gabrielle.

Perplexe. Cette seule expression représentait bien le sentiment qui m’habitait en ce moment. Mon regard, fixé sur le bassin de boue, le scrutait avait un intérêt soutenu, mais tout de même incertain. Je ne doutais aucunement des bienfaits que pouvait avoir cette substance, mais la simple idée de mon corps, entièrement recouvert de vase, me dégoutait. J’aurais très bien pu tourner les talons et me diriger vers le sauna, mais j’y avais déjà passé beaucoup trop de temps, ces derniers jours. J’en abusais, à vrai dire. Voilà pourquoi je souhaitais opté pour autre chose. À vrai dire, je regrettais presque cette obstination que j’avais. Maintenant que je m’étais juré que j’irais, incapable de reculer. Et pourtant, ce n’était qu’en mon fort intérêt que je me débattais : personne n’en savait rien. C’était d’un ridicule. M’assoyant sur le rebord du bassin, j’approchai lentement ma main de la boue et l’y trempait, question d’avoir un petit aperçu de l’effet que cela pouvait faire. C'est dans cette position que me surpris Gabrielle. Étrange, j'avais juste l'air d'une gamine qui s'amusait à jouer dans cette terre mouillée. « Ne pose pas de question. » lui lâchais-je, sentant son regard posé sur moi.

La rousse s'ennuyait, callée dans les couvertures de son lit, profitant de l'absence de son partenaire pour prendre toute laplace, allongée en étoile de mer, les yeux fixés sur le plafond, la respiration lente. Puis un groupe de candidat prit possession de la chambre, forçant involontairement la belle à bouger, elle recherchait du calme. Elle attrappa son maillot dans sa valise, et l'enfila dans la salle de bain, qui était vide de tous candidats. La rousse enfila des vêtements par dessus, une simple tunique et une ceinture autour de la taille, une paire de ballerine chaussée plus tard, elle se promenait. La rouquine arriva dans la grange, bizarrement c'était la première fois qu'elle y posait le pied, elle surprise Evey dans une position dès plus amusante. « Cela serait mal vu si je te plongeais la tête dans la boue ? » pensa t-elle tout haut, en posant son regard azur sur la blondinette.

« Cela serait mal vu si je te plongeais la tête dans la boue ? » J’arquais les sourcils, sceptique. Elle n’oserait pas quand même? Oh, et puis peut-être que si, en y réfléchissant bien. « Ton ultime vengeance, n’est-ce pas ? » lui lançais-je, me rappelant très bien quel sort je lui avais réservé lors de notre première rencontre. De la boue contre de l’eau, je me demandais si c’était un échange équitable. Pas le moins du monde. Rien que d’imaginer mon corps enduit de cette substance me dégoutait quelque peu, alors songer que mon visage puisse en être couvert, hum, je n’appréciais pas tellement. Autant l’éviter. Retirant prestement ma main du bassin, j’essuyais l’excès de boue sur le rebord de celui-ci, puis me levait. « Dommage, je ne te laisserai pas cette chance. » En restant assis, elle aurait certes eut l’avantage sur moi, mais maintenant, debout, j’étais en mesure de me défendre. Qui sait quel sale coup elle était en train de monter contre moi. Il fallait être préparé à toute éventualité. Je n’étais une cible facile.

« C’est pas comme si je te demandai ta permission. » Elle souriait de ce petit sourire sadique et fier, et je compris qu’elle ne relâcherait pas le morceau, qu’elle attaquerait de front. Un combat en corps à corps, hein, c’est ce qu’elle désirait. D’accord, qu’elle vienne. J’avais mes chances, après tout. À force égale, ce serait l’endurance qui nous départagerait. Mais ça, s’était sans compter sur le fait que je m’étais trompé sur le compte de la belle – elle était forte, un tantinet plus que ma petite personne, mais juste assez pour me tenir tête. Elle me força à reculer, me poussant jusqu’au bord du précipice malgré tout mes efforts pour la retenir. Aduler au bas du mur, je compris ce qui allait se passer avant même de voir sa main s’avancer vers moi. Dans un dernier geste pour me sauver de cette impasse, j’attrapais cette main fautive et la tirait vers moi, entraînait dans ma chute ma tortionnaire – qui fut il y a un temps ma victime. Ce petit jeu se jouait à deux, ma jolie. Si je tombais, tu tombais aussi. Il n’y avait pas d’autres options.

