Aliénor & Danaé
#4

S’il y a bien un endroit que je n’ai pas encore eu l’occasion de visiter, c’est bel et bien la salle de sport. Je n’ai pas trop le droit de pratiquer d’activité physique pour le moment, c’est un petit peu trop tôt, alors je tente de ne pas m’attarder devant pour ne pas avoir la curiosité d’y pénétrer à l’intérieur et d’essayer la totalité des machines. Pourtant aujourd’hui je ne pense qu’à cet endroit. C’est étrange d’avoir envie à ce point d’entrer quelque part. C’est peut-être l’interdiction des médecins qui me donnent envie d’y aller et de me défouler comme jamais. J’ai bien fait un jogging la semaine précédente et j’ai couru comme une dingue lors du dernier prime alors un petit peu de course à pied sur un tapis roulant ne peux pas me tuer. Du moins je l’espère. Je me dépêche d’enfiler un survêtement, d’attacher mes cheveux pour ne pas être gêné, d’attraper une petite bouteille d’eau que j’apporte avec moi et d’aller me faire une petite séance de sport. Ce n’est pas comme si j’ai réellement besoin de me défoncer pour retrouver une silhouette de rêve ou un truc dans le genre, mais faire quelques petits efforts sur les cuisses et le ventre ne peut me faire que du bien, surtout après une grossesse. Je ne sais pas vraiment pas quoi commencer. Il y a tellement de chose que je me sens un petit peu perdu. J’ai bien envie de faire du vélo. Non, du rameur. Oh, encore mieux, du step. Je suis en pleine crise existentielle lorsque la porte s’ouvre et se referme. Je tourne la tête, machinalement, et tombe sur ma nouvelle copine, Aliénor. Un large sourire vient illuminer mon visage. Je ne peux pas rêver meilleure partenaire pour une séance de sport. On va pouvoir discuter tout en éliminant les quelques grammes que nous avons eu l’occasion de prendre en dégustant des cookies l’autre jour. « Avec le corps que t’as, tu dois être une habituée des salles de sport. Tu me conseilles quoi pour raffermir les cuisses ? Le tapis roulant ou bien le vélo ? » que je demande machinalement en désignant les deux appareils respectifs d’un signe de la tête. En fait j’crois bien qu’il me faut un programme bien détaillé et à suivre à la lettre pour que je n’ai pas à hésiter comme je suis en train de le faire là. Après tout je viens pour faire du sport, pas pour me prendre la tête sur quel appareil utiliser. Je fais une petite grimace en observant un sac de frappe. « Ça, c'est pour les brutes. » que je dis comme une gamine en désignant l'objet.

J’ai envie de faire du sport et ça même si ce n’est pas très recommandé pour moi et encore moins pour mon petit cœur. Je veux retrouver mon corps de jeune fille insouciante, celle que j’étais avant de tomber enceinte et de laisser mon côté maternel prendre le dessus. J’ai la chance d’avoir perdu pas mal de mes kilos de grossesse, mais il me reste encore quelques endroits à travailler, à raffermir si je veux être aussi fine et pimpante qu’avant. Je ne sais pas par quoi commencer et j’ai bien envie de me le jouer au plouf plouf, mais Aliénor entre dans la pièce pour mon plus grand bonheur. Je vais pouvoir lui demander conseil parce qu’elle est juste super bien foutu la nana et que c’est ma pote. « Tu as vu tout juste. Déjà, il faudrait définir la zone de tes cuisses que tu souhaiterais travailler plus particulièrement : est-ce que c'est plutôt le devant, l'arrière, ou bien les muscles de l'intérieur ? » Parce qu’on ne travaille pas toute la cuisse quand on décide de se muscler à cet endroit-là ? Sans savoir quoi répondre, je baisse les yeux vers mes cuisses et attrape ce qui semble être un bout de gras. « Je … ne sais pas vraiment. » Je n’y connais rien moi en anatomie sportive. Aliénor semble dans son élèment puisqu’elle continue sur sa lancée : « Le tapis de course peut t'être très utile pour les cuisses, mais honnêtement je ne recommande jamais la course à pied. C'est très mauvais pour les articulations, enfin, tu vois, chaque pas entraîne un choc et courir de temps en temps c'est pas nocif mais régulièrement, ça peut être vraiment mauvais. Le vélo est moins agressif, donc même s'il te fera plus travailler les mollets que les cuisses, j'aurais tendance à te le recommander. Tes genoux te diront merci. » Je fronce les sourcils. Elle vient me faire douter et je ne sais même plus si je peux faire du sport sans danger. « Donc tu me conseille de faire du vélo ? » que je demande en guise de conclusion en désignant du doigt un vélo d’appartement qui traine dans le coin. En voyant un sac de boxe je peux m’empêcher de penser à Celse et à son fameux sport mêlant tout un tas de sport de combat. Je fais partager mon avis à la brunette. « Ben dans ce cas sache que tu as devant toi une des plus grandes brutes du nid d'amour. Y' pas beaucoup de sports que je keaf autant que la boxe. » Oops. J’ai envie d’aller me cacher là. Je deviens toute rouge. « Non, mais … j’dis ça pour … les mecs. En général ils s’amusent à jouer les brutes lorsqu’ils frappent là-dedans. » Je tente de me rattraper comme je le peux, mais j’ai juste envie d’aller me cacher. Du coup je m’en vais grimper sur l’un des vélos et je décide de me taire. J’appuie sur tous les boutons et miracle la machine se met à marcher. Cool. Je commence à pédaler tranquillement. « T'es du genre sportive toi ou pas du tout alors ? » Très bonne question. Je baisse brièvement la tête. « Pas trop, mais … c’est que je ne peux pas faire beaucoup de sport en fait. » Je n’en dis pas plus, mais si elle est curieuse elle risque de me poser des questions alors je prends les devants. « Mais je n’ai pas vraiment envie de parler des raisons qui font que je ne peux pas trop faire d’activité physique. »

