Je me contente d'un vague sourire sans renchérir sur le sujet parce que j'estime qu'on a rapidement fait le tour. Léo fait le malin. Je me marre en haussant les épaules, sans nier. C'est vrai que Léo a une technique de séduction imparable, ça se remarque directement. « En drague de beauf, je confirme » je ronronne alors, un sourire moqueur tranquillement installé sur le visage. Mais avouons que c'est finalement plus insultant pour moi, qui suis actuellement avec le loveur beauf, on pourrait presque dire que je n'ai pas été difficile à « attraper ». Il fait semblant d'être très premier degré. Je l'écoute s'enfoncer de plus en plus, il n'a pas besoin d'aide tant c'est un talent inné chez lui. « Bon je crois que je vais te laisser finir ta douche tout seul » je fais mine de dire, faussement vexée juste avant qu'il ne me prenne pour son chiot pendant un court instant. Je brandis ma menace fièrement. Mais il ne s'arrête pas en si bon chemin. Léo s'amuse à tout retourner dans son sens en ce qui concerne l'acquisition de notre canapé. Il aime toujours avoir le dernier mot, c'est presque maladif je trouve. Enfin, venant de moi … « Chut » je lui intime en plaquant rapidement une main sur sa bouche et de lui offrir une mimique qui montre que j'apprécie ce silence bienvenu. Il s'annonce comme un homme musclé, je veux le prendre à son propre jeu. Je décide de tester les muscles inexistants de l'asiatique. Je suis mauvaise parce qu'il a en plus un torse à peu près dessiné, enfin il est très sec. Il fanfaronne. « J'attends de voir sur le long terme pour me prononcer » je me moque telle une princesse qui risque de statuant sur son sort, en sifflant, lorsqu'il se décide … de squatter la douche un peu plus longtemps. J'ai fait mine de le laisser choisir parce que sa réponse me paraissait tellement évidente et qu'elle m'allait aussi. Du coup Léo est content, ce qui étire un léger sourire sur mon minois. J'aime bien lui laisser un semblant de contrôle, assez superficiel, tant qu'il sert ce que je désire, tout va bien. Je lui offre mon cou puisqu'il s'est mis dans l'idée d'embrasser le moindre centimètre d'épiderme. Je serai donc bien incapable de brimer ou frustrer Léo, disons le comme ça, dans un moment comme cela là. Si mais ça serait très mal commencer la journée pour lui comme pour moi. Comme je le disais, je suis vraiment conciliante ce matin, je ne sais pas ce qu'il m'arrive ! « Ne me tente pas s'il te plait » j'annonce, un rictus accroché sur les lèvres. J'observe amusée le petit manège de Léo, avant de rouler des billes, ce qu'il ne faut pas entendre. « Il se cale sur le même rythme anarchique que le tien » je souligne simplement en levant mes prunelles pour finir par croiser son regard. Pour faciliter mes mouvements, mes jambes se dénouent de Léo et mes pieds finissent enfin par toucher le fond de la baignoire. Je me plais à découvrir l'effet que je lui fais, avant que mes lèvres ne se plaquent rapidement contre les siennes, au moins, ça le fera taire pour un bon moment (…) Je finis par ouvrir les paupières. Je me retourne pour observer Léo à l'autre bout du lit. Ma jambe frôle la sienne, dans un froissement de drap, pour lui rappeler que je suis toujours là, et pour qu'il ne s'endorme pas. Les gestes pressants, impulsifs de la salle de bain avaient laissé place à plus de douceur dans le lit. Le bout de mon nez frotte avec affection le sien, comme toujours, un espèce de tic de ma part. « Je ne savais pas que ce emménagement matinal t'avait épuisé à ce point » je siffle sans que ma moquerie ne soit légitime, ni fondée. Il le sait très bien. Je finis par aller me presser contre lui avec un naturel qui m'aurait paru assez inquiétant il y a quelques mois. Mais maintenant, je m'en fous, je crois. L'une de mes mains s'égare dans sa chevelure alors que mes lèvres sollicitent encore les siennes pour quelques instants. « Tu as gagné, on ne va rien faire aujourd'hui » je déclare simplement avant de tirer un peu plus la couverture sur nous, dans un réflexe stupide que j'arrive pas encore à effacer suite à fake lover, la pudeur nous étant inutile maintenant. Je roule sur le côté pour libérer Léo, m'étirant paresseusement, lentement. Je tends un bras du lit pour attraper mon téléphone. « Bon, tu souhaites visiter quelle ville la prochaine fois ? » je lui demande avant de m'installer en tailleur, en faisant une robe de fortune avec un bout du drap. Genre on est capable de faire des pseudos projets et tout. S'il ne veut pas bouger, on peut quand même parler, faire semblant de s'occuper. J'attends sa réponse, comme si j'allais la googeler. J'ai bien dit visiter, et pas habiter, je fais des efforts, parce que je ne suis jamais réellement restée au même endroit aussi longtemps. Et puis on n'a pas d'argent, aussi, j'imagine que ça joue.

