@Gigi

Je n’avais pas vraiment eu le choix de partager ma tente avec Gigi. Enfin, si, on a toujours le choix, mais c’était plutôt venu comme une évidence. J’avais sentie la détresse en elle dès les premiers instants et je n’avais pu me résoudre à aller vers la brune pour lui apporter mon soutient. Je sentais que plusieurs la jugeaient, pour ma part, je m’en sentais incapable. C’était comme si je l’avais prise sous mon aile, comme si elle était ma fille. D’accord, c’est peut-être poussé, mais la première soirée, c’était clairement ce que j’avais ressentie. Et puis, sa compagnie était agréable. Différente, mais agréable. Et moins chiante à dormir avec que je ne l’aurais pensé. Mes yeux posés sur la frêle demoiselle alors que les rayons du soleil frappaient de pleins fouets la tente sans nous laisser le plaisir de les admirer, je profitais du silence et du calme qu’apportait l’endroit. Bon, pour le confort, on repassera… « Tu ronflais… » je murmure, alors que la demoiselle sort enfin de ses rêves. Non je ne suis pas creepy et je ne la regardais pas dormir depuis des heures. Cela fait à peine cinq minutes que je suis réveillée. Et qu’elle se rassure, elle ne ronflait pas. « Je plains ton mari. » Oui, le pauvre quoi. Je finis par lui sourire, soupirant et m’étirant tranquillement, mes muscles endoloris par le manque de matelas. Puis mes yeux s’arrêtent, je me fige d’un coup. Mauvaise idée de ne plus bouger. Mais c’est que je viens de repérer une petite araignée qui grimpe, doucement, directement sur Gigi. Elle est là, je la vois. Mais si je lui dis, elle va partir dans un délire, réveiller tout le monde… Mais d’un autre côté, si je dis rien et qu’elle lui monte jusqu’au visage… Je grimace mentalement à l’idée. Je ne suis habituée de gérer ce genre de crise. Ma fille n’a pas peur des petites bestioles. Et les garçons… N’en parlons même pas. « Gigi… » Je murmure alors, ne laissant transparaître aucune peur, essayant même d’aborder un ton réconfortant. « Paniques pas d’accord… » Probablement les pires mots à lui dire. « Je m’en occupe… Je m’en occupe… Bouges pas. » Elle ne sait pas de quoi je m’occupe. Mais bon. Si elle se met à bouger, ce sera encore pire, on va la perdre, et la brune ne voudra plus dormir dans cette tente. Je tends la main, voyant le désastre venir à mille à l’heure. Dans trois… deux… un…

Ce qui est bien chez Gigi, c’est que tout ce qui lui traverse par l’esprit semble automatiquement se transcrire sur son visage. Elle est expressive et vrai. Enfin, d’une certaine façon. Je sais donc qu’en lui disant qu’elle ronfle, j’aurai le droit à une réplique me trouvant le contraire. Une justification. Il y a en soit quelque chose qui en fait son charme, je trouve. « Peut-être qu’il dit ça pour être gentil. Un vrai gentleman, quoi. » Mais oui, c’est ça. Je crois que j’accroche un peu trop longtemps sur le fait qu’il est souvent en déplacement et qu’il dort à l’hôtel. Une tonne de scénarios me viennent en tête alors que sincèrement, rien de cela ne me regarde. C’est plus fort que moi j’imagine. Et la curiosité m’emporte, alors que j’aimerais connaître les détails de son mariage, en connaître plus sur elle, et plus sur lui. Sauf qu’une bestiole des moins invités fait son apparition dans mon champ de vision. Impossible de l’ignorer. L’araignée qui grimpe le long du bras de Gigi me défit de devoir l’annoncer à cette dernière, comme si c’était ce qu’elle cherchait. L’araignée provocatrice, oui. Sa réaction est imminente et je dois avouer que je n’ai peut-être pas abordée le problème de la meilleure façon qui soit. Pourtant, je suis calme, ça devrait être assez pour la calmer à son tour non ? Ok, non. Au moins, elle ne bouge pas d’un poil. Niveau crie par contre, on est au niveau décibel d’une baleine là… La bouche crispée, je me relève sans mouvement brusque mais avec la meilleure précision, rapprochant mes doigts pour pincer la bestiole. Je ne tiens pas particulièrement à mettre fin à sa vie, après tout, elle n’a rien demandé, mais je sens que la tâche ne sera pas facile, vu l’hystérie de celle qui subit la torture. « Chut… Gigi… » Pas que continuer de crier va aggraver la situation, mais le silence, c’est bien aussi. Pour mes oreilles. Je viens finalement m’emparer de l’araignée, non sans un frisson qui me traverse la colonne vertébrale. Pas que j’ai peur, mais y’a meilleure comme sentiment. « Ok… Voilà… » Le pire serait de l’échapper. J’ai franchement l’impression de régler une mission d’une grande importance là. « Tu ne m’échapperas pas… » Bitch. J’ajoute le bitch dans ma tête. D’un seul coup, j’ouvre la fermeture éclair de la tente et me débarrasse de notre nouvelle ennemie. « C’est bon, tu peux respirer de nouveau. Ta vie n’est plus en danger. » Je rigole doucement, lui offrant tout de même un de mes sourire bienveillant. « C’est ce que j’appelle un réveille en douceur ça… Faudra questionner nos voisins et voir s’ils ne vont pas faire une plainte pour le bruit. »