C'était peut être un peu cliché pour quelqu'un qui vivait du Cinéma, mais s'il y avait bien une chose qui était véritablement susceptible de détendre Sully, c'était de visionner un bon vieux classique. Et justement, après le prime de la veille au matin, il avait bien besoin de se détendre un tantinet, de prendre un peu de temps pour penser à autre chose qu'à la nomination à laquelle il avait réchappé, ainsi qu'à celle dont Lena avait gentiment écopé grâce à ces fichus traîtres qui lui apparaissaient de plus en plus comme un petit groupe de lâches. Donc oui, il n'avait pas nécessairement envie de penser à tout ça dans l'immédiat, et c'est justement dans l'optique de se changer quelques peu les idées qu'il s'était rendu dans le salon, où se trouvait une collection de films qu'il avait maintes fois admiré et qu'il avait envie d'exploiter davantage. Car oui, c'est définitivement dans l'optique de visionner l'un d'eux qu'il était entré ici, pensant qu'il n'y aurait pas grand monde à cette heure-ci, et qu'ainsi il ne dérangerait personne. Ce soir, la plupart des candidats profitaient du fait qu'il fasse encore relativement bon dehors pour s'y balader de manière nocturne, et il est vrai qu'il ne partait pas tellement du principe que l'un d'eux ait pu avoir la même idée que lui. Pour autant, et alors qu'il s'était approché de l'ensemble des films pour en sélectionner un qu'il n'avait plus vu depuis déjà quelques années mais qui restait à ses yeux un incontournable, il ne tarda pas à entendre des pas se rapprocher de lui, car quelqu'un venait manifestement d'entrer dans le salon. Il se retourna alors, et accueillit Enoch avec le sourire, loin de se formaliser de sa présence, autant parce qu'il n'avait en soit rien contre le fait de ne pas être seul, que parce qu'il le trouvait sympathique dans son genre. Il se redressa donc, un dvd à la main, et fit quelques pas vers son camarade. « J'avais l'intention de me mettre un film, j'espère que ça ne te dérange pas » qu'il lui adressa alors, espérant effectivement que ce programme ne l'empêcherait pas de faire ce qu'il était peut être venu faire ici. Mais Sully en vint bientôt à penser que puisqu'Enoch était maintenant présent, il serait un peu bête qu'il reparte alors qu'ils pourraient passer un plaisant moment devant un grand De Palma. « Tu veux te joindre à moi ? J'ai opté pour Les Incorruptibles, je ne sais pas si ça te tente ? » Si ça n'était pas le cas, que ce film ne lui disait rien mais qu'en soit l'invitation le tentait bien, il pourrait tout à fait opter pour autre chose. Il n'était pas facile de deviner les goûts des autres, mais supposons que les hommes avaient tous un peu les mêmes, en soit. « Je peux même aller chercher des bières, si tu veux. » Oui, c'était un peu l'argument clé, celui qui était censé le convaincre pour de bon. Non pas que Sully se sente nécessairement seul, mais il trouvait plus plaisant de visionner un film à deux. A ses yeux, c'était aussi un moment de partage.

