Freddie & Danaé
#3

Je sais très bien que je n’ai pas le droit de faire des efforts trop physique pour le moment, mais je n’ai pas non plus envie de sortir d’ici en ayant dix kilos de plus sur la balance. Je laisse ça aux petites asiatiques qui seront toutes fières de retourner chez elle avec des joues de hamsters pour retrouver leurs parents. Les docteurs pensent que c’est encore trop tôt pour faire du sport et surtout de la course à pied, mais les docteurs ne sont pas ici avec moi alors autant que j’en profite et que je passe au-dessus de toutes les interdictions qu’ils me donnent pour me défouler, pour m’amuser un petit peu, pour commencer à reprendre une vie normale. Avant je faisais du jogging presque tous les jours. Bon c’était déjà pas recommandé à l’époque, mais je suis censé faire tout ce que je veux maintenant que je suis passé sur la table d’opération alors il est temps que je le fasse. Je ne mange pas des masses, mais j’ai encore quelques petits kilos de grossesses sur les hanches et les cuisses. Quelques petits kilos que je ne veux absolument pas garder. Je m’habille d’un pantalon de survêtement et d’un débardeur. J’enfile une paire de chaussures de sport, je me coiffe avec une queue de cheval haute et en avant. Je commence à courir dès que je sors de la chambre. C’est un petit échauffement avant de pouvoir me défouler dans la forêt, endroit dans lequel je n’ai encore jamais eu l’occasion de mettre les pieds. Je vois bien que certains candidats me regardent de travers. Ils doivent me prendre pour une folle, mais je m’en fiche royalement. Je les ignore et traverse les jardins avant d’enfin arriver aux abords de la forêt. Je m’arrête un instant. Il y a tout un tas de chemins devant moi. Je ne sais pas vraiment lequel prendre. Je tourne la tête vers la droite pour apercevoir un tout petit sentier. Parfait. Reprenant ma course, je laisse mes pieds avancer sur ce fameux petit chemin fait de cailloux et de touffes d’herbe par endroit. Je suis en train de courir depuis une bonne vingtaine de minutes lorsqu’un violent point de côté m’attaque à gauche. Je ne suis pas une chochotte et je poursuis ma course comme si tout été parfaitement normal. Quelques mètres plus loin la douleur persiste. Je grimace un petit peu et au bout de quelques foulées supplémentaires je termine par m’arrêter. Je suis toute essoufflée. Un petit peu trop même. J’ai la tête qui tourne. Histoire de reprendre mes esprits je viens m’installer tout près d’un arbre, le dos contre un tronc. Je ferme les yeux et essaye de me calmer en respirant calmement. Je bouge mes doigts et mes pieds pour que le sang circule comme il faut. Des bruits de pas se font entendre, mais je n’y prête pas attention. Ce n’est que lorsque j’ouvre les yeux et que je vois une nana devant moi que je me mets à hurler comme une folle. Un cri strident comme si j’étais sur le point de me faire attaquer. Portant ma main sur ma poitrine, voilà que je viens lui confier : « Tu m’as fait peur, je croyais être toute seule. » Je ne savais pas que certains candidats venaient ici pour ramasser je ne sais quoi. Je redresse ma tête pour regarder dans le panier qu’elle tiens. « Tu fais quoi ? » que je l’interroge en observant l’intérieur du panier tout en fronçant les sourcils.

