Est-ce que vous avez déjà eu droit à un réveil en pleine nuit avec l’impression d’avoir dormi une quinzaine d’heures et d’être en pleine forme ? Ces derniers temps ça m’arrivait souvent et de plus en plus tôt. Il était à peine trois heures du matin et voilà que je me retrouvais les yeux grands ouvertes dans la pénombre à me demander ce que je pouvais bien faire pour tomber de fatigue avant que le soleil matinal ne vienne réveiller tous les autres. Pendant un moment j’avais tourné dans mon lit, observé Maverick qui dormait comme un bébé, la chance qu’il avait lui, pendant un temps je m’étais demandée si je n’allais pas lui mettre un petit coup en faisant comme s’il ronflait trop fort pour qu’il soit lui aussi réveillé et me tienne compagnie mais je m’étais ravisée au dernier moment. Oh et puis merde, SUS au sommeil. Je me relevais tranquillement prenant le temps d’enfiler un sarouel panthère avec un top. Puisque je ne dormais pas j’étais motivée pour aller faire un tour dans une pièce que je fuyais depuis le début n’étant pas trop du genre à me donner en spectacle quoique… Débarquant dans la salle de jeux je remarquais que personne n’était dans le coin, allumant la lumière j’hésitais longuement avant de flancher sur un jeu de danse, j’aimais me dépenser en dansant, je m’en sortais d’ailleurs plutôt remarquablement, on m’avait approché deux fois dans ma jeunesse pour être danseuse sur un tournage, ça avait été intéressant mais je n’étais jamais allée jusqu’au bout. Choisissant une chanson énergétique je l’écoutais une première fois en intégralité regardant la chorégraphie pour avoir une idée de ce que je devais faire, une fois la chanson terminée je la redémarrais tout en suivant la chorégraphie que je reproduisais très bien. C’était insoupçonné chez moi mais j’adorais la danse.

Emilien avait décidé une chose. Il vivrait la nuit. Vivre la nuit, oui. Il était devenu cet oiseau nocturne. La nuit, tout était beau, mystérieux, mystique. Oui, la nuit mystifiait tout. La nuit était magique. Alors comme chaque nuit où il se réveillait en sursaut pour une raison dont il ignorait toujours, il se levait. Marchant dans le noir majestueux. La nuit était devenue son royaume, il fallait croire. Il avait donc sorti de son lit, faisant bien attention de ne pas réveiller sa chère et tendre, Emmeline. Il s’était contenté d’enfiler un tee-shirt, après tout, tout le monde dormait. Personne ne jugerait pas sa tenue peu convenable, à savoir un caleçon et un tee-shirt. Ils dormaient tous, comment pourraient-ils s’amuser à jouer les juges de la brigade du style ? Emilien se baladait donc à travers le chalet, sa peluche ‘chaton’ dans ses bras. On ne sait jamais, après tout, Diana lui avait bien dit qu’elle voulait lui voler. Pas très rassurant comme confession. S’il y avait bien une chose qui lui était précieuse ici, c’était bel et bien sa peluche. Peluche qui n’avait rien d’une peluche à ses yeux. Emilien se baladait donc. Trainant des pieds sur le parquet. C’était silencieux. C’était bien. Silencieux ? Emilien fit quelques pas discrets en direction de la salle de jeu. Non, ce n’était décidemment pas si silencieux que cela cette nuit. Un bruit bourdonnant semblait émaner de la salle de jeu. Sûrement une personne qui avait dû oublier d’éteindre sa console de jeu. Le jeune garçon décida s’approcher, histoire d’en savoir un peu plus sur cette affaire. Du bruit, de la musique semblerait-il. Emilien décida d’ouvrir la porte. En plus d’oublier d’éteindre la console de jeu, le joueur avait oublié d’éteindre la lumière… Heureusement que ce n’était pas eux qui payaient l’électricité ici, dit-donc. Il pénétra dans la pièce, avec la ferme idée d’éteindre tout ce boucan. Oui, parce que vu l’heure, ce n’était pas une mélodie, une musique, c’était un boucan sonore. Voilà tout. Il lâcha un petit soupir avant de s’arrêter… Il fronça les sourcils légèrement, en se tournant en direction de… Alecia. Mais qu’est-ce qu’elle faisait là ? « Euh… Tu sais que les gens normalement constitués dorment à cette heure-ci de la nuit ? » lâcha-t-il.

