candace + branca

Nous en sommes donc en plein cinquième semaine et s'il y a une chose dont je suis plutôt assez fière, c'est ma gestion de linge. Je n'ai pas emmené grand chose mais j'avais prévu le coup niveau sous-vêtements car la lessive et moi, ce n'est pas une grande histoire d'amour et lorsque je peux faire en sorte d'en faire le moins possible, je suis en général assez efficace. Mon crédit lessive est encore tout à fait raisonnable et je prie le ciel chaque jour de ne pas me tâcher outre mesure afin de ne pas être condamner au lavoir. Ce qui n'est pas encore arrivé. Pourtant aujourd'hui, je ne peux pas me défiler, je dois me plier à cette corvée, bien malheureusement. Je récupère donc mes affaires, éparpillées un peu partout sans grand mal. C'est fou comme personne ne me prend jamais rien. Je remplis mon panier et me rend finalement à la laverie automatique où j'y rencontre Candace, vraisemblablement attelée à la même tâche que je m'apprête à effectuer. « Alors, on s'amuse ? » Oui bon c'est pas drôle, faire sa lessive ce n'est jamais drôle mais autant ne pas dramatiser la situation. Je m'approche d'une machine, y fourre mon linge sans grande précaution et la lance, utilisant mon crédit personnel. Le tout fait, je m'assois alors à côté de Candace, l’œil mutin. « J'imagine que tu n'es pas en manque, ça va ? » Référence aux révélations du prime. Je ne juge pas, au contraire je m'en fous, elle fait ce qu'elle veut. Au moins elle s'amuse. Et elle a bien raison, surtout si cela ne dérange pas son mari.

Je ne suis pas une fan des tâches ménagères, mais qui l'est honnêtement. Pourtant je m'y plis, nous n'avons pas de femme de ménage, nous pourrions, on en a les moyens. Mais je ne supporte pas qu'on touche à mes affaires, qu'on les déplace, qu'on puisse les abîmer alors je m'y colle. Alors honnêtement, faire la lessive, ne me gêne pas plus que ça. J'aime porter des vêtements propres après tout. Je suis dans la laverie automatique. J'ai mis deux lessives en route, on a mis notre cagnotte en commun avec Callan, après tout, on lave notre linge ensemble et aujourd'hui, j'ai décidé de m'y coller. De toute façon j'ai un truc à lire et je crois que Callan a chopé un virus. Bref. Je suis installée sur l'une des chaises, mises à disposition, j'ai l'impression d'être retournée à l'époque de la fac, la laverie, l'attente interminable avec des minables autour. Je suis entrain de lire un rapport d'enquête lorsque la sonnette de la porte retentit. Je ne lève pas les yeux. Je ne réagis que lorsque je reconnais la voix de Branca. « Non, je travaille en faite. » Le pire c'est que je suis sérieuse. Le dossier que je tiens entre les mains est confidentiel. Je pourrais me faire rayer du barreau s'il tombe entre des mains malvenues, mais encore faudrait-il que ça intéresse quelqu'un. Je lève les yeux, elle prépare sa tournée de linge. Je termine ma ligne et referme le dossier lorsqu'elle vient s'installer à mes côtés. Sa question est particulièrement amusante. Je tourne les yeux en sa direction. « Pour tout te dire, si, très. On a à peu près quarante minutes avant que mon programme ne se termine, on s'envoie en l'air ? » Je ne souris pas, mon visage est dépourvue d'émotions, rien ne pourrait laisser croire que je plaisante, alors, peut être que je suis sérieuse au fond. Qui sait ?

Elle travaille, comportement tout à fait normal pour une candidate de télé-réalité. Quoique déjà, pour commencer, elle est avocate (j’ai cru comprendre) alors j’imagine que dès le départ, il y a comme anguille sous roche. Je jette un œil fugace à ses papiers sauf que mon entreprise se retrouve sans grand résultat, elle cache tout ça farouchement, c’est dommage, j’étais curieuse. Et puis, des avocats, j’en ai jamais connu, pas en vrai en tout cas, seulement à la télé, tous à beugler ‘objection’ pour des raisons obscures. Ca aurait peut-être été une bonne idée en fin de compte. Hum. « J’espère que ton client n’est pas dans le couloir de la mort parce que si tu restes dans le jeu jusqu’à la fin, ça serait con qu’il ait été privé de son avocate. » C’est vrai, imaginez au tribunal, ‘non non mon avocate est à Fake Lover, peut-on reporter l’exécution ?’, ce serait con pour lui… Je m’installe ensuite à ses côtés et elle pose son dossier certainement confidentiel, faudrait que je trouve où elle cache ça tiens, quand jm’ennuirais… Et puis je prends à nouveau la parole, faisant référence à sa libido qui, semble-t-il, se porte plutôt bien. Pour sûr, j’avais compris que Candace était loin d’une coincée et encore moins à cheval sur la fidélité mais quand même, ça faisait bizarre tout ça. Mais s’ils étaient heureux ainsi, qui étais-je pour juger ? Ce que je ne fais pas, bien évidemment. Elle me parle de son programme et me propose une partie de jambes en l’air avec un air impassible. J’éclaterais bien de rire mais… j’ai du mal à savoir si elle déconne ou pas. J’imagine que oui mais avec Candace, on est jamais bien sûr de rien et quelque chose me dit qu’elle est tout à fait capable de faire ça. « Quarante minutes c’est bien trop court. » je réponds alors, laissant une ouverture sans pour autant me jeter dans la gueule du loup. Non pas que sa proposition ne m’intéresserait pas mais là, comme ça, ici, hum…

