Après avoir fuis le prime comme une lâche, je n'avais pas eu le courage d'affronter Percy et m'étais principalement concentrée sur le fait de ne pas le croiser. Ses propos, ce qu'il avait dit à Ghika, m'avaient secouer de l'intérieur, m'avaient remuer. J'avais l'impression que l'évidence était là, qu'il avait joué durant tout ce temps et que je ne pourrais certainement pas le changer. Il fallait se rendre compte qu'il resterait celui qu'il est. Je m'étais accrochée à une autre idée durant toute la première partie de mon aventure et il était peut-être temps de comprendre la réalité et de l'affronter comme une grande. Installée sur le canapé, une tasse de thé entre les mains, je reste immobile un long moment. J'ai même l'impression de devenir invisible aux restes des habitants. Parfois, ça fait du bien d'être transparente, de disparaître. Et rien ne pourrait me tirer de mon état léthargique, rien du tout. Sauf cette silhouette qui vient de passer d'un pas pressé dans le hall d'entrée, silhouette que j'ai pu apercevoir grâce à la porte restée ouverte. Machinalement, je me met debout et dépose la tasse sur la petite table. Elle y restera probablement un moment. Silencieuse, mes pas s'accélèrent pour ne pas perdre la fameuse silhouette de vue, je reste derrière mais je la garde dans mon champs de vision. Un peu comme une filature. Je m'arrête de marcher uniquement lorsque nous arrivons sur la plage et que, au bout du bouton, je le vois grimper dans ce petit bateau. Je pourrais très bien lui dire quelque chose, d'ailleurs j'ouvre un peu la bouche. Sauf que les sons ne sortent pas. Je reste complètement muette. Il aurait pu partir que je n'aurais rien dit. Mais, se redressant avant d'allumer le moteur, il remarque ma présence. Il est trop tard pour partir maintenant. J'ai envie qu'il me dise la vérité une bonne fois pour toute. Les points serrés, le long de mon corps, j'écoute simplement ce qu'il dit. Il est prêt à me donner des explications mais il faut que je le suive. Certains vont certainement considéré mon geste comme étant complètement débile mais je prends la décision de me rapprocher malgré tout de l'anglais. Il me tend la main mais je ne la saisis pas, je sais me débrouiller toute seule. Le regard plus sombre qu'à l'accoutumé, je prends place dans l'embarcation. «Je t'écoute Percy mais évite les bobards. » que j'articule alors. C'est à lui de se lancer, à lui de m'expliquer parce que moi, je l'ai déjà suffisamment fait. Le plus dur dans tout cela, c'est de l'avoir entendu dire que j'étais simplement une proie facile.

On va certainement penser que je me jette (une fois de plus) dans la gueule du loup en acceptant d'embarquer avec l'anglais sur ce petit bateau. Bien entendu, je peux le comprendre et je n'en voudrai à personne de le penser, mais j'ai besoin d'obtenir des réponses à certaines des questions que je me pose depuis le dernier prime auquel nous avons assistés. Des questions que je me posais déjà peut-être un peu avant mais que j'avais bêtement refoulé par peur d'obtenir des réponses qui ne me conviendraient pas. Aujourd'hui, je le sentais, il était temps de les affronter ces réponses. Il était temps de prendre sur moi et d'entendre la vérité puisqu'il se proposait de me l'offrir. Après lui avoir demandé de m'expliquer, je restais silencieuse et m'asseyais simplement. J'étais prête à écouter et peut-être même à le comprendre si il arrive à se montrer sincère et honnête vis-à-vis  de tout cela. Les yeux posés sur l'anglais, j'essayais de ne pas faiblir et de ne pas fondre en larme devant lui, pas maintenant. Je voulais tout écouter sans lui montrer à quel point tout ce qu'il avait pu dire m'avait touché droit au coeur. C'était un peu de ma faute de toute façon, fallait pas que je m'attache tant, il me l'avait dit. Percy me parle d'une certaine pudeur qu'il aurait eu lorsqu'il se trouvait en compagnie de son propre partenaire. Une pudeur qui l'aurait mené à mentir sur la vérité, sur ce que nous sommes et sur ce que je représente pour lui. Plus qu'une histoire de point, plus que ce que j'ai entendu lorsque je me trouvais sur le plateau et qu'Akela a diffusé cette fameuse rubrique. Il a raison sur un point, cela nous appartient. C'est d'ailleurs pour cela que j'avais préféré ne pas donner une note au candidat lors du prime, parce que j'estimais que cela ne se partageait qu'à deux. Nous. Puis je n'ai pas pour habitude de quantifier les performances sexuels des gens de toute façon. Silencieuse, je lui indiquais d'un simple signe de tête qu'il était autorisé à continuer ses explications. Je ne répondrais