En faisant mon jogging à Paris, en plein bois de Boulogne, je peux m’attendre à tout et avoir à la frousse à n’importe quel moment parce que je viens de croiser la route d’un détraqué mental, mais là je fais tout de même fort. Je pousse un cri tellement strident que je suis certaine que l’on m’entend depuis la plus haute tour du château. J’observe la nana qui se trouve devant moi. Cheveux courts et visage fin, elle est plutôt jolie j’trouve. Je lui fais part de mon état d’esprit du moment. « Pour tout te dire, je ne m'attendais pas non plus à tomber sur quelqu'un, qui plus est à l'effrayer. Je suis désolée, je pensais que tu m'avais entendue arriver, en fait. » Je ne veux pas la faire culpabiliser alors qu’elle a l’air toute gentille. Je termine par lui adresser un petit sourire. « Je … J’étais trop occupé à écouter les battements de mon cœur en fait. » que je viens avouer en baissant la tête tout en me mettant à jouer avec des feuilles mortes se trouvant à mes pieds. Je n’ai pas trop envie de parler de ce qu’elle a peut-être eu l’occasion de voir, genre moi en train de m’étouffer à cause d’un point de côté et de battements de cœur bien trop rapide. Curieuse je lui demande ce qu’elle fait là. « Et bien, je prends l'air » Son panier m’intrigue et je l’écoute à moitié lorsqu’elle me répond. Je ne peux pas m’empêcher de guetter l’intérieur de ce qu’elle tient à la main. « Et ça, hm, c'est pour ramasser les têtes réduites qui traînent parait-il dans la forêt. Ce seraient celles des candidats des anciennes saisons, à ce qu'on m'a dit. Et moi j'adore le glauque, alors bon, fallait pas me le dire deux fois quoi. » Des têtes réduites d’anciens candidats ? Je fronce les sourcils tout en levant les yeux vers elle. Elle aime le glauque ? Elle me fait un petit peu peur quand même, mais je décide de rentrer dans son jeu. Me penchant à nouveau vers le panier, je rétorque d’une petite voix : « Il y en a partout dans la forêt ou bien uniquement dans un endroit bien précis ? » Beh quoi, il faut bien lancer un sujet de discussion. La brunette semble en avoir un tout autre. « Tu courrais, je suppose ? » Je prends un air malin avant de lui répondre, tout en lui faisant un signe de la main : « Elémentaire mon cher Watson. » Je marque une courte pause avant de me lever. « Tu veux bien que je t’aides à chercher les têtes réduites des anciens ? » Elle ne peut rien me refuser vu que je lui fais mon super regard de chien battu.

« Et donc, verdict ? Est-ce qu'il bat comme il devrait battre ? » Très bonne question. Je lui fais signe de se taire en mettant l’un de mes index devant ma bouche, alors que mon autre main vient se poser sur ma poitrine, côté gauche. Je ne sens pas grand-chose là. Je viens alors poser deux doigts dans mon cou, sur le côté, à un endroit bien précis. Un battement. Deux battements. Trois battements. Tout à l’air parfaitement normal à présent. Je hoche la tête d’un signe positif. « On dirait bien. » que j’affirme en souriant. Mon interlocutrice me parle de têtes réduites d’anciens candidats. Je trouve ça glauque, mais ça peut être intéressant. Je l’écoute avec attention avant de lui demander si elle sait où l’on peut trouver ce genre de chose. « J'ai cru comprendre qu'on en trouvait principalement au pied des hêtres, en creusant un peu. Sauf que moi, je séchais les cours de SVT au collège, autrement dit je risque d'avoir un peu de mal à distinguer un hêtre d'un chêne ou d'un érable. » Aux pieds des hêtres ? Je fronce les sourcils tout en observant les arbres se trouvant tout autour de nous. J’essaye de me souvenir à quoi peut bien ressembler un hêtre. J’observe un chêne. Non. J’ouvre la bouche. « Les chênes ca a un tronc super gros et des feuilles étranges, genre en zigzag tu vois. Les érables ça a des grosses feuilles, comme le platane un petit peu. L’érable ce sont des petites feuilles ovales j’crois bien. » Je ne sais pas si je lui suis d’une grande utilité et encore moins si mes propos sont justes, mais au moins elle a une petite piste. Je suis tellement curieuse que je lui demande si je peux venir avec elle pour chercher les têtes réduites. Au moins cela me fera faire quelque chose et je vais tout de même me dépenser. D’accord je ne vais pas courir, mais je vais me dépenser tout de même. « Entendu, mais j'aimerais être sûre que tu es remise, avant. Je ne voudrais pas que tu dégobilles ton petit-déj’ sur mes pompes à la première tête réduite que tu verras. C'est qu'elles ne doivent pas être très fraîches, hein. » Telle une nana confiance je lui fais un signe de la main du style « laisse tomber bébé ». « J’vois des horreurs tous les jours de l’année dans les rues de Paris donc ce n’est pas des têtes en décomposition qui vont me faire peur. » J’suis une nana trop courageuse en plus. J’me lève et regarde encore une fois tout autour de nous. « Bon alors, on commence par où ? » que je dis en posant mes mains sur mes hanches.