Se baigner un peu. Voilà de quoi avait besoin Tweedy. De se baigner un peu. Tout simplement. Ainsi donc, quel meilleur endroit pour cela que la piscine ? C'est donc vers la piscine que la petite brune ne tarda pas à se rendre, bien décidée à y effectuer quelques longueurs, songeant même à s'y épuiser, histoire de passer ses nerfs sur quelque chose. Car si la jeune femme était d'un naturel bien calme, ou en tout cas loin d'être impulsif, elle appréciait de temps à autres de se défouler sur quelque chose. Et justement, en ce moment, elle en avait grandement besoin. Sans se faire passer pour une victime, Tweedy en venait à penser que certaines choses n'allaient pas autour d'elle. Peut être en était-elle totalement responsable. C'était même probable. Mais tout cela la rendait quelques peu malheureuse. Ainsi donc, une virée piscine ne pourrait lui faire que le plus grand bien. Arrivée sur place, la jeune femme ne tarda pas à se débarrasser de sa robe, histoire de se retrouver en maillot de bain. Bien. Maintenant, direction le ... bassin. Hm, attendez-voir, qu'était donc la chose qu'elle pouvait vaguement discerner dans l'eau ? Un vêtement jeté dans le bassin ? Non, cela ressemblait davantage à ... à ... un corps. OH MON DIEU. Quelqu'un était tombé à l'eau. Quelqu'un s'était noyé. Quelqu'un était ... mort ?! Non, impossible. Il devait y avoir encore un espoir, forcément. Ni une ni deux, Tweedy plongea, histoire de venir en aide à celui ou celle qui venait probablement de se noyer. Finalement, il s'avéra qu'il s'agissait d'Anabel. En plus. Ah non, elle n'avait pas le droit de mourir. Interdiction formelle de trépasser, même. Remontant sa camarade à la surface, puis l'amenant jusqu'au bord du bassin, ayant un peu de mal à la remonter sur le sol pour le moment, Tweedy commença à paniquer légèrement. « Anabel ! Pourquoi as-tu fait ça ?! Bats-toi ! Tu vas t'en sortir ! Ta vie ne s'arrête pas aujourd'hui ! Allez, un petit effort ! S'il te plait, reprends conscience ! » Les talents de Tweedy en matière de secourisme étant moindres, il valait mieux qu'elle n'ait pas à en arriver au massage cardiaque, hm.

Le monde vu de sous l’eau est différent, irréel. Cette réalité là est aussi déformée que celle que l’on montre en téléspectateurs lors des primes, ou celle que mes détracteurs on montré au juge pour m’accuser d’une aussi sordide chose que du meurtre de mon fiancé. Je nage en apnée depuis, quoi, une trentaine de secondes, tout au plus. Quand même beaucoup, quand on y pense, mais j’ai toujours eu cette facilité à me plonger sous l’eau pendant une longue période. Mon maillot noir est probablement la seule que l’on voit de moi, à l’extérieur du bassin… mais de toute façon, il n’y a personne dans les parages, si ? Brusquement, sans que l’on mette demander quoi que ce soit, je sens qu’on me tire hors de l’eau dans laquelle je m’étais refugiée. Des bras fins m’entourent et me remonte à la surface, et je suis trop choquée pour penser à éventuellement me débattre. Je sens mon dos entre en contact avec le rebord de la piscine, puis mes oreilles, qui se débouche enfin, daigne me laisser entendre une partie du discours de cette personne, qui ose m’extirper de mon monde sous-marin. « Anabel ! Pourquoi as-tu fait ça ?! Bats-toi ! Tu vas t'en sortir ! Ta vie ne s'arrête pas aujourd'hui ! Allez, un petit effort ! S'il te plait, reprends conscience ! » Oh, quoi ? Elle pensait que je m’étais jeté à l’eau pour volontairement m’enlever la vie ? Remarquez… ce n’était pas tant une si mauvaise idée, mais c’était de jouer avec le feu de le faire en direct à la télévision. J’avais tendance à préféré des trucs plus intimes, plus privés, vous savez. « Arrête Tweedy, bon sens, ça va… j’ai rien. J’suis vivante, tu vois bien! » Je reprenais d’ailleurs doucement le contrôle de mon corps alors qu’elle relâchait l’étreinte qu’elle avait autour de celui-ci. « Pourquoi t’as fait ça? » Arracher quelqu’un des profondeurs alors qu’il est parfaitement apte à respirer, c’est presque aussi pire que de la noyer. Je suis quitte pour un bon bouillon, d’ailleurs, je sens venir la quinte de toux, maintenant que l’air se rend enfin à mes poumons sans encombre.