C'est l'après-midi. Je me vautre à moitié sur le matelas du lit, en soupirant. Je ne sais pas quoi faire. Je reste allongé en ventre en attente d'un signe, d'un appel, peu importe. On peut lire de la détresse sur mon visage ou de l'ennui surtout. J'ai envie de m'occuper, mais rien ne me vient. Je tourne rond continuellement. J'en ai marre. Mon visage se colle aux draps. Je ne bouge plus. Je somnole, je finis par sombrer. Ce n'est que deux heures plus tard que je me réveille en sursaut. Je me suis endormi. Je regarde mon réveil. Et longtemps, en plus. Cela m'a complètement assommé, je crois. Mon regard bleuté parcoure les alentours, puis je cache ma tête sous l'oreiller. Je suis en train de me se laisser aller. C'est navrant. Je me lève, je ronchonne jusqu'à la sortie. Je n'ai pas faim. J'ai envie de me décompresser un peu. Je suis un peu sur les nerfs là. Je me torture pour rien au final. Je vais bien trouver une distraction quelconque. Les livres, j'ai déjà donné. Je crois même que je vais faire une overdose. Je ne compte plus le nombre de bouquins que j'ai avalé depuis mon entrée. Je rattrape mon retard. J'en viens presque à être dégoûté. Non, il me faut un nouveau passe-temps. Tiens, regarder un film ... Cela me paraît une bonne idée ça. Je sais où aller pour se fournir des films. Comme ça, je pourrai étoffer ma culture cinématographique qui est bien pauvre comparé à la plupart de son entourage. Je ne connais que les vieux films et encore. J'arrive dans la salle de réunion qui fait office de salon. J'aperçois Sully de dos, un DVD à la main. Il se tourne vers moi, un sourire accueillant aux lèvres. Il est sur le point de regarder un film et il me demande si cela le dérangeait. Je bouge ma tête à droite et à gauche pour lui signifier que non. C'est peut-être moi qui le dérange. Il a envie d'être seul, je n'en sais rien. Je comprendrais en tout cas. Apparemment, ma présence ne le gêne pas du tout. D'ailleurs, il me propose de se joindre à lui. Il m'incite de rester avec lui. Je réplique avec entrain : - Avec grand plaisir. De toute façon, je n'ai rien d'autre chose à faire à par de errer dans chaque pièce de la maison comme une âme en peine. Il a choisi les Incorruptibles de De Palma. Je lui souris du plus bel. Très bon choix. J'adore ce film, en plus. Je ne m'en lasse pas de le re-regarder à chaque fois qu'il passe à la télévision ou au cinéma du coin. Que des grands acteurs dedans. Un casting de rêve. Il me propose de la bière, en plus. Je ne peux répondre que favorablement à sa suggestion. - Je ne dirai pas non pour une bière. La bière, je ne peux pas m'en passer. La seule boisson alcoolisée que je me permets de prendre. J'ai l'alcool mauvais, il paraît. Depuis que je sais cela, j'évite de boire du whisky ou encore du gin. Je ne suis un très bon buveur.

Kevin Costner était l'un de ses acteurs favoris, et ce film l'un de ceux qu'il avait le plus vus, probablement. Pourtant, son dernier visionnage remontait à quelques temps déjà, et c'est justement pour ça que Sully aspirait à revoir Les Incorruptibles, aujourd'hui, dans ce salon. A la base, il n'était pas parti avec l'idée de visionner ce film en particulier, vu qu'il n'aurait de toute façon pas pu être certain qu'il était disponible parmi la collection de dvds de la pièce. Ce fut simplement un heureux hasard qu'il soit tombé sur ce film-ci, et qu'il se soit rappelé combien il avait aimé le voir, par le passé. Et ce qui ne fut pas moins agréable, ce fut de noter la présence d'Enoch, avec qui il n'avait jusqu'ici que bien peu parlé mais qui lui semblait être quelqu'un de bien. Il avait bien noté son rapprochement avec Avalon, et pour tout dire, il s'en réjouissait pleinement. Il prit en tout cas la peine de s'inquiéter du fait que son camarade puisse aspirer à un peu de tranquillité, car peut être était-il entré dans ce salon pour y être au calme et n'aimerait-il pas que Sully y mette un film qui, en plus, n'était pas tellement des moins bruyants. L'américain pourrait comprendre qu'il soit préférable