w/ tildaJ'ai eu l'envie soudaine de manger un burger. Le genre bien gras, immense. Le genre qu'on mange quand on n'a pas mangé depuis trois jours. Le genre qui cale l'estomac pour toute une journée. Puisque je ne peux pas résister aux caprices de mon estomac, je me suis mis à confectionner le burger tant désiré, avec un bon steak haché dedans, une galette de pommes de terre, tomates, salade, sauce, fromage. Miam. J'ai fait des frites pour aller avec. Et pour finir, je me suis trouvé une bouteille de soda, dont on ne citera bien sûr pas le nom. Repas parfait. Pas très équilibré, mais je m'en fous. Je m'en suis toujours foutu, ça ne va pas changer aujourd'hui. Ce n'est pas mon dîner de ce soir qui changera quoi que ce soit à mon physique. Je me dis que c'est difficile d'aggraver encore plus les choses en ce qui me concerne. J'ai trouvé refuge à la salle de contrôle pour manger tout ça. Je veux bien avouer que c'est aussi un peu pour pouvoir en profiter tranquille, sans des abdos qui se promènent pour me narguer. Je suis le type qui bouffe des burgers et qui boit du soda, pas celui qui fait trois heures de musculation par jour, c'est ainsi. Je suis donc en train de manger quand je suis dérangé. Enfin, c'est excessif comme manière de le dire. Il y a juste Tilda qui est entrée dans la pièce. Oups. "Salut" je dis simplement en m'essuyant ''discrètement'' le coin de la bouche.

Si a bien un endroit dans lequel je ne vais jamais c'est la salle de contrôle. J'y ai mis les pieds la première semaine juste histoire de dire que j'ai respirer l'air de chaque pièce de la baraque. Mais depuis je n'ai pas vraiment ressentis l'utilité d'y aller. Je sais que certain s'amuse à nous regarder à travers les écrans de contrôle... mais moi je trouve ça quelque peu étrange. C'est comme s'ils se mettaient à la place des spectateur et enfin compte c'est aussi comme s'ils ne vivaient pas réellement l'aventure. Je préfère me mêler aux gens pour découvrir des secrets plutôt que de passer mon temps à l'observer de mon haut perchoir. Mais bon j'imagine que la seule utilité serait de faire un zoom sur la cellulite des autres nanas, juste pour se rassuré que chez nous c'est pas aussi avancé. Oui clairement c'est la seule et unique utilité que j'aurais pu trouvé à cette pièce. Enfin ça c'était avant de perdre mon ipad, j'avais une forte envie de checker les twitter des autres, pour voir les nouvelles photos posté et pourquoi pas mettre mes petits commentaires. Oui bon c'est vrai que c'est pas forcément mieux que de coller son nez à un écran pour observer les faits et gestes des candidats, mais c'est mon petit plaisir. Alors puisque je n'ai tout simplement aucune envie de perdre mon temps à le chercher pendant trois heures, je me décide à me rendre dans cette fameuse pièce. Dans mes souvenirs elle n'avait franchement rien d'extraordinaire, juste de l'acier et des écrans quoi. Ah et oui y a la roulette russe, bon c'est vrai j'y vais au moins deux fois par semaine, mais je vais pas vraiment attention à ce coin là de la pièce je me contente de tourner la roulette pleine d’espoirs. Souvent je ressors d'ici totalement dépité. Je pense que je vais me tenir loin de cette roue du diable pendant quelques semaines. Je pousse la porte et tombe sur un spectacle saisissant. Un hamburger bien gras, rien que de voir le fromage qui tombe au ralentis dans l'assiette, la galette de pomme de terre parfaitement bien dorée et puis l'odeur ! Je pourrais dire que ça me dégoûte parce que normalement c'est franchement le genre de nourriture que j'évite pas par soucis de ligne, juste parce que j'aime bien savoir ce qu'il y a dans les aliments que je mange et puis aussi parce que je n'aime pas particulièrement les hamburger, quitte à mal manger je préfère une pizza. Mais là il suffit que mon regard se pose sur les frittes pour que mon estomac en réclame. Je remarque alors Noah, une tache de sauce sur le coin des lèvres et le regard de celui qui vient de se faire prendre en flagrant délit de mal bouffe. Je réponds à son salut par un léger hochement de la tête, j'ai les narines qui frétille et je crois bien que je vais me mettre à baver dans trente secondes. Alors je me rapproche du candidat et m'échoue sur la chaise à coté de lui, sans quitter des yeux son assiette. « Tu partages ? » Je finis par lui demander dans un souffle, comme si je prononçais un mot magique. Il n'a même pas encore dis oui que ma main se dirige vers son assiette pour lui chourer une frite. Délicieux, j'en veux plus.