Ce n'est pas commun de travailler alors qu'on est venu s'enfermer dans une télé réalité pour prendre des vacances. Mais de toute façon, je trouve toujours le moyen de travailler même en vacances alors, est-ce si improbable ? Je ne crois pas. D'ordinaire à la laverie, on emporte des magasines, moi j'emporte un dossier. Mais rapidement je suis interrompue, bien que le terme soit fort, par Branca venue elle aussi s'adonner à la même corvée que moi. « En général, les condamnés à mort n'ont plus besoin d'un avocat puisque ce dernier a vraisemblablement mal fait son travail. » Sous entendant que je n'ai jamais envoyé quelqu'un à la mort à cause d'une défaite. Je pose mon dossier sur la chaise d'à côté puisque déjà, elle me questionne au sujet de ce qu'elle a vraisemblablement appris au prime. La mariée est une chaudasse infidèle. S'il y a avait un journal, le gros titre aurait pu être celui-ci. Je lui fais une proposition, et je vois bien à son air qu'elle n'est pas sûr de savoir comment l'interpréter. Un léger sourire fend mon visage ne deux. Il est très léger, si léger, qu'elle ne le distinguera peut être pas. Face à sa réponse, j'attrape à nouveau mon dossier que j'ouvre à une page totalement aléatoire. « Tu as raison, une prochaine fois peut être... » Je lance, provocante à souhait. Je ne lis plus vraiment, pourtant j'ai l'ai totalement concentré sur mon dossier.

Je ne sais pas ce que cherche Candace, ce qu'elle veut, si elle joue, si elle ment. Elle a cette faculté rare d'arriver à me faire douter et je déteste ça en général mais c'est étrange, avec elle, ça passe. Je n'ai aucune explication à tout ça, peut-être parce que je sens qu'au fond elle n'est pas réellement la personne dont elle donne l'image, je n'en ai cependant aucune idée. Ici, je n'ai aucune certitude, chacun joue un rôle, certains feront tout pour aller le plus haut possible et si j'en cerne quelques uns, d'autres sont encore un mystère pour moi. Heureusement, en un sens, car sinon je m'ennuierais pas mal. Elle est donc avocate, mariée, aime vraisemblablement s'envoyer en l'air, embrasser des inconnues sans avoir froid aux yeux et se foutre du regard des autres. Pour le moment, c'est tout ce que je sais. Ah et aussi qu'elle travaille, ici, ce qui est étrange, vraiment. Elle me répond, sur les condamnés à mort et je dois bien avouer qu'elle a amplement raison, je ne fais pas dans les détails, désolée d'avoir sorti une connerie madame. Et puis je la taquine sur ces liaisons extra-conjugales, choses dont je me fiche éperdument au final et j'ose espérer qu'elle le sait. Elle met alors peu de temps à rempiler, je souris, la contrant et finalement, la voilà qui reprend son dossier en me parlant de prochaine fois. Elle lit, ou fait semblant et mon sourire s'agrandit, amusée par le constat que je viens de faire. « Tu me fais le coup de l'indifférence là ? Tu sais genre 'tant pis' en te mettant à faire semblant de travailler pour que je te saute dessus ? » Ce comportement qu'on a tous utilisé à un moment ou un autre et qui a souvent pour but de faire enrager l'autre... Ça marche d'ailleurs, je suis légèrement intriguée mais pas franchement attisée pour autant. La voyant avec son dossier, j'essaie de me décaler lentement histoire d'en apercevoir quelques lignes sans grand succès malheureusement. « Et si tu résous l'affaire, tu fais comment ? T'appelles tes potes les flics? » Curieuse de comprendre le pourquoi du comment... La machine bippe, j'y jette un œil, elle repart. Vraiment, la pointe de la modernité cette chose là...

