Je ne sais pas pourquoi exactement je me retrouve dans cette pièce. La salle de vidéo surveillance me paraît assez inutile en fait. Ça sert à rien. Si je veux voir du cul, je vais m’envoyer moi-même en l’air, du coup, je vais pouvoir en profiter par la même occasion. Non mais plus sérieusement, il n’y a rien de captivant dans le fait de pouvoir voir ce que les autres font dans le nid. En plus, si au moins on pouvait entendre ce qu’ils disent. Mais non. Je soupire, assise en indien sur la chaise, le regard dans le vide, fixant un écran sans vraiment y porter attention. Je m’emmerde. Ma vie à l’extérieur, bien qu’elle n’est pas extraordinaire, est beaucoup plus captivante qu’ici. J’en viens même à m’ennuyer de mon boulot... ça va pas la tête. Je me penche légèrement pour attraper la bouteille de vin que j’ai volé dans la cave à vin et en prend une longue gorgée. Je ne devrais peut-être pas boire cette semaine, vu comment j’ai été malade durant le week-end passé, mais en même temps, ce n’était pas à cause de l’alcool. Quelqu’un entre dans la pièce, je ne le regarde pas. Et c’est con, mais je sais, pour une raison que j’ignore totalement, que cette personne est Slavin. Je tourne finalement la tête vers lui. Je sais pas, ça fait longtemps que nous ne nous sommes pas retrouvé tous les deux. Et la dernière fois, il m’avait surpris dans un certain moment de faiblesse et je dois avouer que ça m’avait poussé à m’éloigner légèrement de lui. Parce que je n’aime pas être faible, c’est évident. Je reste silencieuse, le fixant un moment avant de tourner à nouveau la tête vers les écrans devant moi. Je bois une gorgée de vin à nouveau avant de lui tendre la bouteille. « Tu veux du vin ? » demandais-je, attendant plus ou moins une réponse de sa part. Je suis de nouveau froide et indifférente. Je n’aurais pas du baisser mes gardes avec lui les semaines passés. Je m’en suis rendu compte maintenant.

Bizarrement je n'aime pas trop la salle de vidéo-surveillance, et pour cause, je n'y vais que très rarement. Et là je n'avais pas prévu d'y aller si je n'avais pas vu London y rentrer. Il faut dire que j'ai l'impression qu'elle m'évite depuis un certain temps elle aussi. Ouais, c'est devenu la mode par ici. Sauf qu'à son sujet je ne sais pas pourquoi. Alors ça m'intrigue, alors je la suis. Et je rentre dans la pièce à sa suite. Je reste un moment appuyé contre la porte, silencieux. Je n'ai rien à dire. Pas avec London, j'préfère prendre la température avant, j'sais jamais comment va être notre échange. Elle a l'air égale à elle même, froide, distante, et totalement inébranlable. On se regarde un instant, y'a des tas de choses qui passent dans nos regards, comme à chaque fois, même si c'est différent. Comme si une part d'elle m'était dorénavant fermé à tout jamais. Elle fixe les écrans et moi je reste à ma place, je l'observe, scrutant chacun de ses gestes. Elle boit du vin, et m'en propose. Je l'attrape. Boire du vin au goulot en plein milieu de l'après midi tout en sachant que je risque de boire ce soir à cause de la soirée c'est dangereux, mais tant pis. C'est mal poli de refuser. Je ne la remercie pas ce n'est pas la peine. Je bois et fais une grimace. « Il est dégueulasse ton vin... » J'sais pas si c'est parce que mon palet s'est habitué à mieux, néanmoins, il ne me plait pas trop celui-ci alors je lui tends sa bouteille et j'avance vers la chaise libre. « Tu m'as manqué. » Je lui dis alors que je m'installe, j'suis sincère même si j'parais totalement indifférent, j'suis presque sarcastique d'ailleurs, sauf que non, mais voilà. Ça passe toujours mieux le sarcasme avec la candidate.« Tu mâtais qui ? » Bon finalement j'ai changé d'avis, je bois une nouvelle gorgée de vin, et pose mes pieds sur la table juste devant moi. Bien tranquillement. Et puis j'pose mes yeux sur les images, y'a rien de bien captivant. J'souris lorsque je vois le visage d'Adie qui passe à l'écran, en plein ménage avec Nora. Mais ça ne dure pas, puisque déjà mes yeux se posent sur London, j'dis rien mais je la regarde. Je soupire aussi.

