Le futur était une notion bien aléatoire, surtout lorsqu'il devait être défini par nos personnes, par une relation entre deux protagonistes. J'avais décidément bien du mal à cerner ce que nous étions, ce que nous voulions ou même simplement ce que je désirais, attendais du jeune homme. Mais il est certain que j'en attendais décidément bien plus que ce que je voulais admettre. Et sur ces paroles, le beau suisse ne tarda pas à me répondre, d'une voix plus incertaine que jamais. « Je… Je ne sais pas… » son visage se releva, déposant ses prunelles dans les miennes « Je crois que c’est pour cela que j’ai peur, parce que je ne sais pas justement. » un blanc s'installa alors pendant de longues secondes. Je le comprenais. Je le comprenais car malgré ce que je pouvais en dire, il était certain que j'avais quelques incertitudes par rapport à ce qu'il advenait de nous. Ce qu'il adviendrait. Pourtant je ne souhaitais pas le montrer, pensant qu'il était préférable que je renvoie une image pleine de confiance, afin que le jeune homme ait une épaule sur laquelle se reposer. Et je voulais être cette épaule. D'ailleurs, lorsqu'il reprit la parole, une moue mi-rassurée mi-étonnée s'esquissa sur mon visage. « Prends-moi dans tes bras… » mais pas le temps de réagir qu'il en venait déjà à chasser ces quelques mots d'un vif revers de main. « Je… Oublie ce que je viens de te demander. Je suis stupide, je n’ai pas à te demander des choses comme ça… » un sourire se dessina tout de même sur mes lèvres, et j'approchais tout de même mon corps du sien, enveloppant rapidement le sien de mes puissants bras, mon menton se déposant sur son épaule droite. Je m'autorisais même à laisser mes lèvres déposer un doux baiser dans le cou du jeune homme, comme pour tenter de le rassurer un peu plus. Je pouvais le sentir là, tout près de moi. « J'aime cette sensation... » ma main traçait de lents cercles autour de la colonne vertebrale du jeune homme, comme exploratrice. J'autorisais alors mes lèvres à se déplacer le long de la mâchoire du jeune homme, jusqu'à ce que mon visage fasse face au sien. Là dessus, elles rejoignaient finalement les siennes en un doux et passionné baiser, un de mes main se déplaçant alors lentement jusque vers la poitrine du jeune homme. Ce n'était plus vraiment une étreinte, mais le tout me semblait bien plus rassurant.

Il n’avait pas le droit de lui faire ce genre de demande. Il savait bien qu’il n’avait pas le droit, il se l’était interdit lui-même. Il avait peur de pêcher de nouveau, de croquer une nouvelle fois le fruit défendu. C’était interdit. Il n’avait pas le droit d’apprécier tant Ezra. Pas tant qu’il ne comprenait pas ce qu’il lui arrivait, ce qu’il se passait dans son petit lui intérieur. Il semblait perdu, paumé, comme le petit poucet. Mais contrairement au petit Poucet, il n’avait pas de petits cailloux qui parsemaient son chemin déjà parcourut. Il n’avait plus de moyen pour retrouver son chemin, il était perdu. Perdu dans le chemin de la vie. Tout cela semblait bien compliqué. Il aurait voulu que tout soit plus simple avec Ezra. Commençant par le fait qu’il aimerait tant savoir ce qu’ils étaient, la nature de leur relation. Peut-être que s’il savait tout lui semblerait alors plus simple. Peut-être. Mais aucun des deux ne semblait savoir. Ils semblaient autant perdu l’un que l’autre sur ce détail, qui avait malgré tout de l’importance. Et personne. Personne pour les aider. Et malgré le fait qu’Emilien lui dise d’oublier ce qu’il venait de lui quémander, il sentit le corps du jeune homme se rapprocher de lui. S’approcher près, bien trop près. Il lui lança un bref regard. Un léger soupir de béatitude s’échappa lorsque les bras d’Ezra vinrent l’entourer. Il laissa ses paupières se clore le temps de cette embrassade. Il était bien là. Là, dans les bras d’Ezra. Là, toutes ses peurs, ses craintes, ses anxiétés, ses interrogations s’effacèrent. Il était bien là. Là, dans ses bras. Il aimerait y rester éternellement. Il savait bien que ce ne serait pas possible. Mais dans un ailleurs, peut-être serait-ce possible. Il y avait bien un ailleurs, un autre monde, où tout était plus simple, où il n’y avait plus d’interrogations, de questions. Emilien aurait voulu y vivre dans cet ailleurs. Ou peut-être pas… Il ne savait pas de quoi cet ailleurs pouvait bien se composer. La voix, presque berceuse, d’Ezra retentit au creux de ses oreilles, et un léger sourire se dessina sur ses lèvres. Lui aussi aimait cette sensation. Sensation qu’il ne saurait décrire, dont il lui serait incapable de dénommer, comme beaucoup de choses. Leurs lèvres vinrent, finalement, se rencontrer. De nouveau. Offrant au jeune garçon un doux baiser. Emilien recula aussitôt lorsqu’il sentit l’une des mains d’Ezra se posait sur sa poitrine. Son regard se perdit un long moment dans celui du français. Dessinant peu à peu un sourire. Un sourire qui devait certainement lui donner un petit air d’idiot. Mais qu’importe. Il s’en fichait de cela. Il se sentait bien, et c’était ce qui lui importait le plus. Il était bien, là, avec Ezra. L’une de ses mains vint caresser la joue du jeune homme qui se tenait en face de lui. Il savait qu’il n’avait pas le droit. Pas le droit de faire cela, de le toucher, de le caresser ainsi. Non, il n’avait pas le droit. Et pourtant, il avait décidé de le faire. Quelques secondes après, il retira sa main. Il eut pu choisir ce moment pour prononcer quelques mots. Quelques mots maladroits. Mais le moment était trop précieux pour venir le polluer avec quelques paroles. Vraiment trop précieux comme moment. Alors, ses lèvres déposèrent un bref baiser volé sur la bouche d’Ezra.