@allen

Ses yeux encore embués, elle essaie de faire bonne impression, de ne pas avoir l’air d’une personne qui aurait bien dormi deux heures de plus. C’est également à cela que sert l’anticerne, même de bon matin. S’habillant rapidement elle a besoin de son café matinal pour être en forme. Elle descend rapidement jusqu’aux cuisines pour se préparer un petit-déjeuner qui la réveillera. Elle se croit encore plus mal réveillée lorsqu’elle croit apercevoir Allen déjà présent dans la cuisine. Lorsqu’elle a quitté le lit il dormait encore. Elle n’a pas passé tant de temps que cela dans la salle de bain, si ? Elle frotte ses yeux pour être certaine de ne pas rêver. « Comment es-tu arrivé ici ? Je veux dire … Lorsque je me suis levée, tu dormais, et maintenant tu es là. » Oh elle ne croit pas qu’Allen possède le don d’ubiquité, mais il faut dire qu’elle est assez étonnée de le voir ici. « Je ne t’ai pas réveillé j’espère ? » Auquel cas elle s’en voudrait, ce n’était pas dans ses intentions. « Je suis désolée, si c’est le cas. Je te fais du café ? » Elle voit qu’il n’a rien devant lui, il doit être là depuis quelques secondes à peine. « Ou alors tu t’es tellement habitué à ma présence, que tu ne peux plus dormir lorsque je ne suis pas là. » ajoute-t-elle dans un sourire amusé, pas sérieuse pour un sou.

Il y avait des gens pour qui le café était purement indispensable le matin, et clairement Allen en faisait partie. Il avait commencé à en boire relativement tard, parce qu'au départ le goût l'avait révulsé, mais il avait fini par s'y faire, et aujourd'hui il serait bien incapable de débuter une journée sans avoir pu avaler de quoi se réveiller un petit peu. C'est donc dans l'optique de petit-déjeuner comme il se doit qu'il gagna la cuisine peu de temps après avoir quitté son lit, loin de s'attendre à ce qu'Agata entre à son tour pour vraisemblablement s'étonner de le trouver ici, et pas dans leur chambre. « En marchant, du moins je crois » qu'il commença par articuler d'une voix un peu cassée, et en affichant un petit air suspicieux, mais clairement amusé par le manège de sa partenaire. « Tu vas dire que je radote, mais je crois qu'il devient urgent que tu prennes rendez-vous avec Addil » commenta-t-il alors par la suite, non sans s'amuser de la situation, c'est vrai, après tout il n'avait rien changé à ses habitudes, mais il semblerait qu'aujourd'hui il ait gagné la cuisine si vite qu'on croirait presque encore le voir à l'étage supérieur. « Non, t'inquiète pas, mais j'accepte volontiers pour le café, merci. » C'était gentiment proposé, après tout, même s'il se tiendrait prêt à prendre le relais s'il s'avérait qu'elle n'avait pas les yeux suffisamment en face des trous pour s'en occuper. Agata reprit en tout cas la parole et il soupira lourdement. « C'est même pire que ça, je peux plus rien faire lorsque t'es pas là. Je végète toute la journée en attendant le moment de te retrouver, et quand tu quittes notre lit, je me tords de désespoir tant cet abandon m'est insupportable. » Ça n'avait pas l'air comme ça, mais c'était quand même un peu moins évident de se lancer dans ce genre de tirades à neuf heures du matin. « Avoue-le, t'as tout fait pour que j'en arrive à ce point de non retour  » l'accusa-t-il pour finir, l'air de la soupçonner d'avoir joué les partenaires idéales dans le seul but de créer chez lui une affreuse dépendance.