que lorsque je me sentirais prête. Uniquement lorsque cela sera le moment. Ce qui ne tarda pas puisqu'il me posa une question. Sans l'ombre d'un sourire, bien trop impliquée et blessée pour cela, je prends la décision de lui répondre. De lui faire enfin entendre le son de ma voix et de lui donner mon point de vue sur les événements. «Non, ce n'est pas ce que tu as fais. » Je ne pouvais tout de même pas lui enlever cela, il avait continué à me donner de l'importance, à apprécier ma compagnie et n'avait rien changé. J'avais apprécié bien entendu. Mais la rubrique avait remit certaines choses en question et la première chose que je remettais en question désormais, c'était moi. «Je... Si je suis amenée à prendre mes distances ce n'est pas forcément contre toi. » Ce n'était pas de cette façon qu'il devait le voir. «C'est plutôt pour moi.» Pour me protéger, pour éviter de souffrir parce que je suis quelqu'un de trop naïf, parce que j'ai longtemps essayer de me persuader qu'il n'y avait pas quelque chose de dangereux dans le lien que nous entretenions. Dangereux pour moi. Parce que je m'attache, parce que je risque de me fracasser le coeur et que cela ne m'est jamais arrivé. «J'aimerai éviter de souffrir plus encore. » que j'articule alors en rivant mes prunelles vers le fond de la barque. «Tu me l'avais demandé Percy, tu avais été très clair et j'aurais dû t'écouter depuis bien longtemps parce que je ne suis pas certaine de tenir le coup. Je suis désolée.» Désolée de ne pas être forte, désolée d'avoir flanchée.

Je ne sais pas comment agir avec Percy mais je sais qu'il n'est plus acceptable de fuir la vérité et de me cacher comme une petite souris. Il est encore moins acceptable de faire comme si de rien n'était, d'agir comme si les paroles qu'il avait prononcé la semaine passée ne m'avaient pas véritablement blessée. Je ne pouvais pas, c'était au dessus de moi. Je suis quelqu'un d'entière et lorsque je ressens ou pense quelque chose, il m'est impossible de le camoufler bien longtemps. Je suis bien moins habile que Percy pour me cacher, pour déguiser la vérité. J'avale difficilement ma salive alors que je viens de terminer de parler, j'ai beaucoup de mal à endurer cette discussion. Ma gorge se serre un peu plus à chaque minute qui passe et je retiens pitoyablement les larmes qui bordent mes yeux. Je n'ai pas envie de pleurer, je n'ai pas envie que l'on me trouve encore plus idiote que cela. Je n'ai pas envie que les gens essaient de croire que j'essaie de sauver les meubles avec mes larmes. Il me reproche d'être égoïste et il m'est difficile d'accepter ce commentaire ? «C'est égoïste de vouloir me protéger ? Non. C'est de la conscience Percy. » Et c'est peut-être bien la première fois que j'en ai depuis le début de cette aventure. Je ne me trouve pas égoïste, comme je la lui ai dis, je ne le fais pas contre lui mais pour moi. C'est une nuance qu'il faut qu'il saisisse. «J'aurai aimé que tu y crois au moins un peu parce que moi, j'y ai longtemps cru pour deux.  Je... T'as même pas voulu essayer d'y croire dans le fond, t'as jamais pensé que ça pourrait marcher.» Je lui déballe, à peu près, tout ce que j'ai sur le coeur en ce moment. Tout ce que je peux pensé de ce que nous avons partagés depuis le début de l'aventure et je me fais du mal en le faisant. Ca fait mal de le dire à voix haute parce que j'ai l'impression d'en prendre conscience en même temps que les mots sortent. «Mais je ne te fais rien payer du tout. Je ne me venge pas et j'aimerais que tu le comprennes»  que j'articule le plus calmement possible alors que ma voix tremble un peu malgré tout. Je n'a pas sa force de caractère, je n'ai pas son tempérament. Contrairement à lui, je ne suis pas énervée par la situation, juste déçue. Triste même. Mais alors qu'il semble me poser un ultimatum, je ne suis plus certaine de rien. Le néant accapare l’entièreté de mon esprit. C'est juste horrible comme sensation. «Je ne sais pas ce que je veux Percy. J'en sais rien. » Je prends la décision de me montrer honnête une fois de plus. «La seule chose que je sais c'est que je ne veux pas avoir mal Percy. Et je ne dis pas que je n'ai connu que des déceptions avec toi, pas du tout. Mais j'en attends trop de toi et c'est pas raisonnable. » Je me mords nerveusement l'intérieur des joues, je ne peux pas le regarder en face et concentre mon regard sur l'environnement qui nous entoure. C'est plus facile que de devoir le regarder droit dans les yeux. «Et le plus horrible dans tout cela, c'est que je suis même pas capable de renoncer concrètement à toi.» Je me fais pitié.

