Je tente de faire un tour des extérieurs, de tout voir. Je me promène dans le jardin lorsque je pense apercevoir un blond. Je croise enfin un visage qui m'est presque familier, j’étouffe un léger soupir de soulagement entre mes lèvres. C'est presque rassurant, je l'avoue, je vais donc à sa rencontre, pour provoquer le contact. Je me positionne à un mètre en attendant qu'il me remarque, ce qu'il ne tarde pas à faire, heureusement pour lui. Je n'ai rien besoin de faire. C'est inné chez moi. Je lui adresse l'esquisse d'un sourire. « Mallaury » j'annonce en l'imitant de ma voix cristalline pour me presser vers lui, c'est à dire justement aligner quelques pas supplémentaires, et comprendre ce qui doit requérir toute mon attention. J'arque un sourcil. Je m'assois à côté de lui. Je retire une sandale, plongeant un pied dans l'eau, tandis que l'autre reste sur la terre ferme. Orientée vers Mallaury, je lui prête une oreille attentive, croisant mes bras contre ma poitrine, je cale mon menton contre le bout d'une de ses épaules. Pour me reposer. Il a fait un voeu. On fait des progrès !  « Concernant quel domaine ? » je me permets de demander, bah quoi ? J'ai le droit tant que je lui demande pas l'intitulé exact, non ? « C'est bien d'avoir de l'espoir » je lâche d'une voix distraite. C'est apparemment ce qui fait tenir l'homme: l'espoir. Je suis tellement philosophique quand je m'y mets. Même si je ne miserais pas tout sur cette fontaine si j'étais lui. J'ai le droit de m'exprimer si je le trouve pathétique, de toute façon, ce n'est pas comme si j'allais réellement me retenir mais j'aime bien quand même avoir la permission légitime. C'est plaisant, je l'avoue. « Oh, je t'ai entendu dire pire, niveau pathétique » je ne peux pas m'empêcher de soulever avec un léger sourire moqueur. Donc si on évalue, sa déclaration n'est pas non plus si ridicule que cela. Je dois m'expliquer ? Voilà ce qui pourrait être qualifier de pathétique à mes yeux: « Pour se cacher, il faudrait déjà qu'on me regarde, or je suis invisible, blablabla » je dis en prenant une voix aiguë, comme ceux des dessins animés. Oui, je me rappelle encore de cela, tout de même.  « Bon, personne ne te fait la misère ici ? » je lui demande, comme ça, parce que certains pourraient profiter du caractère assez calme et pas trop rentre-dedans de Mallaury pour l'emmerder, surtout que je crois qu'on a un ou deux beaux cas. Histoire que je sois au courant. Enfin bon, cela fait juste trois jours que nous sommes ici, alors je n'espère pas !

J'en profite de le voir seul pour m'approcher, même si j'imagine difficilement Mallaury tout faire pour rester en compagnie des autres. Bien évidemment. Il a fait un voeu. Ma curiosité est sans limite, malheureusement. C'est presque maladif chez moi, je m'en rends compte, mais je ne me soigne pas. « Sentimentale, c'est trop vague » je ne peux pas m'empêcher de dire de mon doux soprano en arquant un sourcil. « Sentimentale-sentimentale ? » je lui demande en me rendant compte que ma question ne veut rien dire non plus. J'espère qu'on se comprend un minimum. Je veux dire, sentimentale, coeur et tout le bordel ? Parce que pleins de choses peuvent se rapporter au domaine sentimental, soyons clair ! Il attend ça depuis une éternité, j'écarquille légèrement les yeux. « Il ne fallait pas me dire ça » je dis alors avec un léger geste de la main. « Maintenant j'ai vraiment envie de savoir » je grogne et quand je n'ai pas de réponse, je suis tout simplement frustrée. Oui, je suis chiante et ce n'est pas nouveau. Je finis par le citer parce que dans le genre pathétique, j'avais une belle pépite le concernant mais il n'assume déjà plus. « Oui, exactement » j'en rajoute une couche, je pourrais lui balancer le lieu et la date. Je suis précise. Finalement je lui demande si personne ne s'est amusé à l'emmerder des le début. Heureusement, non. J'hoche la tête, docilement. Je note le prénom Percy, je crois que c'est le gars à qui j'ai refilé ma coupe pendant le premier prime, mais je ne suis pas certaine. S'il fait une proie facile ? J'ai même envie de dire qu'il pourrait être une cible idéale; malheureusement, un peu effacé, pas trop du genre à répondre. Je ne veux pas être méchante, j'essaie simplement d'être réaliste. « Un lapin sous les phares d'une voiture » je réponds même avant de lui donner un léger coup d'épaule pour le dérider parce que j'ai l'impression que son visage est entrain de changer de couleur. Suis-je entrain de le stresser ? Ce n'était pas mon intention, je vous le jure ! « Je serais ton chevalier servant t'inquiète pas » je lui balance avec un léger rictus. Les rôles de bonhomme, ça me va toujours comme un gant. Je suis parfaite dedans. Il me demande à qui je pourrais penser, pour le moment. « Je n'ai pas encore bien repéré » je lui lance un affichant un doux sourire, pivotant mon visage en direction du sien. « Mais je te ferai une petite liste sous peu » j'annonce en haussant les épaules. Je ne peux pas encore réellement juger des personnes que je ne connais pas. Pas du tout même. Je n'ai pas le temps d'écouter la vie ou alors les parcelles de vie de trente-deux habitants en moins d'une semaine, c'est littéralement impossible !

