ft. princesse syssy.

Comme annoncé par l'affolement général, la neige est finalement tombé sur le nid; le premier flocon à peine posé sur la pelouse artificielle vert stabilo de notre jardin, tous s'étaient rué vers l'extérieur, armés de leurs écharpes et autres moufles vomitives. J'avais attendu la cohue, affachi sur le canapé, larvant au possible, pour finalement m'éclipser seul lorsque les autres candidats eurent clos leur temps de jeu: un ange de neige et des inscriptions gamines à même le sol, ça ne se partage pas. Après une heure d'amusement solitaire le plus total, je décide finalement de rentrer, frigorifié jusqu'à la moëlle, claquant même des dents, vêtu en tout et pour tout d'un tee-shirt, d'une micro-doudoune, d'un jean et d'une paire de baskets éponge. Manifestement, la grippe ne m'a pas suffi. Je cherche un chauffage, une cheminée: fuck le chauffage au sol. Mes mains virent au violet, il me faut agir. Grelottant, j'emboite alors le pas vers la cave, ayant un jour vaguement compris qu'un chauffage d'appoint s'y trouver. Prenant un grand souffle de courage, je m'enfonce dans le goufre sombre, n'y trouve rien si ce ne sont quelques capotes usagées. 'Tain, c'dégueulasse.., dis-je en accompagnant mon geste d'une superbe grimace. Découragé, je rebrousse presque chemin, butant alors contre un grand truc que je mets quelques secondes à distinguer tant ma vue est mauvaise dans ce trop peu de luminosité. La danseuse. Je recule d'un bond. Non, sérieux, tu comptes v'nir faire chier jusqu'ici? Tu t'emmerdes tant qu'ça dans ta vie? Il ne m'a certes rien fait, mais c'est simplement le fait de le voir face à moi: Syssoï, tu m'insupportes, c'est viscéral.

J’ai tout tenté dans ce château. La chapelle ? C’est le dernier lieu où l’on cause, c’est à peine si on n’y donne pas des réunion Tupperware. La salle de musique ? Mes tympans vous remercient mais non merci. La salle de sport ? Pour que Sixtine me colle une beigne ? J’ai encore mal aux côtes. La bibliothèque ? La dernière fois un connard nous a enfermé de l’extérieur. J’ai l’impression qu’il n’existe pas un endroit dans ce «nid» qui échappe à la connerie de mes bienaimés partenaires de jeu à l’activité cérébrale si limité qu’elle m’évoque l’absolue quintessence du néant apocalyptique. J’irais bien au grenier, histoire de m’élever un peu, sur le plan physique puisque spirituellement parlant, c’est devenu difficile, mais on n’y a pas accès. Dommage, ça aurait fait un excellent baisodrome pour le troupeau de bovin à culotte comestible. Par contre, il y a la cave, en espérant qu’elle soit bien profonde histoire de toucher au moins un des cercles de l’enfer. Armé d’un bon bouquin, d’une veste chaude et de mon paquet de clope, j’y descends avec la conviction d’y trouver silence et absolue solitude, juste ce qu’il me faut. J’y trouve Caesar, juste ce qu’il me faut pas. J’avoue, honte sur moi, je ne l’ai pas vu venir ce coup-là. D’habitude je suis attentif à mon environnement auditif, mais là... Il m’est rentré dedans sans que je n’ai pu prévenir le coup. Pourtant, il n’est pas vraiment réputé pour sa discrétion, il serait même l’élément le plus nuisible niveau sonore. La preuve, à peine a-t-il levé les yeux vers moi qu’il entame son chant mélodieux, si doux à mon oreille que j’ai envie de lui exploser la tête contre un mur et de l’écouter geindre deux tons en dessous. Cette vision de violence fugace passée, je reprends mon self control, et tente même un sourire. « Le Bescherelle est ton ami. » Je le rassure, d’un ton presque paternaliste, en lui tapotant l’épaule dans un geste de total soutient. Bah oui, on sait jamais, des fois qu’il ait peur que le fameux livre rouge le bouffe ou autre. Une information se stock dans une case de mon cerveau, émettant le doux son de l’indice emmagasiné, puis je le contourne, et m’enfonce plus profondément dans la cave.