J’aime bien le sport, mais malheureusement je n’ai pas trop le droit d’en faire. Les docteurs ne veulent pas que je fatigue mon cœur tout neuf, du coup je n’en fais que très rarement et je suis très vite perdu lorsque je dois choisir entre faire de la course à pied sur un tapis roulant ou bien me prendre pour un coureur cycliste du tour de France assise sur un vélo d’appartement. D’après Aliénor c’est bien mieux le vélo, mais elle parle tellement de trucs que je ne connais pas que je ne suis pas certaine d’avoir eu l’occasion de tout cerner. Je balance une petite phrase toute gentille pour la faire répéter histoire d’être certaine de ce qu’elle vient me conseiller. « Ouais je te conseillerais plutôt le vélo. » Pas de soucis. En plus j’ai comme l’impression que c’est moins fatiguant que la course à pied. J’suis certaine que j’me trompe, mais ça me convient. Je ne vais pas voir passer ma séance de sport comme ça et peut-être même que je vais en faire encore plus longtemps que ce que j’ai prévu à la base. Je prends place sur mon vélo d’appartement, je trifouille tous les boutons et par miracle la machine se met en marche. J’suis fière de moi là. Sourire aux lèvres voilà que je commence à pédaler tranquillement tout en exposant mon avis sur le sac de boxe qui se trouve un petit peu plus loin dans la pièce. Ma camarade ne semble pas du même avis que moi et vient même me confier qu’il lui arrive de frapper dans un sac comme celui qui pendouille dans un coin de la pièce. Je deviens toute rouge et commence à bredouiller quelques mots. Elle étouffe un rire. Oh la vilaine, elle est en train de se moquer de moi. Je fronce les sourcils et lui jette un regard noir. « Ouais, les mecs c'est différent, y'a une question de testostérone qui intervient. Mais tu sais, les arts martiaux, comme la boxe thaï ce sont des sports très nobles. Je te jure que si tu assistais à un seul entraînement tu verrais que ce n'est pas un truc de brutes. » J’suis pas vraiment convaincu par les propos qu’elle est en train de me tenir en fait. Je fais une petite grimace. « Je veux bien te croire lorsque tu dis que les arts martiaux sont des sports nobles, mais c’est tout de même assez violent et ça tu ne peux pas le nier. » que je dis en la pointant d’un doigt presque accusateur. « Y’a des gens qui se blessent avec ce genre de sport. » Avec tous les sports en général, mais je tente de donner un petit peu plus de poids à mes arguments. Sinon Aliénor commence à me demander si je suis sportive ou plutôt flemmarde. Je lui réponds sans rien évoquer d’autre. Je n’ai pas envie de parler de ça maintenant et ici. Du moins pour le moment. « T'inquiète pas, je comprends. On a tous nos sujets qu'on préfère éviter et je respecte ça. Tu préfères qu'on parle de quoi ? » De quoi pouvons-nous parler ? Je fais mine de réfléchir avant de lui poser une question. « Tu ne trouves pas que Eibhlin elle te ressemble un petit peu physiquement ? » Ça c’est de la question. C’est aussi une façon comme une autre de faire la conversation.