Il ne me dira rien. Et franchement, c'est assez frustrant de le savoir, quand même. Je fais une légère moue boudeuse tandis que mon cerveau surchauffe à la recherche d'argument à lui soumettre pour qu'il puisse m'en dire un peu plus. Je pensais à la torture, tout d'abord, mais on va commencer par chercher une méthode douce, hein. « Tu penses que cette hypothèse a vraiment été prouvée ? » je finis par lui demander. Parce que c'est clair que si un gars hurle qu'il veut un million, vu les chances qu'il a au loto, qu'il le dise ou non, cela ne changera rien au fond, non ?  « Donc je te propose qu'on teste » je finis par lui dire avec une douce voix. Comment ça je suis entrain de l'embrouiller pour arriver à mes fins, pas du tout !  « Tu me l'avoues et on regarde comment de temps cela met pour se réaliser ? » je sifflote alors en croisant son regard avant d'étirer un léger sourire sur mon minois pour parfaire la scène. Il m'assène que je trouverais cela niais. Apparemment il me connait mieux que je ne me connais donc, assez perturbant, pas vrai ? « Tu inventes » je dis en feignant une contrariété en roulant des billes avant que mes sourcils ne se froncent. « C'est toi qui utilise le moins niais, pathétique, absurde te concernant, ce n'est pas moi » je lui rappelle sévèrement. Je finis par le comparer à un innocent lapin qui pourrait être la future victime d'un carambolage, super l'image, non ? Tellement parlante.  Il me demande si je pouvais prendre sa défense. Je ne défends pas la veuve et l'orphelin, juste lui, parce qu'on va dire que c'est ma première rencontre dans cette aventure et qu'il faut honorer cela. Pas vrai ? « Bah évidemment » je lâche comme s'il s'agissait d'une évidence en haussant les épaules, je n'aime pas ceux qui s'acharnent, ou prennent des bouquets émissaires. Je trouve cela bien trop facile à mon goût, de toute façon, les gens comme cela, je les fuis. Il me demande si je n'ai pas un voeu à faire, j'hoche négativement la tête de droit à gauche, je n'ai pas d'envie particulière ou alors de chose que je désire depuis une éternité comme lui. En général je n'attends pas cela, je vais les chercher, les provoquer, les objets de mes désirs. « Je préfère attendre une étoile filante pour ça » je déclare alors avant de retirer mon pied dans l'eau pour m'asseoir en tailleur sur bord de la fontaine. Je n'en n'ai jamais vu encore, mais je ne désespère pas ! Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir ! « Et puis comme ça je laisse plus de chance au tien » je souligne et vu le nombre de pièces présentes au fond du bassin, il va pouvoir attendre son tour encore un bout de temps.