Elle est encore endormie, et le passage à la douche ne l’a pas aidé. Et pour tout dire lorsqu’elle voit Allen assis dans la cuisine, elle ne sait plus très bien si elle est réveillée ou si tout ceci n’est qu’un rêve. Lorsqu’elle a quitté la chambre une dizaine de minutes plus tôt, peut-être quinze, son partenaire semblait dormir profondément. C’est pourquoi elle est assez étonnée de le voir ici, en face d’elle. « Oh très drôle, je me doute que tu n’es pas venu ici en volant. » dit-elle faussement vexée, avant que son sourire habituel ne reprenne sa place sur ses lèvres. « Il est hors de question que je prenne rendez-vous avec un psychologue dont je ne connais pas les compétences. » Elle plaisante, mais il y a une part de vérité là-dedans, elle ne consulte que les meilleurs médecins de New-York. Pour ce qui est d’un psychologue, elle ne pense pas avoir besoin d’en consulter un, sans doute Allen en aurait-il plus besoin pour apprendre à se détacher de sa femme, mais c’est une toute autre histoire, et elle ne lui fera pas part de cette réflexion personnelle. Elle continue la conversation en lui proposant du café. Elle attrape une dosette qu’elle met dans la machine, et fait couler du café dans une tasse. Se retournant vers Allen, elle se permet de plaisanter sur le fait qu’il ne peut plus dormir lorsqu’elle n’est pas dans le lit. « Exactement, tu as découvert mon plan. Mais je m’en veux un peu, je ne pensais pas que cela arriverait aussi rapidement et que tu en serais à ce point-là. Je pense que l’on devrait trouver une solution pour remédier à cette situation problématique. » Un large sourire s’empare de ses lèvres, tandis qu’elle se saisit des deux tasses pleines de café et en dépose une devant Allen avant de s’assoir à son tour. « Sinon, parle-moi un peu plus de toi. Même si j’en connais un peu, j’ai l’impression qu’on ne se connaît pas assez. » Elle redevient un peu plus sérieuse. Elle aimerait en apprendre d’avantage sur lui, car ils sont liés tout le temps que durera leur aventure, jusqu’à ce que l’un d’entre eux soit éliminé.

Qui sait s'il n'était pas arrivé en volant, puisqu'Agata semblait lui prêter de drôles de dons ce matin. En tout cas, il n'en démordait pas, il était plus qu'urgent qu'elle aille rendre une petite visite à Addil, parce qu'elle lui aurait décidément tout fait. « Mais comment veux-tu t'en faire une idée si tu ne lui laisses pas une chance de te montrer ce qu'il vaut ? » Lui non plus ne savait pas ce que valait précisément Addil en tant que psychologue, mais s'il ressentait un jour le besoin de parler à quelqu'un, il n'hésiterait pas à aller le voir, c'est certain. « C'est un peu comme ces boîtes branchées qui te disent qu'elles acceptent que les habitués mais qui te laissent même pas entrer la première fois. » Il n'aurait pas pu trouver meilleur exemple, pour le coup, même si après coup il prit conscience qu'elle pourrait penser qu'il savait de quoi il parlait. « Et non, je parle pas par expérience » qu'il précisa alors, des fois qu'elle se soit posée la question. Quant au reste, et tandis qu'il accepta volontiers qu'elle lui prépare un peu de café, le canadien ne put que lui donner raison lorsqu'elle prétendit qu'il ne pouvait plus dormir sans elle, allant jusqu'à très légèrement exagérer les faits. « Eh si, tu vois, après deux semaines j'en suis déjà à coudre ton nom sur tous mes pulls. La prochaine étape, c'est le tatouage, et j'ai déjà pensé à l'endroit idéal ... » Il soutint son regard un court instant, plus plissa doucement les yeux. « … Je te montrerai quand tu seras plus grande. » Qu'on se le dise, il était déjà peu probable qu'il se fasse tatouer un jour, mais à choisir, il opterait plutôt pour un endroit qui permettrait aux autres de contempler son choix, et pas là où il serait le seul à pouvoir l'admirer. « Dimanche, le problème se réglera peut être de lui-même » finit par articuler, dans un plus léger sourire, parce qu'il repensait subitement à sa nomination, à ses chances de passer sa dernière semaine ici, et avec elle, même s'il ne désirait pas faire preuve de pessimisme devant Agata, ni donner l'impression qu'il lui en voulait. Celle-ci reprit d'ailleurs la parole. « Pourtant, crois-moi, tout le monde ne peut pas se vanter de savoir que j'ai vu Love Actually une dizaine de fois » qu'il s'amusa, suite à sa requête. Il comprenait qu'elle ait le sentiment de ne pas le connaître assez bien, même s'ils n'étaient plus des inconnus l'un pour l'autre depuis un moment. « Je pense qu'au contraire, t'en sais plus que n'importe qui ici à mon sujet. Ou en tout cas, que tu connais le plus important. » Il n'entrerait pas dans les détails, elle devinerait sans mal à quoi il faisait allusion. Le fait est que oui, elle connaissait certains détails essentiels de sa vie, des détails qui l'aidaient peut être à le comprendre, parfois, ou tout du moins à le juger en connaissance de cause, et ça n'était pas rien. « Mais si un détail t'intrigue, si y'a une chose que t'aimerais savoir, dis-le moi et je t'en parlerai sans problème. » Il pouvait difficilement faire mieux que de lui proposer de l'interroger directement sur ce qu'elle pourrait vouloir connaître de lui, n'ayant en soi rien à cacher à sa partenaire.

