Si l’on m’avait un jour dit que je vivrai un jour dans un lieu aussi magique, je n’y aurai pas cru. Pour autant, depuis que je suis dans le nid d’amour, tout est un véritable enchantement. Cela me fait même oublié, le caractère quelque peu conflictuel de certains autres candidats. Pour le moment j’observe et me laisse porter par le vent. Cette semaine nous ne craignons rien Penny et moi, alors autant en profiter pour prendre du bon temps. Assied sur les marches de la pergola, fumant tranquillement un cigare, je médite comme le vieux sage que je suis. Enfin, sage c’est vite dit, c’est plutôt l’image que j’essaye de donner aux autres. Avec la fumée qui s’échappe de la commissure de mes lèvres on dirait que je ressemble à la chenille dans Alice aux pays des merveilles à ce moment précis. J’entends des pas derrière moi, me retourne et vois apparaître @Ziyan. Ces propos quelques peu pompeux dans sa réponse sur sa partenaire idéale, m’ont donné un premier apercu plutôt négatif de l’homme. Or, je sais bien qu’il ne faut pas juger un livre à sa couverture. Un cigare ? Je lui propose comme ça, quand il passe près de moi. S’il est d’un rang social aussi aisé qu’il le prétend, il ne refusera pas. Après, je sais par expérience que c’est autour d’un verre d’alcool et d’un bon cigare qu’on apprend généralement à connaitre un homme. Cela te plait l’Ena ? J’ai retenu cela de son profil aussi. Cette pépinière à futur technocrates de la république française. J’en ai connu quelques-uns des requins au dent longue durant ma carrière. J’admets, en avoir même été un moi aussi. Je n’en suis d’ailleurs par très fier. Je trouve ce chemin dangereux. Je dirai même plus, toxique. L’administration française est une machine à broyer les esprits et à forcer les gens à entrer dans des moules faits de compétitive et de manigance. Je suis curieux de voir si le jeune homme dépassera cette simple vision ou restera un simple exemple de ce type d’individu.

En Ziyan, j’ai déceler toute suite ce petit truc en plus, cette chose qui indiciblement nous place dans la même catégorie : celle des technocrates, des puissants de la politique, de l’administration ou de la justice française. On partage également ce goût pour les cigares, ce qui le place inévitablement dans la catégorie des hommes de goût. Il y a chez lui comme une prestance, mêlé à la fougue de la jeunesse qui me rappelle moi dans mes jeunes années. Avant que la machine ne s’emballe et me façonne tel que je suis aujourd’hui. Une prestance, doublé d’un certain recul quand il me parle de l’Ena. J’ai fait sciences Po Paris plutôt que l’ENA. Je te conseille oui de profiter de tes années d’études pour saisir les opportunités qui s’offre à toi et enrichir ton carnet d’adresses. Cela te sera utile par la suite. Surtout si il est aussi ambitieux qu’il semble l’être. Pour autant, à l’entendre parler. Si j’étais lui, j’aurai tendance à me méfier. Dans les écoles comme celle-ci, les esprits rebelles sont peu tolérés. Comme me le disait si bien le commissaire divisionnaire que j’ai remplacé à Lille : « Fais bonne impression tant que tu n’es pas entrée dans la maison. Une fois à l’intérieur, tu remettre en cause tout ce que tu désires puisqu’il sera bien plus compliqué de t’en faire sortir. » Ce sont des formations techniques et absolument pas spirituel. On vous apprend à être de bons petits soldats de la république et pas à se forger son propre avis fâce au monde qui nous entoure. Tu auras largement le temps, une fois diplômé, de développer ton esprit critique et de sortir du cadre préétabli. Je parle par expérience. S’il veut grimper dans les échelons, il faudra d’ailleurs nécessairement qu’il se démarque des autres. Non pas par ses notes, ou son cv puisqu’à ce niveau-là tout le monde est à peu-près à égalité, mais par sa fougue, son envie et surtout sa culture générale. Actuellement je profite des joies de la retraite anticipée. Auparavant, j’ai été inspecteur de police dans la région parisienne, puis dans le Nord de la France, avant de terminer au sommet de la hiérarchie en tant que commissaire divisionnaire de la police judiciaire Lilloise. Je suis assez fier de mon parcours et du travail que j’ai accompli pour atteindre ce poste et le salaire qui va avec. Cela au prix de lourd sacrifices que je ne regrette pas aujourd’hui. Puisqu’au fond, mon ex-femme n’est, certes, pas revenue, mais mes filles ont, elles, fait l’effort de rétablir le lien entre nous afin que je sois présents pour mes petits-enfants. Ce qui fait de moi un grand-père comblé.