Le silence n’est pas pesant, il ne l’est jamais en compagnie de Slavin. Pourtant, il y a bien quelque chose de changer, entre nous deux. Cela serait difficile à décrire, pourtant je sais bien que se sont les nouvelles barrières que je me suis mise entre lui et moi qui gêne en ce moment même. Pourtant, je n’avais jamais abordé ce genre d’attitude avec lui. Mais je lui avais aussi dis que je n’aimais pas ce sentiment, cette façon de m’ouvrir à lui. Je ne comprend toujours pas pourquoi je l’ai fait. Il se décide à prendre la bouteille de vin que je lui tend, avant de déclarer qu’il est dégueulasse ce vin. C’était ce que je m’étais dit en prenant la première gorgée, mais je n’avais pas l’intention d’aller en chercher une autre dans la cave, alors j’allais toléré son goût de merde. « Si tu ne l’aimes pas, ne le bois pas. » dis-je d’une façon neutre, regardant toujours l’écran. « Tu m'as manqué. » Mais oui, bien sur. Il le dit avec sarcasme en plus. C’est un comique, ce petit Slavin. Pourtant, j’ai presque l’impression qu’il est sérieux. Mais en même temps, ça m’étonnerait beaucoup. J’aurais presque envie de lui dire qu’il m’a manqué aussi, mais cela montrerait que je lui porte beaucoup trop d’attention. Je n’ai pas envie de faire croire des choses, qu’elles soient vraies ou fausses. C’est pourquoi je ne dis rien, encore une fois. À croire que je suis pratiquement muette. Puis il me demande qui je mâte et je me décide de tourner ma tête vers lui pour ne plus décrocher mon regard du sien. Je n’en ai pas envie de toute façon. « Je voulais te mâter toi... Mais je ne te trouvais pas. Et pour cause... » Puisqu’il est droit devant moi. Je prend une gorgée de vin avant de passer une main distraite dans mes cheveux en batailles. Ce qui m’énerve le plus, dans toute cette relation, c’est que je me sens tout de même attiré vers lui. Même après avoir décidé de ne plus lui offrir la chance de découvrir quoi que se soit d’autre sur moi. « Je crois que t’es assez occupé au niveau des femmes pour que je t’ai réellement manqué. T’as une femme enceinte sur le bras, en plus de ça... » dis-je en esquivant un sourire, mon premier, après cette petite phrase qui relevait une certaine provocation. Je ne savais pas trop ce que je recherchais en lui disant cela. Mais cela restait tout de même la vérité.

London est perspicace, elle me dit de ne pas le boire le vin si je ne l'aime pas. Ouais j'pourrais sauf que j'fais rarement ce qu'on me dit. Vous savez, l'esprit de contradiction, blablabla. Et puis j'ai soif en plus, j'ai même très soif. Alors je bois, pas beaucoup mais suffisamment pour sentir le coup âcre se répandre dans ma gorge. Je fais la grimace, mais ça arrive parfois, c'est carrément normal. Je ne regarde plus les écrans, j'ai les yeux rivés sur London qui elle ne me regarde pas. Elle est dépourvu de sentiments, son visage est lisse, son regard est éteint, c'est London en somme. La London des débuts, totalement fermée et froide et distante. Celle qui m'a manqué c'est celle qui m'a laissé pénétré sa carapace, mais il ne faut pas que je me fasse de faux espoirs, je crois qu'elle a disparue le jour où je l'ai vu danser, celui là même où je lui ai demandé de se confier. Belle connerie. Je lui demande ce qu'elle regarde, elle tourne enfin la tête vers moi. Sa réponse me fait sourire. « Et bien regarde moi, j'suis là, fais toi plaisir. » J'agite ma main que je descends et remonte pour la laisser me regarder. Elle me connait bien, elle m'a déjà vu nu, plusieurs fois, alors oui, elle connait assez bien mon corps. J'imagine qu'elle n'a pas employé ce terme de cette manière, peut être même qu'elle a dit ça juste comme ça, pour ce que ça change de toute façon. Et puis elle rebondit ensuite sur ma réplique, elle sourit, j'incline légèrement la tête sans lâcher ses iris luisantes, et je souris à mon tour. « Serais-tu jalouse London ? » J'pense pas, en tout cas, c'est exactement le genre de remarque que pourrait lancer une jeune femme jalouse et qui manquerait d'attention. J'pourrais lui dire qu'elle se trompe, que malgré toutes ces femmes qu'elle cite, et qui ne sont pas si nombreuses que ça par ailleurs, elle m'a tout de même manqué parce qu'elle a une place à part dans mon coeur sauf que non, je garde le silence. Tout à l'heure sans doute, ou pas, pour le moment j'ai juste envie qu'elle me réponde.

