Je m’étais rendu compte d’une chose : je ne pleure que lorsque je suis bourrée et je fonds littéralement en larmes quand j’en ai vraiment un bon coup dans le nez. À ce moment précis, je ne savais pas vraiment à combien j’en étais, en fait. La moitié d’une bouteille. Peut-être même une entière. C’était un peu flou dans mon esprit alors que je sentais des choses couler le long de mes deux joues. Des choses mouillées et salées, traçant un chemin sur ma peau rosée. Rosé… ouai, j’avais bien envie d’un peu de rosé. Assise dans mon coin de bar, je me relevais difficilement et en m’y reprenant à plusieurs fois, avant de prendre bien appui dans le sol. Sauf que, quand il s’agissait d’avancer et bien, je virevoltais plutôt, vers les casiers à bouteille à la recherche d’un vin rosé. Ou d’une bouteille de champagne, mais cela m’étonnerait qu’il y en ait ici. Titubante, j’allais donc vers les bouteilles, passant devant un homme sans réellement me rendre compte de sa présence. J’étais même prête à lever une main pour le saluer, mais je n’en avais sérieusement pas la force. Au contraire, je ne sentais pas une crevasse dans le sol et je me rétamais avec fracas contre le sol. Mes yeux s’ouvrirent aussitôt. Je m’étais assoupie, peut-être quelques instants, peut-être quelques heures. J’avais un verre à la main, pas encore vide et une bouteille à côté de moi, pleine. Enfin, on voyait bien que je ne m’étais servi qu’un seul verre. Je relevais ma tête du comptoir contre lequel je m’étais endormi. Malheureusement, les larmes n’étaient pas un rêve, elles étaient bien présente et elles avaient du mettre à mal mon maquillage de la journée. Je n’avais pourtant pas bu tant que ça. Dans un geste de colère, je balançais le verre à terre, se cassant… aux pieds de quelqu’un. Mon regard longea ces jambes, puis tout le reste de son corps doucement, pour arriver à son visage : Keelan. Mes yeux s’arrondirent, tandis que je me retournais immédiatement sur mon tabouret de bar. « Bouge. J’ai pas envie de te parler. » Ouai, l’espace de quelques instants, ce que Keelan et moi avions fait été oublié. De toute manière, ne préférait-il pas oublier…

Cette semaine, personne à nominer. Anabel et Sami s'en étaient déjà occupés. Si dans l'ensemble, les noms qu'ils avaient donnés me satisfaisaient, ce n'était pas le cas pour une personne. Irène. On était peut être pas copains comme cochon, notre relation était bizarre, mais j'appréciais la jeune femme – contrairement à la majorité des habitants, sûrement. Alors je n'avais pas envie de la voir partir. Je trouverais cela bien regrettable, surtout qu'elle s'impliquait bien plus dans le jeu que certaines personnes. M'enfin, on verra bien l'issu des résultats dimanche. Depuis le prime dernier, mes certitudes avaient volé en éclat, alors je serais bien incapable de faire un pronostic sur l'issu des votes. Le départ de Zéqué était incompréhensible. Quand il se montrait violent, à tenter d'étouffer et d'étranger des filles, on le sauvait. Mais quand enfin il s'était calmé, et ne martyrisait plus personne, il dégageait. Mystère. Bref, en cette soirée, après le diner, je décidai de me rendre à la cave, afin de récupérer une bouteille de vin. Sauf que j'y trouvais Irène, dans un piteux état. A l'évidence elle avait un peu trop bu et avait pleuré. Ne remarquant pas ma présence, elle jeta son verre qui alla s'exploser à mes pieds. Pour un peu elle aurait pu me blesser. Mes chaussures et le bas de mon pantalon se retrouvèrent éclaboussé de vin. Super. Ça allait être sympa pour partir au lavage. « Bouge. J’ai pas envie de te parler. » me dit elle. « Et moi je n'ai pas envie de partir. » Pas parce qu'elle me donnait un ordre que j'allais m'exécuter. « Alors que tu en ais envie ou pas, ça sera pareil. » Exactement. Je m'approchai, et m'installai sur le tabouret à ses côtés. « Ça va ? »

