S'il y avait un endroit que César ne regrettait pas particulièrement de ne pas voir, c'était probablement les toilettes et pour une raison simple : c'était ce qui risquait d'être le moins dépaysant pour lui étant donné que des sanitaires ressemblaient à des sanitaires, et qu'il n'imaginait pas la production avoir soigné la décoration d'un endroit où les candidats ne faisaient que passer et rarement pour admirer la vue. Lui-même ne cherchait jamais à s'y éterniser, il y faisait ce qu'il avait à y faire et c'était suffisant, ça lui demandait assez de concentration d'éviter les collisions quand les candidats allaient et venaient au sein de la pièce et se succédaient dans les cinq toilettes mises à leur disposition, surtout quand certains avaient des envies pressantes et manquaient de se prendre les pieds dans sa canne qui même ici lui servait de guide. Tout du moins jusqu'à un certain point, car César avait quand même l'habitude d'utiliser des toilettes, sa canne ne lui serait pas d'une grande utilité une fois qu'il avait poussé la porte d'une des cabines, et c'est la raison pour laquelle il avait pris l'habitude de la laisser près des lavabos et de la récupérer à sa sortie. C'est ce qu'il fit cette après-midi, après avoir ressenti le besoin de faire un détour aux toilettes et s'être aperçu que de façon assez logique, elles étaient l'un des endroits qu'il avait appris à repérer le plus facilement étant donné qu'il s'y rendait plus souvent qu'ailleurs. Entrant dans une cabine, il y resta moins de deux minutes et en ressortit pour aller se laver les mains, puis se pencha sur le coté pour récupérer sa canne qui devrait normalement l'attendre sagement contre le mur. Mais il constata à sa plus grande surprise qu'elle n'était plus là. Instinctivement, il commença à se déplacer à tâtons pour s'assurer qu'il ne l'avait pas laissée un peu plus loin, mais réalisa après quelques secondes qu'elle était introuvable. Une pointe d'angoisse monta en lui, parce qu'il savait que démuni de sa canne, il risquait d'avoir du mal à se déplacer et à marcher jusqu'à un candidat susceptible de l'aider à la retrouver. Il avait beau être familiarisé avec la quasi totalité du palais, il n'en était pas moins ici depuis une poignée de jours et ce serait dangereux pour lui de se passer de l'aide précieuse que lui apportait sa canne pour identifier les meubles, les marches et tout ce qui pourrait devenir des obstacles sur son chemin. Il inspira un coup, puis ressentit une forme de soulagement lorsqu'il entendit l'une des chasses d'eau et comprit qu'un autre candidat se trouvait dans les toilettes. Il y eut ensuite un bruit de porte. Des bruits de pas. Et une odeur qui lui était familière. « C'est toi, Lina ? J'ai reconnu ton parfum. » Il souffla dans un léger sourire, pas mécontent de tomber sur elle parce qu'il n'était pas certain que ça l'aurait beaucoup détendu de faire face à Karla et à son caractère bien trempé qui certainement ne lui aurait pas offert beaucoup plus de compréhension que la dernière fois. « T'as pas vu ma canne ? Je l'avais laissée à coté des lavabos pendant que j'étais aux toilettes, et en sortant de la cabine elle était plus là. » Et pendant qu'il racontait ça, il avait vraiment l'impression de nager en plein délire, parce qu'une canne ça ne disparaissait pas comme ça et que ce genre de choses ne lui étaient que très rarement arrivées au fil des années. « Tu me le dirais si tu me l'avais prise pour me faire une blague ? Promis, je serais pas fâché. » Il reprit après quelques secondes et d'un ton légèrement amusé, parce qu'il vivrait la situation très différemment s'il s'agissait juste d'une blague de la part de quelqu'un qui n'avait pas de mauvaises intentions. Ce serait un scénario un peu plus rassurant que si sa canne avait du s'évaporer sans raison.