faisait, ça n’aiderait pas. Alors il se contente de sa présence, ça lui suffit. Ça l’aide durant un certain laps de temps, et puis les pensées et souvenirs reviennent. Couché dans le sable, ses prunelles déposées sur les étoiles, il s’attelle à trouver un sujet plus sympathique que celui-ci. Parce que comme il le dit lui-même, il n’est pas de très bonne compagnie. Même quand son état d’esprit est un peu meilleur, il n’est pas pour autant une compagnie appréciable, finissant tôt ou tard par jeter un froid. C’est un peu sa spécialité, en réalité. Gaëtane ne trouve pas et il esquisse un bref sourire en guise de réponse. Il sait que c’est sincère, mais ce n’est pas pour autant qu’il va réussir à s’en persuader. Il est ainsi, quand il plonge dans ses pensées, il devient une vraie tête de mule incapable de raisonner correctement, se renfermant sur lui-même. Son esprit divague encore et encore, passant en revue les différents sujets qu’ils pourraient aborder, quelque chose de plus léger, et finalement il a une illumination. « Tu as des pronostics pour dimanche ? » Certes, le prime est un sujet auquel il a soigneusement évité de penser depuis le week-end dernier, mais c’est justement parce qu’il souhaite l’éviter que ce sujet lui revient toujours en mémoire. Il n’empêche qu’il est curieux de savoir quels sont les pronostics de Gaëtane, il l’imagine avoir un point de vue neutre sur la question.

Le fait que Gaëtane lui avoue qu’elle aurait bien voulu faire des études dans le domaine de l’astronomie lui fait se poser la question de savoir ce que lui aurait voulu faire, s’il avait eu le choix. Mais force de constater qu’il ne parvient pas à trouver de réponse. Il ne s’est pas intéressé à grand-chose, il aimait bien les langues, alors peut-être qu’il se serait lancé dans des études de littérature. La lecture ne lui pose pas problème, en plus de cela. Au final, ça ne sert à rien qu’il se pose la question, ce n’est de toute façon pas envisageable. C’est se torturer l’esprit pour rien. Quoi qu’il en soit, ce n’est pas à cause de son séjour à l’hôpital et il ne va pas lui demander plus de précisions sur les facteurs qui sont entrés en jeu, parce que ça la regarde et qu’à priori, elle ne peut pas en dire plus, de toute façon. Le sujet dérive sur le fait qu’elle soit de nouveau sous médicaments, mais il essaie de voir le bon côté des choses, elle a pu s’en passé pendant deux mois. Quant à Quiberon, ça lui manque, mais elle aime bien être ici. Passant un peu du coq à l’âne, cette réflexion sur Quiberon lui fait se demander si elle compte garder contact avec les autres, une fois tout cela fini. Elle aimerait bien et il sent à sa voix que c’est un peu plus compliqué que cela. « J’espère que tu y arriveras. » Il souffle, accompagné d’un sourire sincère. Si elle est motivée, si elle ne compte pas lâcher l’affaire, il n’y aucune raison pour qu’elle ne parvienne pas à garder contact avec d’autres participants de cette émission. Elle ajoute que c’est la première fois qu’elle a des amis et son sourire disparait. Il n’a aucune envie qu’elle se retrouve confrontée à la perte de ceux qu’elle considère amis. Et par la même occasion, il a conscience qu’eux deux, ils vont se perdre de vue. Bien même s’il considère Gaëtane comme une personne de confiance, quelqu’un qu’il apprécie et avec qui il voudrait garder contact, il sait que les chances sont plus nombreuses pour qu’ils se perdent de vue que le contraire. Mais il y en a bien certains qu’elle considère comme des amis qui ne vont pas lui faire ce coup-là. « Je pense que c’est possible de garder le contact avec certains. » Il ne veut pas parler pour les principaux concernés, mais il pense notamment à Mallaury, parce qu’il sait que l’irlandais est proche de Gaëtane. Et il s’imagine que celui-ci n’aura aucun mal à tenir sa promesse s’ils évoquent la possibilité de rester en contact. Il ne sait pas comment le partenariat entre Gaëtane et Adnan se passe, mais il suppose aussi que ce dernier sera en mesure de lui donner des nouvelles de temps à autre. Quant au reste, il ne connait pas vraiment les affinités de