Sachez qu'il était courant que Tweedy agisse sans même prendre la peine de réfléchir, au même titre qu'il lui arrivait rarement de tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de l'ouvrir. Ici, il avait suffi que la petite brune ait distingué ce qui ressemblait fort à un corps inanimé dans le bassin d'eau claire pour qu'elle y plonge à toute vitesse, ne se privant pas d'extirper le dit corps des profondeurs de l'eau. Donc là, en fait, la jeune femme crut faire une bonne action. Mais elle n'en fut plus aussi persuadée quelques instants plus tard, lorsque sa camarade Anabel - qu'elle avait alors cru secourir d'une horrible noyade - lui fit clairement comprendre qu'elle nageait en plein délire. Parce qu'il semblait évident qu'Anabel allait bien. Et donc, il était relativement peu probable qu'elle ait voulu mettre fin à ses jours, puisque semblait quasiment contrariée d'avoir été ramenée à la surface par Tweedy qui, naturellement, avait cru bien faire. Lorsqu'Anabel lui réclama des explications, le rouge monta rapidement aux joues de la petite brune. Ah merde, que pouvait-elle bien lui dire, là ? Qu'elle avait supposé qu'elle s'était délibérément jetée à l'eau, hm ? Assurément pas. Pourtant, c'était bien l'exacte vérité. « Je ... je suis désolée Anabel » commença-t-elle par articuler. Mouais, c'était effectivement un bon début. Mais maintenant, il lui fallait véritablement s'expliquer, et ça, ce serait plus dur déjà. Alors, hm, comment dire ... « Quand j'ai vu quelqu'un au fond de l'eau, j'ai ... j'ai paniqué. » Okay. Mais encore ? Parce que c'était peut être un peu léger pour des explications, non ? Enfin, on dit ça, on dit rien hein. « Du coup, j'ai pas réfléchi, j'ai voulu intervenir. J'ai vraiment cru que quelque chose de grave s'était passé ... » Mouais, disons qu'on pouvait s'en contenter pour le moment. C'était un début, en somme.

Je suis en train de me cracher les poumons à force de tousser, je crois que j’ai avalé une petite quantité d’eau lors de ma rescapée de ces eaux troubles. « Je… je suis désolée Anabel. » entendis-je la jeune femme me dire, visiblement affligé par les circonstances, dire qu’elle ne cherchait qu’à faire une bonne action : me sauver la vie, dans le cas présent. Vie qui n’était pas du tout en danger, information que j’ai tôt eu fait de lui mentionner. Naturellement, je la questionne sur sa raison d’agir, même s’il n’y a à pas une centaine de raisons pour faire un acte d’héroïsme. « Quand j’ai vu quelqu’un au fond de l’eau, j’ai... j’ai paniqué. » Mes poumons semblent se remettre du choc, je réussis même à contenir les derniers soubresauts de la quinte de toux qui m’occupait au cours des dernières secondes. Je ne perds toutefois aucune information. « Du coup, j’ai pas réfléchi, j’ai voulu intervenir. J’ai vraiment cru que quelque chose de grave s’était passé… » J’arque les sourcils. Quelque chose de grave? Attendez une minute… « T’as cru que je me m’étais noyée ? Volontairement parlant… j’veux dire. » Pas besoin de me faire un dessin, j’avais très bien compris pourquoi elle avait agi de la sorte. Et ce n’était pas par méchanceté. N’empêche, j’allais très bien, elle aurait attendu quelques secondes de plus et se serait bien rendu compte que j’étais en parfait contrôle de la situation. Mais bon, qu’est-ce qu’on ne ferait pas en état de panique. L’adrénaline avait ce pouvoir incontrôlable sur nous, quand elle prenait le dessus sur notre raison. « Je suis peut-être désespéré… mais pas à ce point. » Qu’on doute de ma santé mentale, d’accord, à ce point-ci, je commençais à en avoir l’habitude. Mais de là à croire que j’irai vraiment m’enlever la vie ?