pour lui de revenir un peu plus tard et il est certain que s'il voyait qu'Enoch était dérangé par sa présence, il lui laisserait le salon sans problème. Sauf que non, manifestement, ce programme ne l'embêtait pas. Ainsi donc, Sully eut plutôt une bonne idée lorsqu'il lui proposa de se joindre à lui pour visionner le fameux film de De Palma. Mais là encore, il ne put que s'interroger sur le fait que ça puisse ne pas être un film qu'Enoch aurait envie de voir - ou revoir - et préféra lui en préciser le titre, histoire de voir si c'était susceptible de le tenter. Et manifestement, il n'émit aucune objection, soit parce qu'il n'était décidément pas un type contrariant - il avait l'air d'être facile à vivre, au contraire - soit parce qu'il avait déjà eu l'occasion de voir ce film, qu'il lui avait plu, et que ça ne le dérangeait ainsi pas de le revoir. En tous les cas, c'est avec un sourire plus large que Sully accueillit son acceptation, puis qu'il lui proposa d'aller leur chercher des bières. Là encore, Enoch accepta. Sully s'éclipsa donc un court instant, partit dans le réfectoire, puis revint l'instant après avec deux bières, tendant l'une d'elles à son camarade. « Elles sont bien fraiches » qu'il souffla, en souriant, tâchant alors de faire démarrer le film, mais ayant éventuellement un peu plus de mal que prévu. Sully était peut être cinéaste, mais il n'en maitrisait pas parfaitement les nouvelles technologies pour autant. « Ce serait bien, quand même, que j'arrive à mettre le film en route » qu'il fit, préférant assurément en rire, même s'il se trouvait franchement nase, pour le coup. « C'est moi qui suis définitivement nul ou cette télécommande est ... » Il marqua une pause, puis poussa un soupire, le temps de réaliser son erreur. «  ... à l'envers. » Il tâcha alors de pointer le lecteur avec celle-ci, et bizarrement ça marchait déjà beaucoup mieux. Penaud, il s'assit sur le canapé et invita Enoch à faire de même. « Bien. Je vais donc essayer de m’étrangler avec ma bière, je te souhaite un bon film, hm. » Oui parce qu'il se sentait vraiment, vraiment très con.

Si je m'en souviens bien, il y a Sean Connery dedans. Un des plus grands acteurs écossais du monde entier. Je suis un tantinet subjectif parce qu'il est écossais comme moi. Il est notre fierté nationale. Il incarne parfaitement cette classe à la britannique. Il est charismatique, talentueux. Il est incontestablement un des meilleurs acteurs du Royaume-Uni et du monde. Rien que pour avoir incarné James Bond à l'écran, sa renommée est sans précédent. Les Incorruptibles ne sera Les Incorruptibles, s'il n'y avait pas en tête d'affiche Kevin Costner et Sean Connery. Deux poids lourds du cinéma. Je crois même que c'est un de mes films préférés. Je n'ai pas vu beaucoup de films dans ma vie. Ma culture cinématographique est quasi-inexistante. Je le déplore d'ailleurs. Avant, je n'avais pas le temps de m'y intéresser vraiment. Le seul cinéma du coin se trouve à des kilomètres de chez moi. Je n'avais pas le courage de faire tout le trajet pour aller voir un film. Je n'y voyais aucun intérêt. Maintenant que j'ai assez de temps libre, je peux en profiter pour visionner le plus de films possible. Ce soir, je n'avais pas grand chose à faire. J'ai flâné ça et là à la recherche d'une quelconque occupation. J'arrive dans la salle de réunion et je tombe sur Sully qui s'apprêter à regarder les Incorruptibles. Il m'a gentiment proposé de le visionner ensemble. Son invitation me ravit. Surtout qu'on ne s'est plus trop vu, ces derniers temps. Je le trouve toujours aussi sympathique. Comme au début, lors de notre première rencontre. Il est flegmatique, calme et réfléchi. Il est un gars bien. Il est tellement gentil qu'il me propose de boire une bière. Je ne refuse jamais une petite bière. Il s'en va les chercher. Je l'attends ici et prends mes aises. Je patiente comme je peux. Tiens, le plafond a l'air intéressant vu d'en bas. Il revient dans le salon, les deux bouteilles de bières à la main. Bien fraîches, en