Et oui, Slavin est devant moi, plus besoin de le chercher au travers des caméras pour pouvoir l’admirer en toute tranquillité. Il me dit d’en profiter et de me faire plaisirs. C’est bien ce que j’avais l’intention de faire maintenant qu’il était à porté de main. Comme si j’étais vraiment venu dans cette pièce pour pouvoir l’espionner. J’ai le mot looser tatouer dans le front ou quoi. N’importe quoi. « C’est franchement mieux en vrai. Comme ça je vais pouvoir toucher en plus de regarder. » dis-je en haussant les épaules, comme si cette information ne changeait rien finalement. Puis, allez savoir pourquoi, je lui fais une remarque sur lui et ses conquêtes. C’est le genre de phrase que je ne dis jamais, puisqu’elle peut évidemment être mal interprétée. Pourtant, je sais aussi que Slavin comprend ma façon de m’exprimer et ni verra rien d’anormal dans ma réplique. Je ne le lâche plus des yeux, comme si s’en était maintenant impossible. « Serais-tu jalouse London ? » La jalousie, un bien vilain défaut. Je soupire légèrement, alors que je suis sur le point de lui faire une révélation. « Si tu savais... » commençais-je, le plus sérieux du monde. « Je n’en peux plus Slavin... Je pense à toi tout le temps. J’en dors plus la nuit, merde. Tu me bouleverses, me renverses. Je n’ai jamais rencontré quelqu’un comme toi, qui arrive à lire en moi en un seul regard. J’ai l’impression que je peux me confier à toi et que jamais tu ne me jugeras. Et les autres filles... elles te tournent autour, tu les embrasses... Ça me rend folle. » Je prend une pause, baissant finalement les yeux, comme si je venais réellement d’en dire trop. Ouais non, j’en ai fait beaucoup trop. Je relève les yeux et lui souris légèrement. Un sourire qui veut dire que je viens de me foutre de sa gueule. C’est con, parce que j’étais tellement dans l’esprit du moment, que je m’y suis presque cru. Enfin, le pire c’est que certaines choses sont vraies. Pas toutes, faut pas exagérer. Mais ma réflexion sur son regard, ça c’était vrai. Mais bon, cela passera pour du sarcasme, alors je n’ai pas à m’en faire. J’espère qu’il ne prendra pas mal ma petite scène par contre. Je ne voulais pas le blesser ou quoi que se soit. Mais franchement, moi, jalouse des autres filles. Faut pas exagérer. « Tu m’as manqué aussi. » dis-je, le regrettant aussitôt. Bravo, ça c’est bien joué. Parce que cette fois-ci, j’avais été franche. Je le regarde intensément avant de lever les yeux au ciel, pour lui montrer que je suis exaspérée par mes propres propos.

London est là affirmant qu'elle était venue pour me regarder, à travers ces sordides caméras, ce qui serait totalement stupide puisqu'elle s'évertue à me fuir depuis un certain temps. Alors, j'vois pas pourquoi elle me mâterais. Mais rien n'est jamais sérieux dans la bouche de la candidate de toute évidence. Mais elle surenchérit, elle ajoute même qu'elle pourrait en profiter pour me toucher. « Qu'est-ce qui te fait croire que je t'autorise à me toucher ? » Je lui demande tout à fait sérieusement, je ne souris, pas j'suis totalement neutre, détaché, comme toujours avec London. Après, nos yeux sont incapable de se détacher l'un de l'autre, comme aimanté, hypnotisé, appelez ça comme vous voulez, je m'en moque. L'idée est là, elle me fait une remarque sur mes soit-disant nombreuses conquêtes, j'en compte qu'une seule moi, mais soit. Bref, puisqu'elle semble insister et parce que mine de rien ça m'amuse, je lui demande si elle est jalouse, et elle me répond, oh oui, elle me répond et elle ne fait pas semblant. Je l'écoute, et même si elle n'est pas sérieuse, je sais qu'elle pense tout de même quelques éléments, comme le fait que je puisse lire en elle par exemple, et c'est bien pour cette raison que j'sais que c'est pas totalement un mensonge. Je ne cille pas, j'fais comme si elle me parlait de la météo, j'suis indifférent, parce que. J'sais pas trop quoi en penser à vrai dire. « C'est souvent l'effet que je fais aux femmes. » Je lui dis, sur un ton égal sauf que je me lève et que je pousse ma chaise de sorte à me retrouver face à elle, et puis je m'installe en tailleur dessus. « Qu'est-ce que j'peux faire pour apaiser ta douleur ? » J'suis sérieux, bah oui, parce que si elle ne dort plus la nuit faut faire quelque chose non ? Non. C'est bien ce que je me disais. Elle se fout clairement de ma gueule, pourquoi je n'en ferais pas autant, c'est donnant-donnant. Et sans que je ne m'y attende elle m'avoue que je lui ai manqué. Avant de lever les yeux au ciel. Je souris plus franchement. « T'inquiète pas va, Satan te gardera quand même une place à côté de lui mon ange. » Et là je ris, ouais, ça contraste totalement avec mon expression suivante mais je m'en fiche.