- ok, c'est que de la merde -

Voyez, c'était très clairement le genre de situations que Tweedy dépréciait. Parce qu'elle passait pour une idiote à l'imagination débordante, et que tout cela avait un petit goût douteux compte tenu des circonstances. Disons les choses comme elles sont : Tweedy avait supposé qu'Anabel avait volontairement sauté à l'eau et fait en sorte d'y rester, dans les deux sens du terme. Comprenez-la, elle savait sa camarade quelques peu fragile et avait eu vent de la vie difficile que celle-ci avait eu, et qu'elle continuait d'avoir d'ailleurs. Ainsi donc, pouvant comprendre que certains personnes particulièrement malheureuses soient poussées à commettre l'irréparable, un acte désespéré, elle avait effectivement supposé qu'Anabel avait voulu mettre fin à ses jours. Oui, c'était saugrenu comme idée. Parce qu'en y réfléchissant bien, c'était plutôt improbable. Déjà, pourquoi se donner la mort à la télévision, dans une sordide émission de télé-réalité ? Aussi, pourquoi en se jetant à l'eau alors que divers autres moyens existent pour commettre ce genre d'actes ? Enfin bref, tout ça pour dire que Tweedy s'était une fois de plus fait de gros films, et qu'elle ne savait tout bonnement plus où se mettre désormais. Parce que sa camarade ne semblait pas avoir beaucoup apprécié que Tweedy la repêche de la sorte. Il faut dire que ça avait été plutôt brutal, tout ça parce que Tweedy avait voulu bien faire en la sortant de l'eau le plus rapidement possible. Décidément, elle avait tout faux la petite brune, hm. Et maintenant, elle devait légitimement des explications à Anabel. Et lorsque Tweedy lui fit savoir qu'elle avait imaginé que quelque chose de grave s'était produit, Anabel ne manqua pas de lui poser LA question qu'elle redoutait. Oula, était-elle vraiment censée répondre, là ? Probablement. Bon, courage Tweedy, c'était faisable. Il lui fallait juste tourner cela de manière à ce qu'Anabel ne la prenne pas trop pour une tarée. « Je ... je l'ai cru, oui. » Ah non, ça ne convenait pas du tout comme réponse. Parce que Tweedy était censée envelopper. En-ve-lo-pper. « Hum ... je suppose que c'est le genre de choses qu'on peut être amené à faire lorsqu'on souffre » reprit-elle alors, d'une petite voix et portant un regard bienveillant sur sa camarade. Celle-ci lui fit alors savoir qu'elle était peut être désespérée, mais pas au point de vouloir se donner la mort par la noyade. Tweedy grimaça alors légèrement. « Tu sais, on ... on me reproche souvent d'avoir une vision trop optimiste de la vie, des gens ... Mais j'arrive à voir quand quelqu'un va mal, qu'il est malheureux. Je sais que tu as vécu des choses très difficiles, Anabel. Je suis très maladroite dans ma manière d'agir, mais je veux que tu sache que ... que si tu as besoin ou envie d'en parler à quelqu'un un jour, je suis là. » Qu'on se le dise, Tweedy n'avait aucunement la prétention de croire qu'Anabel aurait particulièrement envie de se confier à elle. Simplement, elle trouvait naturel de lui faire savoir qu'effectivement elle serait là en cas de besoin.