Comme il avait du le comprendre de lui-même, je n’avais réellement envie de compagnie. Que ce soit lui ou un autre, c’était pareil. Je ne suis pas du genre à être de bonne compagnie habituellement, alors là, quand j’ai bu, même un verre, ce n’est même plus possible. Pour lui, dégager était la meilleure des solutions, mais mon petit doigt me disait qu’il n’en serait pas ainsi. Depuis quand quelqu’un s’est déjà réellement barré quand on le lui demande aussi gentiment ? « Et moi je n'ai pas envie de partir. » AHAH, quelle réponse étonnante, évidemment qu’il n’allait pas partir et je pariais qu’il allait bien rester avec moi, pour m’enfoncer un peu plus. Malheureusement, j’étais persuadée qu’il était du style à toujours soutenir les gens et à vouloir leur remonter le moral. Moi je n’aime pas ces gens, ils me foutent le cafard justement. « Alors que tu en ais envie ou pas, ça sera pareil. » Je roulais des yeux, faisant une grimace de gamine en reprenant ses paroles. Evidemment que ça serait du pareil au même, il n’allait pas m’obéir tout de même. Il n’allait pas respecter le fait que je voulais rester seule pour des raisons que je tairais. C’était tellement mieux de venir s’incruster dans un tel moment. Je ne dis pas que je n’aime pas Keelan, mais il est un peu gentil à mon goût. La preuve : il venait s’asseoir à côté de moi. « Ça va ? » Je penchais ma tête un peu en arrière, lâchant un soupire d’ennui. Est-ce que j’ai vraiment l’air d’aller ? J’ai l’air d’une poivrote avec une bouteille à côté de moi et mon mascara qui a coulé me faisant ressembler à peu près au Joker. « Non, évidemment que non ça va pas… je pleure ! » Ouai, ça s’était bien un truc à souligner et comme il comptait sûrement en faire la remarquer d’un moment à l’autre, je prenais les devants. Je pleurais et ça, s’était jamais bon signe.

Bien sur que j'allais rester. Ça serait mal me connaître de penser le contraire. Et oui j'étais le genre de personne qui se souciait du bien être des autres. Je n'allais pas en avoir honte. « Non, évidemment que non ça va pas… je pleure ! » Bon d'accord, question conne, réponse conne. Mais merci, je l'avais remarqué qu'elle pleurait.  « Ah bon ? Je pensais que c'était un style que tu voulais te donner » Haha. En attendant ça ne me disait pas pourquoi elle pleurait tout ça. D'où venait cette soudaine tristesse ? Serait ce juste à cause de la nomination ? Ou y avait plus que ça ?  « C'est la nomination qui te mets dans cet état ? » Je cherchais à comprendre. Je n'aimais pas la voir ainsi. De toute manière, je n’aimais pas voir une fille pleurer en général. Venant d’Irène, c'était nouveau. Pas du genre à laisser montrer ses faiblesses. A n’en pas douter qu’elle allait continuer à me remballer. Mais c'était dans son intérêt qu'elle se confie, parce que je n'étais pas prêt de la lâcher.