plus. Que demander de plus ? Il me tends une bière que je m'empresse d'empoigner. Je lui rends son sourire. J'ouvre ma bière à main nue et garde la capsule au fond de ma poche. C'est une bière irlandaise. Je goûte. Pas mauvais du tout. Je regarde Sully en train d'essayer de faire marcher le lecteur DVD. Je remarque qu'il est aussi perdu que moi quand cela concerne les nouvelles technologies. Cela me rassure dans un certain sens. Je devrais peut-être l'aider tiens. Le hic, c'est ce que je ne sais pas comment ces machins fonctionnent. Je ne suis d'aucune utilité. Mon camarade a la télécommande entre ses mains. Il appuie sur un des boutons, mais rien ne marche. Je remarque en même temps que lui qu'il le tenait dans le mauvais sens. J'étouffe un rire amusé. Sans doute parce que j'aurai été aussi maladroit que lui. C'est bon. Il va s'asseoir sur le canapé, je l'imite. Il dit qu'il va essayer de s'étrangler avec sa bière. Il a honte, je crois. Je ris légèrement. Je pose une main sur son épaule pour le rassurer un peu. Je vois qu'il a du mal à ouvrir sa bière. - Attends, je vais t'aider. On échange nos bouteilles. J'ouvre la sienne, je la lui tends et reprends la mienne. Je lui souris avant de reprendre une gorgée de cet élixir. Il paraît qu'il est cinéaste. Je l'ai entendu dire de Avalon. Je me demande quel genre de film il fait. - Quel est ton personnage préféré dans ce film ? Je tente de converser avec lui, en même temps qu'on regarde le film. J'espère ne pas trop le gêner. Comme j'ai déjà vu ce film plusieurs fois, je le connais presque par cœur. Le film débute. Je ne suis pas doué pour débuter une conversation. J'essaie de faire des efforts. On est déjà quinze minutes du film. - Alors, ça se passe bien avec Ismène ? On a tous vu que ces deux-là se sont rapprochés la semaine dernière. Je suis sincèrement heureux pour eux. J'apprécie énormément Ismène. Une vraie perle. Il est chanceux parce que cette fille est adorable et mignonne. Je souhaite que cela marche entre eux. Je ne vois pas pourquoi cela ne fonctionnerait pas. Je croise les doigts pour eux.

Oui, Sully n'avait pas hésité bien longtemps à proposer à Enoch de se joindre à lui pour visionner un film que beaucoup avaient du voir, et qui plaisait généralement sans mal, tant c'était un film bien fichu, porté par le talent de son réalisateur, mais aussi de son casting, bien évidemment. Et c'est avec plaisir qu'il accueillit le fait que son camarade accepte l'invitation et qu'il proposa à ce dernier d'aller leur chercher des bières, ce qui semblait tout indiqué dans une situation comme celle-ci, et partant du principe que peu de gens pouvaient prétendre ne pas aimer la bière. Il partit alors leur en chercher, puis revint avec de quoi se désaltérer. Mais alors qu'il voulut lancer le film, voilà qu'il rencontra quelques soucis avec le lecteur dvd. Lui, clairement, ça n'était pas un matériel qu'il avait l'habitude d'utiliser. Les films, il les visionnait le plus souvent directement sur son ordinateur, pas parce qu'il les téléchargeait - il en serait bien incapable, jugeant ça immoral - mais parce qu'il quittait rarement la pièce où il travaillait, tout simplement. Alors oui, cette télécommande pourrait très vite lui prendre le chou, étant donné qu'il avait véritablement l'impression de débarquer d'une autre époque pour n'être même pas fichu de mettre un dvd en route. Disons qu'il avait surtout l'impression de passer pour un bel imbécile, dans l'immédiat. Et naturellement, l'humiliation fut suprême lorsqu'il réalisa, après s'être excité sur cette pauvre télécommande pendant quelques instants, qu'il la tenait simplement à l'envers. Car oui, elle fut indéniablement plus coopérative dans le bon sens, hm. Ainsi, il alla s’asseoir, terriblement gêné, car n'ayant assurément pas besoin qu'on lui confirme qu'il était parfois complètement dans la lune, et pas franchement dégourdi. Donc oui, peut être tenterait-il de s'étrangler avec sa bière. Une bière qu'Enoch lui ouvrit gentiment, après avoir déposé une main sur son