« Je ... je l'ai cru, oui. » Je ne suis pas surprise de sa réponse, elle me parait même évidente, et elle explique aussi beaucoup de choses. À savoir, pourquoi elle a plongé, en panique, dans la piscine pour m’extraire des profondeurs de celle-ci. Croyant, à tort, accomplir un acte d’héroïsme. Soit celui de me sauver la vie. Au contraire, elle m’a plutôt causé un sacré bouillon. J’en ai encore mal à la gorge. « Hum ... je suppose que c'est le genre de choses qu'on peut être amené à faire lorsqu'on souffre. » Sujet tabou qu’est celui-là, mais avec moi, ce n’est pas nécessaire de faire dans le délicat quand il est question de se donner la mort. Ce thème m’est bien moins étranger qu’on pourrait le penser... « Je sais ce qu’est un suicide, Tweedy. Très bien même. Bien plus que tu ne le pourrais, le croire. » Je n’élabore pas sur le sujet, qu’elle interprète à son bon vouloir les propos que je viens de lui tenir. « Et ce n’est clairement pas ce que je m’apprêtais à commettre, y’a pas cinq minutes. » Si ça peut la rassurer. Même s’il est clair qu’elle est maintenant conscience que j’étais loin, très loin de vouloir m’enlever la vie dans le fond de ce bassin remplit d’eau. Je ne lui en veux pas de s’être inquiété de mon bien-être, de ma sécurité, de ma vie même. Mais je suis assez grande pour prendre soin de moi, malgré tout ce que les apparences peuvent laisser croire. Et dans les moments trop difficiles, j’ai un psychologue pour venir à la rescousse. Le problème? C’est qu’il est plutôt inaccessible, en ce moment. « Tu sais, on ... on me reproche souvent d'avoir une vision trop optimiste de la vie, des gens ... Mais j'arrive à voir quand quelqu'un va mal qu'il est malheureux. Je sais que tu as vécu des choses très difficiles, Anabel. Je suis très maladroite dans ma manière d'agir, mais je veux que tu saches que ... que si tu as besoin ou envie d'en parler à quelqu'un un jour, je suis là. » Encore une fois, j’appréciais l’effort, mais Tweedy ne figurait pas dans le lot de ceux à qui j’irai chercher confidences. Son affiliation avec Ezéquiel me faisait douter de la confiance que j’aurai pu mettre en elle, rien que parce que je considérais qu’elle avait pris pour l’ennemi. C’est idiot, quand on y pense. Mais je ne pouvais pas clairement comprendre ce qui avait motivé son choix, autre que celui d’un entêtement chronique à croire qu’il y avait, quelque part, du bon dans ce dernier. « C’est… gentil de proposer, Tweedy. » me sentis-je quand même obligé de lui répondre, pour ne pas la froisser. C’est que tout ça reposait sur un bon vouloir, au fond. Lui remettre sous le nez son changement de partenaire – alors qu’une bonne quantité de candidats avaient dû le faire pour moi – n’était pas nécessaire.

Il fallait bien l'avouer, Tweedy avait effectivement cru qu'Anabel avait cherché à se donner la mort dans cette piscine. C'est bel et bien ce qu'elle avait pensé à l'instant où elle l'avait reconnue, dans les profondeurs du bassin, et qu'elle avait lutté pour la sortir de là. D'un certain coté, Tweedy avait un peu honte d'avoir pensé une telle chose, car c'était grave d'imaginer un tel fait. Pour autant, elle était persuadée que son imagination n'était pas aussi débordante que d'habitude dans la pareille situation, et donc que le fait d'imaginer Anabel voulant se donner la mort n'était pas l'image la plus saugrenue de tous les temps. D'ailleurs, la réponse de sa camarade ne manqua pas de la conforter dans cette pensée. Elle disait savoir ce qu'était un suicide, mais surtout qu'elle le savait bien plus qu'elle pourrait le croire. Tweedy resta pour le moins inexpressive face à cet aveu, sans doute intérieurement bouleversée d'entendre de telles paroles. Très honnêtement, elle aurait préféré avoir inventé tout cela, parce qu'Anabel lui faisait clairement comprendre que si elle n'avait pas cherché à mourir en ce jour, ça lui était apparemment déjà arrivé. Et ça, c'était assez dur à entendre, tout de même. Donc, elle ne s'apprêtait absolument pas à commettre le moindre suicide cinq minutes plus tôt. Cet aveu, quant à lui, était rassurant. Mais tout de même, Tweedy ne pouvait chasser de son esprit l'image d'une Anabel désespérée au point de vouloir en finir. C'était comme ça. « Je ... je te crois » déclara alors difficilement Tweedy. C'était bien ce qu'elle était censée dire dans l'immédiat, non ? Genre, histoire qu'Anabel sache qu'elle n'insisterait pas dans cette voie, que Tweedy avait bel et bien compris qu'aucune tentative de suicide n'avait eu lieu dans ce bassin. Quoi qu'il en soit, Tweedy ne tarda pas à proposer à sa camarade se confier à elle si besoin est. Bien entendu, elle n'allait pas imaginer qu'Anabel aurait véritablement dans l'idée de se confier à elle, ce serait trop prétentieux de le penser, néanmoins c'était sa manière à elle de lui faire savoir qu'elle serait là au cas où. Anabel lui fit alors savoir que c'était gentil de proposer, ce à quoi Tweedy répondit par un simple sourire. Il lui revint alors en tête qu'Anabel avait eu du mal à reprendre son souffle à la sortie de l'eau. Ainsi donc ... « Mais dis moi, je ... je ne t'ai pas fait trop mal, en t'arrachant de l'eau de cette manière ? » demanda-t-elle alors, de nouveau confuse. Qu'Anabel ne se gêne surtout pas pour la sermonner, elle le méritait.