Spoiler:

Me voir pleurer… c’est vrai que ça devait être un spectacle tellement ahurissant que Keelan nous voudrais pas partir. Non, il ne faut absolument pas manquant ça, pour rien au monde… D’un sens, j’en ferais de même si les rôles étaient inversés. « Ah bon ? Je pensais que c'était un style que tu voulais te donner » Je tournais mon visage vers lui, le considérant un instant mes yeux grand ouverts. C’est vrai que ça aurait pu être de mon genre, faire semblant de pleurer… « C’est vrai que ça pourrait attendrir les gens… » Pourquoi pas ? Les téléspectateurs verraient que je ne suis pas une sans cœur et donc, ils auront tendance à voter pour moi. Mais sérieusement, j’aurai préféré largement pleurer pour de faux, que me donner ‘en spectacle’ ainsi. « C'est la nomination qui te mets dans cet état ? » Je le regardais toujours, fixement. Sauf que cette fois, il me fit littéralement rire. Si ma nomination me faisait chialer, l’on pourrait croire que l’avis des autres compte beaucoup pour moi ce qui n’est bien évidemment pas le cas. Et si je commençais à pleurer pour ça, je n’ai vraiment pas fini de pleurer tout les jours. « J’en ai rien à battre des nominations… » TUUUUT, pas vrai, ça m’avait vraiment énervé, il faut bien l’avouer. Je trouvais ça pas forcément très juste de me nominer alors que je n’avais jamais réellement fait chier Sami et Anabel. Encore s’il s’agissait de Finnick et Sive, j’aurai un peu mieux compris… Sauf que là, oui vraiment, rien à voir. D’ailleurs s’il attendait là après des explications, il pouvait bien se foutre le doigt dans l’œil. « Tu perds ton temps ici. J’te dirais rien… alors va faire ton psy ailleurs ! »

Spoiler:

« C’est vrai que ça pourrait attendrir les gens… » Tout à fait. Et attendrir les gens, elle en aurait peut être besoin en fait. Clairement ça ne lui ferait pas de mal. Remarquez, je ne savais guère ce que le public désirait. Je ne le comprenais plus. Peut être étaient ce une bande d'insensible, allez savoir. Mademoiselle déclara ensuite qu'elle en avait rien à battre des nominations. Elle croyait berner qui là ? Je me doutais qu'il y avait plus, m'enfin qu'elle n'aille pas me faire croire que ça ne l’atteignait pas.  « Bien sur, et mon cul c'est du poulet. » Non mais franchement. Voilà maintenant qu'elle me conviait à dégager d'ici, pour aller faire mon psy ailleurs. Ah mais vraiment. Tellement adorable ces filles ces derniers temps. Entre elle, Laoise et London, on était servi ! Fallait croire qu'elles s'étaient passées le mot. Elles auraient au moins pu faire ça à une semaine d'intervalle chacune. Mais non, toutes en même temps, rien que pour nous faire chier. « Ce que tu peux être chiante. » N'est ce pas ?  « Mais tu perds ton temps aussi à vouloir me faire dégager. » J'attrapai un verre, et me servis de la bouteille qu'elle avait déjà entamée. J'en aurais bien besoin.  « ça irait plus vite si tu me disait ce qui te tracasse. Parce que je n'ai pas l'intention de lâcher le morceau. » Je pouvais faire mon chieur aussi.