Ne pas dormir la nuit c’était quelque chose qui ne me plaisait pas, être un oiseau de nuit ne m’intéressait pas, je le faisais déjà bien trop souvent au travail. Tout le monde pensait qu’être ambulancière simplifiait la tâche par rapport aux chirurgiens et aux pompiers mais mon cul, nous avions un niveau supérieur d’études même si on ne suivait pas le même programme et la même formation que pour les autres étudiants de médecine à partir d’un certain cycle, nous bossions des heures et des heures, je m’étais arrêtée de les compter après quarante mais j’en faisais une bonne dizaine de plus sans jamais me plaindre, j’aimais sauver la vie des gens, c’était mon adrénaline personnelle et je ne me plaindrais donc pas là-dessus, néanmoins passer quelques nuits sans être interrompue était impossible, je n’avais que très rarement si ce n’est jamais passé une seule soirée sans avoir été appelée pour venir en aide à quelqu’un. Il y avait toujours un accident quelque part, un feu qui nécessitait d’apporter des soins aux victimes et les faits divers dans lesquels nous étions parfois même englobés, je m’étais par exemple déjà retrouvée face à un tueur en séries et je peux vous dire que ma vie entière avait défilé devant moi. Cette nuit je ne trouvais pas le sommeil, à croire que j’étais à présent réglée pour ne plus être capable de dormir sept ou huit heures d’une traite sans avoir besoin de faire une pause, ironique quand on y pense bien mais je me faisais rapidement à cette idée. C’était l’occasion de faire de nouvelles choses et je me frottais donc à ce jeu qui avait l’air sympathique. Je dansais d’ailleurs plutôt bien en temps normal et le jeu allait également dans ce sens, ma notation était élevée et dans le mouvement je n’avais pas entendu Emilien me rejoindre. « Euh… Tu sais que les gens normalement constitués dorment à cette heure-ci de la nuit ? » Je me retournais sursautant en entendant sa voix, merde mon cœur était sur le point de s’arrêter à cause de ses conneries. « Tu m’as fait peur mec… Ouais je sais, mais je ne suis pas normalement constituée ! » Je souriais amusée fière de ma connerie.

Il la regarda quelques brèves secondes. La voyant se tortiller dans tous les sens. Bon, les gens normaux appellent cela ‘danser’. Il valait peut-être mieux qu’elle danse plutôt qu’elle chante, vu l’heure tardive. Elle aurait sûrement réveillé tout le chalet. Non pas qu’Emilien pensait qu’elle chantait mal, ni faux, ou pire encore comme une casserole. Il n’en savait rien. Il ne put s’empêcher de prendre la parole et de lui faire remarquer qu’il était l’heure d’être au lit. Même si lui aussi n’était couché. Oui, il n’avait pas envie. Son corps refusait d’être allongé, ses paupières refusaient de se fermer. Emilien face à son solide corps. Le match était perdu d’avance pour le petit gars. Alecia sursauta. Sûrement parce qu’elle ne s’attendait pas à ce que quelqu’un la rejoigne à cette heure là de la nuit. Et surtout que quelqu’un la surprenne en train de danser devant un écran de télévision… Quel drôle de jeu n’empêche. Elle ne perdit pas une seconde pour lui faire remarquer. « Tu m’as fait peur mec… ». Aussitôt, il s’excusa. Après tout, ce n’était pas son attention première de lui faire. Il ne voulait pas lui faire, il voulait juste lui faire remarquer son manque de conformisme nocturne. Vous voyez, non ? « Ouais je sais, mais je ne suis pas normalement constituée ! ». Emilien arqua un léger sourcil. Que voulait-elle dire par là ? Ne pas être normalement constitué, qu’est-ce que ça voulait dire ça ? Avait-elle un troisième bras caché quelque part ? Une malformation quelconque physique ? Ou bien un problème cognitif ? Qu’est-ce qu’il en savait. « Tu vas t’épuisé en bougeant autant… » lui fit-il remarquer. En y réfléchissant un peu plus, c’était peut-être son attention première. Danser, bouger, pour se fatiguer et ainsi pouvoir dormir. Ca tenait la route cette argumentation. « Puis, tu n’trouves pas ça bizarre de devoir danser devant un écran ? C’est nul comme principe, moi, je trouve… ». On dansait sur une piste de danse, on dansait sur de la musique, on dansait avec un partenaire. Mais en aucun cas, on dansait seul devant un écran. C’était étrange comme principe quand même. Enfin, Emilien ne pouvait pas s’empêcher de devoir lui faire partager le fond de sa pensée. Tant qu’elle ne lui proposait de ‘jouer’ avec lui avec ce truc de danser. Il espérait que cette idée-ci ne vienne à l’esprit d’Alecia. Non, non. Lui, il ne voulait pas danser.