Je ne sais pas pourquoi je crois utile de lui mentionner que ce sujet, dont nous ne cessons de tourner autour depuis quelques instants, est loin de m’être inconnu. Elle ne connait rien de ma vie, ou presque, et je doute qu’elle ai pu lire en moi au point de savoir qu’à une certaine période de ma vie, c’est effectivement quelque chose qui à traverser mon esprit. Et que ma stabilité émotionnelle, si ce n’était de ces consultations mensuelles avec mon psychologue, serait bien précaire. « Je… je te crois. » Pas de question indiscrète, pas de curiosité maladive sur ce coup. Et je ne peux que la remercier, intérieurement, de ne pas pousser plus loin cette conversation sur ce sujet épineux. Ce n’est ni l’endroit, ni le moment, pour tenir de tel propos. Ni le confident idéal, malgré tout son bon vouloir. Keelan, Ennio, ou bien même Laoise serait plus qualifiée pour ce rôle, en ce moment, de part le degré de confiance que j’ai pour eux. « Mais dis-moi, je… je ne t’ai pas fait trop mal, en t’arrachant de l’eau de cette manière ? » me demande finalement Tweedy, prenant soudainement conscience de cette toux qui m’a affligé, quelques instants plus tôt, alors que je sortais à peine de l’eau. Brutal retour à la réalité. D’un signe de la tête, je lui assure que non. « J’ai avalé un peu d’eau, par la bouche, et le nez aussi. Mais c’est tout. » J’ai bien failli me recracher les poumons, aussi, mais je vais éviter de le lui dire. Comme ce n’est pas arrivé, ce serait bien inutile de l’inquiéter d’avantage. D’ailleurs, son visage affiche presque en permanence un air inquiet, mais un peu confus, depuis qu’elle s’est rendu compte de son erreur. Il faut qu’elle arrête de se faire des idées. « Arrête de t’inquiéter, il… il y aurait bien pu y avoir une réelle urgence dans cette piscine. Ça arrive. Tu as eu de bon réflexe, mais, visiblement, je n’étais pas la bonne personne à sauver. » que je me sens obligé de lui dire, pour la rassurer. Quelqu’un aurait très bien pu être réellement en train de se noyer, et sa réactivité aurait pu lui sauver la vie. À présent, comme je me sens un peu mieux, je me détourne de la jeune fille, puis enfonce mon corps dans l’eau, ne laissant que ma tête dépassé. « Tu étais venu pour nager, non? » lui demandais-je, comme ça, en remarquant qu’effectivement, c’est son maillot qu’elle portait, et non pas des vêtements, qui aurait pu la suivre, dans sa précipitation. « Alors, viens. » Je m’éloigne d’elle, retournant au centre du bassin en pratiquant ma technique de crawl, pas terriblement efficace sur une courte distance. J’aurai été aussi bien d’en rester à une technique de base. Le petit chien, c’est tellement plus gracieux, aussi.