Agata ne pense pas avoir besoin de consulter un psychologue, ou tout du moins pas pour les problèmes que lui prêtent Allen. De plus, elle ne connaît pas Addil ni les diplômes qu’il possède, c’est un énorme frein pour la jeune femme, même si bien sûr rien n’est réellement sérieux. « Je voudrais voir ses diplômes d’abord tu comprends. » Son ton ne se veut pas sérieux même si en temps normal c’est ce qu’elle demanderait. « Mais je prends tout de même note de ton étrange obsession pour Addil. » Cela fait déjà deux fois en deux semaines qu’il lui en parle, c’est que ça commence à faire beaucoup. Un léger rire s’échappe de ses lèvres lorsqu’elle entend sa comparaison avec les boîtes de nuit. « C’est ce que tu dis, mais j’ai pu déceler une immense déception dans ta voix lorsque tu en parlais. » Elle ne pense pas un mot de ce qu’elle dit. Encore sur le sujet de la plaisanterie, elle lui dit que désormais il ne peut plus se passer d’elle. « Ah oui carrément ? Je ne pensais pas que tu étais le genre d’homme à savoir coudre. » remarqua-t-elle dans un premier temps, avant qu’un sourire amusé ne prenne place sur ses lèvres lorsqu’il lui parle du tatouage. « Quand je serai grande ? C’est vrai que tu es beaucoup plus vieux que moi. » Pas tellement non, même si elle sait que ce n’est que de l’humour. « Et tu comptes te faire tatouer simplement mon prénom ou mon portrait ? » Agata elle n’est pas une très grande fan des tatouages en règle générale, mais elle peut toujours en rire. Son éternel sourire disparaît le temps d’un instant lorsqu’il lui dit que le problème se réglera peut-être dimanche. « Oh non ne dis pas ça. Je suis encore désolée tu sais. Il n’y a pas moyen que tu partes dimanche. » Et il croyait, surtout qu’elle ne voulait pas se dire qu’à cause d’elle il avait quitté l’aventure. De toute manière, cela n’arriverait pas. Elle vient alors s’assoir à côté de lui, lui disant qu’ils ne se connaissent pas encore assez, et c’est important pour Agata. « Ah, je n’avais pas réalisé que c’était une confidence. Ne t’inquiète pas ton secret sera sauf avec moi. » Son sourire reprend alors place sur son visage. Elle connaît déjà des détails importants de sa vie c’est vrai, et elle ne dira pas le contraire. « Je le sais, mais pour moi ça ne doit pas définir qui tu es. Je suis contente que tu aies pu te confier, je n’aurais probablement pas eu le même courage que toi. D’ailleurs si tu as besoin d’en parler, je suis là. » ajoute-t-elle dans un premier temps. Bien entendu elle connaît déjà toute l’histoire avec sa femme, et elle est presque touchée qu’il ait pu lui en parler, parce que dans le cas contraire elle aurait eu plus de mal à se confier. Pour autant, elle aimerait en savoir plus, elle a toujours besoin d’en savoir plus. « Mais je veux savoir qui tu es toi, sans elle, à quoi ressemble tes journées, je ne sais pas. » Peut-être qu’il ne comprendra pas où elle veut en venir, ou peut-être est-ce simplement ridicule.