épaule. Au moins, il n'était pas parti dans un fou rire qui, assurément, aurait été pénible à supporter. « Merci, j'aurais été capable de l'ouvrir en la tenant à l'envers elle aussi et … c'aurait été assez problématique, disons » qu'il souffla alors, en riant légèrement, assez reconnaissant à Enoch de ne pas tellement s'être fichu de sa tronche, contrairement à ce qu'aurait pu faire un certain Valeri, par exemple. Son camarade lui demanda alors quel était son personnage préféré, dans ce film s'entend, et Sully n'eut à vrai dire pas besoin d'un long moment de réflexion pour livrer sa réponse. « Eliot Ness, incontestablement. Pour l'interprétation magistrale de Costner, que je trouve très crédible en chef de cette équipe d'hommes intègres, autant que pour l'intérêt que je trouve au personnage en lui-même, très popularisé dans les films et séries de ces dernières décennies et que ce film rend tout simplement fascinant d'après moi. » Et là, il venait très probablement d'ennuyer son camarade, car il aurait peut être pu répondre plus simplement, d'une façon plus brève du moins. « C'est aussi celui que tu préfères, ou ça n'est pas le plus intéressant à tes yeux ? » Autant lui retourner la question, pour avoir son point de vue sur la chose et ainsi pleinement discuter. Lui, discuter pendant un film ne le dérangeait de toute façon pas, vu qu'il l'avait déjà vu par le passé. Et voilà qu'au bout de quelques instants, Enoch lui posa une nouvelle question, mais cette fois-ci concernant Ismène. Ah. « Oui, je … je me sens bien quand je suis avec elle. C'est une fille géniale et passer du temps avec elle est toujours un grand plaisir. » Il se stoppa pourtant un instant, et soupira doucement. « J'ai simplement peur qu'elle finisse par me trouver ennuyeux. Tout le monde finit toujours par me trouver ennuyeux. Et si j'apprécie le fait que nos tempéraments soient si différents, j'ai peur qu'au final elle me tienne rigueur d'être ce que je suis, elle aussi. »  Ses yeux se reportèrent finalement sur l'écran, car c'était la première fois qu'il se confiait au sujet du fait qu'il craigne de perdre Ismène comme il avait perdu une femme, par le passé. Et la dernière chose qu'il voulait, en plus, c'était embêter Enoch avec ses préoccupations, hm.

La technologie et moi, cela fait deux. Je n'ai jamais su faire fonctionner un caméscope. Avec un lecteur DVD, cela aurait été pire. Je ne peux que compatir avec Sully et sa détresse face à une telle machine. Je ne pense pas que j'aurais fait mieux que lui, en tout cas. Tout ce qui est nouvelles technologies, cela me dépasse complètement. Je suis en retard sur mon temps. J'en ai conscience, mais je ne vois pas l'utilité de tout ce matériel high-tech. Je n'en ai pas besoin dans mon travail. Avec tous ces moyens de communication, je suis largué. Je crois même que mon portable est passé de mode. Sully parvient à l'allumer et à mettre le lecteur en marche en remettant la télécommande dans le bon sens, cette fois-ci. On s'assoit tranquillement sur le canapé. Je vois qu'il est abattu. J'ouvre sa bière pour lui. Il me remercie, encore gêné par la situation. Il n'a pas avoir honte. Le film commence. Je connais le début par coeur. Je n'ai pas besoin de regarder l'écran pour suivre l'histoire. Je l'ai déjà vu maintes fois ce film. Je préfère m'intéresser un peu plus à mon camarade ici présent. Je ne moque jamais des autres. Moi-même, je suis parfois étourdi. Cela m'a joué des tours quand j'étais plus jeune. Pour lui faire oublier cette petite humiliation, je lui change les idées en lui demandant quel personnage il préférait dans Les Incorruptibles. Il me répond que c'est Eliot Ness, le personnage principal et le chef de la bande. Il faut avouer que c'est un leader charismatique, l'archétype du héros américain. En écoutant Sully parler, on sent qu'il est passionné par le cinéma. Il n'est pas cinéaste pour rien. Je trouve son propos intéressant et précis. Il me retourne la question. Je hausse les épaules, puis répond : - Au début, mon personnage préféré