Naturellement, maintenant que Tweedy savait que ce sujet délicat n'était pas inconnu à Anabel, elle préférait éviter d'en reparler. Disons qu'elle ne voulait ni la mettre mal à l'aise, ni réveiller de mauvais souvenirs, des choses qui puissent lui faire de la peine. Non, vraiment, ça n'était pas ce qu'elle voulait. Ainsi donc, Tweedy se contenta de lui faire savoir qu'elle la croyait, et laissa pour une fois sa curiosité de coté, histoire de ne pas risquer de mettre les pieds dans le plat, ce qui arrivait bien assez souvent pour qu'elle ne soit pas tentée de prendre ici le risque. Puis finalement, après quelques instants, elle se fit à nouveau du soucis pour sa camarade, mais légitimement à ses yeux. Quelques minutes plus tôt, Tweedy avait plongé dans le bassin et avait extirpé Anabel des profondeurs de l'eau, si bien qu'elle avait maintenant tendance à se demander si, en la sortant aussi précipitamment de l'eau, elle ne lui avait pas fait mal, d'une quelconque manière. N'oublions pas que Tweedy avait voulu bien faire mais que dans la précipitation de l'instant, il était possible qu'elle ait en fait bien mal fait. Le secourisme, ça n'était de toute manière pas son truc, à la base. Anabel lui fit alors part de son état, ce qui était alors censé rassurer la petite brune. M'enfin, n'oublions pas que cette dernière était du genre stressée, et ce, parfois pour pas grand chose. « Ça a du faire mal, ça ... Olala, si tu savais comme je suis désolée ... » Bah, à force de le répéter, Anabel allait finir par le savoir, quand même. Mais celle-ci semblait justement demander à Tweedy de se calmer, car il est vrai qu'elle aurait vite fait de se remettre à paniquer celle-là. Là encore, ses propos étaient sans nul doute censés la rassurer, et l'on peut dire que ça marchait plutôt pas mal. « Tu ... oui, tu as raison. N'empêche, je ne crois pas non plus être la bonne personne pour sauver, justement » plaisanta-t-elle doucement. Disons que tout noyé qui se respecte était en droit d'espérer meilleure aide. Oui, voilà. Ah mais au fait, il est vrai que Tweedy était venue ici pour nager, à la base, et certainement pas pour jouer au scrabble. « Hum, oui, c'est effectivement pour ça que j'étais venue, au départ » lui signifia-t-elle alors, d'une petite voix. Là, Anabel l'incita à venir, tout en s'éloignant de Tweedy pour retourner au centre du bassin. Tweedy y alla donc elle aussi, le sourire quelques peu retrouvé. « Tu nages souvent ? Je veux dire, que ce soit ici ou en général ... » Une question légitime ? Peut être. Mais surtout une question pour éviter les blancs, disons.

« Ça a du faire mal, ça… Olala, si tu savais comme je suis désolée… » Encore, et encore, elle se confondait en excuse alors qu’il n’avait vraiment rien de mal. J’étais toujours vivante, c’était ça l’important, non? Et ce qu’elle avait désiré, en m’extirpant ainsi de l’eau, quelques instants auparavant. Il fallait peut-être passer à autre chose, maintenant? Afin d’éviter que cette pauvre Tweedy en fasse un véritable malaise, et que j’en vienne à perdre patience… « Le jour où tu auras des enfants, tu seras la pire mère-poule du monde. » me permis-je néanmoins de lui faire la remarque, et oui, oui, c’était de l’humour! Regarder, il y avait même ce léger rictus au coin de mes lèvres! Qui s’effaça bien vite, car je n’étais pas vraiment d’humeur à plaisanter, mais quand même, je venais de faire un grand effort de sociabilité. « Tu… oui, tu as raison. N’empêche, je ne crois pas non plus être la bonne personne pour sauver, justement. » Qu’est-ce qu’il ne fallait pas entendre. Si j’avais été véritablement en train de me noyer, nous n’en serions pas rendus là. « Il n’y a pas de bonne, ou de mauvaise personne pour ça. Du moment que ta présence sauve une vie, le reste importe peu. » Maintenant, j’espère que ce chapitre était clos, et pour de bon, je l’espérais. J’en profitais pour me caler plus profondément dans l’eau, et pour nager un peu, incitant la jeune femme à faire de même. Elle était venue pour ça à la base, il me semble. « Hum, oui, c’est effectivement pour ça que j’étais venue, au départ. » Et bien voilà. Une piscine, c’était fait pour ça. Et non pas pour des plans macabres, comme elle l’avait imaginé. La jeune femme, après quelques hésitations, vint finalement me rejoindre au centre du bassin, où je faisais du surplace. « Tu nages souvent ? Je veux dire, que ce soit ici ou en général… » Toute question est bonne pour nourrir la discussion. « Quand même, oui. C’est le seul sport que j’acceptais de faire, enfant. Et encore aujourd'hui. Je dois avoir suivi des cours pendant neuf, ou dix ans, je sais plus. » Le temps d’apprendre la base de la natation, ainsi que plusieurs techniques. Je m’étais presque rendu au cours de sauveteur, mais j’avais décidé de laisser tomber, ne me sentant pas l’âme d’être autoritaire autour d’une piscine, qui représentait, pour moi, rien de plus qu’un loisir. « Plutôt ça que d'aller en salle de sport. » J'étais comme un poisson dans l'eau, alors c'était tout naturel que je me tourne vers elle.