Y'a des gens qui m'indiffèrent, d'autres avec qui ça ne passe pas et certains avec qui le courant passe très bien, avec qui je ne dois pas faire des efforts surhumain pour leur faire croire qu'ils m'intéressent. Branca fait partie de cette troisième catégorie. Je crois que je l'apprécie, enfin non c'est une certitude, bref. Je travaille parce que je préfère utiliser mon temps intelligemment, je préfère ça plutôt que glander, je déteste glander. Bien sûr ça peut paraître étrange, ça peut même être particulièrement ridicule mais après tout pour ce que j'en ai à faire. Branca s'interroge, je lui réponds, tout naturellement. Je lui propose même une partie de jambes en l'air pour palier l'ennui. Je me rétracte ensuite. Je ne sais pas si j'en ai vraiment envie, j'en sais rien, pourquoi pas. En tout cas, cette situation me divertie. Je retourne rapidement sur vers ce dossier important. Bien que je ne lise que en diagonal finalement. Peu concentré contrairement à tout à l'heure. La répartie de Brance pourrait me faire sourire, oui, elle pourrait pourtant je reste de marbre. « Que ce soit vrai ou non, ça n'a pas l'air de fonctionner. » Je jette un oeil discret vers elle et finalement elle m'interrompt mais pas forcément de la manière de laquelle je m'attendais. Elle me pose des questions sur mon affaire. Je pose à nouveau mon dossier, sur mes genoux et la fixe. « Et bien tu vois, je ne suis pas ce genre d'avocates. Non mon travaille consiste plus à essayer de ruiner l'enquête de la police. Et là plus particulièrement, je cherche une faille dans la procédure afin d'espérer un non-lieu. » Et je m'arrête de parler parce que ça peut être particulièrement ennuyeux. Je ne suis pas procureur de toute façon. La machine fait un bruit, ce n'est pas la mienne, il doit rester encore une grosse demi-heure de toute façon.

Je pense que le terme Lover dans le titre de l'émission a été mal choisi car pour le moment, je vois bien plus de sexe dans le nid que d'amour, ou de pseudo amour. Non pas que ça me dérange, chacun fait ce qu'il veut et d'ailleurs je n'ai pas non plus été innocente de ce côté là. Mais de là à s'envoyer en l'air n'importe où, non quand même pas. Alors quand Candace me fait sa proposition, je suis un peu surprise et je crois qu'en fait, malgré qu'elle soit superbe et que je l'apprécie, non je ne serais jamais vraiment partante pour coucher avec elle. Le problème est certainement là, je l'apprécie et d'une certaine manière que non, je n'envisage pas le sexe comme étant une suite logique dans notre relation. Alors non, je ne réponds pas à son offre ni à cette indifférence qu'elle semble vouloir mettre entre nous pour me faire réagir. Je ne réagirais pas, pas de la manière dont elle l'attend et je lui dit, amusée. Elle me répond, laissant le mystère planer sur la réelle motivation de ce comportement ce qui me fait sourire légèrement. Je ne réponds pas, préférant passer à autre chose et reportant mon attention sur ce dossier qu'elle ne quitte plus. « Ah ! Alors t'aurais été de ceux que j'aime bien alors. » Les avocats, les flics, tous ces gens n'avaient jamais vraiment été mes amis en fait. Mais il y a toujours des limites et même si je n'ai jamais été un ange, je ne suis pas pour autant pour toutes les formes du mal qui peuvent exister sur cette Terre. « Et c'est quoi ton profil type de client ? » Je suis curieuse, j'y peux rien...

Finalement, elle ne relève pas. Finalement elle fait comme si je n'avais jamais fait effet d'une quelconque relation entre elle et moi. Je ne suis pas vexée, ni chagriné, parce que cette proposition relevait plus d'un jeu. J'étais curieuse de savoir jusque où elle allait aller. Pas bien loin visiblement. Mais peu importe. La conversation dérive. Sur mon travail, mon dossier confidentiel que je n'aurais sans doute pas dû emporter avec moi. Parce que ce n'est pas conventionnel, parce que je suis soumise au secret professionnel. Elle m'interroge, me demande des précisions que je pensais pourtant ennuyeuse mais qui ne manquent pas déclencher une relation positive. « Pourquoi ? T'es une délinquante c'est ça ? Les gens bien sous tout rapports ont généralement du mal avec moi pourtant. » Je ne suis pas souvent complimenté dans la profession, mes choix sont souvent remis en causes, mes manières de procéder aussi, mais surtout mes clients. Et c'est là où elle veut en vient par la suite. « Criminels, trafiquants, mafieux, hommes d'affaires véreux, entre autres choses... » Je ne fais pas d’acquit de conscience comme la plupart de mes collègues. Je l'observe, et hausse les épaules. « Je fais toujours partie de ceux que tu aimes bien ? » Je ne suis pas si certaines, les gens me prenne souvent pour une garce sans coeur, je me contente de faire mon travail, il est souvent mal perçu. Je ne suis pas les gens que je défends, je n'approuve pas forcément non plus les crimes qu'ils commettent. Je fais valoir leur droits en tant qu'individu. C'est la base même du métier d'avocat.