Notre embarcation glissait sur l'eau et nous éloignait un peu plus de la plage, nous isolait un peu plus à chaque mètre qu'elle faisait. Nous étions l'un  face à l'autre et la seule chose qui s'offrait à nous était la discussion. Qu'allait-il advenir de nous ? Qu'allions nous devenir ? J'étais certaine de rien Plus rien n'était clair dans mon esprit mais je gardais bien en tête, que si je ne voulais pas souffrir, il me faudrait espérer autre chose de Percy. Il me faudrait abandonner des idées bien trop absurdes pour revenir à la réalité, me rendre compte qu'il n'est pas le genre d'homme de qui l'on doit tomber amoureuse. Et si l'éloignement n'est pas la chose la plus facile à faire, elle est peut-être la meilleure solution à adopter. Une solution à laquelle le candidat n'adhère visiblement pas puisqu'il me reproche d'être égoïste. Je ne le vois pas de cette façon, au contraire, c'est lui que je trouve égoïste. «Parce que vouloir me garder pour toi, vouloir me garder auprès de toi sans me donner ce dont j'ai besoin, c'est pas égoïste ça peut-être ? » Je veux et j'ai besoin qu'il se rende compte qu'il l'est, peut-être même plus que moi. Je me suis attachée à lui sans condition, je l'ai laissé libre de tout sans me rendre compte que cette relation n'était peut-être que destructrice. Je ne peux pas le laisser vagabonder, je ne peux pas l'imaginer me toucher, me caresser et en faire de même avec une autre quelques instants plus tard. Je ne peux plus vivre comme cela et il faut qu'il me comprenne. Je ne lui demande même pas d'accepter, je veux juste qu'il se mette à ma place et qu'il se rende compte à quel point rien n'est facile dans cette histoire. «Comment est-ce que tu pourrais le savoir Percy ? Est-ce que au moins une fois tu aurais essayer ? » Il me le disait depuis le début, il m'avertissait qu'il n'était pas apte à vivre une histoire d'amour. Comment pouvait-il le savoir si il ne s'était jamais laissé la chance de vivre quelque chose comme cela? On ne sait pas tant que l'on a pas essayé, c'est l'une des règles les plus importantes de la vie. On ne peut pas savoir si on aime ou non quelque chose, si c'est fait pour nous, si l'on a pas essayé avant. Si l'on ne s'est pas donné la peine de le faire. «Faut que tu comprennes que je ne peux plus te regarder enlacer d'autres candidates et faire la même chose quelques secondes plus tard avec moi. Tu ne peux pas agir en pensant que ces gestes n'ont aucune répercussions. » Ma voix se voulait calme et posée, je ne cherchais absolument pas le conflit. J'essayais plutôt de remettre mes idées à leur place, de lui faire passer un message. Nous pourrions rester amis mais ils ne devaient pas compter sur des petits extras, je n'en étais plus capable. Je ne pourrais plus lui donner mes lèvres ou mes bras, encore moins mon corps. Et désormais, il attendait de moi que je fixe un moment précis dans le temps. Le moment où je m'étais entichée de lui à ce point. Me pinçant les lèvres, je pris le temps avant de lui répondre. Une réponse honnête et sincère était de mise. Une réponse à laquelle il n'était absolument pas facile de répondre. «Je sais pas te donner un moment précis, te fixer l'instant même où j'ai flanché. Je ne sais pas, c'est arrivé rapidement et j'ai préféré nier l'évidence.» J'avale difficilement ma salive, mes mains se tordent l'une l'autre et j'arrive à peine à affronter son regard bleu azur. «Je ne sais pas dire quand. Tu as pris de l'importance petit à petit et je suis comme beaucoup de gens, je m'accroche, je m'attache à pas grand chose et finalement je me mets à espérer des trucs un peu trop cons.» que je lâche alors en baissant la tête.