Malgré le fait qu'elles avaient à peu près la même allure, Gabrielle avait un petit avantage physique. Et elle n'hésita pas à s'en servir, en faisait reculer Evey jusqu'au bout, si bien que son équilibre commençait à flancher, la pousser avait tellement été facile. Oui, c'était mal de faire ça, mais se venger faisait du bien. Gabrielle n'avait pas prévue qu'Evey l'emmenerait jusqu'au bout. Evey attrappa la main de Gabrielle, qui tenta néamoins de se débarrasser de son emprise, mais la blonde était bien accrochée. La vicieuse. La mesquin. La rousse tomba avec la candidat, mais ce fut cette pauvre Evey qui amortissa sa chute, la rousse tomba sur elle. Heureusement que la belle était un poids plume. « Très bien. » déclara t-elle. Oui, Gabrielle déclarait la guerre. Attrappant une poignée de boue, elle se fit un plaisir de l'étaler sur les beaux cheveux de sa camarade.

La surprise se lisait sur son visage. De toute évidence, et ne s’attendait pas à subir quelconque contre coup de sa petite vengeance. Mais bon, l’occasion était trop belle pour que je passe à côté, encore une fois. À croire que je m’acharnais sur elle. Pauvre petite. C’était plutôt le sort qui faisait en sorte qu’elle se trouve toujours là où l’envie de faire des mauvais coups me prenait. Tombant à la renverse, je fus forcé de réceptionner la p’tite dame, mais par chance, c’est à peine si je la sentis tout contre mon corps. Il y avait cette substance visqueuse pour me distraire. « Très bien. » Avant même que je ne me rende compte de ce qu’elle tramait, je sentis la substance visqueuse atterrir dans mes cheveux, barbouillant mon visage au passage. Oh la salope. Elle allait me le payer. Si guerre elle voulait, guerre il y aurait. Agrippant la jolie rousse qui se trouvait toujours par-dessus moi au niveau de la taille, je fis une légère rotation et la balançait dans la boue, à mes côtés. Je n’allais quand même être la seule à faire trempette. Me relevant de peine et de misère, ayant de la vase au niveau de la taille, je posais mes bras sur mes hanches, lui jetant un regard empreint de défi. « Alors, tu crois toujours que c’était une bonne idée? »

La rousse avait pris un malin plaisir à étaler la boue sur les cheveux de sa camarade. C'était jouissif. Enorme. Gabrielle était sûre qu'elle aurait le droit à une riposte de la part de cette chère Evey, elle semblait ne pas lâcher prise. Elle semblait tenace. Et donc, sans surprise, elle sentit la blondie l'attrapper pour la balancer à côté d'elle. La rousse était en contact avec la substance dégeulasse. Elle poussa néamoins un léger cri, pour la forme dira t-on avant de se relever, la boue empêchait et freinait ses mouvements d'habitude si fluide. C'était affreusement gênant. En plus elle en avait dans les cheveux maintenant, et partout sur le corps, ou presque, son visage et quelques autres parties de son corps avaient été épargnées. « Alors, tu crois toujours que c’était une bonne idée? » Un bref sourire plus tard. « Non, mais maintenant que c'est fait. » répondit-elle en dessinant et en étalant de la boue sur les joues de cette chère Evey.

Elle n’apprécia pas d’être projetée ainsi dans cette substance visqueuse. Mais voilà, au moins, là, nous étions quittes. Je la regardais alors qu’elle tentait de revenir à une position plus décente, et ces petites misères faillèrent bien faire naître un rire tout au fond de ma gorge, mais je me retins, savourant en silence le spectacle si gracieux qu’elle m’offrait. Nos deux corps étaient couverts de boue dégoulinante, côté look, on repasserait. Je lui demandais alors si elle regrettait. Après tout, la situation était loin d’avoir tourné à son avantage. « Non, mais maintenant que c’est fait. » Sa main s’approcha dangereusement de mon visage, je le sentis étaler toute cette boue sur ma joue. On aurait dit une gamine, elle semblait follement s’amuser. Et tout compte fait, malgré la situation désastreuse dans laquelle j’étais maintenant prise, je ne pus m’empêcher de faire naître sur mes lèvres un léger sourire. À croire qu’il était tout de même possible de s’amuser dans ce château. Première surprise. « La boue te va très bien au teint, y’a pas à dire. » Et sans même lui laisser le temps de réagir, je lui en lançais à la figure.