J’avais cet irrésistible besoin d’air. Besoin d’air et d’une centaine de cigarettes. Ca n’allait pas, ça se voyait comme le nez au milieu de la figure. Le prime venait de toucher à sa fin. Je n’étais pas éliminée, mais mon secret avait été découvert et j’avais ce goût d’amertume dans la bouche que je détestais tant. Celle de me sentir à présent vulnérable, connu de tous. Pour quelqu’un qui n’aimait pas parler d’elle, j’étais « servie ». Mais loin de moi l’idée d’être blessée par une quelconque parole d’Andreas. Des connards comme lui, j’en avais côtoyé bien plus que ce que l’on pouvait croire et les paroles les plus blessantes, venaient bien sûr des personnes qui m’étaient les plus « proches ». Les peu d’amis que j’avais, je les avais perdus. Ma famille, aussi détestable qu’elle était avant, m’avait renié. Seule ma meilleure amie m’avait vivement soutenue dans ma démarche. Sans même me pavaner au prime et leur prouver que j’étais devenue importante dans le jeu, salope, ex-homme ou pas, je m’étais éclipsée en douce pour ne pas avoir à parler à quelqu’un. C’était bien la dernière chose que j’avais envie de faire. Rapidement, j’enlevais une couche de vêtement pour me retrouver en débardeur blanc et pantalon fin tout aussi blanc. Je sortais de mon pantalon le paquet de cigarettes qui me tentait tant depuis le début du prime. Je callais une cigarette entre les lèvres et étais prête à rejoindre l’extérieur. Un bruit de pas me suivait à la trace. Ma cigarette allait devoir attendre, j’en avais bien l’impression. Je me retournais et me retrouvais face à Jamie. J’enlevais ma cigarette de mes lèvres et je le considérais un instant. « Quoi ? » Lui demandais-je doucement, mais plissant mes yeux de méfiance. S’il venait à me dénigrer lui aussi, ma main risquait de partir dans sa figure. Malheureusement pour lui, il prendrait pour les autres.

Voilà, mon secret venait d'être découvert, le prime venait de passer, aussi ennuyant était-il et j'étais maintenant là, mains dans les poches, me demandant bien quelle était la prochaine étape. Encore là pour au moins une nouvelle semaine. J'n'étais pas vraiment effrayé, je commençais pour tout vous dire à avoir l'habitude, ouais, c'était devenu une sorte de quotidien. Quotidien que j'essayais de combattre malgré tout, histoire de ne pas être trop bouleversé lorsque mon tour viendrait, lorsque je devrais quitter le jeu. Car je ne me faisais aucun soucis quand au fait que dans les prochaines semaines, voire peut-être cette semaine ci, mon aventure allait se terminer. Maintenant que j'étais réellement moi, maintenant que j'étais libre, je vous avouerais tout de même vouloir profiter de l'aventure sans me prendre la tête sur le comment Finnick aurait répondu à un tel ou à un tel. Et puis de toute façon, sur les derniers jours, mon secret m'avait tellement pesé que j'avais tout simplement choisi de redevenir, ne serait-ce qu'un peu moi même, et c'est très certainement pour cela qu'il avait été dévoilé, à cause de mon changement marquant de caractère. Mais rien à faire, j'n'allais pas me laisser abattre pour autant, on était dans ce jeu pour jouer non ? Alors ouais, jouons. C'est ainsi que j'avais quitté le plateau, balançant ma tête de droite à gauche tout en traversant le parc. J'entrais un instant dans le château, montais pour me débarrasser de mon manteau en cuir avant de redescendre les escaliers jusqu'à ce qu'Irène, qui se trouvait devant moi se retourne « Quoi ? » oufti, regard de tueuse, j'fais quoi là ? Demi tour ? Ouais, bonne idée. Ou pas en fait. J'me dis qu'il vaut mieux faire genre que j'ai un truc à lui dire... et en fait ouais, clairement, j'ai quelques remarques. « Chasse moi ce regard là, t'es flippante, j'te jure. » un léger rire s'échappa de mes lèvres « Sérieux, j'admire vraiment ce que t'as pu faire par le passé, je sais que certains ici n'en pensent pas autant mais... ouais on s'en fout quoi. Au moins tu sais qui t'es toi, et j'trouve ça cool. » dis-je en haussant les épaules.

Me priver de ma cigarette était une mauvaise idée. En général oui, mais surtout après une telle émission. Tout s’était enchaîné si rapidement : l’aveu de mon secret et à peine quelques heures après, le prime. Prime où l’on aurait pu me laisser tranquille et qui finalement c’était soldé par une putain de règlement de compte. La seule manière de me calmer était de trouver un coin tranquille, seule, pour fumer. Un plaisir qui me restait cher depuis longtemps, bien que l’on pourrait croire qu’à cause de mes brûlures, je prohiberais le feu de ma vie. J’ai décidé de vivre et de ne pas me laisser marcher sur les pieds. Pas plus qu’avant. « Chasse moi ce regard là, t'es flippante, j'te jure. » Je levais les yeux au ciel, triturant nerveusement la cigarette entre mes doigts. Je me foutais pas mal de l’avis de Jamie, de savoir s’il me trouvait flippante ou trop méchante ou dégueulasse ou bizarre. J’essayais tout de même de me décontracter, enfin, de prendre une allure normale face à lui. Je lui adressais même un léger sourire forcé, pour faire bonne figure et rien que ça. Il n’était pas le dernier à qui je voulais sourire, mais il n’était pas pour autant le premier. Bon, il me voulait bien quelque chose, non ? « Sérieux, j'admire vraiment ce que t'as pu faire par le passé, je sais que certains ici n'en pensent pas autant mais... ouais on s'en fout quoi. Au moins tu sais qui t'es toi, et j'trouve ça cool. » Je le fixais un instant, ne réagissant pas à ce qu’il venait de me dire. Après tout, les première vraies réactions auxquelles j’avais eu droit avait été négative. Je veux dire, clairement face à moi. Dieu, même si je ne l’aimais pas, il savait bien à quel point j’avais horreur d’entendre ce mot là : admiration. Il pouvait bien l’être, oui il pouvait bien m’admirer, mais je n’avais nullement changé de sexe pour ça ou pour prouver aux autres que j’avais un courage qu’ils n’avaient pas, mais ce n’est nullement le cas. À mes yeux je n’étais pas courageuse. J’avais attendu un choc pour me rendre compte de la bêtise que je faisais en continuant de vivre dans ce corps masculin. « Je sais pas quoi te dire… » Lui répondais-je, subitement, avec un léger sourire. J’oscillais entre le ‘t’as pas à m’admirer’ ou le ‘c’est vraiment gentil de se sentir soutenu’. Choix difficile, bien que je le pensais… « J’ai l’habitude de répondre aux attaques, pas aux… compliments. »