Il ne veut rien me dire, enfin, c'est ce qu'il laisse clairement entendre dans sa réponse. Je pousse un long et théâtrale soupir de frustration pour bien faire passer le passage. Je ne peux pas être plus claire. Je suis très mécontente.  Cela pourrait être de ma faute s'il ne se réalise pas. « Tu essaies de me faire culpabiliser»  Je finis par l'interroger en arquant un sourcil, juste pour savoir. « Parce que ce n'est pas arrivé en vingt-cinq ans de vie» je déclare pour le prévenir. J'ai beau lui porter une once d'affection, il ne faut pas pousser non plus. Il continue. Je trouverais cela plutôt culcul, je ne préfère même pas répondre à ça, je me contente de pincer mes lèvres ne formant qu'une fine ligne rosée sur mon minois maintenant. Je suis un ange gardien. Ça vend un peu du rêve dit comme ça, non ? « J'aime bien l'idée»  je réponds d'une douce voix, mais je ne pense pas que j'aurais le temps d'exercer mon nouveau rôle bien longtemps, hein. Il commence à douter de la fontaine. Il risque d'attendre comme un con. « Je n'aurais pas dis mieux» je m'exclaffe pendant une seconde avant qu'il me demande combien de temps il devrait attendre. Il me prend pour Dieu, non ? « Maintenant» je réponds parce que je suis de nature assez impatience et que ça m'a toujours saoulé d'attendre pour rien au final. Je hais les pertes de temps. Je pousse un profond soupir d'ennui, pendant une ou deux secondes. « Mallaury» je déclare alors avec un ton qui n'annonce rien de bon pour lui, avant qu'un sourire éblouissant ne s'étire sur mon visage. « Parle-moi un peu de toi» je finis par lui demander avant de sensiblement m'orienter dans sa direction, retirant quelques mèches platines qui me barrent la figure pour mieux l'observer. « Parce que franchement, la fontaine, je m'en fous un peu» je lui avoue, je préfère découvrir un pan de sa vie que je ne connais pas plutôt qu'épiloguer une minute de plus sur cette fontaine qui reçoit bien trop d'attentions inutiles. Je veux dire, on a un peu fait le tour de la question non ? Je pense qu'on est fixé, dessus. Maintenant, c'est au tour du jeune homme. « J'attends» je balance sur un ton un brin autoritaire, avant que ma tête ne pivote brutalement vers lui. De toute façon, on a pas mal de temps à tuer !

Il n'aurait du rien dire, justement, il devrait tout me dire ! Ou presque quoi. Je plisse les yeux, un instant. Tout de suite les grands mots. On n'en serait pas là ? Pardon ? « Bah on est bien, là, non ? » je l'interroge en ronronnant de ma voix cristalline en posant mes prunelles azurées sur sa personne, avant qu'une moue interrogatrice ne se dessine sur mon minois. Je ne vois pas du tout où est le problème. Il n'y en a pas d'ailleurs. Je lui demande de me parler, peu importe le sujet, j'ai encore beaucoup à découvrir de lui. Des milliers d'informations que je ne connais pas. « Je ne savais même pas que tu en avais une » je réponds, perplexe en fronçant les sourcils. Oui, j'aime tout savoir, et n'avoir aucune zone d'ombre dans la vie de mes interlocuteurs. J'attends qu'il développe la suite, apparemment, elle attend un bébé, oulah, j'ai envie de dire que c'est déjà une mauvaise chose, à la base. Surement parce que je déteste les gosses, en avoir, c'est comme se tirer une balle dans le pied. Bon, bonne nouvelle, le copain de la demoiselle a tenu Mallaury au courant, c'est déjà pas mal non ? Je tente de relativiser un peu la situation. « Je ne connais pas la situation dans son ensemble, je ne peux pas juger, tu sais » je ne peux pas m'empêcher de dire en le regardant avant de faire une moue boudeuse. « Quel âge a ta soeur ? » je finis par lui demander avec un vague sourire en haussant les épaules, juste pour savoir si la différence d'âge est réellement importante. Parfois, cela influe beaucoup sur la situation. Mallaury me sort que la rupture est surement définitivement entre lui et sa famille. Agacée, je secoue la tête de droite à gauche. « Tu dis vraiment n'importe quoi » je dis d'un ton faussement sévère en le regardant avant de le gratifier d'une pichette sur le nez. On n'a qu'une famille, et on ne peut jamais la perdre. C'est super important en plus ! Il me demande ce que j'aurais fait à leur place. J'attends quelques secondes, en imaginant le cas de figure où mon frère déciderait de s'éloigner brutalement -ce qui n'arrivera jamais- soyons clair. « Si mon frère agissait comme toi » je commence alors pour répondre à sa question un peu délicate. Tout ce qui touche à la famille est un peu un terrain glissant. « Je lui en voudrais à mort, je serais blessée, mais je ferais exprès d'aller le voir tous les jours, de lui téléphoner souvent, même si c'est contre sa volonté, je ferais tout pour continuer à garder le contact » je lui expose d'un vague geste de la main. Je ne sais pas si ma réponse peut le satisfaire ou même l'éclairer. « Mais ça, c'est parce que je suis une chieuse » je lui rappelle donc, c'est dans mon caractère.