C'est précisément pour ça que je me suis isolé. Pour ne pas avoir à partager. Pour ne pas me faire piquer mes frites. Dommage pour moi, j'ai maintenant Tilda qui vient m'embêter. Ça peut paraître excessif, mais je le ressens presque comme une intrusion dans mon moment de mal bouffe. C'est surtout cette main qui est venue me piquer une frite qui m'irrite. C'est mal de faire ça. Je n'oserais jamais faire un truc pareil puisque je connais l'importance d'un plat de frites. C'est comme les brosses à dent, c'est chacun pour soi. Bref. Elle m'a demandé si je partage. Est-ce que j'ai l'air d'en avoir envie ? Je dois paraître aussi blasé que d'habitude, ça ne doit pas être très clair. "On n'est pas dans une pub kinder bueno ici" je dis à voix basse. On ne partage pas ici. On ne vit pas dans la joie et la bonté, dans un monde édulcoré où on sourit à une inconnue qui rentre chez soi pour nous piquer notre bouffe. Ça ne fonctionne pas comme ça, la vie. Et ça va contre les règles du burger. J'avale une frite à mon tour. Je suis persuadé qu'on peut trouver une raison à ça. C'est comme si je voulais m'approprier mon assiette et montrer à l'inconnue que l'assiette et son contenu m'appartiennent. C'est comme poser un panneau « défense d'entrer »  sur sa clôture de maison. "Tu es du genre à piquer des frites dans l'assiette de quelqu'un d'autre donc ?" je lui demande alors comme si ça en disait beaucoup sur elle. Je trouve que ça indique déjà beaucoup de choses sur sa personnalité. Piquer une frite, c'est presque un crime pour les gros dans mon genre. Je crois qu'elle ne s'en rend pas compte. À nouveau, ça vient peut-être de ma mine blasée et indifférente. Je vais devoir penser à changer d'expression faciale, un de ces jours. Histoire d'innover un peu. Et puis, ça ne me ferait pas de mal de changer de tronche. Je ne peux pas savoir à quel point j'ai raison, je sais.