Gaëtane, il ne peut donc pas trop s’avancer sur la question. Mais il sait que certains ne comptent pas effacer cette aventure de leur mémoire aussi vite que lui compte le faire. Notamment Paloma, qui, lui semble-t-il, est motivée à garder contact avec certains. Et si lui le pouvait, il ferait assurément partie de la catégorie de ceux qui tiendraient leur promesse. Sauf qu’en vue de sa situation extérieure, il préfère ne pas laisser d’espoir à qui que ce soit. Le sujet dérive ensuite sur son humeur qui est plutôt mauvaise. Il a connu pire, c’est certain, mais il a aussi connu mieux – même s’il n’affiche jamais un sourire ravi lorsque cela est le cas. Gaëtane lui rappelle que si elle peut faire quelque chose, elle est là. C’est agréable de le savoir, mais la vérité est qu’elle ne peut pas vraiment l’aider. Comme il le dit lui-même, il ne pense pas qu’on puisse l’aider, pour plusieurs raisons, mais la plus importante est qu’il n’est pas en mesure de s’ouvrir aux autres. Il a essayé, il y est parvenu, un peu, mais il n’arrive pas pour autant à baisser sa garde. Et il n’y arrivera certainement jamais. Alors quoi qu’il puisse lui demander, ça ne changera rien, autant ne pas l’embêter avec cela. Il esquisse un bref sourire quand Gaëtane lui dit comprendre. Parce qu’il sait que c’est le cas. Ce n’est pas juste parce qu’elle connait ce sentiment une fois de temps en temps, ni parce qu’elle est polie et qu’elle veut lui signifier qu’elle est là, c’est sincère parce qu’elle vit une situation similaire à la sienne. Elle, à cause de son symptôme et lui parce qu’il l’a voulu. Il finit par changer de sujet, évoquant le prime. Il a beau essayé de ne pas trop y penser, le fait est qu’il l’appréhende et que, par conséquent, il a une bonne place dans son esprit. Mais plutôt que de venir sur le sujet des révélations – ce qu’il craint le plus – il préfère demander à la jeune femme si elle a des pronostics quant à ceux susceptibles d’aller en finale. Lui n’en a pas vraiment. Il n’est pas neutre, en réalité, ceux qu’il voit en finale sont ceux qu’il apprécie et non pas ceux qui peuvent s’attirer les faveurs du public. Mais Gaëtane point du doigt que, justement, ils ne savent pas le réel impact que chacun a dehors. « Je pense que les résultats aux nominations sont une bonne estimation. » Il rétorque simplement, haussant les épaules. Ils sont tous passés au moins une fois par-là, il est donc possible d’avoir une première idée des favoris du public. Certes, le nombre de nominés est bien plus élevé, mais les statistiques sont tout de même en la faveur de quelques nominés. Paloma, Adnan, Andreja ou encore Gaëtane elle-même, qui ont tous terminés premiers ou avec de gros résultats, même lorsqu’ils étaient confrontés à plusieurs candidats. Gaëtane n’est pas venue pour gagner, l’élimination ne serait donc pas un drame pour elle. Ça, il avait déjà cru le comprendre. « Tu vas rester la dernière semaine, si tu es éliminée ? » Pas qu’il le lui souhaite – au contraire – mais ainsi, il pourrait lui dire au revoir de façon convenable, pas simplement parce qu’un des deux vient à être éliminé en fin de prime et est prié de déguerpir dans les prochaines minutes. Elle lui dit aussi qu’elle espère qu’il ira en finale. « C’est gentil. » Il dit simplement, ne sachant pas vraiment quoi dire d’autre. Il n’a pas les mêmes espoirs qu’elle, au contraire, il sait pertinemment que son aventure va s’arrêter dimanche. « Mais il y a bien plus fort que moi. » Il nuance, haussant légèrement les épaules. Les mêmes noms auxquels il a pensé auparavant. Paloma, Adnan, Andreja, Gaëtane, Felice, Aaron. Autant dire qu’il se voit échouer en demi-finale et d’une large majorité, à la huitième ou neuvième place. « Et puis je crois que ça me ferait mal de valider une cagnotte qui me sert à rien. » Il déclare, sur un ton plus léger, esquissant un bref sourire. Oh, s’il la validait, il trouverait bien un moyen de l’utiliser, mais globalement, il serait pas dérangé de la perdre, vu qu’elle ne lui servira pas vraiment, ou du moins, pas assez.

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