Evidemment dans un sens ma nomination me faisait drôlement chier. Sauf que mon état n’était pas du à ça. C’était quelque chose d’autre. Une accumulation de la semaine, dont le point de départ était oui, ma nomination. Si je me faisais virer à la fin de la semaine, cela aurait été une semaine horrible du début jusqu’à la fin. « Bien sur, et mon cul c'est du poulet. » Je le regardais en me mordant la lèvre inférieure. Non effectivement son cul n’était pas du poulet… je n’y avais pas goûté, mais il me semblait bien que ça n’en était pas… ouai je m’égare là. « Ce que tu peux être chiante. » Je roulais des yeux, avant de figer une expression perplexe devant lui. Il venait seulement de s’en rendre compte ou bien ? « Tu crois » ai-je le temps de caser, avant qu’il ne reprenne de plus belle. « Mais tu perds ton temps aussi à vouloir me faire dégager. » Je levais déjà une nouvelle fois mes yeux au ciel. À croire qu’il allait me faire presque la morale celui-là. « Par le passé, pas si éloigné que ça, tu m’as prouvé que je pouvais être persuasive, donc je sais que ça aussi, j’vais réussir ! » Il savait bien de quoi je parlais, certes j’avais mis trois semaines, mais nous avions baisés. Dans la cuisine s’il ne s’en rappelait plus. Evidemment, je n’avais pas envie de le faire dégager de là en trois semaines. S’il pouvait le faire en dix secondes. « Dégage ! » Clamais-je une nouvelle fois, au risque de me répéter. J’ai beau apprécier un tout petit petit petit peu Keelan, lui au même titre que les autres ne m’étais pas familier. Je n’avais pas à étaler ce que je ressentais devant leurs yeux. « ça irait plus vite si tu me disait ce qui te tracasse. Parce que je n'ai pas l'intention de lâcher le morceau. » Je soupirais. C’était une vraie plaie celui-là et en ce moment, pire qu’Andreas alors c’est pour dire… Avec ce dernier, il fallait toujours tout justifier. Avec Keelan, il va falloir toujours raconter ce qui ne va pas ? « Tu t’es pas dis que tout le monde n’avait pas forcément besoin de parler pour aller mieux. Moi par exemple, je ne parle pas de moi pour par qu’on me fasse chier. Alors je vais encore moins parler de ce qui me ‘tracasse’… »

« Par le passé, pas si éloigné que ça, tu m’as prouvé que je pouvais être persuasive, donc je sais que ça aussi, j’vais réussir ! » Hm oui elle avait su se montrer persuasive en effet. Elle m'avait eu à l'usure. Je ne risquerais pas d'avoir oublié notre partie de jambes en l'air dans la cuisine. M'enfin là il ne s'agissait pas de la même chose. Je sentais que ça allait être très compliqué d'arriver à lui tirer les vers du nez. D'ailleurs voilà qu'une fois de plus elle déclara ne pas vouloir parler et que ce n'était pas le moins du monde prêt d'arriver.  « D'accord...Et donc si tu ne veux pas parler, qu'est ce qu'on fait ? On baise ? » La seule chose à laquelle elle semblait répondre. Bon, qu'est ce que je racontais moi ? Je me levai finalement.  « Tu sais quoi ? Reste dans ta connerie, et à te morfondre toute seule ici puisque c'est ce que tu veux. Si jamais tu changes d'avis, tu sais où me trouver » Je n'allais pas la forcer à faire quelque chose qu'elle ne désirait pas. Je reposai le verre de vin sur la table, et quittai la pièce.

SUJET TERMINE POUR KEELAN.

« D'accord...Et donc si tu ne veux pas parler, qu'est ce qu'on fait ? On baise ? »Je voyais que, finalement, je pouvais mettre Keelan dans cette magnifique case qu’est celle de tous ces réducteurs de personnalité. Oui, c’est personne qui ne tenait compte que des rumeurs, des réputations. C’était une évidence depuis le début : Irène=baise. Ce que les autres n’ont pas saisi, c’est que j’étais bien plus que ça, et même si je n’étais pas du genre à parler de moi, je pensais que Keelan l’avait saisi aussi. Visiblement non. J’esquissais tout de même un sourire, tout en effaçant les traces de larmes sèches sur mes joues. « Tu sais quoi ? Reste dans ta connerie, et à te morfondre toute seule ici puisque c'est ce que tu veux. Si jamais tu changes d'avis, tu sais où me trouver ». Je levais les yeux au ciel après avoir acquiescé ses dires d’un mouvement de tête, tout en le regardant s’éloigner. Il avait mit du temps à comprendre, mais il avait enfin compris : je préférais exactement rester dans ma connerie comme il le disait, que de me mêler aux autres et de m’ouvrir à eux. Quand on réfléchit bien, ils étaient tous des inconnus et le resterais tout le temps, maintenant, dans deux semaines, à la fin du jeu. Chacun fonctionne comme il le sens de toute manière…