Si je m’étais intéressée à cette salle alors qu’il était très tard ce n’était pas pour rien, je savais que la pièce était insonorisée, ainsi, à moins d’avoir laissé la porte ouverte personne ne pourrait m’entendre faire du bruit. Oh et puis j’avais envie de me défouler afin d’être plus apte à me rendormir ou, dans le cas contraire uniquement à faire un peu de sport. Dans ma jeunesse je me souviens avoir organisé énormément d’évènements au lycée, tout le monde me respectait et j’étais très populaire à cause du garçon avec lequel je sortais, l’un des sportifs qui avait un avenir radieux, celui qui, quelques mois plus tard m’avait mise enceinte et abandonnée à mon triste sort alors que mes parents en avaient fait autant juste avant, ma vie de famille était un désastre je vous l’accorde mais c’est ce qui m’avait permis de devenir la personne que je suis maintenant. Pour en revenir au lycée, il m’était arrivé d’organiser des comédies musicales avec les deux professeurs de théâtre en m’occupant de la partie musicale à chorégraphier, le rendu avait été au-delà de leurs espérances et je m’étais amusée comme une folle à mélanger les genres pour obtenir un résultat qui surprendrait ceux qui viendraient voir la comédie. Au final je ne m’étais jamais vraiment arrêtée de danser depuis, je le faisais juste toute seule à la maison ou alors dans des clubs de temps en temps avec mes copines. Reprenant mon inspiration après avoir été sur le point de claquer au milieu de la pièce parce qu’Emilien s’était ramené sans faire de bruit pour me signaler que quelqu’un entrait je lui signalais que lui non plus ne dormait pas à cette heure-là, il ne pouvait donc rien dire à mon sujet. Je ne disais pas cela méchamment cela dit, je n’étais jamais vraiment vexante avec les personnes que j’appréciais dans l’aventure. « Tu vas t’épuisé en bougeant autant… » Je le regardais en souriant, est-ce qu’il s’inquiétait du fait que je puisse être épuisée ? Trop mignon de sa part. « Peut-être que je pourrais ENFIN dormir alors ! » Je n’aimais pas particulièrement danser devant ma télévision comme une conne mais avouons-le, quelques-unes des chorégraphies proposées dans ce genre de jeux pouvaient être à un niveau quasi professionnel et j’aimais beaucoup les exécuter avec plus ou moins de réussite. « Puis, tu n’trouves pas ça bizarre de devoir danser devant un écran ? C’est nul comme principe, moi, je trouve… » Il n’était surement pas le seul, mettant pause je me retournais un sourire qui trahissait toutes mes intentions étirant mon visage. « Tu danses avec moi ? » Je poursuivais avec un regard de chien battu, il ne pouvait pas me dire non.

C’était donc pour cela. Pour s’épuiser et pouvoir dormir, ensuite. Il y avait quand même d’autres façons pour trouver sommeil. Comme lire, ou regarder un film. Peut-être qu’elle n’aimait pas cela, Alecia. Il ne savait pas. Enfin qu’importe, ce jeu était quand même stupide et il ne manquait pas une seconde pour le lui faire remarquer. Ca n’avait rien de méchant, il voulait juste partager son point de vue. Puis il était certain qu’il ne devait pas être le seul à penser ça. Danser devant sa télé, comme si tu pouvais danser un slow avec ta télévision, ou une salsa. N’importe quoi. Alecia mit alors son jeu sur pause. Ah, peut-être qu’elle pensait ça, elle aussi. Et elle allait donc terminer sa partie et faire un autre jeu un peu plus intellectuel, et moins idiot. Il put alors déceler un sourire sur le visage de la femme. Elle finit alors par lui demander s’il voulait danser avec elle. « Euh… ouais… » lâcha-t-il hésitant. Il n’avait même pas pris le temps de réfléchir à vrai dire. C’était sorti comme ça. Tout naturellement. « Attends… tu veux que joue à ton jeu là ? C’est non. » finit-il par lui dire, après s’être repris. Puis, il avança vers le meuble où trônait dessus l’écran de télévision. « Enfin… si tu veux, on peut se trouver un autre jeu. ».

