FRANZ


Rafael venait de se lever. Chloe était une partenaire idéale, elle était mignonne, drôle, pas dérangeante. Bref, la partenaire idéale et surtout, elle bougeait juste ce qu’il fallait pour ne pas réveiller l’espagnol toutes les deux minutes. Pas comme Barbara qui adorait bouger pendant la nuit. Ainsi, après une courte mais bonne nuit de sommeil, le garçon se rendit dans la salle de bain où il prit sa douche en vitesse avant d’enfiler un jean et une chemise. Il prit à la volée sa veste, son écharpe et ses lunettes de soleil et descendit en vitesse les marches. Là, il se dirigea d’un pas assuré vers la cuisine où il fu sentir le café chaud. Il s’en prit une tasse et sortit le boire à l’extérieur en compagnie d’une cigarette. Il fallait l’avouer, ce jour-là il avait une sale tête, peut-être à cause de l’alcool ou de la fatigue en tout cas, la paire de lunettes s’imposait. Voir sans être vu était en plus un très bon argument. Le contre-argument aurait été le fait qu’il fasse gris et que le soleil se cachait, ce n’était qu’un détail. Après avoir prit une taffe et but une gorgée de café noir, on pouvait dire que Rafael renaissait enfin.

La semaine avançait petit à petit, plus ou moins lentement. Tout paraissait de toute manière démesurément trop lent ou rapide entre ces murs. J'avais l'impression d'enchainer les petites désillusions au sein de l'aventure. J'avais conscience d'être un candidat au caractère plus ou moins fort dans l'aventure, mais de là à m'attirer des ennuis avec Rafael au bout de trois semaines, s'en était consternant et quelque peu effrayant aussi. Non pas que j'avais peur du jeune homme, loin de là, mais je craignais la suite des évènements, notamment si je m'emportais un jour avec lui.

Les yeux dans la vague, je m'étais ainsi servi en me levant une tasse de café, complétement barbouillé. J'avais l'impression d'avoir été écrasé par un tracteur cette nuit, et la petite douleur qui s'élançait dans mon épaule me faisait comprendre que j'avais très très mal dormi. Je me dirigeai ainsi vers la baie vitrée, observant le jardin enneigé avant d'y apercevoir Rafael. Arquant un sourcil, je me mordis la lèvre. Était-ce raisonnable de m'y avancer? Au fond, comme me l'avait dit Billie Vendredi soir, il était plus raisonnable et intelligent de passer au dessus de cette affaire, après tout il n'y avait pas eu de suite, Rafael n'était qu'un simple petit emmerdeur comme un autre.

Sortant ainsi dehors, je me dirigeai vers les tables où il était assis, m'installant face à lui, sérieux.

Avant que tu ne m'aboies dessus, j'aimerai retirer mon abruti du vendredi soir. Beurk, ça m'écorchait presque la langue de m'excuser. Pourtant il le fallait, je ravalai ainsi ma fierté. Pour faire ravaler ses opinions à Alisk, au moins. Dooonc... oublions.

C'était plus un ordre qu'une proposition, se prendre la tête au sein de la maison était inutile, il y avait bien plus perfide à combattre que Rafael.

Rafael devait encore dormir. Peut-être que même dans ses rêves, il voulait que les gens se prosternent, qu’ils se rendent compte combien Rafael était parfait. Peut-être que c’est pour cela qu’il était en train de rêver que l’un des candidats qui l’avait agacé durant le prime et qui aurait bien mérité de se faire casser le nez – une seconde fois – était en train de s’excuser. A vrai dire, il n’y avait que cette raison qui semblait être possible, comment pourrait-il en être autrement ? Et pourtant, le café aidait au réveil du bel espagnol et l’odeur du tabac accentuait bien cet état de réveil, il ne pouvait presque plus en douter. Un autre sens du alors se réveiller, celui de la vue. C’est pourquoi, après avoir posé sa tasse de café sur la table, il fit lever un instant ses lunettes. Le petit Franz était bien là, devant lui, en train de s’excuser. Peut-être reconnaissait-il enfin la supériorité du mâle, du vrai. Ou alors, c’était pour une autre raison qui échappait à l’espagnol mais il était clair que « c’est pour que tout le monde soit gentil dans cette maison » ne fonctionnerait pas. Il faut dire que Franz avait surtout agacé Rafael a cause de ce mot : abruti. S’envoyer des piques, c’était de bonnes guerres mais les insultes, c’était autre chose. Et puis, peut-être qu’il avait également été blessé dans son estime. Toujours est-il qu’il se contenta d’un : « Oublions. ». Il était hors de question que Rafael s’excuse à son tour.

Un sourire se dessina au coin de mes lèvres alors que je buvais ma tasse de café. C'était avec un certain étonnement que je constatais que Rafael ne s'était permis aucunes remarques désobligeantes, arrogantes ou puantes de médisances. J'étais agréablement surpris, dans un sens, et me dis finalement qu'il était peut-être préférable de coincer le garçon plus souvent à son réveil. Un vent frais souffla alors sur ma nuque et je frissonnai violemment, me tassant dans ma doudoune bien confortable, coiffant ma tête de ma capuche afin de protéger mes oreilles déjà bien rouges.

Très bien...

L'observant en silence un instant, les sourcils arqués, attentif aux expressions mornes du jeune espagnol face à moi, je finis par sortir une cigarette de son paquet avant de venir la coincer entre mes lèvres caféinées.

Est-ce que tu aurais du feu Rafael? S'il te plait..