A de nombreuses reprises, Syssoï m'a, par le passé, ironiquement signifié à quelques points il appréciait mes éclats de voix toujours plus puissants: sache que tes dires ne sont pas tombé dans l'oreille d'un sourd, mais plutôt dans celle d'un mec souffrant d'hyperacousie. Terminator sourit à ma réaction excessive lui étant spécialement dédiée, je bouillone, le fixe un long moment; me rend alors compte qu'il a la physionomie faciale d'un félin. Je suis sérieusement en train de chercher - volontairement - des noises à un chaton d'un mètre quatre-vingt cinq? Relâchant mon masque de gangsta au leitmotiv indestructible, je pouffe une seconde, me ressaisis, reviens à mes fidèles sourcils froncés. Terminator ouvre finalement la bouche; non, en fin de compte, t'aurais mieux fait de la fermer au lieu de barjaquer un truc en franco-russe-papou. Bescherelle, où est la blague? Je n'ai même jamais entendu ce putain de mot. J'évite cependant de lui communiquer mon incompréhension tandis qu'il me tapote la clavicule, comme compatisant à mon ignorance certaine; oh non mon gars, savoure pas ta culture aussi arrogamment. Alors qu'il prend de la distance, je me retourne, arrive à son niveau, attrape son épaule et le plaque contre le mur le plus proche, agrippant vivement son col. Syssoï a beau faire deux Caesar de la largeur, niveau hauteur, nous culminons au même point: minimum syndical à mes yeux largement suffisant. Porte tes couilles un peu, arrête de t'jours te tirer quand la situation t'convient pas! Le règlement du jeu me gueule de lâcher ma prise sur la danseuse, mais mon passif de poids super-plume m'en empêche: tant qu'on ne se tape pas sur la gueule, aucune raison de se faire blamer.

Vous voyez, dans les mangas, il existe toujours le vieil homme sage et silencieux qui possède toutes la connaissance du monde et ne la divulgue qu’avec avarice et retenue ? Vous voyez ? Bah cherchez pas, c’est pas moi ! Mais par contre, à côté du grand sage, afin d’exacerber et mettre en lumière son caractère calme et pondéré, on trouve toujours un petit brun surexcité qui pète son câble au moindre changement de climat et qui, par un concept étrange et typiquement nippon, se retrouve toujours représenté entrain d’agiter bras et jambes à un mètre du sol, bouche grande ouverte, teint rougeâtre, yeux plissés et petite larme au coin de la paupière. A mes yeux, Caesar c’est ça : un mauvais manga qui hurle en permanence au nom de sa sacro-sainte liberté d’expression. Ça m’amuse 5 minutes, mais ce délais écoulé, j’ai juste envie de lui exploser le crâne avec le premier objet contondant venu. Alors, évidemment, moins je le vois, mieux je me porte. Sauf qu’il ne semble pas de cet avis, le petit dragibus, et alors que je le contourne pour rejoindre le coin reculé que j’étais venu chercher dans cette cave, il m’attrape par le bras pour me coller contre le mur d’un mouvement agressif, mais surtout nerveux. Je prends sur moi, un coup de boule est si vite arrivé… J’essaye de m’inspirer du vieux sage et de ne pas répondre à la violence, par la violence. J’ai des réflexes qui, à force de pratique sont devenu instinctif. On m’a appris à répondre en cas de danger immédiat. Sauf que là, je ne perçois absolument pas Caesar comme un danger immédiat ou non. Un danger pour lui-même, certainement, mais ça ne me concerne pas. « Mes couilles se portent très bien. » je lui réponds en décrochant sa main de mon col. « Et la situation m’entraine au comble du bonheur, j’arrive juste au moment où tu te casses, le monde n’est-il pas d’une absolue perfection ? » D’un mouvement brusque du bras, je ne me contente pas de l’écarter de moi, j’en profite aussi pour le plaquer à son tour contre le mur, suffisamment fort pour qu’il s’y cogne le dos, mais pas assez pour qu’il laisse échapper plus que l’air dans ses poumons. C’est un dur, je le sais, il n’arrête pas de le répéter, il peut encaisser les coups, et j’ai beau me contrôler au maximum, ce simple geste m’a permit de libérer un peu de pression. Cependant, seul mon bras l’a envoyé contre le mur, et je m’empresse de mettre le plus de distance possible entre nos corps, j’ai pas du tout envie de le voir se lancer dans une rixe dont il ne sortira pas forcément indemne. « Je ne te retiens pas… » Dis-je, en m’installant en tailleur sur un meuble abandonné, une sorte de commode, ou un truc du genre, avant de sortir mon bouquin de ma poche. Oui, je le congédie, mais n’est-ce pas ce qu’il s’apprêtait à faire avant de tomber sur moi ?