Lorsque je n’arrivais pas à dormir je ne cherchais pas à tout prix quelque chose qui allait m’emmerder au point que je serais forcée de trouver le sommeil, non ça ne marchait pas comme ça puisque j’aimais plus que tout m’amuser tout en combattant la fatigue. Okay je ne suis probablement pas une fille normale mais c’est comme ça que je fonctionnais, cette nuit je m’étais longuement interrogée sur ce que j’allais faire et finalement ce jeu de danse m’était apparu comme un bon moyen de bouger un peu tout en prenant du bon temps. Bon, le fait d’être toute seule faisait que le jeu perdait tout son charme je dois l’admettre, lorsque nous étions six ou sept à danser devant notre télévision c’était tout de même plus intéressant mais là, non, toute seule je m’embêtais presque trop. Emilien apparaissait ici comme la personne que j’attendais, un signe du destin et je n’hésitais pas à lui demander de venir danser avec moi, je craignais sa réponse lui qui n’était pas vraiment branché par ce genre d’activités mais on ne sait jamais. « Euh… ouais… » Il venait vraiment de dire oui ? Je n’allais pas attendre plus de temps histoire qu’il ne revienne pas subitement sur sa décision. « Attends… tu veux que joue à ton jeu là ? C’est non. » Une moue boudeuse remplaçait mon sourire, alors il n’allait pas jouer avec moi ? Dommage j’allais continuer à m’ennuyer en cherchant désespéramment un sommeil qui ne pointerait probablement pas le bout de son nez comme à chaque fois. « Enfin… si tu veux, on peut se trouver un autre jeu. » Bonne idée, j’éteignais le jeu prête à voir ce qu’il avait à me proposer.

La réponse d’Emilien ne semblait pas être celle attendue par Alecia, à en croire sa mine boudeuse. Evidemment si elle lui avait proposé ça, c’était parce qu’elle s’attendait à ce qu’Emilien accepte. Pourtant, elle connaissait sa position au sujet de ce jeu. Afin de ne pas passer pour le vilain qui avait refusé sèchement son invitation, il lui proposa de jouer à un autre jeu. Oui, après tout, un autre jeu, ça pouvait être aussi sympathique et un peu moins idiot. Finalement, Alecia arrêta le jeu, sans un mot. Un air de surprise vint alors se peindre sur le visage du jeune garçon. Il regarda en haut, puis en bas, ayant cru un instant avoir fait quelque chose de mal. Pourtant, ce n’était pas le cas. Il n’avait rien fait de mal, n’est-ce pas ? Non, évidemment. Emilien ne savait pas faire quelque chose de mal, de toute façon. « Bon… » lâcha-t-il dans un timide souffle. Il prit son courage à deux mains et avança vers le placard, il trouverait bien un jeu. Un jeu qu’il trouverait à son goût. Ou peut-être pas, en fait. Il posa au sol, sa petite peluche qui lui tenait compagnie, et se mit à regarder les nombreux jeux. Les très nombreux jeux. « Hey… Professeur Layton, t’en dis quoi ? C’est sympa comme jeu » lui demanda-t-il, tout en se tournant vers elle avec le jeu dans les mains. Puis il se releva, faisant mine de réfléchir. « Autrement… on pourra faire un truc encore plus dingue qu’un fichu jeu vidéo. Genre un strip-poker, un strip-monopoly, un strip-quelque chose… on ferra le buzz avec ça ! En plus, ce genre de jeu, ça doit être ton truc ? ». Il prit alors un air quelque peu scrupuleux, dessinant un léger sourire. Evidemment, Emilien n’était pas sérieux dans cette nouvelle proposition de jeu. Enfin… Alecia ne l’avait pas pris au sérieux de toute façon, n’est-ce pas ?