« Drague de beauf ». Merci ça fait plaisir que Raïssa ait de l’estime pour la façon dont je l’ai séduite. Blague à part on sait tous qu’elle et moi c’est avant tout une histoire de deux rejetés entre qui ça a matché. Je soupire désemparé. Au fond je devrais plus l’être par rapport au fait que je m’enfonce lamentablement plutôt que parce qu’elle critique mes techniques de drague qui, je le répète, sont infaillibles. Au fond je les aime bien moi ses petits seins, mais même mes compliments sont mal interprétés donc comprenez bien qu’à un moment donné je lâche l’affaire. Elle menace carrément de me laisser seul comme un frustré sous la douche mais j’ai d’autres armes m’voyez. Sa seule répartie est de m’empêcher de parler… bon c’est aussi un excellent moyen d’avoir le dernier mot, d’une certaine façon. D’ailleurs elle m’a eu. Je me plie à son désir et je la ferme. J’en fais beaucoup pour cette fille, vraiment. Mais elle me le rend bien, j’aime à le penser tout du moins, comme dans ce genre de moment. Un sourire amusé prend place sur mon faciès parce qu’elle souligne bien évidemment le rythme des battements de mon cœur pour contrer mon argument béton. On ne va pas se mentir mutuellement, dans ce genre de moment ça ne sert strictement à rien.
…
Je suis bien là. Tellement que le sommeil commence à m’emporter. Tout est soudainement si paisible, je sens que je vais basculer dans une longue fin de nuit. Je suis ravi de la tournure qu’a pris cette matinée mais je sens bien que ça ne va pas durer très longtemps dès que le nez de la douce se frotte au mien. Ça sonne un peu comme une sonnette d’alarme, un genre de tactique féminine pour me tenir éveillé, et j’ai raison puisque la mélodie narquoise de sa voix me parvient.  Les yeux demeurant clos je lui réponds d’un sourire amusé plutôt que de lui avouer que c’était elle qui m’épuisait, ça aurait été mal interprété pour sûr. A noter que je fais des progrès quant au fait de réfléchir avant de l’ouvrir, c’est parfois très utile. Sentant Raïssa venir se caler, je passe automatiquement mon bras au-dessus de son corps comme pour la serrer un peu plus contre moi, mes doigts engageants des mouvements lents et circulaires dans son dos. J’adore la peau de Raïssa, elle est aussi douce que celle d’un bébé. Doucement j’ouvre les paupières, mes prunelles arrivant directement dans les siennes. L’instant est silencieux et agréable. C’est parfait. Je l’embrasse un instant avant qu’un sourire se trace sur mon visage à son annonce à laquelle je réplique fièrement. « Ah. Ça c’est une vraie victoire. » Pas comme celle de tout à l’heure où l’issue des évènements ne me revenait pas entièrement. Non parce que ses faux choix ça va, au début je mordais et je me suis vite rendu compte qu’elle se foutait de ma gueule. Là pour le coup c’est une issue 100% Léo. 100% glande. Mes yeux forme grain de riz l’observent s’agiter, j’espère qu’elle n’a pas changé d’avis entre temps parce qu’elle en serait largement capable. « Visiter ? » je questionne parce que je ne sais pas. Visiter, habiter, franchement je suis perdu. Déjà qu’elle m’a secoué le cul plus de fois en un mois que je ne l’avais fait en toute une vie alors autant dire que si elle parle de déménager de nouveau je vais être super largué. Toujours allongé dans le lit je me courbe vers l’avant pour tenter de me rapprocher d’elle. « Grenoble ? » Je guette sa réaction parce que c’est une blague. Elle est très drôle, comme toutes ses comparses d’ailleurs. « Ou alors Mexico. » Si seulement on avait de l’argent. Ah ! En parlant de ça. « J’ai pensé à un truc… » ouais attention ça va chauffer j’ai pensé à un projet "professionnel", bref un truc d’avenir qui va plus loin que demain. Vivre avec Raïssa me rend carrément perspicace je vous le dis. « Tu sais y a plein de types qui se font de l’argent grâce à des blogs ou des chaines youtube. On pourrait faire la même chose, ça financerait nos voyages et comme t’aimes pas rester tout le temps au même endroit ce serait idéal. » Alors génie ou pas génie ? Bon par contre en énonçant mon idée flash à voix haute je viens de me rendre compte d’un potentiel problème. « Sauf si c’est trop compliqué pour une fugitive. » me redressant, je passe mes mains derrière la tête en observant le plafond qui, je l’espère, va me donner une réponse à la question. Cette hypothèse est plutôt cool, ça prend du temps mais je peux me charger des photos et elle de la rédaction multilingue. Ouais, j'ai vraiment pensé à pleins de trucs et en plus de concorder avec sa bougeotte ça convient aussi à mon envie de découvrir un peu plus le monde. Je m'emballe mais en même temps il faut bien que je trouve des idées parce que le bénévolat à l’église du coin en italien c’est chaud quoi. « Sinon je fais pousser des plants et je vends pendant que tu gardes les gamins de l’immeuble. » j’ajoute distraitement, le lustre m’ayant éclairé. C’est un domaine familier et c’est de la drogue douce, pas de liquide en seringue ou quoi que ce soit d’autre qui rende accro et dépendant, donc ça m’irait. Je ne vois aussi que tellement peu d'alternatives pour ma personne que retoucher à la drogue est de nouveau envisageable. Ça ne m'inquiète pas plus que ça, à croire que notre nouvel environnement me profite puisque je n'ai pas fait de nouvelle crise depuis notre emménagement.