était Jim Malone. Je me voyais beaucoup en ce personnage. Un policier droit, à cheval sur ses principes. Je trouve qu'il incarne une forme de sagesse. Mais plus je regarde ce film, plus que je commence réellement à apprécier Eliot Ness. Un vrai héros à la américaine. Je suis toujours épaté par la prestation de Costner. Tout en finesse, qui plus est. Quant à Sean Connery, il a tout simplement la  classe dans ce film. Je suis plus dans le ressenti que dans une certaine forme d'objectivité. Mon analyse est moins développé que le sien, mais je suis content de partager mon point de vue avec lui. Je me demande combien de films il a vu dans sa vie. En tout cas, je ne suis pas déçu. C'est réellement un passionné. Cela fait plaisir à entendre. Je ne regrette pas d'être rester ici avec lui. Je lui parle de Ismène puisque c'est évident qu'il y a quelque chose entre eux. Je suis content de voir qu'ils soient proches, ces deux-là. Ils sont plutôt bien assortis. Ils forment un jolie couple. Il me dit qu'elle est adorable et que c'est toujours un plaisir de passer du temps avec elle. Je ne peux qu'approuver. J'ajoute : - Elle est la fille plus surprenante que je n'ai jamais rencontrée. On se sent tout de suite à l'aise en sa présence. Elle est énergie, fraîche et constamment en train de sourire. Cela réchauffe le coeur de la voir aussi pleine de vie. Je note un moment de silence de sa part. Il me confie qu'il a peur qu'elle finisse par le trouver ennuyeux et qu'elle lui veuille pour cela. Je prends une petite gorgée de ma bière, puis je fronce les sourcils.  - Je ne pense pas qu'elle serait du genre à faire ça. Ismène pourrait te surprendre. Elle a de la ressource, puis elle est sincère. Ne t'en fais pas trop pour ça. Profite des instants que tu passes avec elle. Ce serait bête de tout gâcher, sous le prétexte que tu vas peut-être la perdre un jour. Ma main revient se poser sur son épaule d'un geste chaleureux pour apporter mon soutien. Il me fait part de ses doutes. J'espère pouvoir l'aider à y voir plus clair. - Franchement, tu es loin d'être quelqu'un d'ennuyeux. Sois moins dur avec toi-même. Je me montre sincère avec lui puisque c'est la vérité. Il ne peut pas être plus ennuyeux que moi. C'est impossible. Il manque de confiance en lui, c'est tout. Je le rassure en disant : - Ne t'inquiète pas. Vous deux, ça va durer. Ne doute surtout pas d'elle. Aie un peu confiance en elle. J'y crois dur comme fer à leur histoire. Je pense sincèrement que leur relation peut fonctionner.

C'était maintenant officiel, Sully était égaré au sein d'une époque qui n'était définitivement pas la sienne. Du moins, c'est ce qu'aurait dit sa mère, si elle l'avait vu s'y prendre aussi maladroitement avec cette maudite télécommande. Car la modernité et lui n'avaient en soit jamais été tellement amis, il fallait bien le dire. Lui, il était beaucoup plus branché brocantes que magasins high-tech, et il ne s'en était d'ailleurs jamais caché. Alors oui, tout ce qui était matériel dernier cri, ça ne lui parlait pas des masses. Il n'y avait qu'à voir le temps qu'il avait mis pour réaliser qu'il tenait simplement cette télécommande à l'envers, ce qui fut alors l'humiliation suprême pour lui, qui avait toujours eu bien conscience que ce genre de trucs n'étaient pas pour lui, mais qui aurait préféré qu'on ne le lui rappeEle pas de cette manière, pas alors qu'il était en compagnie d'Enoch, auprès de qui il n'avait pas nécessairement envie d'être ridicule. Il ne manquerait assurément pas de le prendre pour le plouc du coin qui ne sortait jamais de chez lui le dimanche, hm. Et puis bon, n'oublions pas qu'il était aussi filmé, et qu'il n'était pas impossible qu'un fou rire vienne d'éclater en régie, en fait. Le pire serait bien évidemment que cette séquence trouve un jour sa place dans la rubrique de Sydney, ou dans un bêtiser de Noël, rubrique 'perles des candidats de télé-réalité', mais il osait espérer qu'on se désintéresserait finalement de cette séquence. Toujours est-il qu'Enoch eut la gentillesse