Agata disait vouloir jeter un œil aux diplômes d'Addil, à qui elle avait visiblement du mal à faire confiance. Ce n'était pourtant pas faute de le lui recommander. « Parce que ce serait forcément rassurant, tu penses, qu'il les ait pris avec lui ? » C'est qu'il imaginait difficilement un psychologue prendre ses diplômes sous le bras s'il devait intégrer ce genre d'aventures. A moins d'avoir une bonne raison de le faire, mais ce serait curieux voire douteux. « Insinuerais-tu que mes éloges ne seraient pas totalement désintéressées ? » la questionna-t-il en tout cas après qu'elle eut relevé le fait qu'il ait tendance à fréquemment parler d'Addil. La vérité, c'est qu'il avait beaucoup de respect pour le boulot qu'il faisait, et qu'il le trouvait sympathique, comme garçon. Quant à cette histoire de boite de nuit, non, ça n'était pas quelque chose qu'il avait vécu personnellement. « Si tu savais depuis combien de temps j'ai pas du mettre un pied dans ce genre d'endroits, t'aurais une bonne raison de te moquer » qu'il lâcha alors dans un rire, parce que ça remontait effectivement à très, très loin. « Je couds, je repasse, je fais la lessive et, tiens-toi bien, je passe même l'aspirateur ! Je suis un homme moderne, qu'est-ce que tu crois. » En vérité, c'était surtout qu'il avait bénéficié de la bonne influence de sa tante, à l'époque où il avait commencé à s'éloigner de ses parents. C'est elle qui lui avait appris toutes ces choses. « Bah ouais, je devais être à l'école élémentaire que tu devais pas encore avoir quitté la maternelle » qu'il reprit lorsqu'au sujet du tatouage, sa partenaire laissa entendre pour plaisanter qu'il était beaucoup plus vieux qu'elle. « Ton portrait, bien sûr, j'oserais quand même pas faire les choses à moitié ! » Oh non, qu'elle se rassure, ça n'était pas demain la veille qu'il se tatouerait quoi que ce soit, même si à choisir, il opterait plus pour le visage d'Agata que pour on ne sait trop quelles inscriptions indéchiffrables. Sa partenaire sembla en tout cas un peu moins détendue lorsqu'il fit référence au fait que dimanche soir, tout pourrait prendre fin, à commencer par sa pseudo obsession pour elle. « Je le sais, oui, et ça m'embête que tu te sentes responsable car on a simplement pas eu de chance, tu sais, cette roulette est fourbe. » C'était ce qu'il pensait, c'est pourquoi il était bien incapable de lui en vouloir, elle n'avait fait que tenter sa chance à la roulette après tout. Il espérait en tout cas rester, ne serait-ce que pour avoir l'occasion de la connaître un peu mieux. A ce sujet d'ailleurs, elle manifesta l'envie d'en savoir un peu plus sur lui. Elle commença par affirmer qu'elle n'ébruiterait pas le fait qu'il ait vu Love Actually une dizaine de fois et il adopta une mine soulagée, avant de lui rappeler qu'elle connaissait déjà des détails importants de sa vie. « Je suis pas certain qu'on puisse parler de courage, mais oui je sais que tu seras toujours pour moi une oreille attentive, et je t'en remercie, sincèrement. » Parce qu'il avait le cœur rempli de regrets et que ça pourrait lui faire du bien, de temps en temps, d'en parler à quelqu'un que ça intéressait vraiment, même s'il ne prévoyait pas de l'embêter avec ça dès qu'il aurait un petit coup de blues. « Je pense qu'il y a eu un avant et un après ma rencontre avec Andrea. Avant de la connaître, je vivais ma petite vie de lycéen, j'étais plutôt bon en cours, plutôt populaire et je plaisais pas mal à mes voisines. » Il sourit de façon amusée en repensant aux jumelles qui vivaient au bout de sa rue, et qu'il avait quelques fois invité à sortir, à tour de rôle. « Mais après qu'on se soit rencontrés, les choses sont allées très vite. On s'est mariés jeunes, on a eu nos enfants dans la foulée, et ma vie s'est mise à tourner autour d'eux. » Il n'y avait plus eu les copains, les autres filles, et la seule chose qu'il avait finalement continué de faire, c'était se donner les moyens de vivre de sa passion. Avec peu de succès, certes. « Aujourd'hui, je mentirais si je disais que y'a pas des jours où je suis incapable de trouver une bonne raison de me lever, alors je pourrais te raconter comment je m'habitue au fait de me retrouver seul pour la première fois depuis quinze ans, mais crois-moi Agata, ça en vaut pas la peine. » Parce qu'elle risquerait de l'entendre raconter qu'il sautait des repas parce que son chagrin lui nouait l'estomac, et d'autres choses plus pathétiques que franchement passionnantes.