Je sais pas trop à quoi m'attendre de la part de Noah, je le connais pas du tout. Je sais juste qu'il y a un portrait de lui quelque part dans la baraque et qu'il est le partenaire de l'effeuilleuse professionnelle. Alors quand je vois avec son burger là je me dis qu'il va soit être près à partager sois réagir comme un chien de garde. L'un ou l'autre ce n'est pas mon problème. De toute manière je suis déjà entrain de lui piquer un frite dans son assiette le mal est fait. Il m'informe alors qu'on est pas dans une pub kinder bueno. Ça m'arrache un rire. Le partage c'est un peu le truc des êtres humains non ? Enfin peut être pas lui et rarement pour moi aussi. A moins qu'il y en ai trop pour une seule et unique personne. Ce qui ne semble pas être son cas. Il mange une frite, sans me quitter des yeux dans le genre à dire que ''ce sont mes frites pas touche''. Il est donc plus chien de garde que gentil garçon qui partage son repas avec une demoiselle affamée. « Tu vas donc me laisser mourir de faim. » Je miaule en m'étirant assise sur la chaise à coté de lui. C'est pas gentil tout ça. Il pourrait au moins partager ses frites, même si clairement c'est de son steak que j'ai envie, associé au pain, à la galette de pomme de terre et tout le reste. Nourris moi homme ! Il me demande alors si j'étais le genre à piquer les frites dans une assiette. Je ne savais pas qu'il y avait ce genre de personnes. Lui en tout cas j'en déduis qu'il est le genre qui supporte pas qu'on lui pique des frites dans son assette. Ou bien c'est toute la nourriture en général ? « T'es comme ça qu'avec les frites ou bien avec tout ce qui peut se trouver dans ton assiette ? » Je lui demande alors sans répondre à sa question initiale. Parce que non je ne suis pas le genre à piquer dans une assiette sans y être invité. Je suis plutôt le genre de personne qu'on laisse faire ce dont elle veut, juste pour ses beaux yeux. Enfin habituellement je suis ce genre de personne, semblerait que ça marche pas avec un Noah qui a la dalle. « Si tu veux tout savoir, je suis même pas le genre à aimer les frites. Mais tout à fait le genre à convoiter ce que les autres ont. Et là pas de bol c'est tombé sur ta frite. » Je change la fin, allusion non teinté à autre chose. Un genre de frite qu'on trouve pas dans une assiette. Sauf que là c'est un mensonge ou une blague tout au plus. Oui une bonne blague destiné à le dérider un peu. Et vu l'esquisse de sourire qui se dépose sur mon visage, je pense que c'est assez évident.

Je ne vais pas la laisser mourir de faim, c'est faux, je suis trop gentil pour ça. Je veux bien lui préparer de quoi manger si elle veut. Après avoir terminé mon assiette, bien sûr. C'est mon petit plaisir de la journée, elle ne peut pas m'enlever ça. Elle a l'air décidé à me retirer tout mon plaisir. "Bien sûr que non. Mais une seule assiette pour deux, c'est un peu pauvre." Je tente de broder, de trouver des arguments, un peu en vain. Je fais de mon mieux. C'est-à-dire que c'est globalement mauvais.  Je dois pas avoir l'air très crédible. Pourtant, c'est la réalité. Un hamburger pour deux, ça ne fait pas beaucoup. On risque de tous les deux avoir faim si on partage. Je reste sur l'idée qu'il serait mieux qu'elle se prépare son propre truc. Bien plus simple pour tout le monde. Surtout pour moi. Je suis quelqu'un de plutôt généreux mais pas là, pas maintenant. Les frites, c'est sacré. Je n'ai aucun souci quand il s'agit de partager ma bouffe. Pas que ça arrive souvent, puisque je vis seul, je mange seul, toujours seul. Mais je suis prêt à mettre mes assiettes à disposition des plus affamés. Sauf là. Elle n'a pas choisi le bon jour. "C'est... euh, juste avec les frites." je tente ensuite de m'expliquer. Je me renfrogne. J'aurais l'air bête à émettre mon opinion sur le fait que c'est mal de piquer des frites à quelqu'un. Je réalise bien que c'est idiot, mais c'est plus fort que moi. Ce sont mes frites, mon assiette, mon burger. Est-ce que je pique dans les desserts de ces dames, moi ? Non. Je suis sûr qu'elles ne seraient pourtant pas contentes que je m'empare d'un morceau de leur fondant au chocolat. Alors mes frites on n'y touche pas. Tilda reprend la parole, je pense qu'elle a décidé de me troubler. Pour de bon. Elle parle de ma frite comme si elle parlait d'autre chose. "Ma frite aurait préféré que tu la laisses tranquille" je réponds vaguement en reportant mon attention sur mon dîner. C'est bien beau de parler mais il ne faudrait pas non plus que mon hamburger refroidisse avant d'avoir terminé de le manger.