de ne pas lui rire au nez et même de l'aider avec sa canette. Il est vrai qu'on n'était pas à l'abri d'une deuxième maladresse. Et puis, alors que le film commença, Enoch lui demanda quel était son personnage préféré au sein du film. C'est assez naturellement qu'il répondit Eliot Ness, car il est vrai qu'il l'avait toujours grandement admiré. Estimant alors qu'il serait intéressant d'obtenir l'avis d'Enoch sur la question, il la lui retourna, et l'écouta avec beaucoup d'attention. Il disait alors avoir d'abord été intéressé par le personnage de Jim Malone, et avoir vu en lui une forme de sagesse. Mais voilà qu'il laissa entendre qu'il s'était aussi mis à apprécier Eliot Ness, et il était intéressant de voir comment ils en arrivaient à être assez d'accord, au final. « Sean Connery et Kevin Costner sont deux acteurs brillants, et parmi les meilleurs de leur génération respective, d'après moi. Ils apportent tout les deux énormément à ce film et je leur trouve infiniment plus de charisme qu'à tous ces acteurs de maintenant, qu'on voit dans trente-six comédies à l'année et qui ne dégagent rien ou pas grand chose. » Il ne fallait pas lui demander de citer des noms, parce qu'il n'avait pas pris la peine d'en retenir. Il savait simplement que beaucoup des acteurs de maintenant n'avaient pas ce que de plus anciens avaient eu, eux. Mais voilà qu'Enoch lui parla d'Ismène, souhaitant savoir si tout allait bien entre eux. En soit, leur relation restait assez imprécise, mais il est vrai qu'il aimait passer du temps avec elle et qu'il l'appréciait de plus en plus. Car oui, Ismène était une jeune femme formidable et manifestement Enoch était d'accord avec lui sur ce point. Il sourit alors au fait qu'il dise la trouver surprenante, car elle l'était bel et bien d'après lui. Par contre, il est vrai qu'il avait peur de la perdre, de lui sembler subitement ennuyeux. C'était une chose qu'on lui avait déjà reproché et qu'il ne voulait pas revivre, c'est vrai. « Au fond, je sais qu'elle est très tolérante et peut être me l'aurait-elle déjà dit si elle me trouvait pénible. Je ne sais pas. Mais j'espère, oui, qu'elle osera me le dire si elle pense que je ne peux pas lui correspondre. Et je n'ai pas envie de gâcher ce qu'il y a entre elle et moi, non, parce que c'est l'une des choses que j'ai de plus chères à présent. » Sa relation avec Ismène était effectivement très chère à son cœur, et il la chérissait grandement. Sentant alors la main de son camarade se déposer sur son épaule, Sully lui adressa un sourire teinté de reconnaissance. Ce type était décidément quelqu'un de bien. « C'est ce que j'essaie de me dire, oui » qu'il souffla ensuite. Oui, il essayait de se dire qu'il n'était pas si ennuyeux que ça, mais on s'était hélas souvent employé à l'en persuader, et ça avait laissé quelques traces, inévitablement. « Je lui fais confiance, vraiment. Je ne sais pas exactement ce qu'on est l'un pour l'autre aujourd'hui, mais je sais que j'ai envie d'être avec elle, et de l'être pour longtemps. » Autant qu'il le pourrait, autant qu'il leur serait capable d'être ensemble. Il fallait encore que certaines choses se précisent entre eux, mais il est clair qu'il était trop attaché à elle pour accepter de la perdre prochainement. Finalement, jetant un coup d’œil au film, qu'il suivait donc partiellement, il se risqua à lui parler à son tour d'une chose qu'il avait pu observer. « C'est très beau ce qu'il semble y avoir entre Avalon et toi » qu'il souffla doucement, espérant ne pas le gêner, se contentant d'être sincère car il est vrai qu'il les trouvait incroyablement touchants, tous les deux. « Il y a beaucoup de respect entre vous et je trouve ça estimable. » Inutile de rappeler que Sully avait certains principes et déplorait le comportement de certains autres hommes, au sein du nid. Il avait vu les images diffusées par Sydney et avait été frappé par la compréhension dont avait fait preuve Enoch à l'égard d'Avalon. Alors oui, définitivement, il en venait à se dire que c'était un type bien.